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VIe dynastie égyptienne

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v. 2413AEC – 2250 AEC[1],[note 1]

Description de cette image, également commentée ci-après
Statue dePépi Ier conservée aumusée de Brooklyn àNew York.
Informations générales
StatutMonarchie
CapitaleMemphis
Langue(s)égyptien ancien
Religionreligion de l'Égypte antique
Histoire et événements
2413 AECAvènement deTéti
2258 AECFin du règne deMérenrê II
Pharaon
2413-2394 AECpremier :Téti
2393-2343 AECPépi Ier
2334-2260 AECPépi II

Entités précédentes :

Entités suivantes :

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LaVIe dynastie couvre unepériode de plus d'un siècle et demi[note 1] à la fin de l'Ancien Empire. La toute-puissance du roi, sans être remise en cause, est perçue différemment. Il faut sans doute y voir également un changement dans les aspirations religieuses ainsi que dans l'organisation de l'État. Cette période va être marquée par le très long règne dePépi II[note 2]. C'est à cette époque que l'on assiste à un morcellement du pouvoir central au profit desnomarques, tendance déjà amorcée à laVe dynastie. La charge se transmet de père en fils, formant ainsi de véritable dynasties locales sans pour autant usurper le pouvoir royal. Les prérogatives royales sont peu à peu « empruntées » par ces nomarques, comme l'attestent les tombes des nécropoles d'Assouan et également la pratique de la momification.

Souverains de laVIe dynastie

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Voir l’article annexe :Arbre généalogique de la VIe dynastie égyptienne.

L'égyptologue Hracht Papazian a proposé en 2015 qu'un certain nombre de souverains généralement considérés comme appartenant à laVIIIe dynastie identifiée par laliste d'Abydos soient attribués à laVIe dynastie et d'autres àVIIe qu'il ne fait commencer qu'avec le roiDjedkarê Shemaï[2] :

RoiListe d'AbydosTable de SaqqarahCanon royal de TurinManéthon (versionAfricanus)Commentaires
Téti (Ttj)Téti (34)Téti (26)lacune (5.1)Othoès (Οθοης) (VI-1)Pyramide située àSaqqarah-nord.
Ouserkarê (Wsr-kȝ-Rˁ)Ouserkarê (35)lacune (5.2)Longtemps considéré par l'égyptologie comme étant un usurpateur, laPierre de Saqqarah-sud, représentant les annales du début de laVIe dynastie, a montré qu'il n'en était rien.
Pépi Ier (Mry-Rˁ Ppy)Méryrê (36)Pépi (25)lacune (5.3)Phious (Φιος) (VI-2)Pyramide située àSaqqarah-sud.
Mérenrê Ier (Mrj-n-Rˁ Nmtj-m-sȝ=f)Mérenrê (37)Mérenrê (24)lacune (5.4)Méthousouphis (Μεθουσουφις) (VI-3)Pyramide située àSaqqarah-sud. Momie exposée au musée Imhotep àSaqqarah.
Pépi II (Nfr-kȝ-Rˁ Ppy)Néferkarê (38)Néferkarê (23)lacune (5.5)Phiops (Φιωψ) (VI-4)Pyramide située àSaqqarah-sud.
Mérenrê II (Mrj-n-Rˁ Nmtj-m-sȝ=f)Mérenrê Amtyemsaf (39)lacune (5.6)Menthésouphis (Μεθουσουφις) (VI-5)Fils dePépi II et sans doute de la reineNeith. Si lenom de Sa-RêNemtyemsaf est assuré, sonnom de Nesout-bity n'est pas connu avec certitude,Mérenrê n'était qu'une réutilisation de celui indiqué par laliste d'Abydos. LeCanon royal de Turin lui attribue 1 an et 1 mois de règne.
Netjerkarê (Nṯr-kȝ-Rˁ)Netjerkarê (40)Netjerikarê Siptah (5.7)Nitocris (Νιτωκρις) (VI-6)Longtemps considéré comme une femme, leCanon royal de Turin a rétabli le fait qu'il s'agit d'un homme, mais son existence n'est toujours pas prouvée par des sources contemporaines.
Menkarê (Mn-kȝ-Rˁ)Menkarê (41)
Néferkarê II (Nfr-kȝ-Rˁ)Néferkarê (42)Fils dePépi II et de la reineÂnkhésenpépi III selon Hracht Papazian[2].
Néferkarê Neby (Nfr-kȝ-Rˁ Nbjj)Néferkarê Neby (43)Fils dePépi II et de la reineÂnkhésenpépi IV. Commanditaire d'une pyramide non retrouvée et nomméeDjed-ânkh-Néferkarê.

