Tableau périodique des éléments au28 novembre 2016.Avec davantage de détails par élément.
Letableau périodique des éléments, également appelétableau ou table de Mendeleïev,classification périodique des éléments ou simplementtableau périodique, représente tous leséléments chimiques, ordonnés parnuméro atomique croissant et organisés en fonction de leurconfiguration électronique, laquelle sous-tend leurs propriétés chimiques.
La conception de ce tableau est généralement attribuée au chimiste russeDmitri Ivanovitch Mendeleïev, qui, en 1869, construisit une table, différente de celle qu'on utilise aujourd'hui[a], mais semblable dans son principe, dont le grand intérêt était de proposer une classification systématique des éléments connus à l'époque en vue de souligner lapériodicité de leurs propriétés chimiques, d'identifier les éléments qui restaient à découvrir, voire de prédire certaines propriétés d'éléments chimiques alors inconnus.
Le tableau périodique a connu de nombreux réajustements depuis lors jusqu'à prendre la forme que nous lui connaissons aujourd'hui. Il est devenu un référentiel universel auquel peuvent être rapportés tous les types de comportementsphysiques etchimiques des éléments. Depuis la mise à jour de l'UICPA du28 novembre 2016, sa forme standard comporte 118 éléments[1], allant de l'hydrogène1H à l'oganesson118Og.
Ce tableau est la représentation la plus usuelle de la classification des éléments chimiques. Certains chimistes ont proposé d'autres façons de classer les éléments, mais celles-ci restent bornées au domaine scientifique.
Parmi les 118 éléments chimiques connus, 83 sont ditsprimordiaux parce qu'ils possèdent au moins unisotope stable ou suffisamment stable pour être plus ancien que laTerre. Parmi eux, trois sontradioactifs : l'uranium92U, lethorium90Th et lebismuth83Bi ; la radioactivité de ce dernier est cependant si faible qu'elle n'a été mise en évidence qu'en 2003[5].
Les 24 derniers éléments sont ditssynthétiques, car ils n'existent pas naturellement dans l'environnement terrestre et sont produits artificiellement dans lesréacteurs nucléaires ou expérimentalement en laboratoire. On peut cependant trouver certains d'entre eux dans la nature à la suite d'essais nucléaires atmosphériques ou d'accidents nucléaires, comme c'est le cas, dans certaines zones contaminées, pour l'américium95Am, lecurium96Cm, leberkélium97Bk et lecalifornium98Cf. Hors de notre planète, ces éléments, ainsi que l'einsteinium99Es, sont peut-être produits naturellement parprocessusr[6] lors d'explosions desupernovae, comme on l'a longtemps pensé de l'isotope254Cf[7],[8],[9], hypothèse cependant réfutée depuis lors[10] ; ils auraient également été détectés dans lespectre de l'étoile de Przybylski[11].
Dans la mesure où les propriétés physico-chimiques des éléments reposent sur leurconfiguration électronique, cette dernière est sous-jacente à l'agencement du tableau périodique. Ainsi, chaque ligne du tableau, appeléepériode, correspond à unecouche électronique, identifiée par sonnombre quantique principal, notén : il existe sept couches électroniques connues à l'état fondamental, donc sept périodes dans le tableau périodique standard, numérotées de 1 à 7. Chaque période est elle-même scindée en un à quatreblocs, qui correspondent auxsous-couches électroniques, identifiées par leurnombre quantique secondaire, notéℓ : il existe quatre types de sous-couches électroniques connues à l'état fondamental, notéess,p,d etf (ces lettres viennent d'abréviations utilisées initialement enspectroscopie). Chacune de ces sous-couches contient respectivement 1, 3, 5 et 7orbitales atomiques, identifiées par leurnombre quantique magnétique, notémℓ. Enfin, chaque orbitale est occupée par au plus deux électrons, identifiés chacun par leurnombre quantique magnétique de spin, notéms.
En vertu duprincipe d'exclusion de Pauli, selon lequel deuxfermions (ici, deux électrons) d'un même système (ici, un même atome) ne peuvent partager le mêmeétat quantique, les sous-couches électroniquess,p,d etf ne peuvent contenir chacune qu'au plus 2, 6, 10 et 14 électrons respectivement ; dans le tableau périodique, elles matérialisent ainsi lebloc s, lebloc p, lebloc d et lebloc f, contenant respectivement 2, 6, 10 et 14 éléments par période.
C'est la succession des sous-couches électroniques de chaque période qui détermine la structure du tableau périodique en blocs, chaque période étant définie par le retour d'une sous-couches suivant une sous-couchep de la période précédente, avec un nombre quantique principal incrémenté d'une unité.
Larègle de Klechkowski est observée pour plus de 80 % des 103éléments dont laconfiguration électronique à l'état fondamental est connue avec précision, mais une vingtaine d'éléments y font exception. L'état fondamental est en effet, par définition, celui dont l'énergie est la plus faible, et lenombre quantique magnétique de spin des électrons entre en jeu pour déterminer cette énergie : plus le spin résultant des électrons d'uneorbitale atomique est élevé, plus la configuration de ces électrons sur cette orbitale est stable (règle de Hund). Il s'ensuit que, pour les éléments dublocd et dublocf (métaux de transition,lanthanides etactinides), il est énergétiquement moins favorable de suivre la règle de Klechkowski que de favoriser l'occupation impaire des sous-couches les plus externes lorsque la couched ouf est vide, à moitié remplie ou entièrement remplie, car l'écart d'énergie entre ces sous-couches est inférieur au gain d'énergie induit par la redistribution des électrons de telle sorte que leur nombre quantique magnétique de spin résultant soit le plus élevé — dans le tableau qui suit, les distributions d'électrons irrégulières sont indiquées en gras :
( * ) Lenickel présente en réalité deux configurations électroniques correspondant à des énergies totales qui se recouvrent. Les manuels notent généralement la configuration régulière[Ar] 4s2 3d8, étayée par les données expérimentales, car elle contient le niveau d'énergie le moins élevé. Cependant, c'est la configuration irrégulière[Ar] 4s1 3d9 qui présente l'énergie moyenne la moins élevée des deux, de sorte que cette configuration est souvent retenue dans les calculs.
