Mozart naît le à 8 heures du soir au numéro 9 de laGetreidegasse àSalzbourg[3]. Il est le fils deLéopold Mozart, musicien, compositeur et pédagogue originaire d'Augsbourg, ville libre d'Empire, qui occupe alors la fonction de vice-maître de chapelle à la cour du prince-archevêque de Salzbourg, et d'Anna Maria Pertl, sa femme[4], fille d'un fonctionnaire de la cour de Salzbourg.
Comme Trèves, Cologne ou Mayence, Salzbourg est uneprincipauté ecclésiastique duSaint-Empire, sous l'autorité d'un prince-archevêque, et rattachée auCercle de Bavière. Elle est alors une petite ville (10 000 habitants), sur un des itinéraires joignant l'Empire et l'Italie, et tout entière centrée avec ses familles nobles, ses bourgeois, ses petits fonctionnaires et ses artisans sur la cour du prince-archevêque.
Souabe par son père, salzbourgeois par sa mère et sa naissance, Mozart ne se dira jamais autrichien oubavarois, mais toujours allemand.
Wolfgang est le cadet de sept enfants. Trois enfants sont morts en bas âge, avant la naissance de sa sœur aînéeMaria Anna (surnommée« Nannerl », née en1751), et deux autres sont aussi morts de maladie entre la naissance de Nannerl et la sienne[5].
Wolfgang estbaptisé le lendemain de sa naissance dans une chapelle de lacathédrale Saint-Rupert de Salzbourg. Son acte de baptême porte les prénoms deJoannes Chrysost[omus][n 1] Wolfgangus[n 2] Theophilus.Theophilus, signifiant« aimé de Dieu », a des équivalents, allemand (Gottlieb, prénom que son père lui attribue un mois après sa naissance), italien et latin (Amedeo prénom adopté lors de son voyage en Italie en décembre 1769)[6].
Wolfgang se fera appeler généralement « Wolfgang Amadè Mozart », mais s’amuse tout au long de sa vie à déguiser et à déformerses différents noms en de Mozartini, Gangflow (Wolfgang à l’envers), Trazom, etc.[7]. Mais les signatures de sa correspondance ne comportent jamais le prénom Amadeus, qui ne sera employé qu'après sa mort.
Mozart est un petit garçon émotif et tendre, joignant la plus attentive docilité à une spontanéité primesautière, avide de tout apprendre (lesmathématiques) et racontant deshistoires avec une imagination débordante. Il s'épanouit au sein d'un foyer uni et aimant. Il joue avec sa sœur Nannerl, de peu son aînée et bonne musicienne, et reçoit l'enseignement du remarquable pédagogue qu'est son père.
Dès l'âge de trois ans, il révèle des dons prodigieux pour lamusique : il a l'oreille absolue et certainement unemémoire eidétique[8]. Ses facultés déconcertent son entourage et incitent son père à lui apprendre leclavecin dès sa cinquième année. Le jeune Mozart apprend par la suite leviolon, l'orgue et la composition. Il sait déchiffrer unepartitiona prima vista et jouer en mesure avant même de savoir lire, écrire ou compter. À l'âge de six ans (1762), il compose déjà ses premières œuvres (menuetsKV. 2, 4 et 5, allegro KV. 3 inscrits dans leNannerl Notenbuch, « cahier de musique pour Nannerl »)[9].
Mozart ne reçoit pas d'autre éducation que celle donnée par son père. C'est cependant moins au génie en herbe qu'auvirtuose que sa famille prend garde. Léopold a envie de faire connaître cet élève hors de pair et son maître, le prince-archevêque, autorisera des tournées qui feront honneur à sa cour.
Le jeune musicien émerveille les cours et les souverains, les dilettantes et les curieux. Il est cajolé et récompensé, parfois en espèces, mais plus souvent en bagues ou en montres, difficilement monnayables. On admire la simplicité naturelle dont il fait preuve avec les princes. Pour mieux éprouver sa virtuosité, on lui fait accomplir des prouesses comme jouer sur un clavier recouvert d'un drap. À Londres, le naturalisteDaines Barrington tente de montrer que Wolfgang n'est qu'une sorte desinge savant exhibé par son père devant la noblesse européenne et qu'il s'agit d'une supercherie, mais les épreuves auxquelles il soumet l'enfant révèlent qu'il est bien un prodige[13].
Le jeune Mozart démontre ses qualités exceptionnelles de virtuose, non seulement au clavecin, et plus tard aupianoforte, mais aussi auviolon et à l'orgue.
Jamais un apprentissage aussi riche et divers n'a été offert à un jeune musicien. Il rencontre deux musiciens qui vont le marquer définitivement :Johann Schobert à Paris et à LondresJohann Christian Bach, fils cadet deJean-Sébastien Bach. Ce dernier lui fait découvrir lepianoforte, inventé au début du siècle, et l'opéraitalien ; il lui apprend également à construire unesymphonie. C'est déjà la moisson des premières œuvres : seize sonates pour violon et clavier, onze symphonies et en1767, à l'âge de onze ans, un premierSingspiel sacré,Le Devoir du premier Commandement (K.35), et un premieropéra,Apollo et Hyacinthus (K.38), une comédie latine destinée à être interprétée par les élèves dulycée dépendant de l'université de Salzbourg.
De retour à Salzbourg, Mozart se rend régulièrement àVienne, et, durant l'été1768, compose deux autres opéras :Bastien et Bastienne etLa finta semplice ; il n'a alors que douze ans. L'année suivante, il a 13 ans, le prince-archevêque Schrattenbach le nommeKonzertmeister (l'équivalent de premier violon). Onze ans plus tard, il n'aura toujours pas monté en grade.
