| Langue | Allemand |
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| Signé | Berlin-Est |
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| Effet | (Ratification par leBundestag pour la RFA le et par laVolkskammer pour la RDA le) |
| Expiration | (signature dutraité d'union entre la RFA et la RDA) |
| Parties | RFA | RDA |
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| Signataires | Egon Bahr | Michael Kohl |
| Ratifieurs | Bundestag | Volkskammer |
Letraité sur les bases des relations entre laRépublique fédérale d'Allemagne et laRépublique démocratique allemande, communément appelétraité fondamental (enallemand :Grundlagenvertrag), normalise les relations entre ces deux États sans toutefois aller jusqu'à une reconnaissance complète. Cetraité est signé le àBerlin-Est, dans le contexte général de ladétente Est-Ouest et dans le cadre plus spécifique de la politique d'ouverture à l'Est, l'Ostpolitik, conduite par le chancelierWilly Brandt. Il entre en vigueur le.
Il constitue un compromis entre l'objectif de la RDA d'obtenir une reconnaissance juridique complète et la volonté de la RFA de ne pas renoncer au principe d'unité de la nation allemande dans la perspective ultime de laréunification.
Par ce traité, les deux États allemands reconnaissent mutuellement leur existence dans leurs frontières héritées des accords deYalta et dePotsdam conclus entre lesAlliés[a] à la fin de laSeconde Guerre mondiale. Cet accord met fin à ladoctrine Hallstein qui veut que seule la RFA soit habilitée à représenter l’ensemble de l'Allemagne.
Pour des articles plus généraux, voirDétente (guerre froide),Ostpolitik etCrise de Berlin (1958-1963).
La négociation du traité fondamental s'inscrit dans l'Ostpolitik du chancelier ouest-allemandWilly Brandt. Elle concrétise la proposition qu'il formule dans sa déclaration gouvernementale du :« Vingt ans après la fondation de la République fédérale d'Allemagne et de la RDA, nous devons empêcher un développement divergent de la nation allemande et par conséquent nous devons en arriver à une coexistence concertée en vue de parvenir à une situation où les deux Allemagnes vivront l'une avec l'autre... Le gouvernement fédéral poursuit la politique introduite en décembre 1966 et offre de nouveau au conseil des ministres de la RDA des négociations bilatérales sans discrimination au plan des gouvernements, négociations qui devraient conduire à une collaboration fondée sur un traité. Une reconnaissance en droit international de la R.D.A. par le gouvernement fédéral ne peut être envisagée. Même si deux États existent en Allemagne, ils ne sont pas, pour autant, étrangers l'un pour l'autre ; leurs relations ne peuvent être que d'une nature particulière. »[1].

Le,Willy Brandt, etWilli Stoph, le numéro deux du régime est-allemand, se rencontrent àErfurt en RDA[2],[3]. Il s'agit là de la première rencontre entre dirigeants allemands de l'Ouest et de l'Est. Une deuxième rencontre a lieu le, cette fois àCassel en territoire ouest-allemand. Ces rencontres ne débouchent pas sur des résultats concrets mais donnent corps à l'offensive diplomatique annoncée par Willy Brandt. Elles symbolisent déjà une forme de reconnaissance par la RFA de l'existence de deux états allemands, et ouvrent ainsi la porte à des négociations directes entre Bonn et Moscou auxquelles Brandt va donner la priorité. Ces dernières aboutissent rapidement à la signature dutraité de Moscou entre l'URSS et la RFA le parBrejnev et Brandt[4].

La concrétisation des ouvertures faites par la RFA à la RDA prend du temps. Leparti communiste au pouvoir en RDA a une attitude ambivalente face à la nouvelle politique ouest-allemande. D'un côté, il craint que Moscou y voie une occasion de relancer l'idée d'une Allemagne réunifiée mais neutre, de l'autre il y voit l'occasion d'aboutir à une reconnaissance complète de l'État est-allemand. Le développement des relations politiques et économiques entre l'URSS et laRFA faisant suite à la conclusion dutraité de Moscou, ainsi que les négociations surBerlin entre les quatre puissances[a] incitent le dirigeant est-allemandWalter Ulbricht à se déclarer prêt en octobre 1970 à des échanges de vues avec le gouvernement fédéral. Le refus de tout compromis aurait inévitablement conduit la RDA à l'isolement politique en Allemagne et à l'étranger[5].
