Zones d'endémie en 2000 (rouge : endémie forte, marron : endémie moyenneGroupe de patients convalescents (après une typhoïde), sur le pont d'un navire-hôpital (Archives médicales militaires des États-Unis) ; fin duXIXe siècle ou début duXXe
D'après l'Organisation mondiale de la santé, entre 11 et 21 millions de personnes en seraient atteintes chaque année dans le monde, et 128 000 à 161 000 en mourraient[1].
De à, une augmentation marquée dans les notifications des infections àSalmonella paratyphi A chez les voyageurs de retour duCambodge s'est produite en France. Une enquête a révélé 35 cas sans source commune : 21 en France, 5 en Allemagne, 3 aux Pays-Bas, 1 en Norvège, 1 au Royaume-Uni, 4 en Nouvelle-Zélande[2].
La contamination se fait par l'ingestion de viandes peu cuites, et de boissons ou aliments souillés par les selles d'une personne infectée, malade ou non (porteur sain). La typhoïde a rapidement régressé en France et en Europe à la suite de lajavellisation de l'eau de boisson généralisée — du moins en ville — à partir de 1910[3].
La maladie est quasiment absente des pays développés, mais reste fréquente dans les pays en développement d'Asie, d'Afrique et d'Amérique latine[4]. Le germe le plus souvent responsable resteSalmonella Typhi, près de dix fois plus fréquemment retrouvé que lesSalmonella Paratyphi.
Une particularité épidémiologique de ces infections est qu’il existe desporteurs sains de ces bactéries. En effet, après guérison d’une fièvre typhoïde chronique 2 à 5 % des individus continuent à héberger desSalmonella Typhi (essentiellement au niveau de lavésicule biliaire) qui sont excrétées épisodiquement dans les selles et qui peuvent être donc à l’origine de cas secondaires[4].Mary Mallon, également connue sous le nom de « Mary Typhoïde » (Typhoid Mary), fut la première porteuse saine reconnue du bacille de la typhoïde.
unefièvre atteignant un plateau à40 °C, sans accélération dupouls : on parle d'une dissociation pouls-température ou de fièvre paradoxale (retrouvée également dans la brucellose et la légionellose) ;
de possibles saignements de nez (épistaxis), une langue blanchâtre (ditesaburrale) ;
douleurs abdominales, diarrhée ou constipation, abdomen augmenté de volume et tendu (météorisme) ;
un état de stupeur et d’abattement extrême outuphos.
Le malade est prostré, la prostration pouvant aller jusqu'à la torpeur, le délire, et à des signes digestifs intenses (diarrhées). C’est la destruction des salmonelles qui, libérant une substance toxique, l'endotoxine, provoque des ulcérations responsables d'hémorragies et de perforations digestives. Cette phase est responsable des complications qui peuvent entraîner le décès dans 30 % des cas en l'absence de traitement.
Le germe n'est retrouvé dans le sang (hémoculture) que dans 60 % des cas. Il peut être retrouvé de manière inconstante dans les selles et dans les urines.
Le bilan sanguin standard ne montre que des anomalies non spécifiques : concentration habituellement normale des leucocytes (globules blancs) qui sont parfois diminués (leucopénie), parfois diminution du nombre deplaquettes sanguines, signalant des formes graves.
La recherche d'anticorps dirigés contre lesantigènes O et H des salmonelles (test de Widal) ne permet pas de distinguer une infection actuelle d'une atteinte ancienne et guérie. Il existe depuis d'autres tests plus spécifiques, mais de réalisation difficile dans un pays du Sud.
Le germe était initialement sensible auchloramphénicol, mais de nombreuses résistances apparurent dans les années 1970, et ce traitement, aux nombreux effets secondaires, a été progressivement abandonné. De même, des résistances à d'autres antibiotiques (cotrimoxazole etamoxicilline) sont apparues dans les années 1980.