Les origines de la famille du fondateur de la dynastieTéti ne sont pas connues avec certitude. Sa mèreSechséchet Ire appartient probablement à la noblesse ou bien à une branche éloignée de lafamille royale régnante. Quoi qu'il en soit, Téti épouse une princesse de sang,Ipout Ire, qui est donnée pour être une des filles d'Ounas, manifestement mort sans héritier pouvant lui succéder.

Ainsi légitimé par ce mariage, Téti assure la continuité entre les deux dynasties mettant un terme à une crise de succession. Lacapitale reste àMemphis etSaqqarah est choisi comme nécropole dynastique. Les institutions sont renforcées et la stabilité du royaume semble assurée. Cela n'empêche pas une certaine contestation de s'installer au cours de son règne, le roi étant probablement toujours perçu comme illégitime et ouvrant la voie et la possibilité pour d'autres dignitaires, par leur pouvoir ou par leurs liens avec la famille royale, de prétendre à leur tour monter sur le trône d'Horus.

De fait le règne de Téti s'achève par un complot ourdi dans sa garde rapprochée et avec la complicité de hautes personnalités, faits rapportés parManéthon. Bien qu'aucune source contemporaine ne vient confirmer cette histoire, des troubles semblent apparemment être confirmés par les découvertes récentes àSaqqarah de tombeaux de dignitaires ayant subi unedamnatio memoriae et réutilisés aux fins d'autres personnages probablement adversaires. On notera sur ce point le nombre assez important de dignitaires qui occupent le poste de vizir[note 3], indice probable d'une instabilité du pouvoir.

D'autres complots auront lieu au cours des règnes suivants dont notamment un sous le règne dePépi Ier, fils de Téti et troisième pharaon de la dynastie. Les faits qui impliquent le harem royal et de hauts dignitaires sont rapportés dans lemastaba d'Ouni enAbydos. Levizir en tant que ministre de la justice avait été chargé de l'enquête et du jugement des coupables, parmi lesquels on comptera une des épouses du roi.

Cartouches des pharaons de laVIe dynastie relevés sur laliste d'Abydos mais ne mentionnant pasNitocris -Abydos

Une autre découverte récente, lapierre de Saqqarah Sud, a permis de mieux connaître la succession des règnes de cette période. Il s'agit d'un texte de typepierre de Palerme datant du règne dePépi II[3]. Cette pierre enregistrant une partie des annales de la dynastie depuis le règne de Téti jusqu'à celui deMérenrê Ier est inscrite au recto et verso. Elle devait donc être une stèle placée dans un sanctuaire, probablement àMemphis où les prêtres consignaient à l'abri de leur temple les faits et gestes de chaque souverain d'Égypte.

Bien que très dégradée car réutilisée en remploi pour former le couvercle du sarcophage d'Ânkhésenpépi IV, les informations qu'elle contient confirment un interrègne entre celui de Téti et dePépi Ier, celui d'Ouserkarê, ainsi que la durée de chaque règne. Quand l'état du texte le permet, elle donne aussi le nom de la mère de chaque souverain, information essentielle pour définir la généalogie de la famille régnante[4]. Ces annales rendent compte également des faits principaux ou officiels avec l'enregistrement des expéditions commerciales et militaires, des entrées de denrées précieuses, des dons faits aux temples du pays, de l'érection de statues, des grandes cérémonies religieuses du royaume et enfin des recensements du bétail, autres informations essentielles aux égyptologues pour déterminer le nombre d'années de règne de chaque pharaon.

Au cours de cette période le rôle de l'épouse royale et celui de la mère du roi s'accroît au point que des cultes leur sont rendus. Elles se font édifier de véritables pyramides comprenant temple funéraire, dépendances, clergé personnel et tout comme lescomplexes pyramidaux royaux, ces monuments étaient dotés d'une pyramide-cultuelle ou pyramide subsidiaire, tandis que peu à peu leur caveau funéraire s'orne destextes des pyramides, privilège réservé jusque-là au seulPharaon.

Nul doute que ces reines ont joué un grand rôle dans les différents événements qui marquent l'histoire de la dynastie. Comme sous laVe dynastie, le trépasprécipité ou inattendu de certains souverains a dû ébranler la famille royale en bouleversant l'ordre de succession normal de père en fils. Les règnes de Téti, d'Ouserkarê ou deMérenrê Ier forment à chaque fois une charnière de la généalogie familiale. Ouserkarê pourrait être un frère du roi qui prend la succession de Téti en aidant activement la régence de sa veuveIpout Ire en faveur du prince héritierMérenrê Pépi, alors trop jeune pour monter sur le trône[5]. Plus tard,Mérenrê Ier succède légitimement à son père Pépi, premier du nom. Son règne est court et il n'a pas le temps d'achever la décoration de soncomplexe cultuel et funéraire. N'ayant lui non plus apparemment pas d'héritier mâle c'est son frèrePépi II qui lui succède sous la régence de sa mère la reineÂnkhésenpépi II.

