L'étymologie du mot « violon » a fait l'objet de diverses hypothèses : on l'a rapportée aux mots latinsvitula (génisse),Vitula (nom de la déesse de la Victoire) ouvitulari (être transporté de joie), mais il s'agit de suppositions peu fondées[3]. En tout état de cause, le mot français « violon » est formé de la même manière que l'italienviolino : il se compose d'une racine,viol-, à laquelle est ajouté unsuffixe à valeur diminutive (-on en français[4], -ino en italien[5]).
Lalira da braccio, un ancêtre du violon.Anges musiciens,Gaudenzio Ferrari, détail de laMadonna degli aranci, 1529/30, Vercelli, Chiesa di San Cristoforo.
La première mention du violon dont on ait trace est une note de, dans un registre de la Trésorerie générale deSavoie (la langue y est alors le français), pour le paiement des prestations des « trompettes et vyollons de Verceil »[9]. La première apparition du violon dans l'art est due àGaudenzio Ferrari (circa 1480 - 1546), auteur de laMadonna degli aranci (La Madone à l'oranger)[10], datant de 1529-30, dans l'église Saint-Christophe deVerceil[11]. Enfin, une des premières descriptions explicites de l'instrument et de son accord en quintes figure dans l'Epitomé musical des tons, sons et accordz, es voix humaines, fleustes d'Alleman, fleustes à neuf trous, violes et violons[12]. dePhilibert Jambe de fer, publié àLyon en1556. Philibert Jambe de fer écrit :« Le violon est fort contraire à la viole… Nous appelons viole c'elles desquelles les gentils hommes, marchantz et autres gents de vertuz passent leur temps… L'autre s'appelle violon et c'est celuy duquel ont use en danceries[13]. »
Le violon se répand rapidement à travers l'Europe, à la fois comme instrument de rue, populaire, et comme instrument apprécié de la noblesse : ainsi, le roi de FranceCharlesIX aurait commandé à Amati24 violons en 1560[14]. Le plus ancien violon qui nous soit parvenu serait un de ceux-là et porte le nom de leur commanditaire.
Sous l'influence de premiers virtuoses tels queBalthazar de Beaujoyeulx, à la tête du groupe de violons italiens emmenés du Piémont en 1555 parCharlesIer de Cossé, la famille des violons connaît un succès croissant qui va l'amener à supplanter progressivement laviole de gambe. DansCircé ou le ballet comique de la reine (à l'origine,balet comique de la Royne), dont la production globale avait été confiée à Beaujoyeux, se trouvent deux séries de danses instrumentales qui sont spécifiquement destinées à être jouées par desviolons. Le texte et la musique en sont publiés en 1582, formant ainsi la première partition jamais imprimée pour le violon[18]. L'établissement du violon enFrance se poursuit avec la création en 1626 desVingt-quatre Violons du Roi, et surtout grâce à l'influence du compositeur et violoniste italienJean-Baptiste Lully (1632 - 1687), qui, prenant la tête deLa Petite Bande en 1653, la fait progresser jusqu'à la mettre en concurrence avec les Vingt-quatre Violons[19].
C'est néanmoins en Italie que le violon connaît son essor le plus rapide et le plus spectaculaire. La virtuosité des violonistes italiens est exploitée en la deuxième partie duXVIe siècle àBrescia avec les virtuosos Giovan Battista Giacomelli et Giovan Battista Fontana et dès le début de la période baroque parClaudio Monteverdi, qui use detrémolos et depizzicatos dans ses opéras, dont l'un des plus connus pour son usage du violon estL'Orfeo (1607). Il faut attendre plusieurs décennies avant que des virtuoses tels que Heinrich von Biber (1644 - 1704) atteignent hors d'Italie un degré de maîtrise virtuose tel que celui développé par les maîtresitaliens.
La période classique voit l'émergence d'une école de violon germanique influencée par les Italiens qui ont désormais acquis une notoriété suffisante pour faire des tournées dans toute l'Europe.Johann Georg Pisendel (1687 -1755) voyage entre la cour deDresde et ses maîtres italiensGiuseppe Torelli et Vivaldi. Ce sont les œuvres pour violon solo de Pisendel qui auraient influencéBach pour écrire sesSonates et partitas pour violon seul[20] (BWV 1001 à 1006), qui exaltent les capacités polyphoniques du violon : chaque sonate comprend une fugue à quatre voix pour violon seul, et laPartita pour violon seul n° 2 inclut la célèbreChaconne. Les compositeurs virtuoses de l'école de Mannheim,Johann Stamitz (1717 -1757),Carl Stamitz (1745 -1801) etChristian Cannabich (1731 -1798) ainsi que leur contemporainLeopold Mozart (1719 -1787), sont tous des violonistes de renom, exerçant bien au-delà des frontières germaniques.
Dans les dernières décennies du siècle, Paris est devenu un centre cosmopolite pour les violonistes, accueillant non seulement Mozart mais aussi plusieurs virtuoses renommés, notammentJoseph Bologne de Saint-George ouGiovanni Battista Viotti, qui se produit avec leConcert Spirituel dès1782. Au travers de ses 32 concertos pour violon et grâce à sa maîtrise technique, notamment de l'archet, Viotti influence durablement l'art du violon pour les décennies à venir.
Alors que l'école française de violon devait conquérir une place de plus en plus prééminente durant l'ensemble duXIXe siècle, grâce notamment à la fondation duConservatoire de Paris, en1795, c'est encore l'école italienne qui fournit au monde du violon d'alors, en la personne du virtuoseNiccolò Paganini (1782-1840), l'un de ses plus remarquables talents. La publication de ses24 Caprices pour violon solo, opus 1, et de ses concertos pour violon, marque une avancée décisive dans les possibilités virtuoses de l'instrument, préparant celui-ci au répertoire flamboyant duXIXe siècle, en introduisant notamment despizzicati de la main gauche, des coups d'archets en ricochets, des doubles cordes harmoniques… C'est pourquoi Paganini représente dans l'imaginaire romantique la « virtuosité transcendante quasi diabolique »[24]. Ses seuls élèves connus,Camillo Sivori (1815-1894) etAntonio Bazzini (1818-1897) devaient poursuivre l'œuvre du maître, mais l'on peut affirmer que la carrière brillante de Paganini marque la fin de la grande école de violon italienne[25].
« LaWallonie en tant que partie de l'État belge, a été le plus grand berceau des violonistes : l'accumulation des talents sur le plus petit espace constitue un des phénomènes les plus remarquables de la géographie musicale de l'Europe ». Tels sont les mots du musicologue allemand H.-J. Moser, au congrès de la Société internationale de Musicologie d'Utrecht en 1952[28]. Parmi les élèves de Bériot,Henri Vieuxtemps (1820 -1881) écrit une abondante littérature violonistique (ses concertos et pièces de virtuosité sont encore largement présentes au répertoire aujourd'hui). Vieuxtemps a lui-même pour élèveEugène Ysaÿe (1858 -1931), compositeur de six sonates pour violon, opus 27. Tous ces violonistes font significativement évoluer la technique du violon et l'interprétation du répertoire. Parallèlement, à partCamille Saint-Saëns etÉdouard Lalo, les compositeurs romantiques français n'apportent que peu de grandes œuvres de bravoure au violon, laissant aux compositeurs germaniques le soin d'écrire les grands concertos du répertoire.
Nombreux sont les compositeurs qui s'essayent, avec plus ou moins de bonheur à l'écriture d'un concerto. La production russe est sans doute une des plus importantes : les concertos de Prokofiev sont suivis par celui d'Aram Khatchaturian (1940) ;Chostakovitch en écrit unpremier en 1947 et unsecond vingt ans plus tard.Igor Stravinsky a tenté de renouveler le genre et achevé sonconcerto, à Nice, en 1931.
