L'incinération faisait partie desrites funéraires pratiqués sur le territoire de la Suisse actuelle avant la christianisation. Après celle-ci, l'inhumation s'imposa, selon le modèle de la mise au tombeau de Jésus. L'idée de la crémation ne réapparut en Europe occidentale qu'au XVIIIe s.; elle se répandit au XIXe s., grâce aux techniques industrielles d'incinération. Dans la sphère francophone, le terme de crémation s'imposa après 1823. En allemand, celui deFeuerbestattung fut utilisé presque systématiquement depuis 1874. Les partisans de la crémation firent valoir des considérations hygiéniques, économiques et esthétiques pour contester l'inhumation. La crémation trouva des adversaires dans les milieux ecclésiastiques de toutes les confessions. Ils dénoncèrent les idées souvent antireligieuses des adeptes, parmi lesquels il y avait aussi des francs-maçons. Alors que l'Eglise catholique interdit explicitement l'incinération, parce qu'elle lui semblait incompatible avec sa croyance dans la résurrection, cette pratique fut tolérée par les Eglises protestantes après moult hésitations.
Le Zurichois Johann Jakob Wegmann-Ercolani fut l'un des pionniers de la crémation en Suisse. La première société suisse fut fondée en 1874. Le crématoire qu'elle fit construire sur le site du cimetière de Sihlfeld, à Zurich, entra en fonction en 1889, celui du cimetière de Horburg-Gottesacker, à Bâle en 1898. Beaucoup de crématoires appartenaient à des organisations privées qui se regroupèrent en 1916 en Union suisse de crémation. La proportion de la crémation ne cessa d'augmenter au XXe s. Dans les grandes villes, 50% des corps étaient incinérés vers 1980, 90% à la fin des années 1990. La levée de l'interdiction prononcée par l'Eglise catholique en 1963 a beaucoup contribué à cette augmentation, qui s'explique aussi par l'impossibilité, dans la plupart descimetières, d'inhumer un second corps dans une tombe simple, alors que la mise en terre d'une urne y est autorisée.