LeWeald (pron. [wiəld]) est un terme degéographie physique désignant la région sud-est de l’Angleterre encaissée entre lesescarpementscrayeux parallèles desNorth etSouth Downs. Il faut y distinguer deux reliefs, le Haut-Weald (High Weald)gréseux constituant la région centrale ; et leLow Wealdargileux formant la périphérie. Cetoponyme, d’étymologiesaxonne, signifiepays boisé, une qualification toujours appropriée de nos jours : les fermes et les villages parsemant le paysage témoignent, par leur nom, du passé du Weald. D'un point de vue géologique, le Weald est le pendant anglais duBoulonnais français, l'ensemble formant le bassin Weald-Boulonnais.
Weald est un motanglo-saxon, d’une racineIndo-européenne ancienne signifiant « forêt » ou « terre sauvage ». Leswolds, coteaux boisés de l'Angleterre, partagent cette étymologie[1]. Les Saxons donnaient aussi au pays le nom d’Andresleaz, transcription d'un toponyme encore plus ancien :Coit Andred (très étendu), ou en latinSaltus Andred, lagrande forêt[2].Cf. par ailleurs les notes complémentaires[3].
Il y a en anglais un adjectif associé à cette région,Wealden, qui a été repris en français par les géologues (cf. infra).
Le Weald constitue les vestiges d’unanticlinal, à savoir le dôme d'unpli rocheux duCrétacé inférieur, dont l’érosion a mis à nu le substrat, formé de crêtes degrès et de valléesargileuses. Les plus anciennes roches affleurant au centre de l’anticlinal sont rattachées à la couche de Purbeck duJurassique supérieur (étagesPortlandien - aujourd'huiTithonien - etBerriasien). Au-dessus, les roches du Crétacé inférieur montrent des alternances de sables, de grès et d'argiles du facièswealdien (les sables d’Ashdown, l’argile deWadhurst, les sables deTunbridge Wells, dénommés collectivement « lits deHastings ») et l’argile du Weald. CeWealdien est recouvert par la couche dulower greensand de l'étageAptien et la formation de Gault, qui comporte l’argile du Gault et l’Upper Greensand[4].
Les roches de la partie centrale de l’anticlinal comportent des grès durs, qui forment les collines qu'on appelle aujourd’hui le Haut-Weald (High Weald). La zone périphérique est pour l'essentiel constituée de grès plus tendres et d'argiles qui dessinent un paysage au relief moins accidenté, le Bas-Weald (Low Weald). L’anticlinal du Weald ne forme qu'un avec celui de l’Artois enFrance : il se prolonge en effet sur quelque 65 km dans la direction du sud-est et renaît de l'autre côté duPas de Calais pour former les collines duBoulonnais.
On a retrouvé plusieurs fossiles particulièrement intéressants dans les grès et les argiles du Weald, par exemple le spécimenBaryonyx. La fameuse supercherie de l’Homme de Piltdown s'est articulée autour d'un prétendu fossile humanoïde qu'on aurait découvert dans une gravière dePiltdown près deLewes. Le premier spécimen d’iguanodon a été mis au jour en 1819 dans une carrière près deCuckfield par un médecin de Lewes,Gideon Mantell[5].
Une partie des notes du début de ce paragraphe sont traduites du site web :High Weald:Human colonisation.
Les recherches préhistoriques indiquent qu'à la suite des chasseurs-cueilleurs duMésolithique, les habitants dunéolithique se sont mis à l'agriculture, avec pour conséquence des défrichements considérables. Dès l’Âge du fer, le Weald devint une région proto-industrielle, car les grès du wealdien sont riches enminerai de fer, et l'abondance du bois permettant de produire lecharbon de bois utile à la fabrication de fonte, la région resta, de lacolonisation romaine jusqu’à la fermeture du dernier atelier deforge en 1813, un bassin métallurgique de première importance pour l'ouest de l'Europe[6]. L'inventaire de l’Ordnance Survey Map of Roman Britain recense 33 mines de fer : or 67 % d'entre elles se trouvent dans le Weald.
La totalité du Weald était à l'origine couverte par la forêt. Des siècles dedéforestation, correspondant à la demande des chantiers navals, ducharbon de bois pour les forges, lescristalleries et lesbriqueteries n'ont laissé à travers le Weald que des vestiges de cetteforêt primaire.