Le grand intérêt de la classification périodique est d'organiser les éléments chimiques de telle sorte que leurs propriétés physico-chimiques puissent être largement prédites par leur position dans la table. Ces propriétés évoluent différemment selon qu'on se déplace verticalement ou horizontalement dans le tableau.
Ungroupe désigne une colonne du tableau périodique. Chacun des 18 groupes du tableau périodique standard constitue souvent un ensemble d'éléments aux propriétés distinctes des groupes voisins, notamment aux extrémités gauche et droite du tableau périodique (c'est-à-dire dans les blocss etp), où ils se sont vu attribuer des noms d'usage au fil du temps :
Si les termespnictogène etchalcogène sont aujourd'hui assez désuets, les quatre autres en revanche sont encore très employés car ils se confondent usuellement avec desfamilles de même nom :
Hormis l'hydrogène, les éléments du premiergroupe du tableau périodique constituent lafamille desmétaux alcalins. Il s'agit de métaux peu denses de couleur argentée et à bas point de fusion, plutôt mous à température ambiante, formant descomposés ioniques avec leshalogènes et chimiquement très réactifs — ils réagissent violemment avec l'eau pour donner deshydroxydes qui sont desbases fortes — de sorte qu'on ne les trouve jamais sous forme élémentaire dans le milieu naturel.
Outre les analyses par lignes et par colonnes, le tableau périodique permet également d'établir desrelations diagonales entre certains éléments chimiques des deuxième et troisième périodes qui se trouvent en diagonale les uns par rapport aux autres dans le tableau. Il s'agit toujours de la direction diagonale allant du haut à gauche vers le bas à droite, car parcourir une période vers la droite et descendre le long d'une colonne se traduisent de façon opposée sur lacouche de valence des atomes (respectivement, diminution et augmentation durayon atomique, d'où augmentation et diminution de l'électronégativité). Il s'ensuit certaines similitudes entre éléments diagonaux, qui pourtant ne partagent ni la même période ni le même groupe : la distribution desmétalloïdes dans le tableau périodique illustre cet effet.
D'une manière générale, lerayon atomique tend à décroître lorsqu'on parcourt unepériode de gauche à droite, depuis lesmétaux alcalins jusqu'auxgaz nobles, et à croître lorsqu'on parcourt ungroupe de haut en bas. Il croît brutalement lorsqu'on passe d'une période à la suivante, entre le gaz noble d'une périodeP et le métal alcalin de la périodeP + 1. Ceci s'explique très bien par lescouches électroniques constituant lesatomes, et ces observations fournissent des preuves importantes pour l'élaboration et la confirmation des théories de lamécanique quantique.
La décroissance du rayon atomique le long des périodes résulte notamment du fait que lacharge électrique dunoyau atomique augmente tout au long de chaque période, ce qui accroît l'attraction du noyau sur lesélectrons et réduit par conséquent le volume desorbitales atomiques. Lacontraction des lanthanides, observée au cours du remplissage de la sous-couche 4f, illustre très bien ce phénomène : le rayon atomique de l'osmium (élément 76) est quasiment identique à celui duruthénium (élément 44), qui lui est juste au-dessus dans le tableau. Cette particularité s'observe le long de la6e période à partir duhafnium (élément 72) jusqu'auplatine (élément 78), après lequel elle est masquée par un effetrelativiste appeléeffet de paire inerte. Un phénomène semblable s'observe également avec le remplissage des sous-couchesnd dubloc d, mais est moins marqué que celui observé avec leslanthanides, bien qu'il ait la même origine.
Le tableau ci-dessous présente lesrayons de covalence moyens mesurés pour la plupart desatomes, qui illustrent lestendances observées pour les rayons atomiques à travers le tableau périodique :
L'énergie d'ionisation, qui correspond implicitement à l'énergie de première ionisation, est l'énergie minimum nécessaire pour retirer unélectron à unatome et former uncation. L'électron retiré est le moins lié aunoyau atomique et se trouve dans lacouche de valence. L'énergie de deuxième ionisation est par conséquent l'énergie nécessaire pour retirer un deuxième électron à l'ion précédemment formé, etc. Pour un atome donné, les énergies d'ionisation successives augmentent avec le degré d'ionisation. Pour lemagnésium, par exemple, l'énergie de première ionisation est de738kJ·mol-1 pour former le cation Mg+, tandis que l'énergie de deuxième ionisation est de1 450kJ·mol-1 pour former le cation Mg2+. Cela s'explique par le fait que les électrons sont d'autant plus liés au noyau qu'ils sont dans des sous-couches intérieures, ce qui explique également que l'énergie de première ionisation croisse quand on se rapproche du haut et de la droite du tableau.
L'énergie d'ionisation fait un bond lorsqu'on tente d'arracher un électron à uneconfiguration électronique degaz noble, ce qui est par exemple le cas du magnésium ionisé deux fois Mg2+, dont la configuration électronique est très semblable à celle dunéon : l'énergie de troisième ionisation passe à7 730kJ·mol-1 pour former le cation Mg3+ et correspond à l'arrachement d'un électron de la sous-couche 2p après que les deux électrons de la sous-couche 3s ont été retirés lors des première et deuxième ionisations.