Les annales concernant le long règne dePépi II ne sont pas complètes sur la stèle deSaqqarah-sud et l'état de la pierre nous prive d'informations directes et officielles pour l'ensemble de cette période qui marque le début de l'effondrement de l'Ancien Empire[4]. Cependant la durée exceptionnelle de ce règne a produit une grande quantité de documents épigraphiques et archéologiques nous permettant ainsi de mieux la comprendre. Les biographies de grands dignitaires commeHirkhoufnomarque d'Assouan sont de ce point de vue des témoignages de premier ordre.

À la fin du règne dePépi II une crise dynastique s'ouvre. Plusieurs rois sont répertoriés par les listes duNouvel Empire mais le nombre de rois et l'ordre de succession ne sont pas assurés. Ceux dont l'existence est assurée sontMérenrê II, fils aîné dePépi II et probablement de la reineNeith, ainsi queNéferkarê Neby, fils dePépi II et de la reineÂnkhésenpépi IV et commanditaire d'une pyramide non retrouvée et nomméeDjed-ânkh-Néferkarê. Le peu d'éléments de cette période ne permet pas de reconstruire une chronologie fiable.

Économie et société

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Levizir Kagemni assistant au défilé des offrandes - relief peint de sonmastaba deSaqqarah

Dès le début de laVIe dynastie l'État représente une administration puissante dirigée par de véritables ministères à la tête desquels on retrouve les grands du royaume à commencer par le premier d'entre tous levizir dont la puissance est considérable, agissant au nom dePharaon.

La longueur des règnes des trois principaux souverains de la dynastie,Téti,Pépi Ier et surtout dePépi II, favorise la stabilité du royaume ce qui alimente les caisses de l'État, gérées par leTrésor dont la direction est souvent confiée au vizir justement, qui accumule ainsi les charges et les fonctions concentrant la plupart des postes exécutifs du gouvernement du royaume. Depuis laVe dynastie ce personnage n'est plus choisi parmi les enfants royaux mais au sein d'une noblesse qui formait la cour de pharaon. Le vizir recevait plusieurs titres dont celui deprince ce qui n'implique pas forcément de lien avec la famille royale mais désigne davantage son rôle de premier des grands du royaume dont l'autorité est incontestée.

Privilège de haut rang, il recevait alors un mastaba princier situé à proximité de la sépulture royale. Les mastabas deMérérouka,Ânkhmahor et deKagemni représentent des exemples incontournables de l'architecture funéraire de l'Ancien Empire tant par leur agencement que par la qualité des scènes en reliefs qui décorent les parois des salles de culte et leurs dépendances. Pour l'entretien de ces tombeaux et du culte qui en dépendait le roi accorde sur les biens de la couronne des terres regroupées en fondation dont le produit et les bénéfices forment un revenu non négligeable administré directement par le dignitaire et sa famille ainsi favorisés.

Cette puissance est probablement à l'origine de certains remous de l'histoire du pays. Une politique d'alliance maritale permet bien souvent de régler l'affaire, le vizir devenant le gendre du roi[note 4], mais il est avéré que certains d'entre eux ont été à l'origine de tentatives de prise de pouvoir sous les règne deTéti ou dePépi Ier. D'autres paraissent avoir été des soutiens déterminants à la stabilité du royaume comme ce fut le cas du vizirDjaou, fils deKhouinomarque d'Abydos.

Ce dernier personnage peut symboliser une autre innovation dans la société égyptienne de cette période : le développement des élites locales dans le reste du royaume. De fait, il se crée une décentralisation de l'administration qui se regroupe autour dunomarque, sorte de gouverneur représentant de l'autorité du roi et de son administration. Leur rôle dans la gestion de l'État déjà sensible à la dynastie précédente, s'accroît de manière exponentielle au cours de laVIe dynastie au point d'absorber peu à peu les fonctions principales du gouvernement du royaume, dont celle de grand prêtre du dieu principal de la région qu'ils gouvernent.

Cette situation nouvelle permet aux cultes populaires de se développer et certains de ces grands prêtres deviennent alors les véritables intercesseurs auprès des dieux ce qui leur a valu dans certains cas d'être divinisés après leur mort. On citera à titre d'exemple lenomarque d'Assouan Pépi-Nakht Héqa-Îb qui reçoit un culte au sein même de l'île d'Éléphantine non loin du sanctuaire deKhnoum et deSatis[6], ou encore le cas d'Izi,nomarque duTrône d'Horus dont le tombeau àEdfou deviendra un lieu de pèlerinage important[7].