Son père obtient un congé sans solde, ce qui lui permet de faire découvrir l'Italie à son fils. De 1770 à 1773, il effectue trois voyages successifs enItalie : Vérone, Florence, Rome, Naples, Lorette, Bologne,Venise et surtoutMilan. Alors qu'il visiteRome, il entend leMiserere deGregorio Allegri le mercredi de la Semaine Sainte, le 11 avril 1770. Après une seule audition, il aurait parfaitement retranscrit l'œuvre, morceau célèbre mais complexe, d'une durée d'un quart d'heure et alors non publié. Une autre version de l'anecdote mentionne une seconde écoute le Vendredi Saint, Mozart regardant cette fois sa transcription et y apportant quelques modifications[14].
À Bologne, lepère Martini, érudit illustre, l'initie au vieux style sévère et le fait recevoir à l'Académie philharmonique qui n'admet en principe que des membres âgés de plus de vingt ans. Mozart a alors quatorze ans et c'est la dernière haute distinction qu'il recevra de sa vie.
En Italie, Mozart étudie l'opéra, genre musical dans lequel il excellera, mais découvre surtout la bouffonnerie et le travestissement desmasques, la concision dense et la netteté du trait, le brio d'une vivacité jamais alourdie. La musique italienne l'instruit moins qu'elle ne le révèle à lui-même en libérant son tempérament des docilités de l'enfance. Il italianise enAmadeo le dernier de ses prénoms, Gottlieb.
Les œuvres de cette période correspondent bien à cette découverte personnelle : symphonies, musiques de chambre, un premieropera seria,Mitridate (1770), une réussite formelle de virtuosité vocale, unoratorio,La Betulia liberata (1771, composé à Salzbourg entre deux voyages), un spectacle de cérémonie,Ascanio in Alba, un autre opera seria plus personnel,Lucio Silla (1772) qui ne reçoit qu'un demi-succès.
Au service du prince-archevêque Colloredo (1773-1777)
Portrait de Wolfgang Amadeus Mozart vers 1770.
Le jeune Mozart qui a parcouru l'Europe n'a plus d'autre horizon que Salzbourg. Cette perspective est rendue d'autant plus étouffante par l'avènement, le, du nouveau prince-archevêqueHieronymus von Colloredo-Mansfeld. Prince éclairé et progressiste par certains côtés, le prince-archevêque Colloredo, à la différence de son prédécesseur Schrattenbach, est entiché de musique italienne et bien décidé à mettre au pas les Mozart père et fils qu'il trouve arrogants et trop souvent absents. Son nouvel employeur lui impose la forme des pièces qu'il doit composer pour les cérémonies religieuses. À dix-sept ans, Mozart a du mal à accepter ces contraintes, et ses relations avec le prince-archevêque vont en se dégradant au cours des trois années qui suivent.
Mozart réagit à cette situation par une surabondance créatrice : son premier vrai concerto pour piano, son premier quintette à cordes, trois symphonies dont la première (K.183) des deux symphonies qu'il écrira ensol mineur, une partition pour le drame deThamos. Cette poussée créatrice marque le début de la première maturité mozartienne. Une accentuation et une mobilité nouvelle dans l'expression des sentiments se fait jour, parfois jusqu'au tragique le plus brutal. Avec un dramatisme aigu et un art personnel pour combiner rythmes et mélodies, l'art du jeune Mozart ne ressemble déjà plus à aucun autre.
C'est à cette époque qu'il fait la connaissance, àVienne, de son illustre aînéJoseph Haydn, avec qui il entretiendra tout au long de sa vie une correspondance et uneamitié teintée d'admiration, réciproque. Mozart lui donnera le surnom affectueux de « papa Haydn », resté aujourd'hui encore vivace. Joseph Haydn à Léopold Mozart qui le rapporte :
« Je vous le dis devant Dieu, en honnête homme, votre fils est le plus grand compositeur que je connaisse, en personne ou de nom, il a du goût, et en outre la plus grande science de la composition. »
Wolfgang Amadeus Mozart à propos de Joseph Haydn :
« Lui seul a le secret de me faire rire et de me toucher au plus profond de mon âme. »
Dès 1776, Mozart souhaite quitter Salzbourg. Après une année de préparatifs, il envoie le sa démission à l'archevêque Colloredo qui, au lieu de l'accepter, le renvoie purement et simplement de son poste de Konzertmeister pour cause d'absences trop fréquentes. Mozart ne semble pas apprécier la gravité de sa situation : partout où il sollicitera un poste, on éconduira ce jeune musicien sans recommandation qui a été mis à la porte par son maître.
En quête d'une situation (1777-1779)
De septembre 1777 à janvier 1779, Mozart visite Munich, Augsbourg, Mannheim et Paris en quête d'une situation. Sa mère accompagne ce jeune homme de vingt-et-un ans qui se rend d'abord àMunich, où il n'obtient pas de poste, puis àAugsbourg et enfin passe six mois à la cour du prince-électeur du Palatinat, àMannheim, où il se lie d'amitié avec de nombreux musiciens au premier rang desquelsChristian Cannabich, dont il dira dans une lettre du 9 juillet 1778 qu'il était le meilleur chef d'orchestre qu'il ait jamais connu[15]. Il fait également la rencontre de l'intellectuel Otto von Gemmingen qu'il retrouvera plus tard dans la franc-maçonnerie viennoise. Toutefois, ses démarches pour obtenir un poste restent là encore infructueuses.
C'est également à Mannheim qu'il tombe éperdument amoureux de la cantatriceAloysia Weber, ce qui suscite la colère de son père, qui lui demande de ne pas oublier sa carrière. Couvert de dettes, Mozart comprend qu'il doit reprendre ses démarches pour trouver un poste et part pourParis au mois de mars1778.