En parallèle, les quatre anciens alliés de laSeconde Guerre mondiale mènent depuis mars 1970 des négociations en vue de mettre un terme définitif aux désaccords existant entre eux relatifs au statut deBerlin et demandent qu'un accord de transit versBerlin-Ouest soit négocié directement entre les deux Allemagnes[6].Egon Bahr pour la RFA et Michael Kohl pour la RDA entament le des pourparlers en vue de la conclusion d'un traité entre les deux pays et d'un accord de transit vers Berlin-Ouest. Ces négociations ne marquent que peu de progrès durant les mois suivants[5].
Aussi, prenant aussi prétexte de la situation économique difficile de la RDA,Erich Honecker s'assure du soutien de Moscou et remplaceUlbricht le à la tête de la RDA[7]. Le, les négociateurs des quatre puissances concluent unaccord quadripartite sur Berlin, dont l'entrée en vigueur est toutefois conditionnée par le bon aboutissement des autres négociations en cours. Désireux d'être aligné avec Moscou, Honecker débloque les discussions avec la RFA qui aboutissent le à la signature de l'accord inter-allemand de transit entre la RFA et Berlin-Ouest[8],[9].
Les évènements s'accélèrent au printemps 1972 avec la ratification dutraité de Moscou le 17 mai 1972 par la RFA, la signature du traité sur la circulation entre les deux Allemagnes le 26 mai 1972, et la signature formelle de l'accord quadripartite sur Berlin le 3 juin 1972. Les négociations sur le traité relatif aux relations entre la RFA et la RDA reprennent le 15 juin 1972 avec la volonté d'aboutir rapidement. Les négociateurs parviennent à un accord le 8 novembre 1972. La signature officielle intervient le 21 décembre 1972[5].
Cet accord permet aux quatre puissances de prendre acte du rapprochement entre les deux États allemands. Elles publient une déclaration par laquelle elles manifestent leur identité de vue concernant l'admission à l'ONU des deux États allemands, tout en précisant que cette admission n'affectera en aucune façon les droits et responsabilités des quatre puissances sur l'Allemagne ni les accords, décisions et pratiques quadripartites correspondants qui s'y rattachent »[10].

Par le traité signé le les deux États, la RFA et la RDA, se considèrent mutuellement comme égaux en droit et entérinent les frontières existantes issues de laSeconde Guerre mondiale. Cependant, comme la RFA ne peut pas aller jusqu'à renoncer à la perspective de laréunification de l'Allemagne, qui aurait rendu impossible sa ratification par leBundestag, le traité mentionne explicitement les divergences de vue entre les deux États sur« des questions de principe, dont la question nationale » et pose deux restrictions à la reconnaissance des deux États : le traité ne vaut pas reconnaissance en droit international et il ne sera pas procédé à l'échange d'ambassadeurs mais seulement de représentants permanents, étant posé que pour la RFA, la RDA n'est pas un État étranger mais un deuxième État allemand[11]. Ces subtilités entretiennent une certaine ambiguïté juridique sur l'interprétation exacte de la portée politique du traité, encore accentuée par la lettre relative à l'unité allemande adressée par la RFA à la RDA le jour de sa signature[12].
Le processus de ratification en RFA est facilité par la nette majorité dont dispose la coalitionSPD/FDP auBundestag depuis lesélections de novembre 1972. Le débat auBundestag commence le 15 février 1973 par une déclaration duchancelier Willy Brandt[13] dans laquelle il souligne les résultats positifs déjà enregistrés par lapolitique d'ouverture à l'Est qu'il mène depuis 1969, puis affirme que« ladétente en Europe est inimaginable sans la participation des deux États allemands » car« notre vie est directement liée au fait que l'Allemagne est divisée et que la ligne de démarcation est devenue une frontière d'État ». Il poursuit en réaffirmant l'ancrage à l'Ouest de la RFA et son appartenance à l'Alliance atlantique dont sa sécurité dépend, et sa conviction que« ce traité doit permettre d'éviter que les deux parties de notre nation ne s'éloignent l'une de l'autre ». Le vote du Bundestag intervient finalement le. Le traité est validé par 268 voix pour et 217 voix contre, celles de l'oppositionCDU-CSU[14].
Le gouvernement fédéral procède à l'échange de notes avec la RDA le 20 juin 1973, le traité entre en vigueur le, soit six mois après sa signature.