L'influence du bois utilisé a été étudiée. Étant un composant de l'instrument largement majoritaire face au vernis, son rôle semblait devoir être également prépondérant. De nombreuses hypothèses ont été échafaudées, certains allant jusqu'à supposer que le bois des violons provenait de la charpente de cathédrales ou de châteaux, ce qui lui aurait donné un âge exceptionnel. Lloyd Burckle et Henri Grissino-Mayer ont quant à eux fait l'hypothèse que le bois utilisé par les grands maîtres italiens provenait des vingt années précédant leminimum de Maunder additionnés au minimum lui-même. Ce minimum de Maunder est une période de froid intense qui a eu lieu en Europe ; avec les vingt années précédentes, cela correspond à la période1625-1715. Selon les deux auteurs, ce froid aurait provoqué une pousse ralentie des arbres, leur conférant une densité de cernes de croissance par unité de longueur élevée. Mais cette hypothèse a été également rejetée à cause des temps de séchage probablement adoptés par les luthiers italiens, et les auteurs reconnaissent eux-mêmes qu'aucun traitement particulier (séchage, stockage ou vernis) n'a jamais été identifié comme cause certaine de supériorité[32],[33].
Joseph Nagyvary et son équipe ont analysé le bois de cinq instruments (dont un Stradivarius et un Guarnerius) datant d'entre 1717 et 1840. « Dans deux des instruments censés être des merveilles d'acoustique, le bois a été traité par des produits chimiques », d'après Nagyvary : des molécules d'hémicellulose ont été brisées à la suite de l'oxydation causée par un pesticide[34]. Selon le chercheur, le bois aurait été bouilli dans de l'eau chimiquement traitée, dans le but de protéger l'instrument contre les vers et les moisissures. Modifiant la structure du bois, cette opération aurait donc eu des répercussions inattendues. Mais l'agent oxydant employé reste inconnu[35].
l'épicéa commun, duTyrol ou deSuisse, à fibres rectilignes espacées d'un millimètre, pour la table, la barre, l'âme, les contre-éclisses, les tasseaux et les coins ;
L'érable a été choisi parce qu'il n'est pas trop lourd, et il est dur et élastique en même temps. Certains auteurs de lutherie classique prétendent que lepeuplier ou lefrêne, utilisés par les anciens luthiers italiens, ont été écartés car trop mous et donnant des sons creux et en dedans[37], de même Tolbecque critique lui aussi les vieux fonds en peuplier[38].Or on sait que ces considérations sont très subjectives et sujettes à interprétation personnelle, le son n'étant pas uniquement le résultat d'une ou deux données mécaniques du bois, d'autant plus que certaines informations étaient erronées autrefois : le frêne européen par exemple,fraxinus excelsior[39], n'est pas un bois mou, il est plus dur que l'érable sycomore[40],[41]. Le bois du peuplier lui, est bien mou, mais est utilisé dans d'autres domaines de la lutherie classique.
Les bois doivent être vieillis avant d'être utilisés, dans un endroit plutôt froid et à l'abri de l'humidité, du vent, de la poussière et des insectesxylophages.
(noter les diverses pièces de bois et leur nombre entre parenthèses).coupe de la caisse. Noter les pieds du chevalet situés à la verticale de la barre et de l'âme.
Pour pouvoir reproduire un modèle de violon, leluthier fabrique des gabarits et un moule : pour le contour de la table, pour lesouïes, pour l'épaisseur de la voûte, pour la tête.
La table et le fond sont formés ; le plus souvent la table est constituée de deux pièces afin d'assurer une symétrie des largeurs des fibres de part et d'autre de l'axe central pour des raisons de sonorité, tandis que le fond peut être d'une ou de deux pièces selon le choix arbitraire du luthier[42]. Les tables et fonds en deux parties sont obtenus à partir d'un morceau fendu en deux. Le luthier trace une ébauche de la forme de la voûte et détermine les contours exacts de la table et du fond.
Bille initiale.
Bille coupée « sur sens » (ou « sur maille »). Les quartiers sont divisés verticalement.
Les deux parts symétriques sont collées pour former fond ou table.
Une fois les contours de la table et du fond découpés (à la scie à chantourner par exemple) puis affinés (canif, lime), le luthier procède à l'élaboration des voutes. À l'aide de larges gouges d'abord, puis de rabots « noisettes » ensuite, les voutes sont ébauchées. On procède aux finitions en utilisant des racloirs de diverses formes, jusqu'à l'obtention des voutes désirées dont le galbe revêt beaucoup d'importance dans la production de la sonorité.
La même étape de creusage a lieu sur la table et les ouïes sont percées. La barre d'harmonie est alors placée ; il s'agit d'une longue pièce de bois, placée sous la table au niveau du pied gauche du chevalet. Elle sert à aider le violon à vibrer, et à résister à l'importante pression exercée par les cordes.
En vue de l'assemblage du fond et de la table, pour former unecaisse de résonance, on en construit les bords verticaux que sont les éclisses. Contrairement à la table, l'orientation des fibres du bois n'a ici qu'un rôle décoratif[45]. Les éclisses sont cintrées au fer chaud. Puis on les assemble sur une forme au moyen de petites pièces de soutien qui contribueront à la rigidité de la caisse de résonance : tasseaux, coins, contre-éclisses.
Le manche et la touche sont les dernières grandes pièces à réaliser. L'étape délicate de la conception du manche est la taille de la volute, car le modèle utilisé est difficile à appliquer à la pièce à cause du relief (la volute « monte » en même temps qu'elle « tourne »). On creuse le chevillier, partie où passent les cordes, entre le sillet et les chevilles ; dans certains cas, il a même été creusé entièrement, sans que cela ait d'autre incidence qu'esthétique[46]. On taille la touche, large de 25 mm au niveau du sillet, de 49 côté chevalet, et arrondie comme le chevalet.
Puis vient l'assemblage global : on colle le fond sur les éclisses puis, après avoir retiré la forme, on fixe la table et enfin on enclave le manche dans le corps du violon en forçant un peu et on le colle. On fixe alors la touche au manche avec quelques gouttes de colle, afin qu'elle tienne le temps de concevoir le sillet (que l'on ne fixe lui aussi que très légèrement) et de tailler proprement le manche. Puis on fait sauter touche et sillet : l'instrument est terminéen blanc. On procède à l'encollage, c'est-à-dire que l'on enduit le violon d'une sous-couche empêchant le vernis de pénétrer dans les pores du bois. Cette sous-couche peut être à base degélatine, deblanc d'œuf, d'huile… Le violon peut à présent être verni.
Vue en coupe de la caisse de résonance d'un violon non verni.
1.Fond. 2.Table. 3.Tasseau avant. 4.Trou du bouton.
5.Âme. 6.Ouïe. 7.Éclisse. 8.Coin.
9.Tasseau arrière. 10.Barre d'harmonie.
Le vernis a un rôle esthétique et un rôle de protection contre l'humidité due à la sueur du violoniste et à l'air ambiant, dont l'hygrométrie est variable. Plusieurs recettes de vernis existent : à l'alcool, à l'huile de lin, à l'essence grasse (procédé Mailand),propolis… La technique consiste en un mélange variable de solvant et delaques,essence de térébenthine,résines, gommes et colorants, que l'on applique en couches successives sur le violon, et que l'on polit (d'où l'intérêt d'ôter la touche, afin de pouvoir polir le vernis situé sous son emplacement)[47].
Le vernis peut avoir différentes teintes, extrêmement variables d'un cas à l'autre suivant les colorants utilisés, l'usure et la patine. Ainsi, il peut aller du jaune doré pour les Amati au rouge brun desBergonzi en passant par l'orange foncé pour les Stradivarius ou le brun terne des instruments bas de gamme de l'école allemande duXIXe siècle[48]. L'influence du vernis sur la sonorité a été âprement discutée. La recette utilisée par l'école de Crémone ayant été perdue, et les luthiers cherchant la ou les causes de la qualité des violons issus de celle-ci, on a supposé que le vernis jouait un rôle essentiel dans la sonorité du violon. Le temps nécessaire à la fabrication d'un violon est délicat à estimer, car il dépend de l'expérience de l'artisan. On considère qu'un artisan confirmé fabrique un violon en 30 à 45 jours, le bois étant déjà sec. L'étape la plus longue à réaliser est le vernissage, car chacune des nombreuses couches n'est appliquée qu'après le séchage de la précédente, or il peut y avoir jusqu'à trente applications successives[49].
