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Sverre Fehn | |
![]() Musée norvégien des Glaciers à Fjærland (1991). | |
Présentation | |
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Naissance | Kongsberg (Norvège) |
Décès | (à 84 ans) Oslo (Norvège) |
Nationalité | Norvégienne |
Mouvement | Architecte moderniste, membre fondateur de PAGON, branche norvégienne duCIAM, en 1950 |
Activités | Architecte, enseignant, nommé professeur titulaire à l'école d'architecture d'Oslo en 1971 |
Diplôme | DEA : diplômé d'État d'architecte en 1949 |
Formation | École d’architecture d’Oslo |
Œuvre | |
Agence | Première agence à Oslo en 1954 |
Réalisations | Pavillon de la Norvège à Bruxelles (Exposition universelle de 1958), Structure du pavillon des pays nordiques dans les jardins de la Biennale de Venise (1962), Hedmarksmuseet de Hamar, sur un site archéologique médiéval respectant les fouilles qui se poursuivaient (1967-1979), Norsk Bremuseum ou musée du glacier de Fjærland (1991) |
Projets | propose en 1988 une galerie étendue sur un estran rocailleux de Verdens Ende (Bout du monde) |
Distinctions | Prix Pritzker 1997 |
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Sverre Fehn est unarchitecte et professeur d'architecture né le àKongsberg enNorvège et mort le.
Déjà, enfant, Sverre Fehn est passionné de peinture et de dessin[1], c’est donc tout naturellement qu’il se dirige vers des études d’art et d’architecture à l’école d’architecture d’Oslo, où il est diplômé du diplôme d’État d’architecte en 1949. En 1950 il rejoint le groupe PAGON (Progressive Architect’s Group of Oslo, Norway), une filiale du CIAM.
De 1952 à 1953 il effectue un long voyage vers l'Afrique et reste une année étudier l'architecture des villages berbères auMaroc et des confins de l'Espagne. Ainsi, à la suite de ces aînésAldo van Eyck etJorn Utzon, le jeune architecture féru des œuvres modernes découvre "les murs deMies van der Rohe et les toits deLe Corbusier. Cette année consacrée à l’architecture vernaculaire influence énormément son œuvre ultérieure. L'expérience de l'espace et l'amour de la nature et des hommes d'un milieu sont toujours recherché en préalable.
Sous l’influence et sur les conseils deArne Korsmo (en), un de ses anciens professeurs de l’école d’architecture d’Oslo, à la fois ami et mentor, il décide à peine rentré en Norvège de repartir afin d’enrichir sa culture et son expérience architecturale et d'éviter l'absence de commande qui frappe le métier dans son pays. Sverre Fehn s’installe donc àParis pour une année d'étude supplémentaire de 1953 à 1954 avec la promesse d'une bourse française. Assistant auCIAM (congrès international d’architecture moderne) àAix en Provence, il présente des plans d’un projet de logement en collaboration avec son collègue danoisJørn Utzon et fait la rencontre de l'ingénieur-constructeurJean Prouvé, pionnier de l'architecture métallique et des murs-rideaux dans l'entre-deux-guerres, et patron d'une usine de construction lorraine valorisant les métaux, en particulier l'aluminium[2]. Ayant obtenu sa bourse française, il accomplit son stage pratique dans le cabinet d’étude des ateliers de construction Jean Prouvé. Durant cette année il participe au projet de la "villa de Nancy", il est particulièrement impressionné par l’attention particulière que porte Jean Prouvé à l’alliance de la technique, des matériaux dans le projet. Toute son œuvre se construit autour de ces problématiques.
À son retour à Oslo en 1954, il ouvre un cabinet d’architecture installé à Fastingsgate.
En 1962, il réalise l’un de ses projets les plus importants, en tous cas qui le fait connaître définitivement au niveau international : la structure du toit-poutrage en béton du pavillon despays nordiques dans les jardins de laBiennale deVenise. Ce « pavillon nordique » de la Biennale de Venise de 1962, qui respecte quelques grands arbres au milieu du bâtiment-toit, est en un sens fortement influencé par le modernisme deLe Corbusier et deJean Prouvé.
De 1967 à 1979, il construit le musée de lacathédrale de Hamar. De 1971 à 1995, nommé professeur d'architecture, il enseigne à l’École d’architecture d’Oslo. Il est également appelé comme professeur honoraire auprès de différentes écoles d’architecture en Europe et aux États-Unis, notamment l’université Yale et laCooper Union deNew York.