Impatient de voler de ses propres ailes, Mozart marque une grande fierté devant les courtisans de Munich, les bourgeois d'Augsbourg et la haute société parisienne qu'il juge de son juste orgueil de musicien conscient de son génie. Après sa première rencontre avec le fameux orchestre de Mannheim, il écrit :
« Ceux qui ne savaient rien de moi m'ont regardé d'une façon totalement risible. Ils s'imaginent donc, parce je suis petit et jeune, qu'il ne peut rien exister en moi de grand et de mûr ? Eh bien, ils vont s'en rendre compte bientôt ! »
ÀParis, Mozart espère trouver de l'aide auprès deFriedrich Melchior Grimm, qui s'était occupé de sa tournée lorsqu'il avait sept ans, mais sans succès ; l'homme de lettres lui reprochant « un manque de savoir-faire pour se mettre en valeur ». Grimm met fin, déçu, au séjour de son jeune protégé. Mozart ne trouve pas non plus de poste qui lui convienne, et a même du mal à se faire payer ses leçons d'un noble qui le traite avec condescendance ; comportement des nobles en général qui marquera Mozart.
Lors de ce séjour à Paris, sa mèreAnna Maria tombe malade et meurt le, rue du Gros-Chenet (actuellement au 8rue du Sentier, où se trouve une plaque commémorative), emportée par lafièvre typhoïde[16]. Elle est inhumée à Paris après une messe à l'église Saint-Eustache, en présence de son fils qui signe leregistre paroissial de cette église[n 3]. C'est l'époque de lasonate en la mineur,K. 310 / 300d, l'une de ses deux seules sonates pour piano écrites dans une tonalité mineure, avec son thème évoquant une marche funèbre[17] et qui n'est pas sans préfigurer déjà Schubert[18]. Quelque chose s'est passé à Paris et s'il a été un échec professionnel, ce voyage a grandement contribué à la maturation artistique et humaine du jeune Mozart.
De retour au service du prince-archevêque Colloredo (1779-1781)
Après Paris, Mozart rentre à Salzbourg sur les instances très vives de son père. Léopold Mozart a réussi à convaincre le prince-archevêque de le reprendre à son service. Mozart prévient cependant son père de son état d'esprit :
« Je vous jure sur mon honneur que je ne peux souffrir ni Salzbourg ni ses habitants - leur langage, leurs manières de vivre me sont insupportables. »
Sur le trajet de son retour, il passe par Munich, où vit la famille Weber et où il apprend qu'Aloysia aime un autre homme. Après cette suite de déconvenues professionnelles et sentimentales, il arrive la mort dans l'âme à Salzbourg le et doit rentrer dans le rang. Le prince-archevêque Colloredo a daigné le reprendre à son service pour 450 florins par an. À son ancien poste deKonzertmeister, le contrat ajoute la fonction d'organiste à l'église, à la chapelle et à la cour, la formation des enfants de chœur et la composition de toute musique religieuse ou profane demandée par le prince.
Portrait appelé le« Mozart de Bologne », peint en1777 àSalzbourg par un inconnu, pour lepère Martini, qui l'avait commandé pour sa galerie de portraits de compositeurs[n 4]. Léopold Mozart écrira à propos du portrait, dans une lettre adressée au père Martini, datée du :« C'est une œuvre d'art de valeur médiocre, mais je peux vous assurer que du point de vue de la ressemblance, elle est parfaite. »[n 5]
En novembre1780, le prince-archevêque ne peut refuser à son domestique la commande d'un opéra par l'électeur de Bavière pour le prochain carnaval. Mozart se rend àMunich, comme son contrat l'y autorise, pour quatre mois de travail intense. La création, le, deIdomeneo, re di Creta (Idoménée, roi de Crète), unopera seria dans la tradition deGluck, est accueillie très favorablement par le public.
Cependant, Mozart doit rejoindre son employeur à Vienne où le prince-archevêque a été appelé pour faire sa cour au nouvel empereurJoseph II après la mort deMarie-Thérèse. Le 16 mars 1781, Mozart arrive de Munich à Vienne où il est traité plus que jamais en laquais, placé à table entre les valets de chambre et les cuisiniers, alors qu'il vient de connaître le succès à Munich. Fier de son orchestre, Colloredo a formellement interdit à tous ses musiciens de se produire à Vienne pour leur propre compte, et il n’entend utiliser Mozart que pour les réceptions qu’il donne dans la ville impériale. Fin mars, après un premier refus, il autorise cependant Mozart à donner un concert au profit de la Caisse des veuves et orphelins des musiciens viennois, sous la pression duKappelmeister de cette institution et grâce à l’influence de quelques membres de la noblesse locale. Le concert a lieu le 4 avril. Dès le lendemain, Colloredo demande à Mozart de quitter Vienne pour regagner Salzbourg, faute de quoi il ne lui versera plus aucun traitement. Mozart essaie de temporiser, mais le 9 mai éclate une vive altercation qui voit le prince-archevêque traiter publiquement Mozart de débauché, de gueux et de crétin avant de le congédier[20]. Sous le coup de l'émotion, Mozart écrit le jour même à son père : « Je ne veux plus rien savoir de Salzbourg, je hais l'archevêque jusqu'à la frénésie. »
La démission écrite de Mozart ne parviendra jamais à Colloredo, pas plus que celui-ci ne congédiera officiellement Mozart. Ce qui marque la séparation définitive, ce sera le célèbre coup de pied que Mozart recevra, le 2 juin à la maison de l'Ordre teutonique à Vienne, de la part d'un intendant de la cour, le comte d’Arco.
Mozart décide alors de s'installer à Vienne. Il y passera les dix dernières années de sa vie comme compositeur indépendant.
Vienne (1781-1791)
L'indépendance
Désormais débarrassé de l'autorité de son employeur mais aussi de la tutelle de son père, Mozart a gagné sa liberté. Mais il doit se faire connaître à Vienne et gagner sa vie au jour le jour en donnant des concerts, des leçons, en publiant des partitions et en composant.