Un violon à l'état brut, sans vernis, se nommeraviolon sylvicole ou tout simplement unviolon en blanc.
La volute peut avoir une forme originale sur certains violons.
La fonction de lacaisse de résonance est d'amplifier le son provoqué par la vibration des cordes. La face supérieure d'un violon est appeléetable d'harmonie. Faite (le plus souvent) de deux morceaux d'épicéa collés dans le sens de la longueur, elle est bombée et percée de deux orifices en formes deƒ, lesouïes, qui ont pour vocation de libérer les vibrations provenant de la caisse de résonance. La face inférieure, communément appelée le « dos » ou le « fond », est formée d'une pièce en érable, ou de deux pièces collées ensemble dans le sens de la longueur. Elle est également bombée mais souvent dans une moindre mesure. Sur les bords des deux faces, on distingue une double ligne noire enserrant une ligne de même couleur que la table (blanche avant le vernissage) : les filets.
Les flancs en érable, appeléeséclisses, réunissent la table d'harmonie et le fond afin de former une boîte qui forme lacaisse de résonance. Au niveau duchevalet, les côtés du violon sont en forme deC (en creux vers l'intérieur) : ce sont les échancrures, dont le but est de permettre le passage de l'archet. Les petites pointes à leurs extrémités se nomment les onglets. À l'intérieur du violon, on trouve l'âme et labarre d'harmonie, qui jouent un rôle essentiel dans la transmission des vibrations des cordes et dans la résistance face à la pression qu'exercent les cordes.
C'est dans la caisse de résonance que l'on trouve l'étiquette mentionnant le nom duluthier fabricant et l'année de fabrication.
Il permet d'obtenir la bonne longueur de cordes, d'ajuster la tension de celles-ci et autorise le jeu du violoniste. Il s'agit d'une pièce d'érable terminée par la tête, décorée d'un ornement en forme de spirale, lavolute. Dans la construction baroque et classique, jusque vers 1800, le manche du violon était ajusté contre le tasseau et cloué à lui. Maintenant il est enclavé et collé dans le tasseau supérieur. Sur la tête, deschevilles sont fixées latéralement afin de contrôler la tension des cordes. Facilement reconnaissable par sa couleur noire, une longue plaque d'ébène, latouche, nonfrettée, est collée sur le manche. La touche est terminée au niveau de la tête du violon par lesillet, petite pièce en ébène qui fait office de guide pour les cordes.
La volute peut également servir à poser un violon sur un support de partitions.
Les quatrecordes sont la partie du violon qui, mise en vibration par l'archet ou parles doigts, produit le son. Les cordes, de la plus grave à la plus aiguë, sontaccordées à laquinte de la manière suivante :sol, ré, la etmi. On accorde le violon soit avec les chevilles, qui sont situées sur la volute (tête du violon), ou avec les vis (les tendeurs), qui elles, sont situées sur le cordier. Il faut savoir que l'accordage par les tendeurs est plus subtil, et plus facile pour les débutants. On peut cependant accorder le violon autrement pour obtenir un effet, lascordatura.
Pendant une très longue période, les cordes étaient en boyaux et seule la corde desol était entourée d'un fil d'argent ou decuivre (elle était dite « filée »)[50]. Le boyau employé n'était pas dechat comme le veut une idée très populaire. Cette erreur est par exemple reprise dans la définition humoristique du violon[51] donnée parAmbrose Bierce dans sonDictionnaire du diable de 1911 : « Violon : instrument destiné à chatouiller les oreilles de l'homme par le frottement de la queue d'un cheval sur les boyaux d'un chat ».
L'erreur pourrait provenir d'une compréhension trop littérale decatgut[52], corde de boyau utilisée en chirurgie. En réalité, on emploie pour fabriquer les cordes en boyau la tunique médiane de l'intestin grêle dumouton, dont les fibres sont résistantes. Plusieurs fils obtenus par découpage dans le sens de la longueur sont tordus ensemble, et la tunique médiane est si fine que les intestins grêles de quatre à cinq moutons sont nécessaires pour faire environ vingt-cinq cordes dela[53].
Une corde de boyau doit être dans toute sa longueur cylindrique, de même diamètre, élastique, d'une souplesse régulière et de couleur transparente. Un épaississement ou une densité irrégulière de la structure du matériau empêchent un accord tout à fait juste. La justesse d'une corde ne s'évalue sur la régularité du diamètre que si elle est de densité régulière, cette dernière condition n'étant remplie que pour les cordes de bonne qualité[54].
Au début duXXe siècle, la corde demi fut remplacée par un fil d'acier, car elle se brisait trop souvent[55]. Plus tard, on a également muni d'un enroulement d'aluminium les cordes dela et deré, dont le noyau est en boyau ou en matière synthétique, tel que l'hydronalium(en) (alliage d'aluminium et demagnésium résistant à la corrosion due à la sueur)[56]. Cette dernière solution est maintenant privilégiée (sauf pour lamusique ancienne) : elle est moins sensible au désaccord ; elle n'est pas aussi exigeante lors de la fabrication, et peut donc être réalisée de manière industrielle. On utilise également beaucoup des cordes basses filées à noyau d'acier, qui produisent une sonorité claire mais sèche. Pour accorder plus facilement les cordes d'acier, beaucoup plus sensibles à la tension, ont été mis au point des mécanismes à vis spéciaux, fixés au cordier, lestendeurs, petites molettes fines.
Si toutes les cordes avaient le même diamètre, la tension devrait diminuer pour les cordes basses. La répartition de la pression sur la table serait alors irrégulière et la sonorité des cordes basses insatisfaisante à cause de la faiblesse de résonance. C'est pourquoi les cordes ont des diamètres différents, mais une tension presque égale. On tend plus fortement la corde de mi, qui repose sur le pied droit du chevalet afin de lui conférer un volume sonore et un éclat accrus. Un violon de typeStradivarius pèse entre 355 et 365 g tout compris ; la table, 55 g, et le fond, 90 g, doivent résister, par l'intermédiaire des éclisses, à la tension des cordes égale à 27 kilogrammes[57]. Comme dans le cas du violon la pression transmise à la table vaut 0,140 kg par kg de tension[58], on trouve une pression exercée sur la table valant 3,78 kg.
Yehudi Menuhin dit des cordes[59] : « La corde desol, la plus grave, suscite une sonorité riche, profonde, et inspire un sentiment de noblesse. La corde deré se distingue par son caractère plus passionné, plus vif. La corde dela s'ouvre et s'épanouit dans l'espace. La plus brillante et la plus extravertie des quatre est la corde demi. »
Lechevalet est une planchette sculptée enérable sycomore placée perpendiculairement à la table d'harmonie entre les ouïes et qui assure deux fonctions. Il maintient les cordes dans une configuration arquée (les cordes ne sont pas dans un même plan), permettant que chacune puisse être frottée séparément. Il a également une influence sur la sonorité du violon, car il communique les vibrations des cordes à latable d'harmonie. Tout comme l'âme, cette pièce n'est pas collée à l'instrument, mais maintenue en place par la seule pression des cordes.
Les quatrecordes peuvent être accordées au niveau de la tête grâce auxchevilles ; à la base du violon, lestendeurs permettent un accord plus fin. Ces tendeurs sont attachés aucordier, pièce noire enébène fixée à la caisse par un bouton.
De très nombreuses techniques existent sur le violon pour obtenir une large palette sonore et tirer toutes les possibilités de l'instrument. Le plus souvent, on joue du violon en posant lebas de l'instrument (le côté chevalet - cordier, et non le côté manche - volute) sur la clavicule gauche, tandis que les doigts de la main gauche (excepté le pouce) appuient sur les cordes au niveau de la touche et que la main droite tient l'archet et frotte avec celui-ci les cordes. Cette façon de jouer est indépendante de la latéralisation (droitier ou gaucher)[réf. nécessaire]. Quelques violonistes jouent en posant l'instrument sur leur clavicule droite, et donc en inversant tous les gestes, mais la première manière est très largement majoritaire. Les explications qui suivent considèrent donc le cas le plus courant.