Il réalise de nombreux musées remarquables en Norvège mais il s’est aussi occupé de la construction d’habitations privées parmi lesquelles on notera particulièrement la villa Schreiner à Oslo (1963) et la villa Busk à Bamble (1990).
Il construit également un certain nombre de maisons qui sont liées à la topographie caractéristique des fjords norvégiens, de la lumière du nord, à l’ombre et au vent.
La plupart de ses œuvres sont construites en Norvège. Bien qu’il ait gagné un grand nombre de concours, une faible part de ses projets a été réalisé. Il a reçu en fin de carrière de nombreux prix parmi lesquels lamédaille Heinrich-Tessenow et leprix Pritzker, tous deux en 1997.
Sverre Fehn se définit comme un architecte incompris et un antisocial[3]. Peu intéressé par les relations d’affaires ou politiques, il se fait connaître en travaillant à des projets et en gagnant des concours. Ses projets n’ont pas toujours abouti et ceux qui ont été achevés ont parfois été sévèrement critiqués ce qui est une blessure pour lui. Cependant il est publié de nombreuses fois, devient enseignant à l’école même où il a été formé et reçoit des prix, la reconnaissance et la consécration arriveront en 1997 avec leprix Pritzker, la plus haute récompense en matière d’architecture.
Ses dernières réalisations sont le reflet de l’influence de la culture norvégienne, et de la richesse de son environnement naturel.
Arne Korsmo (en), professeur antinationaliste rencontré à l’école d’architecture d’Oslo lors de ses études, apporte une énorme ouverture d’esprit à Sverre Fehn et devient son mentor. « Korsmo a été mon véritable maître »[3], dira–t-il à propos de lui. En effet c’est le professeur qui est à l’origine de toutes les rencontres déterminantes de Fehn, rencontres qui marquent son œuvre ultérieure. Le maître pousse son ancien élève, devenu son ami, à aller chercher une ouverture d’esprit en Europe et aux États-Unis, à sortir de la Norvège. Ainsi il a permis à Sverre Fehn de rencontrer des architectes aux États-Unis, et de sceller des amitiés durables avecUtzon,Aldo van Eyck, etPeter Smithson , ainsi queCharles Eames.
À Paris, Sverre Fehn fait la connaissance deJean Prouvé, qui lui transmet sa fascination pour la technique et la construction dans la conception du projet, qui fait de l'ébauche une « histoire poétique ». En France, Sverre Fehn visite également à plusieurs reprises les ateliers deLe Corbusier à Paris et le chantier de lacité radieuse à Marseille.
Plus tard, en 1962 à l’occasion de la construction du fameux pavillon nordique vénitien, il rencontreCarlo Scarpa à Venise, et les deux créateurs partagent une amitié en dépit de conceptions architecturales divergentes. SiCarlo Scarpa critique avec force et maintient de grandes réserves sur le pavillon de Sverre Fehn, Sverre le comprend et s'imprègne de la conception muséographique de l'architecte italien aumuseo civico di Castelvecchio deVérone (1956-1964) pour son projet du musée du Hedmark àHamar[4].
C’est l'ensemble de ces rencontres marquantes, et bien d'autres, qui forgent le "modernisme poétique" de Fehn, qui reconnait lui-même être influencé par les œuvres deLudwig Mies van der Rohe,Utzon et aussiAlvar Aalto, moderniste finlandais duquel il est parfois pris en successeur et héritier spirituel.
Son pays d’origine, la Norvège, influence énormément les travaux de l’architecte. Malgré le fait qu’il ait tenté toute sa vie d’aller contre les grandes tendances de l’architecture nordique traditionnelle, Fehn ne peut nier sa culture et l’impact de celle-ci sur l’ensemble de son œuvre. Vers la fin de son œuvre, l'architecte cesse de lutter, se réconcilie avec l'attitude populaire, ce qui se ressent dans ses projets de maisons individuelles.« Si l'architecture devenait totalement rationnelle, les gens seraient traités comme des animaux. »[5]
Le paysage nordique, la lumière, et finalement l’architecture traditionnelle ont fortement nourri la l’inspiration de l’architecte.