Le traité est loin de mettre fin aux divergences d'intérêts et de points de vue qui opposent les deux États depuis leur création en 1949. Ses signataires en sont conscients :Egon Bahr déclare le jour même de la ratification par le Bundestag« Bisher hatten wir keine Beziehungen, jetzt werden wir schlechte haben – und das ist der Fortschritt » (« Jusqu'à présent, nous n'avions pas de relations, maintenant nous en aurons de mauvaises — et c'est cela le progrès »)[15].
Après le vote du parlement fédéral, leBundestag, en faveur de la loi d'approbation du traité, leLand de Bavière, dirigé par laCSU, dépose un recours au Tribunal constitutionnel fédéral le 28 mai 1973. Après deux mois d'empoignade politico-juridique, le Tribunal rend le 31 juillet un jugement qui n'invalide pas le traité mais en donne une interprétation assez éloignée de l'esprit dans lequel Willy Brandt et le SPD souhaitent inscrire les échanges avec la RDA.
Rendu par référence à laLoi fondamentale de 1949, le jugement dispose qu'aucun organe constitutionnel de la RFA ne peut renoncer à l'objectif de restauration de l'unité de l'État allemand et que tous sont tenus de travailler à la réalisation de cet objectif dans leurs politiques. Ils sont tenus de constamment réaffirmer le droit à la réunification et s’abstenir de faire quoi que ce soit qui pourrait l'empêcher. Le jugement rappelle aussi que l'article 16 de la Loi fondamentale selon lequel« la nationalité allemande ne peut pas être retirée [...] » implique que les citoyens allemands au sens de la Loi fondamentale ne sont donc pas uniquement des citoyens de la République fédérale d'Allemagne[11],[16].
Le traité proprement dit comprend un préambule et dix articles. Il est complété par des lettres et documents annexes[17],[18].
Le préambule pose d'entrée l'existence de deux États allemands dans leurs frontières actuelles — issues de laSeconde Guerre mondiale — et inscrit le traité dans l'objectif de contribuer« à la détente et à la sécurité en Europe » et de« créer, pour le bien-être des hommes dans les deux Etats allemands, les conditions de la coopération entre la RFA et la RDA ». Il acte aussi le désaccord sur la question de l'unicité de la nation allemande.
Les Articles 2 et 3 inscrivent les relations des deux États dans le cadre de laCharte des Nations unies.
Par l'Article 5, la RFA et la RDA déclarent qu'elles« contribueront à la sécurité et à la coopération en Europe, (qu') elles appuieront les efforts visant à réduire les forces et les armements en Europe, (et) les efforts servant à la sécurité internationale et visant à la limitation des armements et au désarmement, notamment dans le domaine des armes nucléaires et autres armes de destruction massive ».
Par l'Article 7, la RFA et la RDA se déclarent« prêtes à régler des questions pratiques et humanitaires au fur et à mesure de la normalisation de leurs relations ».
L'Article 8 prévoit que les deux États échangeront des représentations permanentes.
La signature du traité s'accompagne le même jour de celle de documents complémentaires[17] :
Conformément à l'article 8 du traité, les représentations permanentes commencent leurs travaux le 2 mai 1974. Günter Gaus est accrédité en tant que représentant permanent de la République fédérale auprès de la RDA et Michael Kohl en tant que représentant permanent de la RDA en République fédérale.
Les deux États demandent leur admission auxNations unies dont ils deviennent les 133e et 134e membres le. La signature du traité met fin à l'isolement diplomatique de la RDA.
Les accords complémentaires suivants sont conclus au cours des années suivantes :
La participation de la RDA et de la RFA auxjeux olympiques est symbolique de l'affrontement auxquels les deux États allemands se livrent à travers le sport sur le plan de leur image et de leur visibilité internationales. En conséquence d'une décision duCIO de 1965, la RDA aligne sa propre équipe depuis les JO d'hiver (Grenoble) et d'été (Mexico) de 1968, mais avec encore ledrapeau et l'hymne allemand commun utilisés lors des trois précédentes éditions. À la faveur de la reconnaissance de l'existence de deux États dans le traité fondamental, la RFA admet que la RDA ait comme la RFA son drapeau et son hymne dès lesjeux de 1972 à Münich[21].
Faisant suite à lachute du mur de Berlin, laréunification de l'Allemagne s'opère très rapidement en 1990. Letraité d'union (Einigungsvertrag) signé le établit les modalités de la fusion des deux États allemands et rend sans objet le traité fondamental.