La pratique de l'hérédité des charges contribuant au cumul des bénéfices et de la propriété foncière au profit de ces grandes familles, génère l'enracinement d'une véritable noblesse féodale qui en apparence continue à s'en remettre à l'autorité royale mais dans les faits, gouverne localement et gère à son profit les terres et leurs revenus. Les cités des nomes se développent en même temps qu'une classe moyenne rattachée aux administrations locales. L'économie et les échanges favorisent le commerce dans la vallée tout en permettant l'envoi des expéditions au-delà des frontières du pays à la recherche de biens précieux et rares[8].

Groupe statuaire en albâtre représentant la reine-mèreÂnkhésenpépi II, mère dePépi II -musée de Brooklyn,New York

C'est notamment d'une de ces puissantes familles qu'est issue l'un des personnages emblématiques de la dynastie,Ânkhésenpépi II, épouse de deux rois et mère d'un troisième et dont la sépulture a été récemment mise au jour àSaqqarah au sud de lapyramide dePépi Ier.

Dans lesoasis du désert libyque à l'ouest duFayoum, ces gouverneurs se font édifier de véritables complexes funéraires dont le monument principal est un vaste mastaba doté d'un temple de culte. Ces structures recouvraient tout un réseau de chambres funéraires destinées aux membres de la famille qui régnait littéralement sur ses terres. Tout autour s'installent les tombes des fonctionnaires rattachés au gouvernement de la région. Dans d'autres régions du pays comme dans lenome inférieur du Sycomore, dont la capitale est Qus, la future Cusae des grecs, une nouvelle nécropole régionale voit le jour sous l'impulsion du nomarque Pépiânkh. Là il s'agit de tombes creusées dans la falaise qui domine les nécropoles populaires et la plaine fertile. Ces types de cimetières dont le schéma est calqué sur celui des nécropoles royales est significatif des changements de la société égyptienne d'une société centralisée et individualiste au service d'un souverain en une société décentralisée et centrée désormais sur le noyau familial qui représente alors la nouvelle valeur morale. Sur le plan administratif et politique cela revient à créer sur tout le territoire deHaute-Égypte et deBasse-Égypte des domaines seigneuriaux qui font vivre toute une population de cultivateurs, d'éleveurs et de pêcheurs, de commerçants et d'artisans, de fonctionnaires et de serviteurs qui passent juridiquement sous l'autorité privée des gestionnaires et des grands propriétaires[9].

Cette féodalité permet l'émergence d'une classe moyenne plus étendue que celle traditionnelle liée à la cour du roi, entraînant de-facto le développement des arts locaux. Les sites deMeir, deDendérah, d'Abydos, deDakhla ou d'Assouan représentent les croissances les plus remarquables de ce point de vue.

Sur le plan militaire, le recrutement des soldats autrefois réglé par conscription nationale sur tout le territoire est désormais également confié auxnomarques qui deviennent alors de véritables chefs militaires. Certains n'hésitent pas à payer des mercenaires notammentnubiens, dont l'habileté et l'efficacité des archers n'est plus à démontrer. Lepharaon ne participe pas directement aux expéditions qui sont confiées en termes de commandement soit auvizir soit aux gouverneurs locaux. La fin de la dynastie est marquée par l'accroissement de l'activité militaire aux frontières du pays. Des expéditions punitives sont organisées contre les régions révoltées duSoudan tandis qu'une véritable campagne militaire est lancée contre les peuplades orientales qui certainement commencent à s'infiltrer sur le territoire égyptien menaçant les principales routes commerciales et l'accès aux ressources des mines d'or deNubie ou de turquoise et de cuivre duSinaï, denrées précieuses essentielles à l'économie de la société égyptienne antique.

Sur le plan religieux, le culte d'Osiris est de plus en plus répandu et pratiqué, concurrençant les culteshéliopolitains au sein même du temple funéraire royal. Les temples des capitales des nomes reçoivent souvent par décret royal l'immunité fiscale ce qui engendre la création de véritables domaines privés. Ces terres et les revenus qui en proviennent finissent par échapper complètement à l'administration centrale pour enrichir le principal officier du culte qui à cette époque est donc lenomarque[10].