Le tableau ci-dessous représente la première énergie d'ionisation mesurée pour la plupart deséléments, ce qui permet de visualiser les variations de cette grandeur à travers le tableau périodique. On observe en particulier plusieursminima locaux autour de l'angle inférieur gauche des différentsblocs,césium etfrancium pour lebloc s,actinium pour lebloc f,lawrencium pour lebloc d etthallium pour lebloc p :
L'électronégativité est une indication de la tendance d'unatome à attirer lesélectrons. Elle dépend à la fois dunuméro atomique et de l'éloignement desélectrons de valence par rapport aunoyau atomique. Plus l'électronégativité est élevée, plus l'élément attire les électrons. Cette grandeur, déterminée par exemple par l'échelle de Pauling, suit globalement la même tendance que l'énergie d'ionisation : elle croît quand on va vers le haut et vers la droite du tableau, avec un maximum pour lefluor et un minimum pour lefrancium. Il existe cependant des exceptions à cette règle générale, qui suivent les exceptions à l'évolution durayon atomique : legallium et legermanium ont une électronégativité supérieure à celle de l'aluminium et dusilicium respectivement en raison de la contraction dubloc d. Leséléments de la4e période qui viennent immédiatement après lesmétaux de transition ont des rayons atomiques particulièrement petits, d'où une électronégativité plus élevée. On observe également que lesmétaux dugroupe du platine et lesmétaux nobles ont une électronégativité particulièrement élevée et croissante vers le bas du tableau, phénomène qu'on observe également le long dugroupeno 6.
L'affinité électronique d'unatome est la quantité d'énergie libérée lorsqu'unélectron est ajouté à un atome neutre pour former unanion. Cette grandeur varie beaucoup d'un élément à un autre, mais destendances sont perceptibles à travers le tableau périodique, présentant certaines similitudes avec l'électronégativité. Leshalogènes présentent la plus forte affinité électronique, très supérieure à celle de tous les autres éléments ; elle est maximum pour lechlore, et non lefluor, à la différence de l'électronégativité.
D'une manière générale, lesnon-métaux ont une affinité électronique plus positive que celle desmétaux, tandis que celle desgaz nobles, réagissant trop peu, n'a pas été mesurée. L'affinité électronique croît généralement le long d'une période, mais il est plus difficile de dégager une tendance le long des groupes : elle devrait décroître en descendant le long d'un groupe puisque les couches de valence sont de moins en moins liées au noyau, mais on observe expérimentalement qu'environ un tiers des éléments échappent à cette tendance, et présentent une affinité électronique supérieure à celle de l'élément situé au-dessus d'eux dans le tableau périodique ; seul le1er groupe, celui desmétaux alcalins, est caractérisé par une décroissance régulière de l'affinité électronique.
lesmétaux sont généralement dessolides brillants trèsconducteurs susceptibles de former desalliages avec d'autres métaux ainsi que descomposés ioniques avec des non-métaux ;
lesnon-métaux sont desisolants souventgazeux susceptibles de former descomposéscovalents avec d'autres non-métaux et des composés ioniques avec des métaux ;
lesmétalloïdes présentent des propriétés intermédiaires entre métaux et non-métaux, et sont situés, dans le tableau, entre ces deux catégories d'éléments.
Plus l'énergie d'ionisation, l'électronégativité et l'affinité électronique sont faibles, plus l'élément a un caractère métallique prononcé. Réciproquement, les éléments pour lesquels ces grandeurs sont élevées sont non métalliques. Les non-métaux se regroupent par conséquent autour de l'angle supérieur droit du tableau (typiquement lefluor et lechlore), tandis que la grande majorité des éléments ont un caractère métallique plus ou moins prononcé, les plus métalliques se regroupant autour de l'angle inférieur gauche (typiquement lefrancium et lecésium). Entre ces deux extrêmes, on a coutume de distinguer parmi les métaux :
lesmétaux alcalins, les plus réactifs ;
lesmétaux alcalino-terreux, réactifs à un degré moindre que les précédents ;
leslanthanides et lesactinides, dont font partie tous les métaux dubloc f ;
lesmétaux de transition, comprenant la majeure partie des métaux dubloc d ;
lesmétaux pauvres, dont font partie tous les métaux dubloc p.
Parmi les non-métaux, on peut distinguer, outre lesfamilles conventionnelles :
lesnon-métaux polyatomiques, rappelant les métalloïdes et susceptibles de présenter un caractère métallique (carbonegraphite etsélénium gris, par exemple) ;
Au-delà des lignes, des colonnes et des diagonales, leséléments sont traditionnellement regroupés enfamilles aux propriétés physico-chimiques homogènes :
famille desmétaux pauvres, parfois dits « de post-transition », dont l'étendue peut varier selon les auteurs et qui regroupe les métaux dubloc p ainsi que ceux dugroupe 12 hormis lecopernicium112Cn. ;
famille desnon-métaux, regroupant tous les éléments non métalliques n'appartenant pas aux deux dernières colonnes du tableau ;
famille deshalogènes, comprenant les quatre premiers éléments du groupe 17 ;
famille desgaz nobles, comprenant les six premiers éléments du groupe 18.
Aux extrémités gauche et droite du tableau, ces familles se confondent à peu près avec lesgroupes, tandis qu'au centre du tableau elles ont plutôt tendance à se confondre avec lesblocs, voire avec lespériodes. Ces regroupements d'éléments fondés sur leurs propriétés physiques et chimiques sont par essence imparfaits, car ces propriétés varient souvent de manière assez continue à travers le tableau périodique, de sorte qu'il est fréquent d'observer des recouvrements aux limites entre ces regroupements. Ainsi, lebéryllium est toujours classé parmi lesmétaux alcalins bien que sesoxydes soientamphotères et qu'il présente une tendance marquée à former descomposéscovalents, deux caractéristiques desmétaux pauvres comme l'aluminium. De même, leradon est toujours classé commegaz noble bien qu'il ne soitpas chimiquement inerte et tende à former descomposés ioniques, ce qui le rapproche desmétaux.