Jeu habituel :legato (lié). Le violoniste frotte les cordes avec l'archet et ne différencie pas chaque note ; le jeu est très fluide. Idéalement on ne distingue pas à l'oreille de différence entrepoussé ettiré. Ces deux mots viennent nommer les deux phases d'un aller-retour de l'archet :tiré quand on va du talon vers la pointe, etpoussé l'inverse.
Staccato : c'est une succession de martelés (frappés à coups répétés). On peut faire dustaccato dans un même coup d'archet, ou en alternanttiré etpoussé à chaque note.
Martelé : blocage de l'archet après un laps de temps plus ou moins long qui permet de couper le son et donc de détacher chaque note. À l'attaque, l’archet est collé à la corde, puis on allège brutalement la pression, libérant l'archet, et on joue avec la vitesse de l'archet ; à la pointe (ou à tout autre endroit où l'on a décidé de stopper la note), l'archet se repose sur la corde avec uniquement une pression de l'index.
Sauts. La forme de la baguette de l'archet, légèrement courbe, donne au jeu la possibilité de nombreux sauts :
Ricochet : lorsque l'archet rebondit sur la corde plusieurs fois en un coup d'archet, c'est un ricochet. La vitesse d'un ricochet est variable, selon le point de lancement (vers la pointe, on obtient un ricochet rapide) et selon la hauteur du rebond ;
Saltato, soitsautillé. L'archet, placé au milieu, se met naturellement à sautiller (à perdre brièvement le contact avec la corde) dès que l'on alternetiré etpoussé assez vite, et avec une pression plutôt faible de l'index ;
Spiccato : dans le premier tiers ou le deuxième quart de l'archet, il s'agit de faire sauter l'archet par un mouvement d'aller-retour du poignet (et non du bras entier), qui doit rester très souple.
Doubles cordes,accords. L'archet peut être placé sur deux cordes voisines, et l'on peut jouer simultanément deux parties différentes. Le violoniste peut aussi, en appuyant un peu plus sur l'archet, mettre trois cordes quasiment dans un même plan et jouer un accord de 3 notes presque en un même moment. Pour les accords de quatre cordes onarpège l'accord, c'est-à-dire que l'on joue deux doubles cordes à la suite (sol-ré en même temps, suivies dela-mi en même temps). Des variantes pour s'accommoder au style de la pièce ont parfois lieu, particulièrement pour les accords dans les morceaux baroques.
Pincement. Avec lepizzicato (oupizz), le violoniste pince les cordes avec la main droite. Cette technique est généralement utilisée pour les accompagnements ou les pièces dejazz.
Placement. On peut placer l'archet à différents endroits, notamment :
à mi-chemin entre lechevalet et la touche (habituel) ;
près du chevalet, pour gagner en puissance et en corps ;
quasiment sur le chevalet (sul ponticello), pour un son très sifflant, fébrile, très aigu, parfois faible ;
sur la touche (sul tasto), pour un son lointain et distant, parfois qualifié deblanc.
Col legno : ce ne sont plus les crins qui sont en contact avec la corde, mais le bois de l'archet. L'effet obtenu en frottant alors la corde n'ayant que peu d'intérêt (le son est quasiment imperceptible), il s'agit plus souvent de frapper la corde, pour obtenir un remarquable aspect percussif. Cette technique est notamment restée célèbre grâce à la pièceMars, issue desPlanètes, deHolst.
Bariolages. Il s'agit de passer rapidement d'une corde à sa voisine. On peut alors jouer des notes à un rythme très élevé ; le bariolage sur les cordessol - ré - la - mi / mi - la - ré - sol est très usuel.
Tremolo. Redoublement très rapide (sans rythme mesuré) d'une note. Son exécution a généralement lieu, pour des questions de facilité, vers la pointe et uniquement avec le poignet (et non tout le bras).
Dans les années 1970-75, Jo Venuti a été vu et entendu jouer sur les quatre cordes de son violon simultanément. Il détachait la mèche du côté de la hausse, réalisant ainsi une sorte de fouet. Il passait ensuite ce « fouet » sous le violon. La mèche revenait alors au-dessus des cordes. Il tenait alors la virole avec la baguette et tendait plus ou moins la mèche.
Jeu habituel : les doigts de la main gauche viennent appuyer la corde sur la touche de manière à raccourcir la longueur de celle-ci. La longueur, avec la tension, détermine la hauteur de la note.
La même note jouée sur deux cordes différentes, sonne avec une couleur différente, plus ou moins « chaude ». Ces différences sont exploitées par le violoniste en fonction de l'effet recherché. Lepouce servant à tenir le manche, les doigts sont désignés du premier au quatrième, l'index étant lepremier doigt, alors que lesvioloncellistes, au contraire, utilisent le pouce pour jouer une note se situant au-dessus de lacaisse de résonance.
Démanché. Technique essentielle, elle consiste à déplacer la main gauche le long du manche, ce qui permet de jouer des notes plus aigües sur une même corde. C'est ce système qui permet au violon d'ajouter deuxoctaves à son étendue déjà établie de deux octaves et deux tons. Les distances à parcourir par la main gauche sont codifiées par un système de positions.
Vibrato. Le vibrato est réalisé par le mouvement du poignet, de l'avant bras et celui du bout du doigt, d'avant en arrière, sur la corde. La hauteur de la note est ainsi modifiée, descendant en deçà de la valeur normale de la note puis remontant. La vitesse et l'amplitude du vibrato sont choisies afin que le caractère du morceau soit le mieux reflété ; ces deux éléments sont indépendants et on peut ainsi créer plusieurs variantes avec de différentes combinaisons de vitesse et amplitude. L'amplitude maximale usuelle en musique classique est très inférieure au demi-ton.
Trilles etbatteries : ces techniques consistent en l'alternance très rapide de deux notes séparées d'intervalles allant de la seconde mineure (demi-ton) jusqu'à la quarte augmentée (six demi-tons). Elles se pratiquent en laissant le doigt de la note de base appuyé sur le manche, pendant que l'autre doigt appuie et se redresse, de manière cyclique, plus ou moins vite, sur la note haute. La distinction entre trille et batterie se fait selon l'intervalle (inférieur ou supérieur au ton).
Harmoniques. Parfois, on pose légèrement un doigt en un endroit précis de la corde, sans appuyer, de manière à bloquer certains modes de vibration : par exemple, en mettant le doigt au milieu de la corde, on ôte la note fondamental, et on entend alors surtout la première harmonique, uneoctave plus haut que la note obtenue sur cette corde à vide. En plaçant le doigt au tiers de la corde, on obtient la deuxième harmonique, une octave et unequinte plus haut. Ces notes sont appelées des harmoniques et ont des sonorités assez flûtées. La sonorité « flûtée » permet d'étendre la couleur et l'étendue des instruments à corde (exemples : dans le dernier mouvement du concerto de Sibelius, les concertos dePaganini) et cette sonorité est la raison pour laquelle dans certaines langues ces sons sont appelés « flageolet » (flageolet tone en anglais,Flageoletton en allemand, ou simplementflažolet en tchèque).
Doubles cordes. Le violoniste apprend progressivement à commander chaque doigt séparément et avec précision, jusqu'à enchaîner des notes différentes sur deux cordes, ou à placer ses quatre doigts en même temps chacun sur une corde et à en changer les positions plusieurs fois à la suite. C'est un exercice particulièrement exigeant dejustesse.
Glissando : le doigt glisse le long de la corde tout en exerçant une pression dessus. L'effet en est très caractéristique, et peut se faire sur une étendue d'environ deux octaves, du grave à l'aigu, ou inversement. On en trouve de brillants exemples chezRavel, pour des effets figuratifs (vent, cris d'oiseaux).
Glissando harmonique : comme son nom l'indique, mélange de deux techniques, qui consiste à faire glisser le doigt sur la corde sans exercer de pression. Le doigt effleure tour à tour les harmoniques naturelles de la corde et desfausses harmoniques, sifflantes, indistinctes et ténues. Ravel l'emploie aussi pour imiter des oiseaux, mais l'exemple le plus saisissant de ce mode de jeu est l'introduction du balletL'Oiseau de feu deStravinsky, celui-ci l'écrivant pour toutes les cordes.