Cette situation qui s'impose peu à peu à tout le pays, ne semble pas présenter de danger tant que le gouvernement de pharaon est stable et sa puissance assurée sur tout le territoire. À l'inverse lorsque la crise dynastique qui suivra le long règne dePépi II devient insoluble, le système éclate et le pays se morcelle. La religion, l'administration et l'économie se resserrent autour de ces princes qui forment de véritables dynasties locales qui à la période suivante revendiqueront le pouvoir sur la dynastie officielle qui ne gouverne alors plus que les régions deMemphis et d'Héracléopolis Magna, ultimes domaines royaux.

Relief représentantHirkhouf à l'entrée de sa tombe àQubbet el-Hawa -Assouan

Dans les pratiques funéraires, si au début de la dynastie ces dernières sont directement héritées et inspirées de la période précédente, peu à peu on assiste à une traduction du changement de la société au sein même de ces pratiques, à commencer par le regroupement autour de la cellule familiale. Désormais les membres de la famille ont leur propre sépulture et culte au sein même de la tombe du chef de la famille. Les tombeaux sont alors conçus d'emblée comme descaveaux familiaux. Cette pratique se standardise tout au long de la dynastie et dans toutes les couches de la société.

Ce changement s'accompagne d'une véritable révolution en ce qui concerne les rites et l'architecture funéraire avec peu à peu un soin de plus en plus marqué donné à l'infrastructure, notamment au caveau funéraire, tandis que la superstructure se réduit à sa plus simple expression devenant le plus souvent une simple chapelle dotée d'une stèle et d'une table d'offrande. Ces tombes sont principalement édifiées en briques crues et sont nommées par les égyptologues « tombes en four » en raison de l'analogie de leur architecture avec celle des fours destinés à la production de pain ou de poterie. Seuls les éléments de culte sont en pierre quand le propriétaire a les moyens de se faire ériger un monument de cette qualité. En revanche, le caveau, lui, prend une dimension plus vaste et pour les plus aisés ses parois se décorent de textes qui préfigurent les « textes des sarcophages » largement répandus lors de laPremière Période intermédiaire[11].

Cette nouveauté est directement inspirée du développement destextes des pyramides dans les tombeaux royaux. Apparaissant pour la première fois dans une pyramide royale sousOunas, dernier pharaon de laVe dynastie, à dater du règne dePépi Ier ces textes rituels commencent à être également inscrits dans les caveaux des reines principales du roi. Les épouses secondaires, si elles bénéficient également d'un tombeau en forme depyramide, n'ont alors pas droit aux textes religieux, apanage de la reine mère et des épouses de premier rang. Au règne suivant la règle semblent devenir systématique puisque sur les trois pyramides identifiées des femmes dePépi II, toutes trois bénéficient d'un tel traitement.

On assiste à un phénomène parallèle pour les classes inférieures de la société, ce qui a été traduit par les historiens comme une preuve d'une certainedémocratisation des rituels, y compris celui de la momification, pratique qui assimile directement le défunt à unOsiris. C'est également à cette époque que commence à apparaître la présence de statuettes rituelles dans le viatique funéraire qui accompagne le mort dans son voyage vers l'au-delà. À la période qui suit immédiatement l'Ancien Empire, certaines de ces statuettes de genre féminin seront baptisées par les premiers égyptologues lesconcubines du mort.

Si le sens précis de leur rôle aux côtés du défunt n'est pas rendu explicite par des inscriptions, ces statuettes représentent les ancêtres desouchebtis qui deviendront jusqu'à laBasse époque un des éléments les plus significatifs du mobilier funéraire égyptien.

Arts et culture

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Linteau d'Ouni, mentionnant la pyramide dePépi Ier - Rosicrucian Egypt Museum deSan José

Suivant l'évolution de la société, on assiste au début de laVIe dynastie à un développement des arts et de l'architecture hérités de ladynastie précédente. Les dignitaires continuent à se faire aménager de somptueuses tombes ou mastabas dans les principaux sites de la vaste nécropole deMemphis.

Au début de la dynastie, lesgrands prêtres de Ptah restent les maîtres d'œuvre de la royauté. Leur rôle éminent à la période précédente est confirmé sous les premiers souverains de la nouvelle famille régnante. Ils jouissent alors d'une grande réputation auprès du roi et faisant partie de la noblesse du pays transmettent leurs charges à leurs enfants, créant de véritable dynastie de prêtres.

La principale réforme concernant cette fonction aura lieu sous le règne dePépi Ier.Sabou Tjéty a fait inscrire sur la stèle de son tombeau ce décret qui outre le fait de vanter ses mérites de chef des artisans indique qu'il est le premier des grands prêtres dePtah à cumuler toutes les charges liées à cette lourde tâche. Alors qu'avant lui deux grands pontifes étaient désignés pour remplir ces fonctions essentielles à la royauté qui se répartissaient entre des fonctions civiles et des fonctions religieuses, désormais le grand prêtre absorbe l'ensemble et devient l'unique architecte du programme artistique du roi[12],[13].