D'autres regroupements sont également en usage, par exemple :
Laconfiguration électronique des éléments est décrite de façon satisfaisante par le modèle desorbitales atomiques jusqu'au milieu de la7e période. PourZ >> 100, des effetsrelativistes deviennent significatifs sur desélectrons en interaction avec unnoyau très fortementchargé, certaines corrections induites par l'électrodynamique quantique ne peuvent plus être négligées, les approximations considérant les électrons de façon individuelle pour déterminer lesorbitales — approximation du champ central — ne sont plus valides, et des effets decouplage spin-orbite redistribuent les niveaux d'énergie, et donc lessous-couches électroniques. Il s'ensuit que la distribution des électrons autour du noyau devient délicate à modéliser pour ces éléments, et qu'on peut s'attendre à ce que leurs propriétés chimiques soient plus difficiles à prévoir.
Si les propriétés physiques et chimiques de tous les éléments jusqu'auhassium108Hs sont bien connues, seuls deux éléments denuméro atomique supérieur à 108 ont fait l'objet d'études expérimentales : lecopernicium112Cn et leflérovium114Fl ; on n'a par conséquent que très peu d'informations sur les propriétés physiques et chimiques des autres éléments de numéro atomique supérieur à 108.
Le flérovium, quant à lui, présente des propriétés ambiguës : davantagemétal que gaz noble, contrairement à ce que laissaient penser les premiers résultats obtenus en 2008[20], il serait lui aussi volatil, mais plus réactif que le copernicium, et pourrait appartenir, tout comme lui, à une nouvellefamille correspondant à des « métaux volatils », intermédiaires entre métaux et gaz nobles du point de vue de leurs propriétés d'adsorption sur l'or[21] ; dans la mesure où il s'avère chimiquement semblable au plomb, il peut être vu comme unmétal pauvre, mais ne peut en toute rigueur être rangé dans une famille d'éléments en l'état actuel de nos connaissances.
Leséléments chimiques sont identifiés dans le tableau périodique par leurnuméro atomique, qui représente le nombre deprotons que contient leurnoyau, mais il peut exister plusieursatomes différents pour un même élément chimique, différant les uns des autres par le nombre deneutrons dans leur noyau. Dans la mesure où ces atomes occupent la même case dans le tableau périodique, ils sont ditsisotopes — avec une étymologie issue dugrec ancienἴσος τόπος /ísos tópos signifiant « au même endroit ».
Les isotopes d'un élément ont généralement exactement les mêmes propriétés chimiques, car leurconfiguration électronique est identique. Mais la masse du noyau étant différente, on observe uneffet isotopique d'autant plus prononcé que l'atome est léger. C'est notamment le cas pour lelithium3Li, l'hélium2He (du point de vue de ses propriétés physiques) et surtout l'hydrogène1H.
L'isotope2H (deutérium) de l'hydrogène est suffisamment différent de l'isotope1H (protium) pour que l'UICPA admette — mais sans le recommander — l'usage d'un symbole chimique spécifique au deutérium (D) distinct de celui de l'hydrogène (H).
Dès lebismuth83Bi, tous les isotopes des éléments connus sont radioactifs. L'isotope209Bi a ainsi unepériode radioactive valant un milliard de fois l'âge de l'univers. Lorsque la période dépasse quatre millions d'années, la radioactivité produite par ces isotopes devient négligeable et présente à court terme un risque sanitaire très faible : c'est par exemple le cas de l'uranium 238, dont la période est de près de 4,5 milliards d'années et dont la toxicité est avant tout chimique[22],[23],[24], à travers notamment descomposéssolubles tels queUF6,UO2F2,UO2Cl2,UO2(NO3)2,UF4,UCl4,UO3, certains composés peu solubles tels queUO2 etU3O8 étant quant à euxradiotoxiques[25].
Au-delà deZ = 110 (darmstadtium281Ds), tous les isotopes des éléments ont une période radioactive de moins de 30 secondes, et de moins d'un dixième de seconde à partir de l'élément 115 (moscovium288Mc).
Lemodèle en couches de lastructure nucléaire permet de rendre compte de la plus ou moins grande stabilité desnoyaux atomiques en fonction de leur composition ennucléons (protons etneutrons). En particulier, des « nombres magiques » de nucléons, conférant une stabilité particulière aux atomes qui en sont composés, ont été observés expérimentalement, et expliqués par ce modèle[26],[27]. Leplomb 208, qui est le plus lourd des noyaux stables existants, est ainsi composé du nombre magique de 82 protons et du nombre magique de 126 neutrons.
Certaines théories[d] extrapolent ces résultats en prédisant l'existence d'unîlot de stabilité parmi lesnucléides superlourds, pour un « nombre magique » de 184 neutrons et — selon les théories et les modèles —114,120,122 ou126 protons ; une approche plus moderne montre toutefois, par des calculs fondés sur l'effet tunnel, que, si de tels noyaux doublement magiques sont probablement stables du point de vue de lafission spontanée, ils devraient cependant subir desdésintégrations α avec unepériode radioactive de quelques microsecondes[28],[29],[30], tandis qu'un îlot de relative stabilité pourrait exister autour dudarmstadtium 293, correspondant auxnucléides définis parZ compris entre 104 et 116 etN compris entre 176 et 186 : ces éléments pourraient avoir des isotopes présentant des périodes radioactives de l'ordre de la minute.
On ignore jusqu'à combien deprotons et d'électrons un mêmeatome peut contenir. La limite d'observabilité pratique est généralement estimée à au plusZ = 130[31], dans la mesure où l'existence des atomes superlourds se heurte à lalimite de stabilité desnoyaux[32]. Cela place la fin du tableau périodique peu après l'une des valeurs proposées pour le dernierîlot de stabilité, centré dans ce cas autour deZ = 126.