La mentonnière et le coussin sont deux pièces pouvant s'ajouter ou s'enlever librement du violon, et dont la fonction est de faciliter l'adaptation du corps à la forme des éclisses. Le coussin se place sous le violon, et évite ainsi à laclavicule de subir trop durement le contact des bords du violon.
La mentonnière se place sur le violon, à gauche du cordier, ou l'enjambant, et comme son nom l'indique, on y place le menton. Elle permet d'éviter de mettre massivement la sueur du violoniste en contact avec la table, abîmant alors le vernis.Louis Spohr semble avoir été un des premiers à l'utiliser, en1819. L'accessoire était à ses débuts assez grossier, s'implantant dans le tasseau avec une vis à bois. Il fut largement critiqué, comme étant « un champignon qui aurait poussé sur le bord du violon », ou étant jugé gênant, ridicule, augmentant sans raison la hauteur des éclisses, empêchant de faire corps avec l'instrument, modifiant le son du violon… Tolbecque considérait dans les années 1900 qu'il avait fallu 70 ans pour que l'usage se répande, et qu'il était à présent tout à fait adopté[66]. C'est cependant inexact, les instrumentistes de musique traditionnelle (par exemple enmusique cadienne) jouent souvent le violon posé contre le haut de la poitrine, et donc n'ont pas besoin de mentonnière. Quant aux Tsiganes, ils jouent souvent les contre-temps le violon en l'air, la table basculant de l'horizontale à la verticale (l'axe du violon conserve son orientation habituelle)[67].
La sourdine se place sur lechevalet. Son action consiste à ajouter de la masse au chevalet ce qui restreint la transmission des vibrations des cordes au chevalet et donc à la caisse de résonance via l'âme. Le but premier de la sourdine est de réduire l'intensité sonore du violon, mais ce n'est pas son seul effet. La sourdine permet aussi de modifier letimbre de l'instrument. Il existe deux catégories de sourdines : les sourdines d'orchestre et les sourdines d'appartement. Les sourdines d'orchestre (petites sourdines en caoutchouc ou en ébène) utilisées à l'orchestre donnent untimbre plus doux et feutré. Les sourdines d'appartement (sourdines peigne en caoutchouc ou en plomb qui sont beaucoup plus lourdes) ont pour but de réduire l'intensité sonore au maximum pour ne pas déranger les voisins.
Par exemple : une simplepince à linge ; un petit morceau decaoutchouc posé sur le chevalet entre les cordes deré et dela ; une plus large bande (à quatre branches), recouvrant entièrement le dessus du chevalet, dusol aumi ; un modèle métallique (le plus puissant : en plomb).
Deux types de sourdine : une simple pince à linge ; une sourdine en caoutchouc.
Sourdine en plomb à quatre branches posée sur le chevalet.
Le violon a rencontré un grand succès partout dans le monde[68] étant donné sa versatilité, sa petite taille et son poids minime. Il a non seulement réussi à intégrer des musiques savantes, mais il a aussi réussi à supplanter desvièles traditionnelles. Il a également suscité une nouvelle attitude des musiciens folkloriques face à la musique écrite[69]. Il a été un trait d'union entre les diverses classes sociales en Europe notamment, où lesTziganes par exemple faisaient le lien entre bourgeoisie et paysannerie. Il a été modifié, adapté, transformé, tant dans sa structure que dans son jeu ou sa tenue, mais il est resté identique et authentique à lui-même finalement.
Dans beaucoup de pays européens, le violon est entré par la petite porte dans la vie musicale, accompagnant la musique à danser populaire[70], laissant la musique savante à laviole. Grâce à sa large diffusion, il a permis aussi la mise en valeur du patrimoine traditionnel qui accéda à des scènes jusque-là réservées à la musique savante.
EnIrlande, l'instrument se nommefiddle et est joué par un fiddler ; là aussi c'est dans la musique à danser qu'il trouve son accomplissement.Kevin Burke est un musicien irlandais de renom ayant participé notamment au groupeThe Bothy Band.
Violoneux chanteur des rues deParis (gravure de1845[72]).
Les Tziganes et les musiciens Juifs (jouant la musiqueklezmer) ont su eux développer un style de jeu sophistiqué ; musiciens itinérants, la portabilité de l'instrument fut très vite appréciée. Les danses et les cérémonies de mariages étant très en vogue dans ces pays, le violon s'y est développé dans les campagnes.
Moldavie : on y trouve un violon à sept cordes sympathiques, sans doute influencé par lagadulka, unevièle bulgare.
Pologne : l'instrument a rencontré un accueil très favorable dans ce pays où les danses étaient plébiscitées. Le violon a subi des modifications pour ressembler auxvièles existantes avant son arrivée :mazanki (à une frette),gesliki etsuka. Leskrzypce est taillé dans un bloc de bois monoxyle et a de trois à quatre cordes ; une allumette placée sous les cordes au niveau de la touche fait office de capodastre.
Roumanie : lavioarâ est très prisée dans ce pays où les musiciens usent à volonté descordatura. Il existe des variations locales : lecontra n'a que trois cordes ; lavioarâ cu goarnâ est un « Stroh violon » ou « violon à pavillon » appelé aussilauta (ou hidede) cu tolcer.
Serbie : leviolina se joue en trio dans le folklore.
Slovaquie : L'oktavka (« violon octave ») et leshlopcoky (« violon boîte ») sont des variantes rustiques côtoyant la version originale.
Ukraine : leskripka a la particularité d'être joué essentiellement sur la deuxième ou la troisième corde.
Grèce : les Tziganes se sont ici aussi emparés duvioli avec un accordalla turca (Sol - Ré - La - Ré), joué sur la poitrine, oualla franca (sol - ré - la - mi), joué sous le menton. On trouve en Crète des instruments à cordes sympathiques.
Italie : Parallèlement à la musique classique, le violon devait y connaître un destin folklorique, étant joué dans bien des régions pour accompagner la danse. AuXIXe siècle, il subit la concurrence de l'organetto, un accordéon diatonique. L'ensemblesuonatori rassemble trois violons. Dans le sud du pays, il intègre la formation accompagnant la danse thérapeutiquetarentelle.
Portugal : ce pays a joué un grand rôle dans la dissémination du violon dans ses colonies ou comptoirs. On l'y nommeviola pour le différencier des autresvièles rustiques appeléesrebecs.
Les principaux violonistes sontRidha Kalai, Abdou Dagher etJasser Haj Youssef. Ce dernier, reconnu également dans le jazz, est le premier violoniste à adapter le jeu du violon arabe sur uneviole d'amour.
Iran : le violon est très apprécié ici et il remplace à volonté lavièlekamânche dans les ensembles jouant lamusique iranienne savante. Il est sans doute à l'origine de l'ajout d'une quatrième corde aukamânche d'ailleurs. Il existe une grande école de violon, et les compositeurs n'hésitent pas à écrire des concertos selon tel ou teldastgâh pour lui.
Israël : à la suite de l'immigration massive des juifsAshkénazes, nombre de musiciens talentueux des pays de l'Est se sont retrouvés dans ce pays où le violon accompagne désormais les danses folkloriques.
Le violon est largement joué dans lamusique indienne depuis leXVIIIe siècle, surtout dans lamusique carnatique mais aussi dans lamusique hindoustanie où il subit toutefois la concurrence dusarangi, unevièle traditionnelle au jeu très difficile et qui est souvent réservée aux Musulmans. Certainement importé par des colons portugais ou britanniques (d'où son nomviolon), à moins qu'il ne soit une invention autochtone (cf.supra), il est devenu un véritable instrument classique là-bas aussi ; il est utilisé tant en solo, accompagné d'une percussion (tablâ oumridangam), qu'en accompagnement des chanteurs ou danseurs. C'est aussi un instrument qui se retrouve souvent dans les maisons indiennes. On en trouve aussi une version folklorique dans l'ancienne province portugaise de Goa où on l'appellerebec.