L'habitat du Weald est très clairsemé, et les premiers villages n'y sont apparus qu'auxXIIIe–XIVe siècle. Auparavant, le Weald était surtout une terre d’élevage extensif et nomade, particulièrement vouée aupacage par les communautés autochtones. Plusieurs lieux-dits du Weald tirent leur nom de cette époque, nom qui rappelle celui des exploitants, auquel on rajoutait le suffixe « -den » – ; ainsi par exemple,Tenterden était exploitée par les habitants deThanet. Dans la plupart du Weald, l’habitat permanent ne s'est développé que bien après le reste des basses terres de Grande-Bretagne, et cela bien qu’auXVIe siècle, on eût pu y dénombrer jusqu’à une centaine dehauts-fourneaux et de forges en activité[6].
Le Weald prend naissance entre l'ouest et le nord-est dePetersfield dans leHampshire ; de là il traverse les comtés deSurrey et duKent au nord, etSussex de l'Ouest etde l'Est au sud. D'une superficie totale de 1 300 km², il s’étend sur 135 km d’est en ouest, et environ 50 km du nord au sud. La pointe orientale du High Weald, qui s'avance dans laManche, comprend dans sa partie centrale les hautes falaises de grès entreHastings etPett Level ; de part et d'autre, lesestrans dePevensey et Romney, qui constituent le littoral actuel, sont dominés par les anciennes falaises maritimes.
On qualifie une bonne partie du Haut-Weald, à savoir sa partie centrale, duHigh WealdArea of Outstanding Natural Beauty. Le paysage est fait decollines arrondies, parsemées d'affleurements de grès et séparées par des ruisseaux aux coteaux ravinés (appelésgills) ; de bocages irréguliers, de taches de bruyères et de nombreuses forêts ; de fermes isolées, de ruelles et chemins boueux[7]. On peut voir dans laforêt d'Ashdown les vestiges d'une ancienneforêt royale (lachasse royale, enanglo-normandchace).
Parmi les agglomérations, les plus importantes sontHorsham,Burgess Hill,East Grinstead,Haywards Heath,Tonbridge,Tunbridge Wells,Crowborough ; ainsi que le littoral, de Hastings etBexhill-on-Sea jusqu'àRye etHythe.
LeLow Weald[8], qui forme la périphérie du Weald, offre un paysage très particulier. Bordure érodée du High Weald, elle présente des affleurements ponctuels de grès au milieu de la couche d'argile. Le paysage qui en résulte est un mélange de larges terrasses argileuses basses, de petits bois (les « shaws ») et de champs. Le pays est largement irrigué, avec partout des mares et des ruisseaux déroulant leurs méandres.
Certaines parties du Weald, comme la grande plaine entourantCrawley, ont été aménagées pour les besoins de l'urbanisation : c'est là que l'on trouve l’aéroport de Londres Gatwick et ses dépendances, et l'échangeur deHorley–Crawley. En dehors de ce secteur, le Low Weald a préservé son habitat traditionnel, avec ses villages et ses bourgs perchés sur les proéminences de grès. Il n'y a guère de grandes villes, bien queAshford etReigate soient à proximité immédiate au nord. Les bourgs sont petits et bâtis en longueur, du fait du paysage boisé primitif et de la nature du sol, une argile compacte[9].
Le Weald est arrosé par plusieurs rivières qui y prennent naissance, et dont la majorité se jette dans les fleuves avoisinants, notamment laMole, laMedway, laStour, laRother, laCuckmere, l’Ouse, l’Adur et l’Arun. Plusieurs de ces cours d'eau entraînaient desmoulins à eau et desmartinettes, et refroidissaient leshaut-fourneau utilisés naguère dans l'industrie textile et métallurgique.
Les autoroutesM25,M26 etM20 empruntent toutes le Val d’Holmesdale pour rejoindre le nord, et touchent par conséquent la limite nord du Weald. La M23 reliantBrighton traverse du nord au sud le flanc ouest du Weald, plus étroit et travaillé par les grandes marées. Les autres routes empruntent à un moment ou un autre ces deux points de passage, mais au prix de nombreux cols et virages : ainsi l’A21 vers Hastings, malgré des rectifications de tracé, est souvent chargée.