Formé après les dévastations de laDeuxième Guerre mondiale, Sverre Fehn fait bien partie de cette génération d’architecte qui cherchent à redéfinir le modernisme. Il a contribué à ce queSigfried Giedion appelait « la nouvelle tradition »[6]Dès sa formation, l’œuvre de Fehn est fortement influencée par Le Corbusier, Jean Prouvé, des architectes modernistes dont il tire un enseignement sur les rapports entre structure et technique comme moyen d’expression, langage, éléments d’alphabet de construction servant à écrire une histoire. Fehn vise en fait à allier structure et poésie.« Le rationalisme dans l’architecture moderniste est toujours le danger de l’oubli de la construction. Mais sans technique, l’architecture perd son sens. On se retrouve toujours au milieu de cet insolvable dilemme »[7]
Sverre Fehn, à propos de son « pavillon nordique » présenté lors de la biennale de Venise de 1962, dit « Dans ce domaine, comme dans les autres, je crois qu’il faut combattre l’indifférence. S’intégrer précisément, volontairement dans un site. Ne jamais regarder la nature de façon romantique. Mais créer entre elle et votre intervention, une tension. C’est ainsi que l’architecture acquiert sa lisibilité et que nous retrouvons l’histoire que nous avons à raconter»[8].Construit dans le seul parc de la ville, le pavillon imaginé par Fehn est transpercé de multiples arbres. Il est constitué d'une toiture protégeant les œuvres de la lumière directe, ayant également pour objectif de recréer la lumière et l'ambiance des pays nordiques, où les œuvres ont été produites. Afin que la lumière ne perde pas son intensité, le bâtiment a été couvert d'un mélange de ciment, et de marbre blanc.
Sverre Fehn avoue éprouver une certaine fascination pour les contrastes, et en fait la force constitutive de ses projets.
« Je m’efforce d’attirer davantage l’attention des gens sur la beauté du site » « J’ai dit à mes étudiants que si, en regardant un bâtiment, ils remarquent un bel arbre, alors le bâtiment est une belle pièce d’architecture. C’est le dialogue entre l’arbre et l’architecture qui rend l’arbre beau[9]. »
L’architecte travaille sur la tension entre la nature et l’intervention. Fehn s’attache à respecter la nature, chaque projet est intimement lié et dialogue avec elle. De manière forte, parfois abrupte, le bâtiment doit mettre en valeur le site. Cela crée une certaine résistance entre la matière et la nature : le contraste doit être fortement exprimé, ne pas « traiter la nature avec douceur » C’est une attaque de notre culture contre la nature.« L’architecture est un arrêt dans le temps, une philosophie inscrite dans la terre pour marquer le paysage ».
Ainsi, la station de recherche glaciologique devenue Musée des Glaciers à Fjærland est initialement conçue comme un long bloc de pierre abandonné là par un glacier.
Selon Fehn, le temps et l’espace de la nature et ceux de l’humain sont pas coordonnés. Le temps de la nature est long et quasi-infini, celui de l’humain est court et restreint. Le rôle de l’architecture est de rétablir un lien entre l’échelle, de les synchroniser. L’architecture ne possède pas d’espace-temps, elle réconcilie l’homme et la nature. Il faut déchiffrer le langage du paysage et trouver la juste échelle adaptée au corps.
Le plus primordial dans un projet est d’être capable de lire le langage du paysage aussi précisément que possible, et de pouvoir appréhender l’échelle du corps humain afin d’obtenir une adéquation parfaite entre paysage, bâtiment et corps.L'architecte norvégien travaille également beaucoup sur la thématique de l'horizon, lien entre terre et ciel. Selon lui les toitures plates de Le Corbusier recréent cet horizon, que les hommes ont perdu depuis la découverte de la terre en tant que globe. « Il faut redonner la terre à la Terre, et l'horizon dans les maisons des hommes »[6]. L'architecture a ce rôle et réconcilie, relie le ciel et la terre.
L’hiver, dans le nord de la Norvège, il fait nuit plusieurs mois d’affilée, ce qui enrichit l’imagination selon Fehn[10]. L’architecte nourrit une fascination des ombres et la lumière, de la dualité entre la vie et la mort[11]. Il considère ses réalisations comme des objets vivants, ayant pour objectif de surpasser la mort, du moins la propre mort de l’architecte.
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