On en joue d'une manière particulière. L'accord est en Sol2 - Ré3 - Sol3 - Ré4 pour le solo et Sol3 - Do3 - Sol3 - Do4 pour le chant masculin (sa - pa - sa - pa). L'instrument est tenu à l'envers, la tête reposant sur la cheville du musicien assis en tailleur, et le tasseau arrière reposant sur la poitrine, laissant ainsi maintenu, la main gauche libre pour exécuter lesglissandos (jâru) si fréquents dans cette musique. On y joue tous lesrâgas possibles. Les principaux violonistes sont leDrL. Subramaniam,M. S. Gopalakrishnan,V. G. Jog, et leDr N. Rajan. Le frère du premier,L. Shankar (à ne pas confondre avec Ravi Shankar), est aussi un violoniste reconnu dans laworld music. Le violon tend à remplacer peu à peu lesvièlesesraj etdilruba dans la musique semi-classique ainsi que dans les musiques de film. On le retrouve aussi bien auSri Lanka où on l'appelleravikinna, qu'auBangladesh.
Malaisie : cette même influence s'est répandue ici ou le violon a intégré les orchestres de Cour sous le nom debiola également. Cet instrument accordé à l'européenne intègre aussi des ensembles accompagnant les danses ou théâtres locaux.
Philippines : les Espagnols ont aussi apporté avec eux lebiyolin au sein de leur lointaine colonie asiatique, où les musiciens locaux jouent des sérénades de types européens. De là l'instrument s'est aussi répandu dans les ethnies plus reculées, où on l'appellegologod ougitgit.
Avec l'immigration massive d'Irlandais, d'Écossais, de Scandinaves, de Slaves, et autres creusets violonistiques, on y retrouve la plus forte concentration de styles de jeu et de danses en tout genre.
États-Unis : Il existe aussi une grande tradition defiddler dans ce pays où on a tendance à jouer sur le bras, la poitrine ou la joue en usant descordatura.
Jamaïque : le violon connaît un franc succès ici dans la musique à danser, où il est joué avec le style de Floride, tenu contre la poitrine. Il existe un « violon de bambou » tiré d'un segment encore vert de bambou d'où quatre languettes sont détachées à titre de cordes ; l'archet en bambou lui aussi doit être plongé dans l'eau avant de jouer.
Mexique : le violon a été adopté par certains groupes d'Indiens, mais on le rencontre surtout au sein des orchestres traditionnelsmariachis ouhuapangos. Lerabel est aussi utilisé par certains Amérindiens.
Panama : le violon y a finalement remplacé lavièle à trois cordesrabel.
Argentine : certains Indiens y ont adopté le violon. Il est aussi joué dans la province de Santiago del Estero pour jouer la danse locale, la zamba, non pas sous le menton, mais contre la poitrine. On les appelle alorsviolineros.
Bolivie : on trouve au cœur de la forêt amazonienne des orchestres baroques (formés par les missionnaires) qui ont conservé de façon orale un patrimoine musical unique.
Brésil : on trouve dans le pays la varianterabeca issue du Portugal.
Chili : lerabel a trois cordes se rencontre ici aussi.
Le violon déjà présent au début du siècle dans lesstrings bands noirs, fait des débuts timides dans l'histoire dujazz, puisqu'on le trouve parfois dans des orchestres deJazz Nouvelle-Orléans. Deux courants se développent, un violon rural noir issu du blues, et un violon rural blanccountry héritier des traditions populaires d'Europe occidentale. Ainsi on voit naître lewestern swing de Bob Wills et leblue grass. C'est toutefoisJoe Venuti, considéré comme « le père du violon jazz »[74][réf. nécessaire] qui fit émerger cet instrument en tant que soliste, notamment par ses duos avec le guitaristeEddie Lang dans les années 1920-1930.Eddie South,Ray Nance etStuff Smith enrichiront chacun avec leur style propre la palette d'expression du violon jazz américain dans les années 1930.
En Europe se développe avant-guerre une tradition solide du violon jazz avec le danoisSvend Asmussen, les FrançaisMichel Warlop et surtoutStéphane Grappelli qui a véritablement montré que le violon pouvait swinger, et est devenu une référence incontestable. « Le violon […] a fait avec lui une entrée fracassante dans l'univers du jazz. L'apport de Grappelli est absolument unique dans l'histoire du jazz comme dans l'histoire du violon[75]. » Malgré le succès et l'influence qu'a exercée Grappelli, l'importance du violon dans le jazz est toutefois restée assez mineure. Quelques musiciens d'origine Tsigane l'utilisent naturellement, par exempleElek Bacsik, ou plus récemmentFlorin Niculescu, qui remporte un beau succèsrevivaliste, et se pose en héritier de Stéphane Grappelli[76].
Certains musiciens dufree jazz en font une utilisation déstructurante, par exempleOrnette Coleman, qui n'ayant pas de réelle technique sur l'instrument, l'utilise comme moyen d'instabilité.Noël Akchoté l'utilise de façon bruitiste ou pour ses possibilités de longs glissandos.
Si les tentatives de réintroduire le violon dans le rock restent relativement rares, ses potentialités restent intactes, comme en témoigne le double disque d'or obtenu par le groupeLouise Attaque avec un jeu qui tient largement la place à la fois rythmique et mélodique de la guitare et avec des harmonies et des effets qui ne tombent pas dans lebluegrass ou lefree jazz. Le violon entre dans le pop-rock dès les années 1960, par exemple avecThe Left Banke, lesBeatles (Eleanor Rigby, 1966), leVelvet Underground (John Cale dans Venus in Furs, 1967). Dans les années 1970, il est largement présent dans lerock psychédélique et lerock progressif[77], avec par exemple[78] :
On peut retrouver également le violon dans certains groupes de folk metal :Ithilien,Korpiklaani,Mägo de Oz,Eluveitie,Turisas,Cruachan,Niflheim… Le violon sert alors à évoquer des univers féériques, mythologiques et/ou médiévaux, et il est souvent accompagnés d'autres instruments traditionnels (flûtes, mandoline, violoncelle, cornemuse…) en plus des instruments plus « classiques » utilisés dans la musique metal (voix, guitare, basse, batterie).
Le violon a eu plusieurs descendants, que ce soient des instruments conçus dans une optique d'amélioration du son, ou que ce soient des innovations destinées à utiliser les nouveaux matériaux et techniques.
Le violon proposé par François Chanot en1819, s'il conservait plus la forme globale de l'instrument, était aussi fort différent du modèle. Les table et fond n'avaient aucun angle au niveau des échancrures, les ouïes étaient des fentes de largeur constante qui suivaient les bords de la table, la tête était retournée afin de faciliter la mise en place de la deuxième corde, et les cordes ne s'attachaient plus au cordier mais directement dans la table. Ce dernier point avait pour conséquence l'arrachement de la table, et après des critiques fort élogieuses quant à la sonorité, comparée à celle d'un Stradivarius, et quant au prix (cent écus), l'instrument ne fut pas adopté massivement[81].
Suleau partit de l'observation que pour augmenter le volume sonore du violon, il fallait agrandir la surface vibrante. Ne pouvant ni trop élargir la caisse, ni l'approfondir démesurément, ni modifier sa longueur à cause des habitudes des violonistes, il décida de creuser des sillons, orientés perpendiculairement au sens des fibres, tout en maintenant une épaisseur de table constante, ce qui donnait à la table vue de profil l'aspect d'une succession de vagues régulières. Les résultats sonores n'étant pas à la hauteur de ses attentes, il essaya de mettre les sillons dans le même sens que les fibres du bois, mais sans succès[82].
Contraction de « Lata » (boîte de conserves) et « violín » (violon, en espagnol), ce dérivé a été fabriqué pour l'ensemble d'instruments informels argentin Les Luthiers. Ce n'est pas un nouvel instrument, mais la parodie d'un violon, dont le premier prototype date de 1968. Il a de vrais composants de violon: le chevalet, la touche, des chevilles et les cordes. C'est le corps, fait avec une boîte de conserves (jambon ou biscuits), qui donne l'originalité de la parodie. À cause de son faible son, il a besoin d'être amplifié.