Le, à l'invitation de l'empereurJoseph II, il participe devant la cour à une joute musicale aupianoforte contreMuzio Clementi, célèbre virtuose du clavier, tout juste arrivé à Vienne. Mozart a la préférence de l'empereur, Clementi celle de lagrande-duchesse Marie-Louise. Les deux pianistes improvisent sur des thèmes imposés, déchiffrent à vue une partition autographe dePaisiello et jouent des morceaux de leur composition. Mozart interprète des variations sur le thème deAh vous dirais-je maman !. L'empereur déclare la joute nulle et remet cinquante ducats à chacun. Le pianisteLudwig Berger se souviendra de Clementi lui disant en 1806 de Mozart : « Jamais jusqu'alors je n'avais entendu quelqu'un jouer avec autant d'esprit et de grâce. J'ai été particulièrement impressionné par un adagio et par plusieurs de ses variationsextempore, dont l'empereur avait choisi le thème, et que nous devions concevoir alternativement. »[21]
En1782,Joseph II commande un opéra à Mozart. Ce seraDie Entführung aus dem Serail (L'Enlèvement au sérail), en langueallemande, qui inciteraGluck, compositeur et directeur des concerts publics à Vienne, à féliciter Mozart et sera l'opéra de Mozart le plus joué àVienne. Joseph II est enchanté, voilà l'opéra allemand dont il rêve.
Mozart a fait la connaissance de la troisième fille de madame Weber,Constance, et décide de l'épouser, sans attendre le consentement écrit de son père qui en sera furieux. Le mariage est célébré à Vienne le à lacathédrale Saint-Étienne.
Peu après, lebaron van Swieten, directeur de la bibliothèque impériale, lui fait découvrir deux compositeurs qui sont alors tombés dans l'oubli :Bach etHaendel. Mozart, homme de théâtre, tout comme Haendel, admire les effets musicaux créés par ce dernier pour accentuer le caractère dramatique de ses œuvres. Il est en outre fasciné par l'art ducontrepoint de Bach, qui influence directement saGrande messe en ut mineur KV. 427, et nombre de ses œuvres par la suite. La même année, il commence une série de six quatuors dédiés à son amiJoseph Haydn, qui se terminera en1785.
Pétri des idées desLumières, Mozart entre le enfranc-maçonnerie dans la logeZur Wohltätigkeit (la Bienfaisance), et accède au grade de maître, le 13 janvier1785[22]. Très épris des idéaux de la maçonnerie qui diffusent cette philosophie des Lumières, il écrit par la suite une douzaine d'œuvres pour ses frères maçons, dontDie Maurerfreude (La Joie des maçons, K. 471) en février1785, laMaurerische Trauermusik (Musique funèbre maçonnique, K. 477) en novembre1785, et surtout, en1791,La Flûte enchantée (dit « opéra maçonnique ») KV. 620, qui serait une transcription de l'initiation à la franc-maçonnerie avec ses épreuves, son maître de cérémonie, la répétition de thèmes avec trois notes et une musique évoquant l'idéal maçonnique.
Portrait de Mozart peint par Barbara Krafft en 1819, soit 28 ans après le décès de Mozart.
En1786, Mozart fait la connaissance du librettisteLorenzo da Ponte, « poète impérial » à Vienne avec un rang directorial comparable à celui de Salieri directeur musical du Théâtre d'opéra impérial et kappelmeister. Da Ponte, alors bien en cour, contrairement à Mozart, convainc l'empereur d'autoriser la création d'un opéra basé surLe Mariage de Figaro, deBeaumarchais, alors qu'il avait fait auparavant interdire la pièce, jugée subversive. Mozart met en musique le livret de Lorenzo da Ponte, et la première deLe nozze di Figaro (Les Noces de Figaro) a lieu le à Vienne. Son succès n'empêche pas son retrait rapide de l'affiche, l’œuvre mécontentant la noblesse viennoise. Mozart part alors àPrague, oùLe nozze connaît un grand succès. En hommage à cette ville, il compose laSymphonieno 38 en ré majeur.
Il reçoit alors du directeur du théâtre dePrague, ville qui lui a fait fête, la commande d'un opéra pour la saison suivante. Mozart fait à nouveau appel à Lorenzo da Ponte librettiste à succès, pour créer le livret deDon Giovanni. Il s'inspire d'unopéra buffa italien de Gazzaniga produit àVenise sur un livret de Bertati quelques mois auparavant[23]. Le, son père, Léopold, meurt. Il avait rompu avec lui. Ce décès bouleverse Mozart, et va influencer la composition de son opéra alors en chantier.Don Giovanni est créé authéâtre des États dePrague le avec un grand succès, mais qui ne se confirmera cependant pas à Vienne. Mozart note Don Giovanni comme unopéra buffa, sans doute en raison du genre d'opéra, dans son catalogue[24], mais cet opéra sera publié et produit comme dramma giocoso, mêlant le comique et le tragique.
Le, Joseph II, satisfait de Mozart, le nomme musicien de la chambre impériale et royale avec un traitement confortable de 800 florins par an. Il le charge de la musique de danse. Mozart tentera en vain d'obtenir le poste de Konzertmeister impérial, la fonction occupée parGluck. À ce traitement, Mozart ajoute ses cours privés donnés à la noblesse ou à la bourgeoisie de Vienne, le fruit des concerts par souscription, qu'il organise et qu'il dirige et des gratifications pour chacun de ses opéras. Des opéras qui ne connaissent pas un grand succès selon Robbins Landon, la Cour et le public préférant l'opéra napolitain de Paisiello etMartin y Soler notamment, bien qu'il s'inspire de ce style dans la trilogie, mais à sa manière. C'est cette manière qui à cette époque ravit les amateurs. MêmeGoethe qui admire Mozart, lui préfèreCimarosa.
Après la mort de son protecteur, l'empereur Joseph II, Léopold II lui succède. Ce dernier ne semble pas apprécier Mozart, qui perd sa situation, puis les faveurs de lanoblesse, sans doute à cause du procès pour dettes intenté par leprince Lichnowsky à l'issue d'un voyage effectué en commun.