Cinq lignes dechemin de fer desservaient naguère le Weald ; leur construction a posé aux ingénieurs de nombreux problèmes liés au relief et la dureté des affleurements gréseux. LaBrighton Main Line emprunta le tracé des anciennes routes, même s'il fallut pour cela percer un long tunnel àBalcombe et édifier leViaduc de l'Ouse Valley. Les affluents de l’Ouse ont été utiles pour acheminer les matériaux lors de la construction des lignesEast Grinstead-Lewes (désormais fermée) etUckfield-Lewes. LaHastings main-line posa des difficultés de tracé particulières lors des premiers travaux, avec des virages serrés et de nombreux tunnels ; on rencontra des problèmes analogues avec la ligne Ashford-Hastings.
Le Weald est réputé auprès desrandonneurs et descyclistes ; il est traversé de nombreuxchemins de grande randonnée.
Ni les sables stériles du High Weald, ni les argiles lourdes du Low Weald ne conviennent à l'agriculture intensive, et lerelief tourmenté s'ajoute à ces difficultés. Seuls certains affleurements isolés de limon vert (greensand) se prêtent au maraîchage intensif, comme dans la vallée de laWestern Rother. Au fil des siècles, la superficie allouée à la culture des céréales a dépendu fortement de lademande, avec deux pics historiques : lesGuerres napoléoniennes et laDeuxième Guerre mondiale. Le Weald possède sa propre espèce bovine, la « race duSussex », même si cette espèce a été élevée en aussi grand nombre dans leKent et certaines parties duSurrey. Obtenue par croisement avec les puissants bœufs qu'on employait encore à retourner la lourde terre du Low Weald même après la motorisation, cette race de vaches rousses fut longuement prisée parArthur Young dans son livre « Agriculture of Sussex » lorsqu’il voyagea dans le Sussex dans les années 1790.William Cobbett observait qu'on en trouvait les meilleurs spécimens dans certaines fermes misérables du High Weald. Autrefois, tous les foyers élevaient descochons qu'on engraissait à l'automne avec lesglands présents en abondance dans les vasteschêneraies du pays.
Malgré l'intense défrichement desXVIIe siècle etXVIIIe siècle, le Weald a préservé son caractère boisé, avec des forêts qui aujourd'hui continuent de couvrir près de 23 % du pays (l'une des plus fortes densités de forêt en Grande-Bretagne) et une densité bien supérieure en certains endroits. Les grès wealdiens, généralement acides, favorisent unbiotope delande boisée dont les principaux vestiges se trouvent dans laForêt d'Ashdown et près deThursley.
Encore vivace enFrance, lesanglier sauvage s'était éteint enGrande-Bretagne et enIrlande auXVIIe siècle, mais des individus d'élevage échappés des enclos de ferme ont récemment été repérés à travers le Weald[10].
Le Weald compose le paysage favori de nombreux auteurs anglais, particulièrement ceux duXIXe siècle et du début duXXe siècle. Les noms les plus célèbres sont ceux deJohn Evelyn (1620-1706), d’Arthur Conan Doyle (1859–1930), deRudyard Kipling (1864-1936) et deVita Sackville-West (1892-1962). Certains endroits mentionnés dans les aventures deWinnie l'ourson, dues à la plume d’A.A. Milne, comme lepont de Poohsticks et laForêt des cent arpents, existent réellement dans la forêt d’Ashdown, qui était voisine de la maison de campagne de Milne àHartfield. Certaines localités, commeGroombridge Place[11] ouReigate[12] forment le décor de nouvelles du cycle desSherlock Holmes de Conan Doyle[13] (lui-même résidait fréquemment à Crowborough).
Le jeu decricket aurait vu le jour dans le Weald auXIIIe siècle. Lestoolball, voisin, est toujours pratiqué dans le pays, surtout par les dames.
D'autres régions du sud de l'Angleterre portent le nom de « Weald », bien qu'elles soient en dehorsdu Weald proprement dit : citonsNorth Weald dans l’Essex, etHarrow Weald au nord-ouest deLondres.
Wold est un terme désignant certains plateaux dénudés duNord de l'Angleterre, comme lesWolds du Yorkshire et lesLincolnshire Wolds, bien qu'au contraire ce soient plutôt des plateaux calcaires.