Richard Feynman releva en 1948 qu'une interprétation simple de l'équation de Dirac semi-relativiste aboutit à une impossibilité pour représenter lesorbitales atomiques lorsque le numéro atomique vautZ >1⁄α ≈ 137, où α est laconstante de structure fine : de tels atomes ne pourraient avoir d'orbitale électronique stable pour plus de 137 électrons, ce qui rendrait impossible l'existence d'atomes électriquement neutres au-delà de 137 protons ; l'élément 137 est depuis lors parfois surnommé « feynmanium »[33]. Lemodèle de Bohr donne par ailleurs une vitesse supérieure à celle de la lumière pour les électrons de la sous-couche 1s dans le cas oùZ > 137. Une étude plus poussée, prenant notamment en compte la taille non nulle du noyau, montre cependant que le nombre critique de protons pour lequel l'énergie de liaisonélectron-noyau devient supérieure à 2m0c2, oùm0 représente lamasse au repos d'unélectron ou d'unpositron, vautZcrit ≈ 173 : dans ce cas, si la sous-couche 1s n'est pas pleine, le champ électrostatique du noyau ycrée une paire électron-positron[34],[35], d'où l'émission d'un positron[36] ; si ce résultat n'écarte pas complètement la possibilité d'observer un jour des atomes comprenant plus de 173 protons, il met en lumière un facteur supplémentaire d'instabilité les concernant.
Au-delà des sept périodes standard, unehuitième période est envisagée pour classer les atomes — à ce jour inobservés — ayant plus de 118 protons. Cette huitième période serait la première à posséder des éléments dubloc g, caractérisés à l'état fondamental par des électrons sur une orbitale g. Néanmoins, compte tenu des limites à la périodicité aux confins du tableau — effetsrelativistes sur les électrons des très gros atomes — qui deviennent significatifs dès le dernier tiers de la7e période, il est peu probable que laconfiguration électronique de tels atomes obéisse aux règles observées tout au long des six premières périodes. Il est en particulier délicat d'établir le nombre d'éléments contenus dans cebloc g : larègle de Klechkowski en prédit 18, mais laméthode de Hartree-Fock en prédit 22.
Le tableau périodique étendu à la huitième période avec 22 éléments dans lebloc g pourrait ainsi présenter l'aspect suivant :
Une neuvième période est parfois évoquée, mais, compte tenu de l'incertitude réelle quant à la possibilité d'observer à terme plus d'une dizaine d'éléments nouveaux sur la huitième période, tous les éléments de numéro atomique supérieur à 130 relèventa priori de la pure extrapolation mathématique. Une variante de la table ci-dessus, proposée par Frickeet al. en 1971[37] et revue parPekka Pyykkö en 2011[38], répartit les 172 mêmes éléments sur 9 périodes, et non 8, en les distribuant de manière non périodique : les éléments139 et140 sont ainsi placés entre les éléments164 et169, dans lebloc p et non plus dans lebloc g, tandis que les éléments165 à168 sont placés sur une9e période dans lesblocs s et p.
De la toute première tentative de classification des éléments chimiques parAntoine Lavoisier en 1789 au tableau périodique deGlenn Seaborg que nous utilisons aujourd'hui, de nombreux hommes de sciences, issus d'horizons — et parfois de disciplines — différents, ont apporté chacun leur contribution, sur une période de près de deux siècles.
C'est en 1789 que le chimiste françaisAntoine Lavoisier a publié à Paris sonTraité élémentaire de chimie, présenté dans un ordre nouveau et d'après les découvertes modernes. Cet ouvrage en deux volumes a jeté les bases de la chimie moderne, en faisant le point sur les connaissances de la fin duXVIIIe siècle dans cette discipline. Il y précise notamment le concept d'élément chimique comme unesubstance simple qui ne peut être décomposée en d'autres substances, avec en corollaire la loi fondamentale de conservation de la masse de chacune de cessubstances simples au cours des réactions chimiques. Il mentionna également le fait que de nombreuses substances considérées comme simples par le passé, se sont révélées être en réalité des composés chimiques (par exemple, l'huile et le sel marin), et il précisa s'attendre à ce qu'on considère sous peu lesterres (c'est-à-dire certains minerais) comme des substances composées de nouveaux éléments.
Il publia dans cet ouvrage un tableau récapitulatif des « substances » considérées à son époque comme des éléments chimiques, en prenant soin d'établir une équivalence avec le vocabulaire hérité des alchimistes afin d'éliminer toute ambiguïté. Ce tableau, qui se voulait exhaustif et outil de référence, mentionnait ainsi, parmi les éléments chimiques, la lumière et le feu, encore considérés à cette époque comme des principes « chimiques » bien que Lavoisier lui-même ait invalidé la théorie duphlogistique :
Noms nouveaux
Noms anciens correspondants
Substances simples qui appartiennent aux trois règnes et qu'on peut regarder comme les éléments des corps[e]
Les éléments chimiques y sont classés en quatre familles :
Les éléments impondérables (gaz et autres « essences »)
Les non-métaux
Les métaux
Les « terres », à savoir des minerais (oxydes, sulfates) considérés comme corps simples.
Lechlore est désigné comme « radical muriatique », car Lavoisier considérait que tous les acides étaient desoxoacides — le nomoxygène signifie étymologiquement « formant des acides » — et cherchait donc le « radical » que l'oxygène aurait rendu acide — l,acide muriatique désignait l'acide chlorhydrique, qui ne contient cependant pas d'oxygène.
Cette classification a surtout le mérite de clarifier certaines notions fondamentales, mais ne révèle encore aucune périodicité des propriétés des éléments classés : les métaux sont ainsi recensés tout simplement par ordre alphabétique en français.
La première tentative de classification moderne des éléments chimiques revient au chimiste allemandJohann Wolfgang Döbereiner qui, en 1817, nota que la masse atomique dustrontium (88) était approximativement égale à lamoyenne arithmétique des masses atomiques ducalcium (40) et dubaryum (137), qui ont des propriétés chimiques semblables (aujourd'hui, ils sont classés parmi lesmétaux alcalino-terreux). En 1829, il avait découvert deux autres « triades » de ce type : celle deshalogènes (la masse atomique dubrome (80) étant égale à la moyenne arithmétique (81) de celles duchlore (35,5) et de l'iode (127)) et celle desmétaux alcalins (la masse atomique dusodium (23) étant égale à la moyenne arithmétique de celles dulithium (7) et dupotassium (39)).
