UnF/A-18 Hornet se déplaçant à une vitesse proche de celle du son lors d'un passage dans une zone de condensation d'air humide.
Lavitesse du son, oucélérité du son, est lavitesse de propagation des vibrations dans tous les milieux gazeux, liquides ou solides. Elle peut être déterminée pour des matériaux autres que l'air, dans lesquels le son ne peut être perçu par l'oreille humaine.
Dans unfluide quelconque, quelles que soient les conditions de pression et température, la vitesse du son dépend de lacompressibilité isentropique et de lamasse volumique du milieu de propagation de l'onde. Dans la plupart des fluides, et notamment dans l'air, elle dépend très peu de lafréquence et de l'amplitude de la vibration.
Depuis l'Antiquité, on conçoit que le son se déplace rapidement, mais pas instantanément. Le phénomène de l'écho a nourri les premiers raisonnements : si la propagation du son était instantanée, on ne pourrait distinguer le son initial du son réfléchi sur une paroi ; et si le retard était dû à la paroi, il ne dépendrait pas, comme on le constate, de la distance. On vérifie aussi que cette vitesse ne dépend pas des qualités du son : fort ou faible, grave ou aigu, le retard est toujours le même. Enfin, le phénomène de l'écho fait également penser à la réflexion de la lumière sur un miroir, ou aux ondes à la surface de l'eau frappée par une pierre[1],[2].
Galilée explique le son par des « plissements » de l'air, qui se communiquent de proche en proche sans déplacement d'ensemble, où ses contemporains ne concevaient que la transmission par une particule matérielle se déplaçant à grande vitesse sur toute la trajectoire du son[7].Newton précise cette notion ; il applique au son, considéré comme mouvement d'une perturbation consistant en une succession de compressions et de détentes de l'air, les principes ducalcul infinitésimal pour déterminer, le premier, la vitesse du son à partir des caractéristiques de l'air[8].
À la fin duXVIIe siècle, l'Acoustique deSauveur explique la vibration de l'air dans les tuyaux desinstruments de musique à vent. Comme cette vibration dépend de la vitesse de propagation du son, elle constitue un autre moyen de l'établir. L'accord des tuyaux est bien connu des facteurs d'instruments, les lois de la vibration des cordes et des diapasons, qui peut s'observer à des cadences bien inférieures, fournissent des bases de comparaison, et la méthode desbattements un moyen de mesure précis, et le calcul donne les mêmes résultats[9].
On procède à plusieurs expériences au cours du siècle suivant, en tirant des coups de canon la nuit et en mesurant à distance la durée entre la perception de la lumière émise par la flamme à la bouche du canon et la perception du son. Le prestige de Newton est considérable, et l'on ne dispose alors d'aucune autre théorie que la sienne ; néanmoins, les vitesses déduites de ces expériences, qu'on refait à plusieurs reprises, sont toujours supérieures de 16 % environ à celle que l'on obtient avec sa formule[10],[11],[8].
S'il fait un vent dont la direction est perpendiculaire à celle du son, celui-ci a la même vitesse qu'il aurait par temps calme ;
Mais si le vent souffle dans la même ligne que parcourt le son, il le retarde ou l'accélère selon sa propre vitesse ;
La vitesse du son est uniforme, c'est-à-dire que dans des temps égaux et pris de suite, il parcourt des espaces semblables ;
L'intensité ou la force du son ne changent rien à sa vitesse.
Cette expérience est rapportée par l'abbé Nollet[13] qui, dans le même ouvrage, démontre que « le son décroît comme le carré de la distance qui augmente »[14].
« La vitesse du son est égale au produit de la vitesse que donne la formule newtonienne, par la racine carrée du rapport de la chaleur spécifique de l'air sous une pression constante, à sa chaleur spécifique sous un volume constant. »
Au tournant duXIXe siècle,Young,Laplace etPoisson relient la vitesse du son à l'élasticité du milieu. Pour vérifier ces calculs théoriques,Biot mesure en1808 la vitesse du son dans les solides ; en1826,Colladon confirme la valeur prévue pour l'eau à 0,5 % près par des expériences dans le lacLéman[17],[18].
La vitesse duson peut se définir rigoureusement de deux manières[19] :
Vitesse de groupe
Lavitesse de groupe du son est le quotient de la distance que parcourt un ébranlement sonore par le temps nécessaire à son arrivée. Les premières évaluations de la vitesse du son dans l'atmosphère et dans l'eau ont été réalisées à partir du calcultopographique des distances et duchronométrage du délai entre la transmission de la lumière, supposée instantanée, et celle du son.
