Ne doit pas être confondu avecUn prince à New York ouThe King of New York.
| Titre original | A King in New York |
|---|---|
| Réalisation | Charlie Chaplin |
| Scénario | Charlie Chaplin |
| Acteurs principaux | Charlie Chaplin Dawn Addams Michael Chaplin |
| Sociétés de production | Attica-Archway |
| Pays de production | |
| Durée | 107 minutes |
| Sortie | 1957 |
Pour plus de détails, voirFiche technique etDistribution.
Un roi à New York (A King in New York) est un film sorti en1957 et réalisé parCharlie Chaplin qui en est également le principal acteur (ce sera d'ailleurs son dernier « premier rôle »). Ce film qui présente une vision ironique de certains aspects politiques et sociaux aux États-Unis fut produit en Europe à la suite de l'exil de Chaplin en 1952 ; il ne sortit en Amérique qu'au début des années 70.
Le film s'ouvre sur cette phrase :«One of the minor annoyances of modern life is a revolution » (« Parmi les petits inconvénients de la vie moderne, il y a les révolutions »).
Après une révolution dans son pays, l'Estrovie, le roi Igor Shahdov (Charlie Chaplin) fuit àNew York, où il est accueilli par son fidèle ambassadeur Jaumier, et son premier ministre Voudel. Installé à l'hôtel Ritz avec Jaumier, il se trouve rapidement ruiné, car Voudel s'enfuit enAmérique du Sud avec les fonds du trésor. Son seul projet est d'entrer en contact avec l'Atomic Energy Commission, à qui il souhaite vendre des plans visant à créer grâce à l'énergie atomique un monde idéal (il est cependant contre l'usage de labombe A).
La reine Irène, qui vit à Paris, le rejoint à New-York. Le couple s'entend bien mais leur mariage est avant tout un mariage d'état et Shadov propose à sa femme de divorcer pour mettre fin à cette situation malheureuse. La reine accepte le divorce et rentre à Paris.
Il rencontre Ann Key, qui le séduit pour le faire venir à un dîner mondain filmé retransmis à la télévision à son insu, où il révèle son expérience théâtrale et interprète le monologue d'Hamlet avec « folie et vigueur ». On lui propose par la suite de jouer dans des publicités télévisuelles, mais il refuse. Finalement, sans nouvelles de la commission atomique, il est poussé par ses problèmes d'argent à en faire quelques-unes.
Invité à visiter une école progressiste, il rencontre Rupert Macabee (Michael Chaplin), rédacteur du journal de l'école et jeune historien de dix ans, qui lui fait part de ses théories sur le passeport, les monopoles, la bombe A, comme empêchant l'homme de jouir de son droit naturel. Bien que Rupert dise ne croire en aucune forme de gouvernement, ses parents sont des instituteurscommunistes.
Les parents de Rupert, sont arrêtés et le jeune garçon, errant dans les rues, rencontre Shadov devant son hôtel. Le roi l'invite à monter se réchauffer, Rupert se réfugie dans sa suite où il se fait passer pour son neveu. Alors que Shadov et Jaumier sortent lui acheter des vêtements, les membres de la commission atomique, qui répondent enfin aux tentatives de prise de contact, se rendent à l'hôtel où ils sont seuls avec l'enfant, qui les scandalise par un virulent discours communiste. Lorsque Shadov et Rupert se retrouvent seul, la télévision diffuse un reportage montrant l'audition des parents Macabee par laCommission des activités antiaméricaines, chargée de démasquer les communistes. Dénoncés par l'un de leurs camarades, ils risquent d'être condamnés à une peine de prison.
Rupert est ramené à son école par un officier fédéral. La télévision diffuse la nouvelle du lien entre le fils de militants communistes et le roi, et déforme la nouvelle en accusant le roi d'être à la solde des communistes et de faire partie d'un réseau d'espionnage atomique. Shahdov est convoqué à une audiencemaccarthyste. Il est lavé de tout soupçon, mais décide de quitter les Etats-Unis et pour s'installer en Europe. Il fait ses adieux à Ann Key, et reçoit un télégramme de la reine qui semble éprouver de l'amour pour lui et souhaite renoncer au divorce. Il a également promis à Rupert de venir le voir avant son départ. Il se rend à l’école, et apprend que Rupert a cédé à la pression et dénoncé les camarades de ses parents en échange de leur libération. L'enfant fond en larme devant Shadov, qui lui dit de se consoler et l'invite à lui rendre visite en Europe avec ses parents. Le film se termine sur Shadov et Jaumier dans l'avion du retour.
et dans l'ordre alphabétique
À son arrivée, Shahdov est plein d'espoirs pour cette Amérique « jeune et dynamique », il tombe vite des nues dès ses premières sorties.
Dès son arrivée à New York, le roi est perturbé par la manière de vivre américaine : il va au cinéma ou assiste à un concert deRock 'n' roll déchaîné où de jeunes étudiantes se roulent par terre, surexcitées et, tandis que Shahdov en enjambe une pour gagner sa place, il se fait mordre sauvagement le mollet.Ensuite, voulant déjeuner dans un restaurant qui semble au premier abord très calme, le délicat pianiste se voit remplacé par un groupe de rock, dont le batteur assomme littéralement Shahdov à coups de baguettes.