Dans les premiers temps de son installation à Vienne, tout semble favorable à Mozart. Il est reçu de façon très bienveillante par un certain nombre de mécènes nobles et par le public bourgeois des amateurs de musique. Dans les palais et les concerts publics qu'il organise à son bénéfice, il joue ses concertos, improvise au clavier et fait entendre ses symphonies. Un seul de ses concerts peut lui rapporter de 500 à 1500 florins. Il donne des leçons de piano et de composition, et reçoit chaque jour trois ou quatre élèves fortunés qui peuvent chacun lui rapporter 400 à 500 florins par an. Il vend à des éditeurs des sonates, de la musique de chambre, des quatuors. Il reçoit des gratifications pour les dédicaces de ses œuvres à des mécènes et la somme forfaitaire de 500 florins pour chaque nouvel opéra dont il peut exploiter le succès en réalisant des arrangements de certains airs pour divers instruments.
Jusqu'en 1785, il bénéficie d'une situation financière assez florissante avec des revenus annuels estimés, selon les années, entre 2000 et 6000 florins. À partir de 1786, il ne parvient pas à maintenir ses succès de pianiste à la mode et la composition d'opéras ne parvient pas à compenser ce manque à gagner. Probablement joueur, isolé en raison de son caractère difficile,« demeuré enfant » selon sa sœur Nannerl, Mozart est lourdement endetté. Le 9 novembre 1791, peu avant sa mort, il est condamné par le tribunal deBasse-Autriche (Landrechte) à rembourser 1435florins avec mise sous séquestre de ses biens, auprince Karl von Lichnowsky qui lui a intenté un procès pour dettes à l'issue d'un voyage effectué en commun à Berlin en 1789. Le tribunal ordonne à la chambre de la cour impériale, employeur de Mozart, de saisir la moitié du traitement annuel de 800 florins qui lui avait été accordé en 1787.
Maladie et fin prématurée
Cénotaphe non officiel de Mozart dans lecimetière St Marx à Vienne : lastèle est unecolonne brisée symbolisant la mort, une statue d'ange éploré s'appuyant à son socle[26]. Ce cénotaphe se trouve dans le cimetière dans lequel Mozart fut inhumé ce 6 décembre 1791 à l'emplacement supposé de la fosse commune.Cénotaphe officiel de Mozart dans lecimetière central de Vienne : une statue en bronze représente la muse de la musique. Cette stèle était à l'origine dans le cimetière St Marx (véritable lieu de sépulture de Mozart), elle fut mise ici dans le carré des musiciens au centre entourée des vraies sépultures des autres génies viennois : Beethoven, Schubert, Brahms, Gluck, Johann Strauss II…
Durant les dernières années de sa vie, Mozart est souvent malade et chroniquement endetté. Il compose beaucoup : sonates, concertos, symphonies, opéras (dontCosì fan tutte, sa dernière collaboration avec Lorenzo da Ponte). L'année1790, qui voit le décès de l'empereur Joseph II (son successeurLéopold II n'est pas favorable aux francs-maçons) et le départ de Joseph Haydn pour Londres, est peu productive[27].
En1791,Emanuel Schikaneder, franc-maçon comme lui, mais d'une autre loge, directeur d'un petit théâtre populaire de la banlieue de Vienne, leFreihaustheater auf der Wieden, sollicite sa participation à un opéra populaire en allemand. Il en écrit le livret, et Mozart écrit la musique de son avant-dernier opéra,Die Zauberflöte (La Flûte enchantée).
Sa création le 30 septembre 1791, dans le théâtre privé de Schikaneder, est un triomphe. Ce dernier a prévu de mettre en scène plusieurs opéras populaires de langue allemande inspirés deLulu, ou La Flûte enchantée et les Garçons judicieux, tirés du recueil de contes intituléDschinnistan, de Wieland et Johann August Liebeskind (1786-1789). Le livret deLa Flûte enchantée (Die Zauberflöte) représente un opéra féérique, mi-chanté, mi-parlé. D'après des recherches récentes[28], les airs de l'opéra émaneraient de compositeurs divers collaborant avec Schikaneder et pas seulement de Mozart, mais toute la musique aurait été attribuée à ce dernier. Il s'agirait donc d'une production collective[29] qui se serait poursuivie dans un autre opéra féériqueDer Stein der Wiese.La Flûte enchantée passe pour avoir créé un« style d'opéra allemand complètement formé fondé sur l'étrange mélange et d'humour vernaculaire qui caractérise le texte »[30].
En juillet, un inconnu lui aurait commandé unRequiem (KV. 626), qui devait rester anonyme. On sait aujourd'hui qu'il était commandité par le comteFranz von Walsegg, et on suppose que celui-ci souhaitait soit faire deviner à ses amis le nom de l'auteur, soit s'en attribuer la paternité. On a retrouvé le contrat entre le comte et Mozart selon leDictionnaire Dermoncourt.
Mozart, affaibli par la maladie et les privations, doit, en outre, faire face à une surcharge de travail, car il a reçu (débutaoût) la commande d'un opéra (La Clemenza di Tito, KV. 621) pour le couronnement du roi deBohêmeLéopold II, qu'il doit composer[24] en trois semaines. L'opéra est mal accueilli, l'impératrice qualifie l’œuvre« porcheria tedesca » ("saleté allemande") et de« musique très mauvaise » ; quant à la cour, elle lui est hostile dès le départ (elle avait« une aversion fortement préconçue pour la composition de Mozart ») et n'aimait que l'opéra italien[31].
Mort
Mozart meurt le, cinq minutes avant une heure du matin[32], à l'âge de35 ans, sans avoir pu achever ce Requiem (qui sera terminé à la demande deConstance par trois de ses élèves,Franz Xavier Süssmayer, Joseph Eybler, Freystadler et probablement l'abbé Stadler d'aprèsRobbins Landon[33]). Les raisons de sa mort restent inconnues. Il était alors fiévreux, le corps gonflé et alité.
