Certaines villes ont une origine romaine (commeNyon,Olten ouSoleure), d'autres sont nées à l'ombre de monastère (commeSaint-Gall,Schaffhouse ouLucerne) ou encore liées au siège d'un évêché remontant aux débuts de la christianisation (Avenches puisLausanne,Coire,Bâle,Genève). La plupart des villes helvétiques sont une expression du pouvoir politique et très nombreuses sont celles qui sont fondées (dès la seconde moitié duXIIe siècle, mais surtout auXIIIe siècle), par des seigneurs qui voyaient là une ressource politique (par l'implantation dans un territoire donné), économique (par les rentrées financières procurées par les taxes) et militaire (par la garnison que pouvait fournir la population en cas de guerre).
Ces villes neuves sont établies selon un projet bien défini, le plus souvent selon de plan dit« zaehringien », car inspiré de villes fondées par lamaison de Zähringen (ou Zaehringen), commeFribourg, (vers 1157)Berne (1190) ou encoreMorat (1179-1191)[3]. Ce plan en rectangle allongé, adapté à la topographie et le plus souvent entouré d'une enceinte, est caractérisé par des maisons contiguës alignées de part et d'autre d'une rue principale fort large pour l'époque, capable de recevoir de grandes foires. Il y a aussi une place du marché, souvent à une croisée de rues, des voies secondaires plus resserrées, enfin des « ruelles punaises » (c'est-à-dire « puantes ») très étroites servant essentiellement d'égouts à ciel ouvert. Ce plan « zaehringien » pourrait être lui-même inspiré de modèles antérieurs, notamment enFrance àBeaujeu dans leBeaujolais[4] ou àBesançon, dont la disposition remonte même à l'époque romaine[5]. Ce plan dit zaehringien est également fréquent dans des territoires qui ne relevaient pas de l'autorité de la famille de Zähringen, comme le pays de Vaud, par exemple, qui relevait de lamaison de Savoie.
L'une des caractéristiques des villes neuves est qu'elles recevaient du seigneur fondateur unecharte de franchises. Ce document en faisait des villes à part entière, quel que soit le nombre d'habitants, en général minime, au moment de la fondation. Ces franchises conféraient aux habitants un certain nombre de droits, une relative indépendance, une organisation politique et tout particulièrement un droit de marché, extrêmement important. Ces avantages attirent rapidement un grand nombre de nouveaux occupants qui participent à la croissance de l'agglomération.
Aujourd'hui encore, certaines communes de moins de 10 000 habitants se définissent toujours comme ville, ainsi par exempleLoèche[6],[7]. Ce privilège disparaît avec l'avènement de laRépublique helvétique en1798, les villes devenant de simples communes, à l'instar de laFrance voisine dont le système administratif issu de la révolution est transposé enSuisse[7].
La notion de ville réapparaît en1882 sous la forme d'une notion statistique définissant une ville comme une commune de plus de 10 000 habitants, notion instaurée par le Bureau fédéral de statistique, ancêtre de l'Office fédéral de la statistique[7],[8] ; la notion d'agglomération apparaît en 1930[7]. Dans la pratique chaquecommune décide ou non d'utiliser ce terme : par exemple, la commune deKöniz n'utilise pas le terme de ville malgré ses 40 000 habitants. Si la notion de ville est réapparue auXIXe siècle d'un point de vue statistique, elle n’apparaît dans laconstitution de la Suisse qu'en 1999[7].
À partir de 2015, pour qu'une commune soit considérée comme ville, la somme de la population, des emplois et des nuitées, nommée HEN, doit être de 12 000 dans la « zone centrale », un noyau urbain à forte densité de population, et d'au moins 14 000 sur l'ensemble du territoire communal[9].
L'ancienne définition statistique de la ville est abandonnée en 2015 au profit d'une nouvelle définition tenant compte notamment de la densité de population, du nombre de personnes actives et du nombre de nuitées afin d'éviter que des communes rurales issues de fusions de communes se retrouvent considérées comme ville[6],[10], commeVal-de-Ruz etVal-de-Travers dans lecanton de Neuchâtel ou encoreMaur ouWald dans leCanton de Zurich, bien que non issue d'une fusion, en raison des grandes superficies et des faibles densité de population de ces communes. Cette nouvelle définition fait que, pour des raisons de densité de population, des communes de moins de 10 000 habitants se retrouvent considérées comme ville car très denses[10].
↑Rolf Hager (ed.), The Zähringer New Towns: Modern Planning Concepts in the Towns Built During the 12th Century in Southern Germany and Switzerland by the Dukes of Zähringen. An Exhibition Sponsored by the Dept. of Architecture, Swiss Federal Institute of Technology, Vetter 1966, 42 p.
↑Paul Hofer, «Aux origines du plan de Berne», Hommage à Marcel Grandjean. Des Pierres et des Hommes. Matériaux pour une histoire de l'art monumental régional, BHV 109 Lausanne 1995, pp. 25-53.
↑Marcel Grandjean, «Villes neuves et bourgs médiévaux, fondement de l'urbanisme régional»,L'Homme dans la ville, Lausanne 1984, pp. 61-100. -- Marcel Grandjean, «Vers une histoire fondamentale de l'urbanisme médiéval dans le Pays de Vaud»,Nos monuments d’art et d’histoire 1988, pp. 428-437. -- Marcel Grandjean, «Les villes: espaces et réseaux»,Les Pays romands au Moyen Age, Lausanne 1997, pp. 87-98.
Hans Boesch, Paul Hofer,Villes suisses à vol d'oiseau, Lausanne, Zurich 1963.
Rolf Hager (ed.), The Zähringer New Towns: Modern Planning Concepts in the Towns Built During the 12th Century in Southern Germany and Switzerland by the Dukes of Zähringen. An Exhibition Sponsored by the Dept. of Architecture, Swiss Federal Institute of Technology, Vetter 1966, 42 p.
Marcel Grandjean, «Villes neuves et bourgs médiévaux, fondement de l'urbanisme régional»,L'Homme dans la ville, Lausanne 1984, pp. 61-100.
Marcel Grandjean, «Vers une histoire fondamentale de l'urbanisme médiéval dans le Pays de Vaud»,Nos monuments d'art et d'histoire, 1988, pp. 428-437.
Marcel Grandjean, «Les villes: espaces et réseaux»,Les Pays romands au Moyen Age, Lausanne 1997, pp. 87-98.
Paul Hofer, «Aux origines du plan de Berne»,Hommage à Marcel Grandjean. Des Pierres et des Hommes. Matériaux pour une histoire de l'art monumental régional (Bibliothèque historique vaudoise 109), Lausanne 1995, pp. 25-53.
Gras : Chef-lieu de canton U : Membres de l'union des villes suisses sans pour autant être des villes d'un point de vue statistique C : Communes de plus de 10 000 habitants étant des villes selon l'anciennedéfinition de 1882, mais pas selon la définition actuelle