Vitesse de phase
Lavitesse de phase est le quotient de lalongueur d'onde par lapériode de la vibration. Cette définition implique que le son ne comporte qu'une seule fréquence. Ce quotient équivaut au produit de la longueur d'onde par la fréquence, qui est l'inverse de la période, ou encore au quotient de la pulsation (en radians par seconde) par lanorme duvecteur d'onde (en radians par mètre), dont l'usage est plus commode dans certains calculs de laphysique. Elle se mesure en déterminant lafréquence d'uneonde stationnaire dans un tuyau. Dans cet espace, dont lalongueur domine les autres dimensions, la vitesse de phase et la longueur déterminent l'onde stationnaire qui constitue larésonance. Cette méthode de mesure, implicite dans le calcul d'untuyau d'orgue, est la seule praticable quand le milieu ne se trouve pas en grande quantité dans la nature.
Ces deux vitesses ne diffèrent que dans un milieudispersif, c'est-à-dire dans lequel la vitesse de propagation dépend de lafréquence. Dans l'air, comme dans tout fluide homogène, elles sont pratiquement égales, quels que soient les caractères du son, qu'il soit puissant ou faible, grave ou aigu.
En envoyant depuis un émetteur des impulsions sonores et en les détectant à une certaine distance, on peut mesurer le temps que met l'impulsion à parcourir la distance séparant les deux équipements. Cela revient à mesurer la vitesse de transmission de l'énergie sonore, c'est-à-dire lavitesse de groupe.
Ce procédé simple montre ses limites dès qu'on désire effectuer une mesure précise. L'incertitude de mesure sur chacun des deux termes du quotient se répercute sur le résultat.
Les expériences historiques ont été effectuées en milieu naturel. Dans l'atmosphère, les différences de température et de vitesse du vent entre les couches de l'atmosphère provoquent uneréfraction de l'onde sonore[20]. Le son parcourt donc une distance légèrement supérieure à celle entre le point de départ et le point de mesure. Si cette distance est faible, le milieu est à peu près homogène et la déviation est négligeable ; mais il faut savoir mesurer avec précision de courtes durées.
Si on effectue la mesure au moyen d'unguide d'ondes[21], il faut être sûr que la paroi dutuyau acoustique ne participe pas à la propagation, soit en conduisant la vibration plus vite que l'air, soit en réagissant avec lui pour la ralentir.
La mesure dans un milieu solide, sous pression ou à haute température est difficile avec ce procédé.
En mesurant lalongueur d'onde du son et en la multipliant par sa fréquence on obtient sa vitesse. Cela correspond à lavitesse de phase. Plusieurs méthodes le permettent.
Vitesse de phase et tuyau d'orgue :
Dans uninstrument à vent comme unsifflet, la note produite dépend de la longueur du tuyau. La note exprime lahauteur de lafréquence fondamentale du son. Cettefréquence est celle d'uneonde stationnaire dans un tuyau, elle dépend du temps que la perturbation prend pour aller jusqu'à l'extrémité du tuyau et revenir à la source. Elle dépend donc de la vitesse de propagation dans le fluide qui remplit le conduit. La vitesse esthomogène au rapport entre une longueur et un temps. Elle s'obtient ici par la multiplication de la longueur du tuyau par la fréquence fondamentale.
Dans un dispositif similaire à untube de Kundt, un conduit est bouché à l'une de ses extrémités et couplé à unhaut-parleur à l'autre. Lapression acoustique issue de ce haut-parleur estréfléchie par le côté bouché du tube. Uneonde stationnaire s'installe dans le tube si cette réflexion arrive au haut-parleur enphase avec la vibration du haut parleur. On en déduit que l'onde sonore a parcouru un aller-retour en une durée correspondant à un multiple de la période de la vibration. La longueur du tube est donc un multiple de la demi longueur d'onde. On peut s'assurer du nombre de longueurs d'onde dans le tube en déplaçant un microphone dans sa longueur pour détecter les ventres correspondant au maximum d'amplitude et les nœuds correspondant au minimum. En multipliant la longueur d'onde par la fréquence, on obtient la vitesse.
Si le tube est ouvert à l'autre extrémité, la pression acoustique issue du haut-parleur, ne trouvant plus de résistance, se transforme en vitesse acoustique sur l'ouverture. Une onde réfléchie repart en direction de la source. La résonance se produit si la longueur du tube est un multiple du quart de la longueur d'onde.
