Cet article concerne le svastika en général. Pour son utilisation par le nazisme, voirCroix gammée nazie.
Quatre exemples. Haut gauche : svastika en dix-sept carreaux ; haut droite : svastikahindou ; bas gauche : svastika symbole solairepréhistorique ; bas droite : svastikaaztèque
Il apparaît à l'époquenéolithique pour la première fois dans la préécriture de laculture de Vinča[5]. Cetteubiquité temporelle et spatiale lui a parfois valu le nom de « symbole universel ». On peut le décrire comme unecroix composée de quatre potences prenant chacune la forme d'ungamma grec encapitale (Γ), d'où le nom de croix gammée qui lui est souvent donné.
Ce symbole est toujours largement utilisé enAsie et particulièrement enInde. Dans l'hindouisme, il possède de nombreuses significations sacrées et il représente notamment leDharma. Il est toujours un symbole omniprésent chez lesbouddhistes. Il est le symbole premier dujaïnisme, considéré par ses adeptes comme le plus favorable de tous les symboles. EnChine, il symbolise l'éternité. Il est aussi fréquemment visible dans les temples statuaires, décorations, motifs vestimentaires de l'ensemble des pays bouddhistes, d'Extrême-Orient, d'Asie du Sud-Est et d'Asie centrale.
Le mot est composé desvasti et du suffixe diminutif-ka. Le sens desvasti est « bonne santé, bonne fortune » (c'est aussi une interjection équivalant aufrançais « vive ! ») ; il est lui-même formé desu, « bon » (grec ancienεὖ /eũ, « bien »,indo-européen commun* h₁su-) et deasti, « existence » (duradicalas, venant du radical indo-européen duverbeêtre, soit* h₁es-, d'où provient la plupart des verbesêtre indo-européens).Svastika peut donc se traduire par « ce qui apporte la bonne fortune » ou « ce qui porte chance ». Toutefois l'étymologie, reconsidérée, met en évidence deux éléments :su- « favorable » et*nes- « approcher » (-n- amuï en composition ; parent de l'anglaisnext, du lettonnak, etc.), avec le sens fondamental de « heureux retour », ce qui explique l'association du signe avec les dioscures Nasatya qui ramènent à la santé, au beau temps, etc.[6]. Il existe une différence entre le svastika et le plus récent gammadion : attesté dès le Paléolithique supérieur dans un contexte (paléo)astronomique, le svastika est doté d'un sens giratoire ; le gammadion est l'assemblage fixe de quatre gammas.
Le svastika inscrit dans un carré peut être retourné comme s'il était vu dans un miroir, donnant deux versions de sens opposé. On le qualifie de « dextrogyre » (dextro = droite ; gyro = tourne) lorsque le tracé de chacune de ses pattes est tourné dans le sens des aiguilles d'une montre (卐), et de « lévogyre » (ou encore « sénestrogyre ») dans le cas contraire (卍). En Inde, on trouve des figurations dans chacun des deux sens et, qui sont généralement vues comme « bénéfiques ». La considération de ces deux sens provient de deux orientations possibles liées aupradakshina. Le svastika lévogyre (sauvastika) est parfois vu comme un symbole nonauspicieux[7], de malchance[8].
C'est l'un des plus anciens symboles de l'humanité que l'on retrouve sous plusieurs formes dans la majorité des civilisations du monde, bien qu'il n’ait pas toujours la même signification. Les différentes graphies inspirées de la forme du svastika ont pu naître indépendamment les unes des autres, bien que certaines soient liées historiquement (svastikas indien et bouddhique, svastika indien et svastika duXXe siècle européen).
Différentes hypothèses ont été avancées pour expliquer l'ubiquité du svastika. Une explication triviale est qu'il s'agit d'un motif décoratif facile à exécuter. Une autre, qui fait appel aux fonctions symboliques communes à tous les humains, suggère qu'il s'agirait à l'origine d'une représentation d'un mouvement rotatif : rotation apparente du soleil dans sa course diurne, comme celle de la lune et des planètes, de gauche à droite dans l'hémisphère Nord (soit dans le sens des aiguilles d'une montre) ; rotation du ciel nocturne autour de l'étoile polaire (rotation inverse, due au changement de point de vue de l'observateur, tourné vers le Nord et non plus vers le Sud). D'autrescorps célestes ont été proposés, unecomète par exemple, selon l'astronomeCarl Sagan, au vu de celle représentée dans un manuscritchinois deMawangdui. Chez lesNavajos, il s'agit de la rotation d'une bûche.
La signification et l'importance du svastika varient selon les cultures et les époques. Il peut n'être qu'un signe parmi d'autres comme sur les poteries Vinča, ou un symbole religieux prééminent comme dans l'hindouisme et lebouddhisme. De nos jours, par exemple, le svastika levogyre (卍) est utilisé pour marquer les temples bouddhistes sur les plans de ville japonais.