La légende, reprise dans le filmAmadeus de Miloš Forman (film inspiré du célèbre ouvrage sur Mozart deHildesheimer) qui veut que Mozart ait composé ceRequiem en prémonition de sa mort prochaine relève plus de l'imagerie romantique que de la réalité.
Obsèques
Mozart reçoit un enterrement de troisième classe, usuel pour la bourgeoisie moyenne à cette époque. Sa femme Constance laisseGottfried van Swieten, ami et mécène du compositeur, organiser les funérailles : le service funèbre se déroule, sans messe ni musique[40], dans lachapelle du Crucifix, une chapelle latérale de lacathédrale Saint-Étienne de Vienne[41]. Le 6 décembre 1791, le corbillard conduit la dépouille à la tombée de la nuit au cimetière Saint Marx, dans la banlieue de Vienne, dans un des seize caveaux d'un« tombeau communautaire simple », conformément aux règles d'inhumation viennoises, dit un seul auteur. Il fut en fait enterré, de l'avis général des ouvrages de référence, dans une fosse commune ordinaire ; une fosse pouvant contenir seize corps avec des couches de terre par rangées de quatre selon leDictionnaire Mozart[40], au tarif le moins cher, 8 florins et 36 kreutzers, comme la majorité des classes moyennes[42]. Être enterré dans une fosse commune anonyme[n 6] n'avait rien d'inhabituel. L'Empereur avait imposé une loi en ce sens, pour éviter que les Viennois ne se rendent aux cimetières pour rendre hommage à leurs morts et ramènent en ville des maladies.
Mozart n'eut pas decroix, ce qui a choqué à l'époque les admirateurs du compositeur. Une légende non fondée veut que Joseph Rothmayer, un des fossoyeurs, note l'emplacement du corps en entourant le linceul d’un fil de fer et, lors du remembrement du cimetière en 1801, récupère le crâne supposé de Mozart pour le confier à un anatomiste viennois, qui en fera don au Mozarteum de Salzbourg et sera l'objet d'études anatomo-pathologiques[43]. Des analyses ADN récentes n'ont pas pu authentifier le crâne comme étant celui de Mozart. Si ni la famille ni les amis — sauf Salieri, Süssmayer, Deiber et van Swieten franc-maçon comme Mozart, cinq personnes en tout — n'accompagnent le cercueil à son inhumation, cela pourrait être en raison d'un décret impérial qui interdisait aux convois funèbres l'accès aux faubourgs en raison d'épidémies, dont lecholéra[44]. Il est établi que devant l'inaction de la veuve de Mozart, plusieurs personnes ont ensuite cherché à retrouver ses restes dans le cimetière, en vain, les fosses communes étant régulièrement remaniées pour accueillir de nouveaux corps.
Un service commémoratif a lieu àPrague le, cette fois devant des milliers de personnes.Emanuel Schikaneder en organise un préalablement le 10 décembre 1791 à Vienne, au cours duquel le début duRequiem (Introït etKyrie) pourrait avoir été chanté, la partie composée par Mozart lui-même[45].
Mozart en1789, portrait deDora Stock (Mozarteum de Salzbourg). Il est l'un des rares portraits ressemblants du compositeur.
De nombreux portraits présumés de Mozart semblent avoir été effectués de seconde main, probablement sans voir le musicien ou bien rétrospectivement, après la mort du compositeur. Ils montrent des physionomies différentes et sont douteux quant à leur ressemblance. Le portrait peint vers 1782 parJoseph Lange, beau-frère de Mozart et peintre amateur, était considéré par sa femme, Constance, comme étant « de loin la meilleure image de lui »[47]. Mais le portrait de qualité le plus ressemblant est unportrait en miniature réalisé parDora Stock le 16 ou le lors d'un séjour de Mozart àDresde. D'une grande finesse, il est dessiné selon la technique de lacarta tinta sur un carton préparé de couleur ivoire. Il montre le compositeur en buste de profil à gauche. Le format ovale réduit (76 × 60 mm) et le portrait de profil sont courants dans les portraits en miniature de la fin duXVIIIe siècle. Ce portrait de 1789 est considéré comme le dernier portrait connu de Mozart réalisé d'après le modèle vivant.
Dans son livreLes Confessions de Constanze Mozart, la romancièreIsabelle Duquesnoy décrit Mozart comme blond (il a cessé de porter des perruques dès son arrivée à Vienne), aux yeux bleus, le regard doux, myope, gaucher et affublé d'unemalformation congénitale à l'oreille. Sa femme sera accusée d'adultère, notamment avec un élève de Mozart (Süssmayer), qui l'accompagne en cure à Baden durant une grossesse difficile ; les rumeurs cesseront lorsque l'enfant (Franz Xaver Wolfgang Mozart) naîtra, porteur de cette même malformation.
Son œuvre
Style
Style galant et style savant
Mozart est, avecHaydn etBeethoven, l’un des principaux représentants du styleclassique« viennois ». Cela ne suffit certes pas à le définir. Dans une époque dominée par lestyle galant, Mozart réalise la synthèse des complexitéscontrapuntiques propres aubaroque tardif et des formes novatrices influencées notamment par les filsBach ou parHaydn. Si Mozart est considéré comme le meilleur représentant du styleclassique, son style va toutefois bien au-delà : il est l’un des plus personnels et des plus immédiatement reconnaissables à l’oreille.