Cette mesure implique qu'on sache mesurer la fréquence, et que la paroi du tube n'interagisse pas notablement avec l'air.
On peut aussi réaliser des ondes stationnaires dans les liquides. Les ondes agissent sur la lumière de la même façon qu'unréseau optique. Il est donc possible, grâce à un montage optique, d'y mesurer la vitesse du son.
Dans les solides, il est impossible d'utiliser un microphone ; mais des capteurs en surface permettent la détection, et lorsque l'onde revient en phase sur le dispositif excitateur, elle change l'impédance mécanique à l'excitation, ce qui permet d'établir la fréquence de résonance pour un dispositif de la longueur considérée.
La différence principale entre ces deux méthodes est le résultat obtenu : d'une part la vitesse de phase et d'autre part la vitesse de groupe. La différence entre ces deux grandeurs n'est cependant visible que lorsque ladispersion du milieu est importante, ce qui est rarement le cas.
Calcul de la vitesse du son dans différents milieux
Une onde sonore est uneonde mécanique se propageant dans un milieu matériel qui se comprime et se relâche. En l'absence de tout milieu matériel, il n'y a donc pas de son dans levide. Lors de la propagation d'un son dans un milieu, lesparticules de ce milieu ne se déplacent généralement pas à la vitesse de propagation de l'onde mais vibrent autour d'un point de repos. Dans les solides, les ondes transverses étant possibles, il peut même n'y avoir aucun déplacement des particules dans la direction de propagation de l'onde. Il ne faut pas confondre la vitesse du son avec lavitesse acoustique, qui est celle desparticules matérielles constituant le milieu de propagation, dans leur très petit déplacement alternatif.
La propagation du son est d'autant plus rapide que la masse volumique du milieu et sa compressibilité sont petites.
D'un milieu à l'autre, les deux paramètres changent. Dans l'hélium, dont la compressibilité est à peu près égale à celle de l'air, mais dont la masse volumique est, dans les mêmes conditions de température et de pression, bien plus faible, la vitesse du son est presque trois fois plus grande que dans l'air. Dans ungaz àpression atmosphérique, la vitesse du son est bien plus faible que dans unliquide : bien que la masse volumique du gaz soit bien plus faible, celui-ci est presque infiniment plus compressible que le liquide (qui est souvent considéré incompressible). Par exemple, le son se propageexactement à1 482,343m/s (5 336,435km/h) dans l'eau pure à20 °C[23], approximativement à340m/s (1 224km/h) dans l'air à15 °C et à environ1 500m/s (5 400km/h) dans l'eau de mer.
Cette propriété est notamment utilisée pour déterminer la qualité d'unbéton, car une propagation plus rapide signifie que le béton contient peu de bulles d'air (la vitesse du son dans le béton est beaucoup plus élevée que dans l'air). La célérité dans l'eau de mer intervient notamment dans les systèmes de repérage desbancs de poissons et dessous-marins[23].
L'hygrométrie influe peu sur la vitesse du son dans l'air.
Sans onde decisaillement, la vitesse du son se propage seulement par compression. Si le son n'est pas trop fort (), la compression et la détente du fluide peuvent être considérées comme étantisentropiques et la vitesse du son est :
Soit un fluide nonvisqueux, initialement au repos. Les propriétés du milieu en un point situé à une distance de la source de perturbation peuvent s'écrire comme la somme d'une valeur moyenne temporelle (uniforme) et d'une composante instationnaire (de faible amplitude). Ainsi :
masse volumique : ;
pression : ;
vitesse : composante radiale uniquement, de moyenne temporelle nulle, notée.