On peut voir des svastikas sur des cartes postales des États-Unis souhaitant bonne chance au début des années 1900[10],[11]. Cependant, auXXe siècle, les svastikas ont été utilisés par le régimenazi et sont devenustabous dans le monde occidental, même le svastika bouddhique pointant vers la gauche, à l'inverse du svastika indien et de lacroix gammée. Des tombes bouddhiques appartenant à des famillesindochinoises furent vandalisées après la guerre ; plus récemment, des cartesPokémon portant un svastika bouddhique durent être retirées de la vente auJapon. La circulation de l'information et l'intérêt accru pour les civilisations asiatiques n'ont pas suffi à réhabiliter le svastika dans le mondeoccidental. Son interdiction est même proposée, au regret des hindous vivant en Europe[a].
PourRené Guénon, le mouvement circulaire exprimé par ce symbole est utilisé pour mettre en évidence l'axe de la figure, seule partie immobile et symbole de l'immuabilité d'un principe transcendant. Affirmant que cette croix doit être considérée comme une figure horizontale il y voit un « signe du Pôle », qui serait un des symboles les plus anciens de la « tradition primordiale », d'origine polaire et mère de toutes les autres traditions. Ce symbole aurait ainsi été conservé, en oubliant plus ou moins son sens, par les religions actuelles. Pour lui, le sens de rotation n'a pas d'importance dans ce symbolisme et peut être considéré comme la vision d'un même objet par une face ou par l'autre. Quant au terme de « sauvastika » il n'y voit qu'un adjectif dérivé de « svastika » qui désigne simplement, en sanscrit, ce qui a un rapport avec ce symbole[13].
Pour Jean Chevalier et Alain Gheerbrant, le svastika est symbole d'action, de manifestation et de régénération perpétuelle puisqu'il indique par son graphisme le mouvement[14].
Comme l'indique son nom sanskrit, le svastika est dans les mystiques orientales un signe de bon augure. Bien que se retrouvant dans toutes les cultures de l'humanité préhistorique, son utilisation systématique vient de l'Inde, correspondant à la compréhensionhindoue du monde, et est donc utilisé aussi par lebouddhisme et surtout par lejaïnisme, qui sont toutes deux des religions d'origine indienne.
Il est principalement un symbole cosmique mettant en scène le mouvement perpétuel de rotation autour d'un point fixe, celui de l'univers qui subit toutes les évolutions, de tous les cycles, de la transcendance. Il représente plusieurs forces positives, commeGanesh dans l'hindouisme, dieu que l'on invoque pour tout commencement comme étant celui qui écarte les obstacles, parfois représenté sur un lit de svastikas. Chez lesbouddhistes il représente la connaissanceésotérique et laroue du dharma.
Symbole Jaïn ; le svastika est un symbole majeur et omniprésent dans lejaïnisme, religion de la non-violence ouahimsa. Ici, les quatre points bleus entre les branches du svastika représentent les quatre mondes : en haut à gauche, le monde des hommes ; en haut à droite, le monde des dieux ; en bas à gauche, le monde des animaux et des plantes ; en bas à droite, le monde des démons : seul le monde des hommes est ouvert à la délivrance, grâce aux trois joyaux (en vert) du jaïnisme (vision juste, connaissance juste, conduite juste), qui permet d'accéder à la libération du cycle des réincarnations (le candra-bindu : en jaune).
Dans la religionhindoue, les deux sens de rotation sont associés à l'activité du dieuBrahmā constructeur de l'univers : lesvastika proprement dit pointant vers la droite représente la construction, la croissance (प्रवृत्तिPravritti), alors que celui pointant vers la gauche, appelésauvastika (सौवस्तिक), représente l'involution, la destruction (निवृत्तिNivritti). Inscrit dans un carré à base horizontale (graphie nettement plus fréquente que la position à 45°), il représente la stabilité, ses branches indiquant les quatre orients. Il peut également être le symbole du dieu solaireSūrya. Le svastika pointant vers la droite, auspicieux et bénéfique, est presque seul représenté et jouit d'une popularité inaltérée par les événements en Europe. On le retrouve même sur des objets non proprement religieux. Le sauvastika, considéré comme lié autemps (connoté négativement), n'est en général pas employé. AuBengale,Svastika est un prénom courant.
Le svastika y joue un rôle encore plus important que dans l'hindouisme et représente leTirthankara Suparsva, septième « faiseur de gué » du jaïnisme. C'est l'une des 24 marques auspicieuses. Tous les temples et textesjaïns portent ce symbole, qui est dessiné sept fois avec duriz autour de l'autel avant chaque cérémonie.