D'autres chimistes identifièrent d'autres séries d'éléments, etLeopold Gmelin publia en 1843 la première édition de sonHandbuch der Chemie, qui mentionnait des triades, ainsi que trois « tétrades » et une « pentade » —azote,phosphore,arsenic,antimoine etbismuth, que nous connaissons aujourd'hui comme les éléments dugroupe 15 du tableau périodique.
En 1859, le chimiste françaisJean-Baptiste Dumas généralisa les triades de Döbereiner en les étendant en tétrades incluant les éléments les plus légers, définies non plus par les moyennes arithmétiques, mais par une progression similaire d'une tétrade à l'autre, par exemple :
Bien qu'en apparence similaire à celle de Döbereiner, l'approche de Dumas était potentiellement bien plus féconde, car applicable de façon pertinente à un bien plus grand nombre d'éléments : alors que les progressions arithmétiques sont restreintes à quelques groupes d'éléments, l'incrément constaté par Dumas entre éléments successifs aux propriétés similaires mesure précisément la longueur de la période qui sépare ces deux éléments — incrément d'environ 16 entre les deux premiers éléments d'une tétrade, puis incrément d'environ 48 entre deuxième et troisième éléments, puis entre troisième et quatrième éléments.
Le premier à remarquer la périodicité des propriétés chimiques des éléments fut le géologue françaisAlexandre-Émile Béguyer de Chancourtois lorsqu'il classa en 1862 les éléments chimiques alors connus en fonction de leur masse atomique déterminée en 1858 par le chimiste italienStanislao Cannizzaro. Il normalisa la masse atomique de tous les éléments en prenant celle de l'oxygène égale à 16, et, considérant que « les propriétés des éléments sont les propriétés des nombres » organisa les éléments chimiques en spirale sur un cylindre divisé en seize parties, de telle sorte que les éléments aux propriétés similaires apparaissent l'un au-dessus de l'autre.
Chancourtois remarqua alors que certaines « triades » se retrouvaient précisément alignées dans cette représentation, ainsi que la tétradeoxygène –soufre –sélénium –tellure, qui se trouvait également avoir des masses atomiques à peu près multiples de seize (respectivement 16, 32, 79 et 128). C'est la raison pour laquelle il appela cette représentation « vis tellurique » en référence au tellure. C'était la première ébauche de classification périodique des éléments. Celle-ci ne retint cependant pas l'attention de la communauté scientifique, car Chancourtois n'était pas chimiste et avait employé des termes appartenant plutôt au domaine de lagéochimie dans la publication qu'il avait adressée à l'Académie des sciences, laquelle fut éditée de surcroît sans ses schémas explicatifs, ce qui rendit le texte abscons.
D'un point de vue conceptuel, c'était une grande avancée, mais, d'un point de vue pratique, Chancourtois n'avait pas identifié la période correcte pour les éléments les plus lourds, de sorte que, dans sa représentation, une même colonne regroupait lebore, l'aluminium et lenickel, ce qui est correct pour les deux premiers, mais totalement erroné d'un point de vue chimique pour le troisième.
Dans la foulée, le chimiste anglaisJohn Alexander Reina Newlands publia en 1863 une classification périodique qui eut, elle, un plus fort retentissement (quoique tardif, eta posteriori), car il avait organisé les premiers éléments alors connus par masse atomique croissante — plus précisément, par masse équivalente croissante — dans un tableau à sept lignes en les arrangeant de telle sorte que leurs propriétés chimiques soient similaires par lignes, sans hésiter à placer deux éléments dans une même case si nécessaire pour éviter de laisser des cases vides par ailleurs.
Ce faisant, il avait identifié une nouvelle triade, dont les extrémités étaient lesilicium et l'étain, et dont l'élément médian restait à découvrir : il prédit ainsi l'existence dugermanium, en lui assignant une masse atomique d'environ 73. Mais la grande faiblesse de son travail était qu'il n'avait pas laissé de case vide dans son tableau pour accueillir notamment le futur germanium : il avait en fait cherché avant tout à classer les éléments connus dans un tableau complet sans chercher de classification plus large tenant compte de possibles éléments à découvrir, qu'il avait pourtant pressentis. De plus, comme Chancourtois, il avait un problème de périodicité, car si les éléments légers connus à l'époque avaient bien une périodicité chimique tous les sept éléments, cela cessait d'être valable au-delà ducalcium, et le tableau de Newlands s'avère alors inopérant :
Tableau deJohn Newlands illustrant la « loi des octaves »[40], 1865.
La mise en évidence d'une périodicité globale jusqu'au calcium était néanmoins une grande avancée, et Newlands présenta cette classification en l'appelant « loi des octaves » par analogie avec les sept notes de musique, mais ce travail fut assez mal accueilli par ses pairs de la Société de chimie de Londres, qui le tournèrent souvent en ridicule et firent obstacle à sa publication ; ce n'est qu'après la publication des travaux deDmitri Mendeleïev que la qualité de cette analyse a été reconnue.
Le chimiste anglaisWilliam Odling — secrétaire de la Société de chimie de Londres, et donc rival de Newlands — travaillait également, dans les années 1860, à une table périodique des éléments chimiques remarquablement proche de celle que publierait Mendeleïev en 1869. Elle était organisée en périodes verticales avec des cases vides pour les éléments manquants et plaçait — à la différence du premier tableau de Mendeleïev — leplatine, lemercure, lethallium et leplomb dans les bonsgroupes. Son action négative à l'encontre de Newlands entacha néanmoins définitivement la renommée d'Odling, et sa contribution à l'élaboration du tableau périodique des éléments est aujourd'hui largement méconnue.
La contribution du chimiste allemandLothar Meyer est à peine mieux reconnue que celle d'Odling, car ses travaux décisifs ont été publiés après ceux de Mendeleïev alors qu'ils étaient pour la plupart antérieurs. Il publia ainsi une première version de sa classification des éléments en 1864, puis finalisa en 1868 une seconde version plus aboutie qui ne fut intégralement publiée qu'à sa mort, en 1895.