Né dans une famille de musiciens, tôt habitué à voyager et à rencontrer des instrumentistes et compositeurs d’horizons et nationalités différents, Mozart devient dès l’enfance un imitateur de génie et s’approprie tout ce qu’il entend. Il suit cette méthode tout au long de sa vie, notamment quand il s’agit de se familiariser avec lecontrepoint, ce« style savant » (ou« sévère ») si difficile à assimiler à l’époque où on lui oppose lestyle galant dans lequel Mozart baigne depuis l’enfance. Il commence par transcrire plusieursfugues deBach pourtrio à cordes, sur une commande de Van Swieten (KV. 404a), puis se consacre réellement à composer desfugues, non sans difficultés : celle entamée pour le final de laSonate pourviolon KV. 402 reste inachevée ; tandis que celles duPrélude etfugue KV. 394 composé en1782 ou de laSuite dans le style deHaendel KV 399 sont d’une extrême complexité, qui traduit les difficultés rencontrées par Mozart dans l’étude du contrepoint. Pourtant, celui-ci nourrit laMesse en ut mineur KV. 427 entamée à la même époque. Dans les mois suivants, on retrouve des fugues pour vents (Sérénade KV. 388), pour piano (Fugue en do mineur pour 2 pianos KV. 426, par la suite transcrite pour orchestre dans l’Adagio et fugue KV. 546), et plus tard pourorgue (KV. 594 et KV 608). Puis, dans les années suivantes, Mozart abandonne la simple imitation, mais des œuvres bénéficient de ce travail : le final duQuatuor en sol majeur (KV. 387) ou le final de laSymphonie « Jupiter » (KV. 551), deux mouvements où la superposition des lignes atteint une maîtrise inégalée.
Il est impossible de définir Mozart par un genre précis.Opéra,symphonie,concerto,musique de chambre,musique sacrée… Mozart est un touche-à-tout qui s’approprie chaquegenre, chaqueforme, chaqueinstrument pour mieux le réinventer. Si les traits principaux du styleclassique sont bien présents dans ses œuvres (clarté de la structure et de ses articulations, équilibre de laformation,harmonie simple), si son don inné pour lamélodie est une évidence, Mozart en joue pour mieux faire ressortir tel motif, telledissonance, surprendre par des audaces peu prisées de ses contemporains : quelques œuvres, à l’époque confidentielles, en portent la marque (comme laFantaisie en ut mineur KV. 475 ou leQuatuor« Dissonance » KV. 465, dont l’introduction justifie le nom).
Mozart n’était pas pour autant un révolutionnaire. Il est l’auteur d’une abondante production dedivertimenti,menuets et airs très conformes aux conventions de l’époque, sans jamais se laisser enfermer dans un registre. Lorsqu’il compose ses opéras, c’est chaque fois avec une alternance entreopéra buffa (Les Noces de Figaro,Così fan tutte) inspirés de l'opéra napolitain qui connait alors un grand succès etopéra seria (Idomeneo). Et son avant-dernieropéra rompt avec chacun de ces deux styles puisqu’il s’agit d’unsingspiel, une opérette allemande chargée de symbolisme et, à vrai dire, inclassable :la Flûte enchantée qui prend place dans une série d'opéras populaires créés par Schikaneder, directeur de troupe.
Cultivé, curieux, sans cesse à l’écoute des inventions musicales ou artistiques de son époque, Mozart a su jusqu’au bout faire évoluer son style au gré des découvertes. On sent facilement l’influence débutante duSturm und Drang allemand dans les dernières années mozartiennes (et pas seulement dansDon Giovanni ou dans leRequiem inachevé, qui reprend des thèmes du remarquablerequiem de Michael Haydn, son ami). Le propre du génie mozartien est là : avoir su s’inspirer de ses contemporains sans jamais suivre d’autre modèle que le sien propre. La conscience de son génie lui donne une impertinence acérée qui fait partie de sa tournure d'esprit foncièrement anti-conformiste[50].
La force et la grâce, la puissance et l’émotion, le pathétique, l’humour, l’élégance la plus exquise sont réunis dans son œuvre pour faire de Mozart le compositeur le plus accompli de sa génération avec Haydn.
Mozart a eu une grande influence sur l’histoire de la musique, et ce directement auprès de ses contemporains. Il clôt une période plus qu'il en ouvre une autre. Même son aîné,Haydn, ami et admirateur de Mozart, en subit l’influence dans ses dernièressymphonies etmesses, et dans ses deuxoratorios.
Les successeurs de Mozart n’y échappent pas :Beethoven, qui l'a rencontré en 1787, etSchubert, davantage encore, qui grandit à Vienne quelques années après sa mort, à l’époque même où le génie de Mozart est enfin unanimement reconnu. D’autres compositeurs, moins à l’avant-garde du romantisme, restent plus proches de l’esprit mozartien classique, notamment son élèveJohann Nepomuk Hummel ouLouis Spohr. Lesopéras deGioachino Rossini doivent à Mozart en tant qu'auteur d'opérasbuffe d'inspiration napolitaine, et ce n’est pas un hasard si l'italien choisit de mettre en musiqueLe Barbier de Séville deBeaumarchais, premier volet des mésaventures deFigaro ayant déjà fait l'objet d'un opéra de Paisiello (célèbre en son temps) que Mozart a connu à Vienne. Enfin,Mendelssohn,Chopin,Brahms, et mêmeBusoni assument l’héritage de Mozart dans une grande partie de leurs œuvres, souvent à la même hauteur que celui deBach alors peu joué.
Le disque et les œuvres de fiction contribuent à faire de lui le plus populaire des compositeurs classiques.
Quelques décennies après la mort de Mozart, plusieurs tentatives ont été faites afin d’inventorier ses compositions. Toutefois, ce n'est qu'en1862 que le musicologue autrichienLudwig von Köchel achèvera un catalogue chronologique de 626 œuvres, qui fait, aujourd’hui encore, figure de référence. La numérotation est indiquée précédée de l'indication K. ou KV. (Köchelverzeichnis, « Catalogue Köchel » enallemand). Sa sixième édition recense désormais 893 œuvres.