Les chantiers royaux concentrent une grande part de l'activité architecturale de chaque règne et lespyramides et leurstemples prennent alors une forme standardisée. Les chambres funéraires royales sont donc systématiquement décorées destextes des pyramides tandis que la qualité des reliefs atteint un apogée pendant cette période que ce soit dans les monuments royaux[note 5] ou dans les vastes complexes funéraires des grands du royaume dont la décoration s'inspire directement de ces standards.

Les villes de pyramides qui en dépendent se développent autour de chaque temple d'accueil, ou temple-bas de chacun des complexes cultuels royaux, formant peu à peu un réseau urbain périphérique à la capitale qui abrite le palais royal. Les nécropoles de leurs résidents s'installent proche du temple funéraire royal ou temple-haut de la pyramide, poursuivant ainsi la tradition des nécropoles royales initiée sous laIVe dynastie.

L'entretien de ces cités toutes consacrées aux rites funéraires des rois régnants et de leurs prédécesseurs est fixé par décret royal. Nous possédons par exemple pour les deux villes de pyramides deDahchour un de ces décrets datant du règne dePépi Ier témoignant qu'à cette époque les cultes des pharaons des dynasties précédentes ne sont pas tombés en désuétude et font l'objet d'attention régulière de l'administration royale[14]. Si l'emplacement de ces villes des pyramides deSnéfrou n'a pas pu être identifié avec certitude, celui des prêtres du culte deKhentkaous Ire a été mis au jour et fouillé sur le site deGizeh. Le complexe funéraire de la reine comporte le long de la chaussée montante permettant d'accéder au temple de culte, tout un ensemble de demeures spacieuses qui abritaient ces officiers du culte et leur famille. Clairement datée de la fin de laVe dynastie, cette ville reste en fonction tout au long de laVIe et nous livre un exemple de premier ordre de l'organisation de l'habitat de cette époque[15].

Parallèlement au milieu de la dynastie la décentralisation de l'État produit l'éclosiond'écoles locales qui œuvrent pour le compte des élites régionales. Les tombeaux deMeir ou d'Assouan symbolisent cet art provincial qui est encore très empreint des canons de la cour royale. En revanche les productions dans les oasis du désert occidental signent une nette démarcation entraînant la création de types originaux et souvent spécifiques à l'éloignement de ces territoires contrôlés par des gouverneurs qui agissent en tout point comme de véritables monarques locaux. L'architecture des tombes s'inspire de plus en plus des sépultures nubiennes en adoptant notamment la voûte en brique crue, tandis que le mastaba monument principal hérité des nécropoles royales memphites, se transforme peu en peu en un lieu de sépultures collectives qui abrite outre le gouverneur et les siens, celles des dignitaires et serviteurs qui l'entourent. La découverte de la nécropole de Balat dans l'oasis deDakhla représente l'exemple le plus significatif de cet art funéraire provincial[16].

Statue d'un homme provenant deGizeh - Ägyptisches Museum,Leipzig

Mais le développement des arts ne se limite pas au champ funéraire. On assiste également au développement des villes et de leurs sanctuaires depuis ledelta jusqu'enHaute-Égypte :