Le premier tableau de Meyer comprenait vingt-huit éléments classés en six familles définies par leurvalence : c'était un grand pas en direction de la forme moderne du tableau périodique, organisé engroupes dépendant de laconfiguration électronique des éléments, elle-même directement en relation avec leur valence ; ce n'était néanmoins pas encore le même tableau qu'aujourd'hui, car les éléments étaient toujours rangés par masse atomique croissante. Le second tableau de Meyer, qui élargissait et corrigeait le premier, fut publié en 1870, quelques mois après celui de Mendeleïev, dont il renforça l'impact sur la communauté scientifique en apportant aux thèses du chimiste russe, encore très contestées, le soutien de travaux indépendants. La grande force de ce travail résidait dans les périodes de longueur variable, avec une disposition des éléments qui permettait d'éviter les regroupements fâcheux de Newlands, tels que lefer, l'or et certains éléments dugroupe du platine parmi l'oxygène, lesoufre, et les autreséléments du groupe 16 :
Meyer avait également remarqué que si l'on trace une courbe représentant enabscisse lamasse atomique et enordonnée le volume atomique de chaque élément, cette courbe présente une série de maxima et de minima périodiques, les maxima correspondant aux éléments les plusélectropositifs.
Tableau périodique deMendeleïev, publié en 1870.Tableau périodique de 1876 conservé à l'université de Saint-Pétersbourg
Malgré la qualité réelle des travaux de ses contemporains, c'est bien auchimiste russeDmitri Mendeleïev qu'on doit le premier tableau périodique des éléments s'approchant de celui que nous utilisons aujourd'hui, non seulement dans sa forme, mais surtout par la vision qui l'accompagne. À la différence de ses prédécesseurs, Mendeleïev a, en effet, formulé explicitement en quoi son tableau constituait un outil d'analyse théorique des propriétés de la matière :
les éléments chimiques, lorsqu'ils sont ordonnés par masse atomique croissante, montrent une périodicité de leurs propriétés chimiques ;
les éléments qui ont des propriétés chimiques semblables ont soit des masses atomiques semblables (osmium,iridium,platine par exemple), soit des masses atomiques croissantes de façon arithmétique (potassium,rubidium,césium par exemple) ;
la disposition des éléments ou des groupes d'éléments dans la table par masse atomique croissante correspond à leurvalence et est en rapport, dans une certaine mesure, avec leurs propriétés chimiques ;
les éléments les plus abondants dans le milieu naturel sont ceux qui ont la plus faible masse atomique ;
la valeur de la masse atomique détermine les propriétés des éléments chimiques ;
la masse atomique de certains éléments devrait parfois être revue, car le tableau est plus cohérent en réarrangeant certains éléments — typiquement, letellure — sans tenir compte de leur masse atomique expérimentale ;
on doit s'attendre à découvrir des éléments inconnus au moment de la publication de ce tableau, par exemple des éléments analogues à l'aluminium et ausilicium, avec une masse atomique comprise entre 65 et 75 ;
il est possible de prédire certaines propriétés des éléments à partir de leur masse atomique.
L'avancée était significative :
Mendeleïev prédit ainsi l'existence d'une série d'éléments, dont il précisa certaines propriétés, à commencer par leur masse atomique :
l'eka-bore (44), correspondant auscandium (45), découvert en 1879,
l'eka-aluminium (68), correspondant augallium (69,7), découvert en 1875 — une réussite particulièrement brillante, car Mendeleïev avait prévu une densité de 6 g/cm3 et un bas point de fusion, les valeurs réelles étant 5,9 g/cm3 et29,78°C,
l'eka-silicium (72), correspondant augermanium (72,6), découvert en 1886 — là encore, avec un remarquable accord entre les observations et les propriétés physico-chimiques prédites par Mendeleïev,
l'eka-manganèse (100), correspondant autechnétium (99), découvert en 1937 ;
il identifia par sa théorie une dizaine d'éléments dont la masse atomique avait été déterminée de façon incorrecte ;
Les travaux de Mendeleïev ont été accueillis avec scepticisme par ses pairs, mais la publication subséquente de plusieurs résultats similaires (notamment ceux deJohn Newlands et deLothar Meyer), obtenus de façon indépendante, a fait basculer le consensus en faveur de cette nouvelle vision deséléments chimiques.
Découverte de l'argon par William Ramsay et Lord Rayleigh
C'est en voulant mesurer avec précision la masse atomique de l'oxygène et de l'azote par rapport à celle de l'hydrogène queJohn William Strutt Rayleigh nota une divergence entre la masse atomique de l'azote produit à partir d'ammoniac et celle de l'azote séparé de l'air atmosphérique, légèrement plus lourd. Employant une méthodologie rigoureuse,William Ramsay parvint en 1894 à isoler l'argon à partir de « l'azote » atmosphérique, et expliqua l'anomalie apparente de la masse atomique de l'azote atmosphérique en déterminant la masse atomique de ce nouvel élément, pour lequel rien n'était prévu dans le tableau de Mendeleïev. Sa nature gazeuse et son inertie chimique l'avaient rendu jusqu'alors invisible aux chimistes.
La masse atomique de l'argon (un peu moins de 40) est très voisine de celle ducalcium (un peu plus de 40) et donc supérieure à celle dupotassium (39,1), ce qui posa quelques problèmes de classification[42], car il semblait y avoir « plus de place » dans le tableau périodique entre lechlore et le potassium qu'entre le potassium et le calcium. Les choses se compliquèrent encore lorsque Ramsay etMorris Travers découvrirent lenéon en 1898, matérialisant, avec l'hélium (découvert en 1868 par l'astronome françaisJules Janssen et l'AnglaisJoseph Norman Lockyer), le groupe nouveau des gaz rares (ougaz nobles), appelé « groupe 0 » : la masse atomique du néon (20,2) était exactement intermédiaire entre celles dufluor (19) et dusodium (23). Ainsi, les gaz rares semblaient se positionner tantôt entre unmétal alcalin et unmétal alcalino-terreux, tantôt entre unhalogène et unmétal alcalin.