Une fois le malade hospitalisé et isolé, le traitement consiste en l'administration defluoroquinolones de deuxième génération ou deceftriaxone. La réhydratation, souvent par voie intraveineuse, est impérative pour compenser les pertes liquidiennes secondaires à la diarrhée. Un traitement contre la fièvre (antipyrétique) peut parfois être nécessaire. De nombreuses souches en Inde et au Pakistan sont actuellement résistantes aux fluoroquinolones de deuxième génération (ciprofloxacine) et à la ceftriaxone. En revanche, on ne connaît pas de résistance à l'azithromycine[5].
La prévention passe par l'amélioration des conditions d'hygiène dans les pays d'endémie et par lavaccination. Les visiteurs doivent se méfier de l'eau locale et de la nourriture crue.
Il est important de respecter les mesures d’hygiène classiques : lavage fréquent des mains à l’eau et au savon, principalement après chaque passage aux toilettes et avant toute manipulation d’aliments.
Dans l’entourage du malade : nécessité de dépister les porteurs sains par la pratique decoprocultures afin d’éviter une dissémination de l’infection, principalement chez les personnes travaillant dans le secteur agroalimentaire, en collectivités de jeunes enfants ainsi que chez le personnel soignant.
Conseils supplémentaires aux voyageurs dans des zones endémiques : veiller à ne consommer que des aliments cuits et de l’eau minérale capsulée (décapsulée devant soi) ou de l’eau préalablement bouillie ou purifiée par adjonction de pastille de chlore[6].
En 1888,André Chantemesse (créant le sérum de Chantemesse) etFernand Widal démontrent la possibilité d'un vaccin contre la typhoïde[7] qui sera développé par SirAlmroth Wright en 1896 (Pfeiffer lui en disputera l'antériorité[8]). Peu avant la Première Guerre mondiale, une loi du 28 mars 1914 impose la vaccination TAB (vaccination contre la typhoïde et lesparatyphoïdes A et B) ; ce vaccin avait été mis au point en 1896 par Almroth Wright en Angleterre et en 1909 par André Chantemesse etHyacinthe Vincent en France.Alexandre Besredka proposera une vaccinothérapie.
Levaccin contre la typhoïde a servi dans le passé[9], et encore récemment[10], comme agent de lapyrétothérapie.
La vaccination se fait en une seule dose. La protection est active 10 à 14 jours après l'injection et elle dure 3 ans.
Le vaccin est recommandé pour les voyageurs devant effectuer un séjour prolongé ou dans de mauvaises conditions, dans des pays où l’hygiène est précaire.
En population générale, la vaccination systématique n’est recommandée en aucun point du territoire français ; elle ne pourrait être envisagée que dans des situationsépidémiques locales particulières[6]. Toutefois, à l'époque où existait leservice militaire la vaccination était systématique pour les nouvelles recrues.
Le vaccin contre la typhoïde disponible en France sous le nom commercial deTyphim Vi , est de type « polyosidique non conjugué », c’est-à-dire unvaccin à sous-unités obtenu exclusivement à partir de polysaccharides de lacapsule bactérienne deSalmonella Typhi. Ce vaccin injectable (une seule injection) confère une protection d’environ 70 % contre la fièvre typhoïde durant au moins trois ans. Il peut être administré à partir de l’âge de deux ans[12].
Un vaccin combiné contre typhoïde ethépatite A existe également, commercialisé sous le nom deTyavax. Il est administrable à partir de 16 ans[12].
Un vaccin vivant atténué existe, commercialisé sous le nom deVivotif. La souche deSalmonella Typhi Ty21a estdélétée pour la régionaro A pour éliminer son caractère pathogène. Elle estauxotrophe. Le vaccin est administrable à partir de l'âge 5 ans, conditionné engélules gastro-résistantes à avaler[12].
Daniel Faget,La découverte d'un risque sanitaire lié à l'alimentation : fièvre typhoïde et consommation de coquillages en Méditerranée du milieu du XIXe siècle à la Seconde Guerre mondiale,p. 345-363, tome 55, fascicule 221, 2005(lire en ligne)