En Inde, c'est un symboleomniprésent, non seulement sur les temples, mais aussi sur les maisons, dans les rues, les objets, en tant que symbole religieux, spirituel et métaphysique du cosmos et de la vérité (ekam satya, aneka panthi est un vers duVéda qui signifie « Une seule vérité, plusieurs chemins »). Le svastika représente d'ailleurs la « société noble » (ârya samaj) pour les Hindous, composée des brâhmanes (savants), kshatriya (Défenseur), vaïshya (paysan-artisan) et shûdra (serviteur), ou comme le définit le Manusmriti (lois de Manu) :
« 62. La mort, sans l’espérance d’une récompense, pour les Brâhmanes et les vaches, ou dans la défense de femmes et d’enfants, garantit la béatitude à ceux ne faisant pas partie de la communauté Ârya (les Vahya). 63. L'ahimsâ (respect impérieux de la Vie, non-violence), la véracité, l'abstention de s'approprier les biens d'autrui, la pureté et le contrôle des sens, Manu a ainsi déclaré que tout cela peut être considéré comme le résumé du Dharma pour les quatre Varna d’Ârya (« noble »). (LivreX) »
Enfin, lesJaïns — le jaïnisme étant une religion morale qui a pour premier credo la non-violence (ahimsâ) — utilisent tout spécialement le svastika pour symbole de l'Harmonie cosmique, et bien sûr à chacune de leur cérémonie : le centre du svastika symbolise l'âme libérée du cycle des réincarnations, tandis que les quatre branches représentent : 1. le monde des démons ; 2. le monde des végétaux ; 3. le monde des animaux (l'homme fait partie du règne animal) ; et 4. le monde des divinités ; l'âme libérée est au centre car elle est en paix éternelle – délivrée des naissances et des morts en ces différents corps et destins de démons, de végétaux, d'animaux et de divinités, grâce à la pratique de la non-violence et de l'ascèse absolues (pour le jaïnisme, le svastikaordonne ainsi la Non-violence directe et indirecte enverstoutes les créatures, qui ont toutes la mêmeâme, la mêmevie, le mêmevouloir-vivre dans des conditionnements différents et éphémères).
Le svastika a été utilisé par les bouddhistes probablement dès la fondation de cette religion aux alentours duVIe siècle av. J.-C. En dehors de l'Inde, svastika etsauvastika ont d'abord été indifféremment utilisés, les deux formes étant considérées comme aussi favorables l'une que l'autre. Néanmoins, l'apparition dusinogrammewan 卍 vers l'époque desLiao a favorisé la forme pointant vers la gauche, plus fréquemment employée.
Le caractèrechinois a été créé sous ladynastie Liao (907-1125). Il existe sous deux formes, laforme traditionnelle :卍, est inversée par rapport à laforme simplifiée :卐 (pinyinwàn, équivalent de萬 /万, « 10 000, myriade »), représente directement un svastika pointant vers la gauche ; il symbolise dans lebouddhisme chinois la réalisation des dix mille mérites, qui promettent lenirvâna (voir lesūtra ci-contre) ; leBouddha, ainsi que le bodhisattvaGuanyin (bodhisattva de la compassion) les portent d'ailleurs parfois, dans l'iconographie chinoise, sur la poitrine ou sur le front. Dans lebouddhisme zen, c'est le « sceau de l'esprit de Bouddha ». Ce symbole est utilisé pour noter les temples bouddhiques sur les plans de ville àTaïwan et auJapon. La valeur de « soleil » lui fut attribuée par l'impératriceWu Zetian lors de sa tentative de création de nouveaux sinogrammes. AuJapon, les deux formes de svastika sont quelquefois associées aux deux composantes de l'illumination : le svastika pointant vers la gauche, en japonaisomote manji (svastika externe) ou simplement 卍(まんじ,manji?) représente l'amour et la compassion (associés au bouddhaAmitābha), alors que le svastika pointant vers la droite,ura manji (svastika interne) ougyaku manji (svastika inversé) représente la sagesse et l'énergie associées àAkshobhya.