Projetée sur l'axe radial, cette équation s'écrit :
En négligeant le terme puisque et en assimilant à sa moyenne temporelle, il vient :
(E2)
Équation d'état
La masse volumique est reliée à la pression par l'équation d'état du fluide, dont la dérivée au premier ordre est exprimée par le coefficient de compressibilité isentropique. On peut donc écrire :
(E3)
Expression du champ de pression
En éliminant de l'équation (E1) grâce à l'équation (E3), on obtient :
La dérivation de la première équation par rapport au temps et de la seconde par rapport à donne :
La solution générale du champ de pression est de la forme :
Champ de pression :
Formule de Newton
Dans sonTraité de mécanique céleste, Laplace rappelle sa formule publiée en 1816 dans lesAnnales de Physique et de Chimie[15] :
« La vitesse du son est égale au produit de la vitesse que donne la formule newtonienne, par la racine carrée du rapport de la chaleur spécifique de l'air sous une pression constante, à sa chaleur spécifique sous un volume constant. »
La vitesse du son fait intervenir la masse volumique et la compressibilité isentropique du milieu selon l'hypothèseisentropique de Laplace :
Newton avait basé son modèle sur une hypothèseisotherme du son, ce qui le conduisit à une formule équivalente à :
La vitesse du son dans ungaz parfait est fonction du coefficient de Laplace (gamma), de lamasse volumique ainsi que de la pression du gaz et se calcule théoriquement ainsi :
La célérité du son dans un gaz parfait vaut donc :
moles de gaz parfait demasse molaire ont une masse et occupent un volume sous la pression et à la température. La masse volumique vaut alors. Avec, laconstante universelle des gaz parfaits, on définit la constante spécifique du gaz parfait étudié :. On réécrit en conséquence :
La formule (I) montre que la célérité du son dans un gaz parfait est inversement proportionnelle à la racine carrée de la masse volumique ; la formule (II) montre également qu'elle est indépendante de la pression du gaz et de la fréquence, mais qu'elle est proportionnelle à la racine carrée de la température[23]. L'indépendance de la vitesse du son par rapport à la pression du gaz n'est toutefois vérifiée que pour des pressions voisines de la pression atmosphérique normale (condition d'application de laloi des gaz parfaits).
La constante est une grandeur indépendante de la température. Le coefficient adiabatique dépend peu de la température. Les valeurs du ratio sont approximativement égales à :
Avec l'équation (II), on obtient la vitesse théorique du son dans l'air sec assimilé à un gaz parfait en m/s en fonction de la température en kelvins :
Les différences entre auteurs proviennent principalement de la prise en compte de constituants mineurs de l'air, principalement l'argon et legaz carbonique, et des incertitudes qui affectent les calculs des constantes. L'air n'étant pas un gaz parfait, ces formules ne donnent qu'un résultat approximatif. Des calculs plus raffinés tiennent compte des interactions entre molécules (viriel) et apportent des correctifs. De ce fait, la pression et la fréquence affectent les dernières décimales[32].
Au voisinage de la température ambiante, la célérité du son dans l'air peut être approchée par la linéarisation suivante[33] :
La vitesse du son dans l'air augmente faiblement avec l'humidité, la différence pouvant atteindre un peu plus d'un mètre par seconde[35]. L'air est un milieu faiblementdispersif, surtout s'il est humide. La vitesse augmente peu avec lafréquence, l'écart ne dépassant guère0,1m/s dans le spectre audible[36], mais peut être sensible pour les ultrasons àhaute fréquence.
Relation entre vitesse du son et vitesse des molécules de gaz
Dans le cas d'un gaz parfait diatomique comme l'air, on a par conséquent :
Cette relation montre que dans l'air la vitesse du son est inférieure à la vitesse quadratique moyenne des molécules du gaz au repos. En application, à20°C, avec = 28,965 g mol−1, on obtient :
La vitesse du son dans ungaz de van der Waals est fonction de deux variables thermodynamiques indépendantes, classiquement la température et levolume molaire :
moles de gaz demasse molaire ont unemasse et occupent un volume sous la pression et à la température. Lamasse volumique vaut alors et levolume molaire. Le coefficient de compressibilité isotherme vaut alors, pour un gaz de van der Waals :
Dans le cas d'un fluide diphasique (bulles d'air dans l'eau liquide par exemple), la vitesse du son se trouve fortement modifiée. Le calcul de la vitesse du son est alors assez complexe et dépend notamment des relations qui unissent les deux fluides (par exemple, dans le cas d'un liquide avec des bulles de vapeur, il faudra prendre en compte les changements de phase).
Lors d'un orage, la distance de celui-ci à un observateur peut être estimée de deux façons. Au préalable, l'observateur doit mesurer le temps séparant la vision des éclairs de la perception du tonnerre. Il peut ensuite[41] :
multiplier ce temps par 300 pour obtenir une distance en mètres (par exemple pour un temps de 6 s, la distance est de 1 800 m) ;
diviser ce temps par 3 pour obtenir une distance en kilomètres (par exemple pour un temps de 6 s, la distance est de 2 km).
↑a etbFrançoisBaskevitch, « L’air et le son dans l’Encyclopédie, un curieux silence »,Recherches sur Diderot et sur l'Encyclopédie,no 44,(lire en ligne).
↑Dictionnaire technologique ou nouveau dictionnaire universel des arts et métiers et de l'économie industrielle et commerciale,vol. 19, Thomine et Fortic,(lire en ligne).