  • ÀBubastis,Téti puisPépi Ier édifient à proximité du grand sanctuaire deBastet destemples du ka, sanctuaires dédiés au culte du ka divin et royal. Ces édifices possèdent déjà un plan complexe dont les éléments architectoniques principaux tels que les portes, les piliers et architraves sont faits de pierre[17]. Non loin toute une nécropole provinciale s'est installée avec des mastabas édifiés en briques et dont les plus fastueux possédaient des caveaux aux parois de calcaire portant des formules d'offrandes et autres textes religieux[18]. On citera notamment le tombeau d'Ânkh-haef, directeur des prêtres sous le règne dePépi II. Son caveau parementé de calcaire conserve encore des peintures et des inscriptions dont certaines sont des prières àOsiris etAnubis. Ils font partie des premiers témoins des textes funéraires qui seront plus tard regroupés dans différents corpus que l'on désigne par le terme usuel de « Livre des morts ».
  • ÀHéliopolis,Téti,Pépi Ier font ériger desobélisques monumentaux en pierre dont les vestiges ont été retrouvés sur place. Il s'agit actuellement des plus anciens monolithes adoptant cette forme élancée qui restera un symbole solaire tout au long de l'histoire de l'Égypte. Une inscription de SabniIer nomarque d'Assouan, atteste par ailleurs qu'une commande de deux obélisques en granite a été réalisée sous le règne dePépi II. Pour l'occasion le roi lui adressa deux grands navires destinés au transport des monolithes jusqu'au temple du dieu àHéliopolis.
  • EnAbydos, le temple principal de la cité déjà millénaire est rebâti sous les règnes dePépi Ier,Mérenrê Ier puisPépi II[19]. Une grande enceinte vient enclore l'ensemble des installations cultuelles de la cité sainte dont le temple du dieuOsiris-Khentamentiou qui est considérablement agrandi et doté de colonnades et portes monumentales en pierre.
  • ÀHiérakonpolis, la découverte de deux statues royales en métal cuivreux, dont l'une représentePépi Ier et l'autre plus petite probablement son fils et successeurMérenrê Ier, démontre que ces souverains ne négligèrent pas ce sanctuaire dédié au culte d'Horus, dieu de la royauté. Une autre découverte datant probablement de cette époque fait partie des trésors les plus remarquables d'orfèvrerie de l'Égypte antique. Il s'agit d'une tête de faucon en or, coiffée de deux hautes plumes et dont les yeux sont réalisés par une unique pierre cylindrique en obsidienne.
  • ÀAssouan, sur l'île Éléphantine, le temple deSatis reçoit également une attention particulière comme en témoigne la mise au jour d'unnaos en granite dédié au dieu parPépi Ier. Il est actuellement exposé dans ledépartement égyptologique duMusée du Louvre, et bien que de dimension modeste représente là aussi l'exemplaire le plus ancien denaos connu jusqu'ici. Cette partie la plus sacrée du temple abritait la statue de culte de la déesse à laquelle était rendu un culte quotidien.

Ce programme architectural qui couvre le pays de monuments divins nécessite la présence continue d'artistes et artisans ainsi que d'équipes de maçons. Pour alimenter ces chantiers les architectes commandent les matériaux nécessaires dans les principalescarrières du pays comme celles d'Hatnoub ou d'Assouan. Des inscriptions dédicatoires comprenant des formules laudatives classiques en l'honneur de pharaon témoignent là aussi de l'activité intense qui régnait alors dans l'ensemble des nomes.

Si l'agrandissement, le renouvellement ou l'embellissement de ces temples et sanctuaires sont encore des commandes royales, il n'en reste pas moins que les traces qui en subsistent aujourd'hui démontrent l'emploi de plus en plus systématique de la pierre pour les édifices ce que l'on ne retrouve pas aux époques précédentes dont les sanctuaires divins faits essentiellement de matériaux périssables tels que le bois et la brique crue. Cette évolution déterminante de l'importance des cultes locaux continue au détriment du culte royal et signe définitivement l'abandon d'une certaine vision du rôle du roi à la période suivante puis auMoyen Empire. Désormais s'il reste le premier prêtre de l'Égypte, il n'est plus le seul objet du culte populaire.

Décadence et ruine de l'Ancien Empire

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La fin de laVIe dynastie coïncide avec la fin de ce que les historiens appellent l'Ancien Empire de la civilisation de l'Égypte antique. Plusieurs hypothèses ont cours sur les réelles causes de cette fin, qui apparaît souvent comme un effondrement soudain et catastrophique.

La durée du règne dePépi II est probablement une des raisons les plus citées de la chute de la dynastie. Comme souvent lorsque le règne d'un souverain s'éternise, les héritiers disparaissent avant leur père ou bien accèdent au trône à un âge déjà avancé, ne règnent que très peu de temps et ne font que retarder pour un temps la fatalité d'une crise dynastique[20].

De fait, le règne du successeur de Pépi, leMérenrê II, semble confirmer cette situation qui réunit toutes les conditions d'une succession difficile. Mort de vieillesse, détrôné ou assassiné, il disparaît sans laisser de monument et selonManéthon de Sebennytos, historien égyptien de l'époque ptolémaïque, c'est son épouse qui monte sur le trône, une reine du nom deNitocris. Selon cette légende, elle ne règne que pour venger la mort de son époux et disparaît également, laissant le pays en proie à l'anarchie.

Aucune trace de cette reine ou d'un quelconque assassinat deMérenrê II n'a été découverte à ce jour. Quand bien même, cette situation n'explique pas à elle seule l'effondrement de la royauté. Au contraire, l'accroissement des pouvoirs desnomarques, associé à la multiplication des exemptions et des immunités fiscales des temples et des fondations funéraires qui eurent lieu à compter du règne dePépi Ier, semblent être les deux principales causes de ce déclin.