Au-dessus de la baignoire de sa chambre d'hôtel, se trouve un écran de télévision diffusant des publicités, où une jeune femme au décolleté plongeant fait l'apologie d'une « excellente » bière.Puis, on assiste à la soirée filmée pour la télévision et parsemée de ridicules publicités faites par Ann, pour déodorants et pour dentifrices.L'émission passée, Shahdov devient très demandé par les publicitaires, il est demandé par « Bière royale », par « Fromage royal », mais refuse par fierté.Il finit par faire une publicité pour duwhisky, mais cette scène est ridicule, car Shahdov s'étouffe tant le whisky est mauvais. Finalement, Ann veut absolument le faire jouer dans une publicité pour hormone et dévoile un trucage publicitaire bien connu : elle veut prendre Shahdov en photo avant et après lifting, afin de faire croire que ce sont les hormones qui l'ont rendu plus jeune.
Les trois bandes annonces de cinéma sont semblables à des affiches de propagande : « vous irez voir ce film ». Les trois films ainsi présentés sontL'assassin a une âme,Le Retour de la Terreur, etHomme ou Femme, ce dernier parodie d'ailleurs le filmLouis ou Louise.On remarque de nombreux portraits satiriques d'acteurs et de personnages médiatiques de l'époque, commeSophie Tucker dans la scène du dîner.
Lemaccarthysme est également vivement critiqué, d'ailleurs Chaplin fut un des premiers à le critiquer[1]. Les jurés cherchent à tout prix à inculper les accusés pour « outrage au jury », ce en quoi Shahdov se venge involontairement en les arrosant avec une pompe à incendie. Le chantage subi par le jeune garçon, dans le but de lui soutirer des informations sur ses parents, achève de donner une image négative des maccarthystes.
On peut voir un lien direct entre l'histoire du personnage Shahdov et Chaplin lui-même, en effet, tout juste débarrassé des problèmes de censure posés par le Breen Office (branche de la Légion de la Décence) pour son filmMonsieur Verdoux[2], il fut convoqué par laCommission des activités anti-américaines, alors la Ligue catholique essaya d'empêcher la projection du film[2] et la presse se déchaîna. Il parvint cependant à finirLes Feux de la rampe (Limelight) avant de quitter l’Amérique en septembre1952 sous la contrainte[1],[3]. On peut également voir un rapprochement entre les parents du jeune garçon et lesépoux Rosenberg[2], qui furent condamnés à mort alors que leur culpabilité n'était pas prouvée.
Il est intéressant de comparerUn roi à New York avec un film antérieur,Le Kid dont l'affiche est partagée avec un enfant, victime d’une société malade. DansLe Kid, l’injustice de la société prend la forme d’une privation physique. DansUn roi à New York, ce que l’enfant subit est bien pire : son honneur, sa conscience et son âme sont blessés[1].Le rôle du jeune garçon était d’une importance capitale : à l'instar deJackie Coogan dansLe Kid, il partageait pratiquement la vedette avec Chaplin. C’est au dernier moment que Chaplin choisit son fils aîné,Michael, alors âgé de dix ans. Les parents de Michael envisagèrent de déguiser son identité sous le pseudonyme de John Bolton[1], mais l’enfant insista pour garder son propre nom de Michael Chaplin.
François Truffaut, dans son livreLes Films de ma vie, fait un rapprochement entreUn roi à New York et la Bible elle-même[4].
Au départ, le film devait être une comédie musicale, mais vite il sembla à Chaplin que la gravité du sujet abordé ne permettait pas un genre si léger[5]. Mis à part cela, tandis qu'enAmérique il possédait son propre studio et ses propres employés avec lesquels il était habitué à travailler, il se retrouve seul et sans aide aucune enEurope[1]. Ainsi, le tournage lui coûtant très cher, il réalisa le film en un temps qui lui semblait exceptionnel, douze semaines[1]. L’action se déroule à New York, mais Chaplin fut obligé d’utiliser des extérieurs de Londres[1],[5]. Il engagea un des grands opérateurs de l’histoire du cinéma,Georges Périnal[1], mais qui était très occupé et ne put accorder toute l'attention que le film méritait.
Le film fut bien reçu en Europe[5], mais le retard de la sortie américaine handicapa sévèrement son impact commercial, d'autant plus qu'il était interdit aux journalistes américains d'avoir accès à la copie du film[5]. De nos jours, les critiques sont toujours très divisés à propos de la qualité du film : tandis que certains le jugent négativement, d'autres le considèrent comme le chef-d'œuvre de Chaplin. Cependant de manière générale les critiques s'accordent à louer l'aspect délivré de toute contrainte du film, à l'exemple de Kenneth Tynan voyant un mérite dans le fait que : « Personne n’a soumis le scénario à un de ces ‘polissages’ qui sont l’euphémisme utilisé dans l’industrie pour signifier qu’on a raboté les rugosités et limé les dents acérées… Un film libre et fruste sera toujours préférable à un film élégamment enchaîné. »[1].