Il est habituellement exécuté par le chef d'orchestre et compositeur Carlos López Puccio[83].
Augustus Stroh conçut et breveta en 1899 un violon sans table, ainsi décrit[84] :
« Le chevalet est placé de manière à transmettre les plus légères vibrations à un levier ; ce levier est lui-même en communication avec un diaphragme d'aluminium, non uni. Ce diaphragme est la partie principale du violon ; c'est lui qui donne au son la force nécessaire ; il est fixé par deux coussinets de caoutchouc au bâti du violon. Près du diaphragme s'ouvre un pavillon métallique qui sert à renforcer les sons. »
Qualifié à ses débuts de « futur roi de l'orchestre », leviolon à pavillon fut utilisé quelque temps pour les enregistrements phonographiques, sa puissance résolvant le problème des microphones peu sensibles. Son usage n'a ensuite probablement pas cessé de se restreindre, puisque les témoignages à son sujet, au-delà des premières années, sont rares, et l'on ne dispose pas de données permettant d'évaluer combien d'exemplaires sont actuellement joués. Il a connu un succès en Roumanie.
Auguste Tolbecque explique dans son ouvrage qu'il a fabriqué un violon dont les ouïes sont situées sur les éclisses, au niveau des échancrures[85], ceci toujours dans l'optique d'éviter de perdre un tiers de la surface de la table au niveau du chevalet. Cependant, on ne dispose pas de plus de données quant à son usage.
Il s'agissait d'un violon dont la caisse de résonance était extrêmement réduite en largeur. Sa forme très élongée l'avait fait surnommer « flute ». C'était l'instrument favori des maîtres à danser car il était très facilement transportable chez leurs clients, avec un son aigrelet mais d'un volume suffisant pour rythmer la danse. On le transportait dans un étui en forme de cône vertical non fermé en partie supérieure, muni d'une courroie pour le porter en bandoulière ou l'accrocher au mur. L'archet plus long dépassait du cône.
Vers lesannées 1990, des violons enfibre de carbone ont été mis au point avec un avantage considérable : leur prix peu élevé. Ils ne servent le plus souvent que de violons d'étude car bien que des musiciens les eussent choisis pour les concerts pour leurs qualités de puissance, de clarté et d'intelligibilité, ils les trouvent à la longue ennuyeux, à cause d'un son « plat », toujours le même quelle que soit la nuance de jeu, sans expressivité[86]. Ces violons sont aisément reconnaissables grâce à leur table noire qui comporte un fin quadrillage sombre.
En 2002, la firmeYamaha présente sa gamme Silent, où l'on trouve entre autres des violons dits silencieux (moins sonores est plus exact) car privés decaisse de résonance. L'amplification est assurée par un système électronique, auquel on a ajouté un préamplificateur. L'encombrement est légèrement réduit en épaisseur et en largeur grâce à des arceaux démontables, ce dernier point étant beaucoup plus flagrant sur lescontrebasses de la gamme, qui peuvent faire 10 cm de large une fois partiellement démontées. Les violons de cette gamme coûtent environ 800 €[87].
Gildas Bellego a mis au point un violon formé d'une table en épicéa et d'un fond et d'éclisses en fibre de carbone et polyéthylène, la caisse étant sans angles au niveau des table et fond comme dans le violon Chanot, mais également au niveau des jointures fond-éclisses et éclisses-tables. Le moulage de cefond étendu diminuant le nombre de pièces à monter à 15, le prix diminue également, à 2 000 €[88].
Enfin, la firme américaine QRS a construit « Virtuoso Violin », un violon qui joue seul les partitions au formatMIDI, grâce à un système mécanique pour l'archet et un système électromagnétique pour la détermination de la hauteur des notes[89].
Avant de jouer, on met de lacolophane sur l'archet. Or, en jouant, celle-ci se détache de l'archet sous forme d'une fine poussière blanche, qui se dépose sur la table d'harmonie, entre le chevalet et la touche. Après avoir joué, il faut donc nettoyer la zone avec un chiffon sec de soie ou de coton[90]. L'emplacement de la poussière de colophane est un bon indicateur du placement global de l'archet. Le jeu est incorrect lorsque l'on joue trop sur la touche, ce qui est difficile à voir sans miroir quand on exécute un morceau, mais très simple à constater grâce à l'emplacement de la poussière de colophane.
À cause desouïes, l'intérieur de la caisse de résonance du violon communique avec l'air extérieur : la poussière entre donc librement dans l'instrument. Il faut donc régulièrement nettoyer l'intérieur de la caisse en y introduisant quelques grains deriz (non cuit pour éviter d'empâter l'intérieur de la caisse). Quand on agite le violon, les grains font s'agglomérer la poussière en moutons qui ressortent ensuite aisément par les ouïes[90].
Le bois du violon craint les changements de température et de taux d'humidité. Il est impossible desécher le violon si le taux d'humidité augmente (les sachets de poudreséchante sont inappropriés), mais la manœuvre contraire est réalisable grâce à des humidificateurs à placer dans la boîte de l'instrument (petit flacon d'eau percé de trous) ou directement dans la caisse de résonance (tube de plastique troué contenant de l'éponge que l'on a imbibée d'eau). Il est conseillé de maintenir le violon à une température comprise entre 16 et20°C, et à un taux d'humidité entre 40 et 65 %[91].
Les cordes métalliques sont sujettes à l'usure à la fois mécanique (frottement des doigts, particulièrement à cause des démanchés) et chimique (sorte derouille, à cause de lasueur) due au jeu. Il faut les nettoyer, elles et la touche, de la graisse laissée par la sueur des doigts, en utilisant de l'alcool ou de l'Eau de Cologne[90]. Il faut aussi les changer régulièrement, la corde demi étant la plus touchée du fait de son faible diamètre, la corde desol étant au contraire assez résistante au problème. Une corde demi est ainsi changée tous les mois quand on joue quotidiennement quelques heures, tandis qu'unsol peut tenir trois mois avant que l'altération soit vraiment sensible à l'oreille. En effet, une corde usée devient difficile à accorder aux autres, semblant sonner toujours faux quand on en joue à vide ; c'est un signe tardif, postérieur au « seuil » d'usure réellement convenable, et nécessitant le changement immédiat de la corde. Une corde largement trop usée peut « claquer », c'est-à-dire se briser brusquement (par exemple sous l'effet de la chaleur, d'un trop brusque coup d'archet…).
Boîte à violon : vue générale.
On conserve un violon dans une boîte dont la forme et le matériau peuvent varier. Cette boîte contient nécessairement le violon, l'archet, l'épaulière, la colophane, un chiffon doux pour l'entretien et des cordes de rechange. Elle peut contenir également, selon les cas, les partitions, d'autres archets, un métronome, un hygromètre, un humidificateur, de la craie pour l'entretien des chevilles, une sourdine… .
Légende :
Volute
Cheville
Sillet
Manche
Touche
Corde
Bloc de colophane
Corde usagée en boyau (couleur jaunie et forme gondolée par la cheville).
Violon en restauration : de gauche à droite, le fond et les éclisses, le manche, la table sur laquelle ont été collés de nombreux taquets.
Le luthier peut réparer desfractures de la table ou du fond. Lesdéformations de la voûte sont corrigées grâce à une mise sous presse de la table avec un moule ayant exactement la forme à donner à la table pendant vingt-quatre heures. Ledoublage consiste à coller une pièce de bois supplémentaire à une partie de l'instrument devenue trop mince et trop fragile. Plusieurs doublages sont possibles. Dans tous les cas, l'opération n'a lieu que sur une table saine, c'est-à-dire dont les fractures ont été réparées et la forme de la voûte corrigée.