D'une part l'autorité de l'État est affaiblie, mais plus grave encore, l'économie royale elle-même est de plus en plus grevée par l'entretien des innombrables prêtres funéraires et des nombreuses cités funéraires royales qui mettent à l'abri du Trésor toute une partie de la population du pays.

On sait par un papyrus écrit enhiératique datant de laPremière Période intermédiaire, soit juste après la chute de laVIe dynastie, queDjed-Sout, la ville de pyramide du complexe funéraire deTéti situé à la périphérie deMemphis, comportait encore dix-mille habitants libre d'impôts, ce qui est considérable pour l'époque[note 6],[21].

Cet exemple se répétait probablement autant de fois qu'il existait de cités analogues. Elles devaient former un vaste réseau urbain s'étalant le long de la grande nécropole royale de la capitale et attirait toute une population privilégiée en raison du statut spécial dont elle bénéficiait alors du simple fait d'être au service des anciens pharaons devenus des dieux. Ce statut, associé à celui similaire des nombreuses cités provinciales et domaines des temples qui deviennent alors de véritables potentats, menace gravement la stabilité du royaume et du même coup l'équilibre et la prospérité du pays.

Depuis peu une nouvelle hypothèse vient s'ajouter à celles déjà émises, qui peuvent avoir été toutes concomitantes et ainsi avoir précipité la chute de l'Ancien Empire : toute la région subit pendant cette période une série de sécheresses catastrophiques, affamant le pays et jetant dans le trouble l'ensemble de la société égyptienne. Ces sécheresses seraient dues à des bouleversements climatiques qui apparaissent dès laVe dynastie et dont la baisse significative des niveaux de crue du fleuve enregistrés sur laPierre de Palerme apporterait la confirmation[22]. Ce changement climatique s'étale sur plusieurs décennies et transforme peu à peu les savanes et plaines fertiles en désert aride, asséchant les lacs et les cours d'eau qui parcouraient encore les régions occidentales.

SelonManéthon toujours, laVIIe dynastie est composée de soixante-dix rois ayant régné soixante-dix jours… Cette répétition du chiffresept a une valeur symbolique forte et signifie sous la plume de l'historien-prêtre que le pays sombre alors dans l'anarchie.

L'État devenu incapable de contrôler le pays à la suite des évolutions de la société et des mœurs, ne peut plus subvenir aux besoins essentiels des habitants livrés à la famine. Le pays éclate et se morcelle en autant de régions que de principautés formées autour des grands nomes qui deviennent les seuls recours et les seuls vestiges d'une brillante civilisation.

Notes et références

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Notes

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  1. a etbEn termes de chronologie absolue, la détermination de dates exactes de début et de fin de la dynastie est un exercice périlleux du fait de l'ancienneté de la dynastie, et plusieurs chercheurs ont fait chacun des propositions ; on trouve par exemple :
  2. Manéthon de Sebennytos lui prête un règne de 94 années, ce qui paraît sans doute exagéré ; les égyptologues lui prêtent plutôt un règne d'un peu plus de 60 ans.
  3. Pas moins de six vizirs sont attestés pour le gouvernement deTéti dont la durée n'a pas excédé les douze années de règne.
  4. Voir notamment l'exemple deTéti qui donne en mariage ses filles aux principaux dignitaires du royaume à commencer par ses vizirs.
  5. Voir les reliefs dutemple funéraire de PépiIer et dePépiII.
  6. Papyrus hiératique 1116A del'Ermitage Impérial à Saint-Pétersbourg.

Références

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  1. Talletet al. 2023,p. 418.
  2. a etbPapazian 2015,p. 395.
  3. Baud et Dobrev 1995,p. 23-92.
  4. a etbBaud et Dobrev 1997,p. 35-42.
  5. Grimal 1994,p. 106.
  6. Grimal 1994,p. 114.
  7. Grimal 1994,p. 115.
  8. Pirenne 1961,p. 289-295.
  9. Pirenne 1961,p. 301-303.
  10. Pirenne 1961,p. 295-298.
  11. Aufrère et Golvin 1997,p. 132-136.
  12. Breasted 1906,p. 133.
  13. Maystre 1992,p. 61-69.
  14. Capart et Merbrouck 1930,p. 185-186.
  15. Lehner 1997,p. 138.
  16. Vallogia 1998.
  17. Wilkinson 2000,p. 110.
  18. Bakr 1989,p. 29-52 & pl.III.
  19. Kemp 1968,p. 138-141.
  20. Verner 2001,p. 373-376.
  21. Scharff 1936,p. 36.
  22. Bárta et Bezděk 2008,p. 222-223.

Bibliographie

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Voir aussi

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