Bien que certaines des premières pièces de Mozart aient été écrites pour clavecin, il s'est également familiarisé dans ses premières années avec des pianos fabriqués par le constructeur de Ratisbonne Franz Jakob Späth[51]. Plus tard, lors d'une visite à Augsbourg, Mozart a été impressionné par les pianos Stein et en a fait part à son père dans une lettre[51]. Le 22 octobre 1777, Mozart a créé son concerto pour trois pianos (K.242) sur des instruments fournis par Stein[52]. L'organiste de la cathédrale d'Augsbourg Demmler jouait la première partie, Mozart la deuxième et Stein la troisième[53]. En 1783, alors qu'il vivait à Vienne, il a acheté un instrument deWalter[54]. Leopold Mozart a confirmé l'attachement que Mozart avait pour son pianoforte Walter :« Il est impossible de décrire l'agitation. Le pianoforte de votre frère a été déplacé au moins douze fois de sa maison au théâtre ou chez quelqu'un d'autre »[55].
Écrits
Mozart ne peut pas être considéré comme écrivain. Toutefois, son abondantecorrespondance, qui a fait l’objet d’éditions partielles puis complètes, n’est pas seulement une source importante pour la compréhension du compositeur et de son époque, mais également une œuvre d’une qualité littéraire certaine bien qu'elle soit avant tout utilitaire et dépourvue de commentaires sur la musique et la vie musicale et culturelle de son temps.
Correspondance de Wolfgang Amadeus Mozart, édition de la Fondation Internationale Mozarteum, réunie et annotée par A. Bauer, O. Deutsch et J. Eibl, trad. par Geneviève Geffray. Flammarion, Paris, 1986-1999, 7 vol.(ISBN978-2-08-067782-2) (édition complète, sous coffret).
Lettres des jours ordinaires (1756-1791), choisies, présentées et annotées par Annie Paradis, traduites par Bernard Lortholary, Fayard, 2005.
Wolfgang AmadeusMozart,Correspondance complète, édition de la Fondation internationale Mozarteum Salzbourg : édition française et traduction de l'allemand par Geneviève Geffray,Flammarion,, 1906 p.(ISBN978-2-081-23647-9) (édition complète en un volume).
Dans sa correspondance, Mozart se dit allemand, dans un sens général et non un sens administratif, l'ensemble politique du Saint-Empire romain germanique ne donnant aucune postérité étatique[56]. Mozart est donc avant tout un Salzbourgeois de langue allemande, et par extension un sujet du Saint-Empire romain germanique, auquel participe également l'Autriche et qu'elle domine en partie (depuis leXIIIe siècle, la couronne impériale se transmettant généralement dans laMaison de Habsbourg (devenueMaison de Habsbourg-Lorraine en 1765).
András Schiff. Wolfgang Amadeus Mozart.Piano works. Pianoforte Walter (Salzburg)
Viviana Sofronitsky. W.A. Mozart :11CD box, the first world complete works for piano and orchestra performed on original instruments. Orchestra : Musicae Antiquae Collegium Varsoviense « Pro Musica Camerata », Poland. Walter (Paul McNulty)
Annexe
Frise chronologique
Notes et références
Notes
↑Jean Chrysostome est le saint fêté le jour de sa naissance le 27 janvier.
↑Wolfgang (littéralement : la « venue du loup » ou la « démarche du loup ») est le nom de son grand-père maternel, connu comme chanteur et chef de chœur.
↑Mozart est nommé Wolfgang Amédée (sic) Mozart dans leregistre paroissial de l'église Saint-Eustache à Paris, l'acte de sépulture indiquant : « En ce jour, Marie-Anne Pertl, âgée de 57 ans, femme de Léopold Mozart, maître de chapelle à Salzbourg, Bavière, qui mourut hier rue du Gros-chenet, a été enterrée dans le cimetière en la présence de Wolfgang Amédée Mozart, son fils, et de François Heine, un ami trompette dans la cavalerie légère de la Garde royale". Cité parAuguste Jal,Dictionnaire critique de biographie et d'histoire, Plon, 1872,p. 893.
↑Actuellement, le portrait se trouve au Civico Museo Bibliografico Musicale de Bologne.
↑« Malerisch hat es wenig wert, aber was die Ähnlichkeit anbetrifft, so versichere ich Ihnen, daß es ihm ganz und gar ähnlich sieht. »
↑Même les tombes individuelles des riches étaient anonymes, leurs noms étant apposés sur le portail du cimetière.
↑La dédicataire serait en fait la pianiste française Louise-Victoire Jenamy (1749-1812) et non un membre de la famille « Jeunehomme » comme on a longtemps pensé :(en) Michael Lorenz,« The continuing Jeunehomme nonsense » [« « L'absurde Jeunehomme continue » »](consulté le).
↑« Mozart, Wolfgang Amadeus » dans Éric Saunier (dir.),Encyclopédie de la franc-maçonnerie, Librairie générale française, La Pochotèque, 2008 (2000), page 590.
Jean Gribenski et Patrick Taïeb (dir.),Mozart et la France : De l’enfant prodige au génie (1764-1830), coll. « Symétrie Recherche », série « Histoire du concert », Symétrie, Lyon, 2014(ISBN978-2-914373-86-9).
Michel Montoyat,Moi, Mozart l'européen, coll. « Fa si la musica », Le Sablier Éditions, 2006, 26p. (OCLC671269875).
Michèle Lhopiteau-Dorfeuille,Wolgang Amadeo Mozart : « rêver avec les sons » (avec 2 CD), coll. « Toutes les clés pour explorer la musique classique », Le Bord de l'eau, 2011(ISBN978-2-35687-104-6).
Isabelle Duquesnoy,Les Confessions de Constanze Mozart (2 vol.), Plon, 2005 ; rééd. coll. « Les grands romans », Points Seuil Poche(ISBN2757826182).
Les cinq concerts organisés par Joseph Legros auConcert Spirituel dans lesquels Mozart est à l’affiche durant son troisième et dernier séjour àParis entre avril et septembre 1778.
Partitions libres
(de + en)Neue Mozart-Ausgabe Online, version électronique de la nouvelle édition intégrale des œuvres de Mozart, mise en ligne par la fondation internationale Mozarteum de Salzbourg.