La sueur abîme le vernis et peut donc rendre nécessaire le changement d'une partie d'éclisse à droite du manche. On construit donc la nouvelle partie d'éclisse, que l'on courbe ; puis on amincit aux abords du collage les deux pièces, de manière à les faire se chevaucher en épaisseur, ce qui donnera de la solidité à la réparation. Les éclisses peuvent aussi être rehaussées si leur trop faible hauteur nuit à la puissance sonore de l'instrument. Les fractures qui ont été réparées sont souvent soutenues par des taquets, petites pièces de bois identiques à celles posées sur le joint du fond lors de la fabrication du violon. Leur nombre ne doit cependant pas être trop important, car de toute évidence ils gênent la propagation du son[92].
Les chevilles, sous la traction des cordes, peuvent déchirer leurs emplacements. Si l'on tient à conserver la tête pour sa beauté, la difficulté est de conserver le haut des emplacements (appelés joues du chevillier) en y adjoignant une nouvelle pièce pour le bas. Si le manche est défectueux, mais que l'on conserve la tête, on pratique une enture du manche : la tête est encastrée dans le manche, passant sous lui. Enfin, toutes les pièces neuves sont de couleur différente des pièces originales car elles n'ont pas été vernies. Le luthier effectue donc des raccords de vernis, avec une base peu colorée (pour qu'elle ne s'impose pas à la couleur originale), à laquelle il ajoute petit à petit les colorants. Puis il le polit et essuie l'instrument avec un lainage imprégné d'huile de lin, afin de redonner à l'ensemble un aspect net et brillant[93].
La plasticité cérébrale est la capacité du cerveau à modifier sa structure ou son fonctionnement après sa mise en place au cours de l'embryogenèse. Plusieurs travaux scientifiques se sont servis de l'exemple du violon pour illustrer cette propriété.
La zone du cerveau qui commande les mouvements fins de la main est l'opercule pariétal. Celle-ci est particulièrement impliquée dans le jeu du violon. Cependant, des analyses de 1999 ducerveau d'Albert Einstein, conservé par Thomas Stoltz Harvey, analyses effectuées par une équipe de l'Université McMaster, ont montré qu'Einstein n'avait pas d'opercule pariétal, et qu'un mécanisme de compensation s'était mis en place, lui accordant un lobe pariétal inférieur d'une taille plus grande que la moyenne de 15 %[94].
La représentation corticale des doigts de la main gauche chez un violoniste, obtenue parimagerie par résonance magnétique fonctionnelle, montre une augmentation de la zone corticale activée par des stimuli de ce doigt. La taille de la zone du cortex consacrée à l'auriculaire devient similaire à celle du pouce, ce qui n'est pas le cas du non-violoniste. Cependant, ces modifications, liées à l'apprentissage, varient en fonction de l'âge d'acquisition : l'agrandissement de cette zone est plus importante chez les individus ayant commencé la pratique du violon avant l'âge de13 ans ; cette surface atteint son maximum chez les artistes qui ont commencé le violon avant l'âge de cinq ans ;[réf. nécessaire] selon certains, elle reste cependant importante chez ceux ayant commencé plus tard[95] alors que d'autres considèrent que ceux qui ont commencé l'apprentissage après sept ans ne présentent pas de différences significatives avec des non-musiciens[96].
L'effet de l'augmentation de taille de la zone de représentation sensorielle de la main gauche est une dextérité accrue : le violoniste est capable de placer ses doigts dans des positions différentes tous les dixièmes ou vingtièmes de seconde avec une précision de quelques dixièmes de millimètre, quand le non-violoniste les place tous les quarts de seconde ou toutes les demi-secondes avec une précision d'un millimètre[97]. Le violoniste confirmé est capable de corriger la justesse d'une note en un dixième de seconde, au quart de ton[98] ; il peut, dans unmouvement rapide, jouer12 notes à la seconde, il les anticipe alors d'au moins 700 ms[99].
Le syndrome de la gouttière cubitale se produit lorsqu'il y a compression dunerf cubital, soit lors de son passage dans la gouttière entre l'olécrane et l'épitrochlée, soit lorsqu'il passe dans l'avant-bras proximal enchâssé dans le canal cubital entre des structuresmusculaires etligamentaires. Le coude le plus susceptible d'en être atteint est le coude du bras qui tient le manche du violon. Cependant, le coude du bras tenant l'archet peut également être atteint de ce syndrome à cause des mouvements répétitifs de flexion et d'extension. Dans les deux cas, les symptômes sont les mêmes : douleurs dans l'avant-bras, dans les quatrième et cinquième doigts, sensation d'engourdissement de ces zones et de faiblesse lors des mouvements[100].
Le musicien atteint d'une dystonie de fonction n'arrive plus à contrôler le mouvement d'un ou de plusieurs doigts : d'après la définition de Raoul Tubiana, il subit des « contractions musculaires passagères, involontaires, non douloureuses, entraînant une incoordination de ses mouvements, uniquement lors d'un passage musical bien déterminé, troubles qui persistent malgré l'effort qu'il fait pour les corriger. »[101] En général, la récupération fonctionnelle à un haut niveau technique n'est qu'exceptionnelle, et la guérison totale n'est pas possible[102].
Les tendinites particulières au violoniste touchent les extenseurs ou les fléchisseurs des doigts, la partie externe du coude, ou l'épaule. Celles-ci sont caractérisées, essentiellement, par une douleur le long du trajet du tendon concerné[103]. Le syndrome de compression vasculo-nerveux (ousyndrome du canal carpien) provoque des fourmillements au niveau des doigts et un manque de sensibilité digitale. Le canal carpien, gaine située dans la face intérieure de la main, renferme les tendons fléchisseurs des doigts et le nerf qui leur permet d'être sensibles[103]. On peut aussi voir des névrites douloureuses des nerfs digitaux dues à une irritation mécanique. Des troubles globaux de la main sont à craindre, et leurs causes courantes sont les mauvaises positions, une pratique intensive, un changement de technique, une hygiène de vie insuffisante et l'anxiété[104].
↑Titre complet de l'édition originale :Epitomé musical des tons, sons et accordz, es voix humaines, fleustes d'Alleman, fleustes à neuf trous, violes et violons. Item un petit devis des accordz de musique, par forme de dialogue interrogatoire et responsif entre deux interlocuteurs P. et I.
↑Stowell, Robin,The nineteen Century bravura tradition inThe Cambridge Companion of the Violin, ed. Cambridge University Press, 1992
↑Bien que Viotti soit apparu en public durant une durée inférieure à dix ans, les qualités de son jeu dominèrent plusieurs générations de violonistes, Stowell, Robin, op. cit.
↑Étude deUnited States Department of Agriculture, Forest Service & Forest Products Laboratory Research paper comparant les duretés de divers bois, dontfraxinus exclesior,acer pseudoplatanus etpopulus spp et encore plus élastique.http://www.fpl.fs.fed.us/documnts/fplrp/fpl_rp643.pdf
↑Plusieurs centaines de recettes de vernis de luthiers et facteurs d'instruments sont répertoriées dans une base de données en ligne :VERNIX (« VERNIX : Une base de données de recettes de vernis issues de sources écrites anciennes », survernix.philharmoniedeparis.fr(consulté le)), développée par le laboratoire du Musée de la musique et le Pôle ressources de la Cité de la musique - Philharmonie de Paris.
↑Le violon joue desgammes non tempérées. Par conséquent, la position du doigt pour un si# sera légèrement différente de celle correspondant à celle de la note do (et de celle du ré♭♭), alors que sur un piano, ces trois notes correspondent à la même touche.
↑Pour les appréciations de l'époque et l'avis de Tolbecque, voirTolbecque, chap. La mentonnière et le piquet,p. 184–186
↑Elbert, T., Pantev, C., Wienbruch, C., Rockstroh, B., Taub, E. (1995).Increased use of the left hand in string players associated with increased cortical representation of the fingers.Science, 270, 305-307.
↑Autour de3 min 58 s du documentaireLe cerveau impensable - La plasticité neuronale, de Claude Edelmann, 1991. AvecIvry Gitlis.Fondation Ipsen - Les Films du Levant.
↑Autour de15 min 11 s du documentaireLe cerveau impensable - La plasticité neuronale
↑DocumentaireLe cerveau impensable - La plasticité neuronale, autour de 17 min 17 s