À la suite de la découverte de l'électron et de celle desisotopes par l'AnglaisJoseph John Thomson — qui ont accompagné les débuts de la physique de l'atome avec les travaux de l'AllemandMax Planck, du Néo-ZélandaisErnest Rutherford et du DanoisNiels Bohr — les recherches du physicien anglaisHenry Moseley sur la corrélation entre la charge dunoyau atomique et lespectre auxrayons X des atomes ont abouti en 1913 au classement des éléments chimiques non plus parmasse atomique croissante, mais parnuméro atomique croissant. C'était une évolution majeure, qui résolvait toutes les incohérences issues du classement en fonction de la masse atomique, lesquelles devenaient gênantes depuis les travaux de systématisation deDmitri Mendeleïev.
L'argon était ainsi placé entre lechlore et lepotassium, et non plus entre le potassium et lecalcium, tandis que lecobalt était clairement positionné avant lenickel bien qu'il soit un peu plus lourd. Il confirma que letellure devait être placé avant l'iode sans nécessiter de revoir samasse atomique, contrairement à ce qu'avait suggéré Mendeleïev. Il releva également que les éléments de numéro atomique 43 et 61 manquaient à l'appel : l'élément 43 avait déjà été prédit par Mendeleïev comme eka-manganèse (il s'agit dutechnétium, radioactif, synthétisé en 1937) mais l'élément 61 était nouveau — il s'agit duprométhium, radioactif également, isolé en 1947 :
Le physicien américainGlenn Theodore Seaborg contribua dès 1942 auprojet Manhattan dans l'équipe du physicien italienEnrico Fermi. Il était chargé d'isoler leplutonium — que lui-même avait synthétisé et caractérisé en — de la matrice d'uranium au sein de laquelle il se formait. C'est au cours de ce travail qu'il développa une connaissance approfondie de la chimie particulière de ces éléments. Il établit ainsi que leur position dans le tableau périodique (l'uranium était alors placé sous letungstène et le plutonium sous l'osmium) ne rendait pas compte de leurs propriétés.
En 1944, il parvint à synthétiser et à caractériser l'américium et lecurium (éléments 95 et 96), ce qui lui permit de formaliser le concept desactinides, c'est-à-dire d'une nouvellefamille aux propriétés spécifiques et formée des éléments89 à103, située sous leslanthanides dans le tableau périodique, qui prit ainsi sa configuration actuelle. Seaborg conjectura également l'existence dessuperactinides, regroupant les éléments121 à153 et situés sous les actinides.
Le tableau périodique utilisé de nos jours est celui remanié en 1944 par Seaborg.
Une autre représentation est celle d'Otto Theodor Benfey(en), datée de 1964, dont l'objectif était de remédier aux discontinuités du tableau standard à l'aide d'une représentation en spirale :
De nombreux modèles en trois dimensions ont également été proposés afin d'enrichir la représentation des éléments par diverses informations spécifiques[46].
Tableau périodique étendu pour définir les propriétés dans le cadre des lanthanides, des actinides, de l'yttrium, le scandium, l'aluminium, le bore, l'hydrogène
Tableau en cupcakes utilisé parIda Freund en tant qu'outil pédagogique[47].
Le tableau de Mendeleïev a été adapté pour représenter d'autres données physiques des éléments, et été appliqué pour visualiser des éléments totalement différents[48].
Jusque dans les années 1970, l'industrie utilisait moins de vingtmétaux. Depuis les années 2000, par suite du développement des produitsélectroniques, destechnologies de l'information et de la communication, de l'aéronautique, allié à l'innovation technique dans la recherche de performances et de rendements, la demande en nouveaux métaux « high tech » a explosé, et concerne maintenant environ 60 métaux. Pratiquement tous les éléments de la table sont utilisés jusqu'auno 92 (uranium)[49]. Les réserves de la plupart des métaux au niveau de production 2008 varient de 20 ans à 100 ans[50].
↑Elle était organisée en cinq colonnes (plus l'hydrogène et lelithium) comptant jusqu'à vingt éléments, mais surtout les éléments chimiques y étaient rangés parmasse atomique croissante, et non en fonction de leurnuméro atomique.
↑En fonction des auteurs, legroupe 3 peut également être constitué dulanthane et de l'actinium au lieu dulutécium et dulawrencium représentés ici[2],[3]. En janvier 2021, le groupe de travail de l'IUPAC a proposé la disposition plaçant le lutécium et le lawrencium dans le groupe 3 comme compromis en attendant des conclusions définitives[4].
↑La nature d'unélément chimique relève souvent de plusieursfamilles d'éléments, dont la répartition représentée ici ne retient que la nature dominante de chaque élément ; la répartition des familles dans le tableau peut varier selon les auteurs, notamment dans la partie droite du tableau.
↑Notamment les théories de champ moyen et les théories MM.
↑Par cette formule, Lavoisier entendait regrouper les substances « impalpables ».
↑Il s'agissait d'oxydes ou de sulfates d'éléments métalliques pour certains déjà connus de Lavoisier, qui soupçonnait d'ailleurs que certaines de ces « substances simples » fussent en réalité des substances composées de plusieurs éléments différents.
↑(en)Encyclopaedia Britannica : article « Transuranium Element », dont la brève section « End of Periodic Table » en fin d'article situe entre 170 et 210 la borne supérieure théorique dunuméro atomique, et àZ ≈ 130 la limite d'observabilité des atomes.
(en) « The Photographic Periodic Table of the Elements »(consulté le) : en cliquant sur un élément, on obtient des renseignements déjà détaillés, puis encore plus en cliquant surFull technical data (qui donne aussi accès à des données détaillées sur chaque isotope).