Chez lesTibétains, le svastika est appeléགཡུྒདརུྔ (g.yung-drung), ce qui signifie « éternel ». Traditionnellement, les bouddhistestibétains adoptent le svastika pointant vers la droite comme les Indiens, tandis que les bonpos, pratiquants de l'ancienne religion tibétaine prébouddhiqueBön, utilisent le svastika pointant vers la gauche. Chez les bouddhistes tibétains bonnets rouges - titre donné aux écoles du bouddhisme tibétain portant une coiffe noire, Kagyüpa, Sakyapa, Nyingmapa. — école dont sont issus les karmapas et autres grands maîtres du bouddhisme originel — , le svastika est sénestrogyre, c’est-à-dire qu’il tourne dans le sens inverse des aiguilles d’une montre ; au contraire, chez les bonnets jaunes, école étant la seule à porter une coiffe jaune — dont sont issus les dalaï-lamas et les panchen-lamas — , le svastika est dextrogyre, c’est-à-dire qu’il tourne dans le sens des aiguilles d’une montre. En ce cas il représente la renonciation, mais symbolise aussi la course visuelle du soleil[15]. Ce caractère est également utilisé dans l'écrituredongba, prononcé ɯ33 et représentant le bien, le bon[16], de la minoritéNaxi, reflétant au Tibet des restes toujours vivants de la culture Bön et des traditions tibétaines prébouddhiques.
EnCorée, le svastika est très courant dans les rues où il indique un lieu bouddhiste.
Au début desannées 1920, le mouvement religieux syncrétisteDao Yuan (道院 Maison du Dao) fonda en Chine l'organisation charitable duSvastika rouge, dont les activités s'interrompirent après1949 ; les branches deHong Kong etSingapour, encore actives, patronnent des écoles et des hôpitaux.
Certaines tribus indiennes d'Amérique du Nord l'utilisent, particulièrement dans le Sud-Ouest desÉtats-Unis, lui donnant chacune une signification différente. Ainsi chez lesHopis il représente les pérégrinations des clans alors que chez lesNavajos c'est la « bûche tournoyante » liée aux rites de guérison. Le svastika a été retrouvé dans les sites archéologiques de lacivilisation du Mississippi, dans l'Ohio.
C'est un motif traditionnel chez lesKunas dePanama qui le font figurer sur ledrapeau de leur territoire autonome deKuna Yala.
Dans la mythologie lettone, il est appelé « croix de tonnerre » (pērkonkrusts) ou « croix de feu » (ugunskrusts).
Chez lesfrancs-maçons, il est le symbole de l'univers, le centre du svastika représentant l'étoile polaire, tandis les quatre branches symbolisent les quatre points cardinaux.
Des mouvements religieux modernes l'utilisent ou l'ont utilisé de façon emblématique et en référence à sa signification originelle : la religionvietnamienneCao Dai, leFalun Gong,Ásatrú ; leMouvement raëlien l’avait combiné avec l’étoile de David dans son logo, changé en1991 en retirant le svastika par respect pour les Juifs qui auraient pu se sentir blessés de voir le svastika lié à l’étoile de David. Le chef spirituel du Mouvement raëlien a, par contre, réintégré le svastika en 2007 dans le logo originel (sauf en Israël).
La découverte dès leXVIIIe siècle de la parenté entre les langues d'Europe et des langues du Nord de l'Inde avait éveillé beaucoup d'intérêt. L'Inde est devenue pour les intellectuels mal à l'aise avec les religionsjudéo-chrétiennes une alternative au mondeméditerranéen comme source de la civilisation européenne. L'archéologueHeinrich Schliemann, en collaboration avec les spécialistes desanskritÉmile-Louis Burnouf etMax Müller, fut le premier à proposer que les symboles grecs découverts sur le site supposé deTroie étaient un symbole typiquementindo-européen, avatar du svastika indien, et que lesAryens pouvaient être des ancêtres desEuropéens.
SelonFriedrich Heer, auteur d'une biographie d'Adolf Hitler parue en 1968[17], celui-ci était enfant lorsqu'il aurait remarqué pour la première fois un svastika dans les armoiries de l'abbaye de Lambach où il était choriste.
Par la suite, il s'est servi du svastika indien comme symbole de l'aryanisme, alors que telle n'est pas sa fonction première, car ce symbole n'a jamais été exclusif auxārya, ensanskrit « noble », terme qui indique en Inde, outre la noblesse dans un sens courant (noblesse de cœur, d'esprit), les quatrevarnas hindoues, c'est-à-dire les brâhmanes, leskshatriya (rois), lesvaïshya (paysans, artisans) etshudra (serviteurs), ou l'ensemble de la population hindoue, selon leslois de Manu ; néanmoins, le svastika, par ces quatre branches, représente les quatre ordres ci-dessus mentionnés de la société hindoue sacrée (qui n'a pas de base « raciste » mais liée au comportement de chacun), c'est-à-direârya ou noble, « aryenne », incarnant l'ahimsa (non-violence), telle que définie par le législateur de la tradition védique, Manu :
« La mort, sans l’espérance d’une récompense, pour les brâhmanes et lesvaches, ou dans la défense de femmes et d’enfants, garantit la béatitude à ceux ne faisant pas partie de la communautéÂrya (les Vahya). L'ahimsa (respect impérieux de la Vie, non-violence), la véracité, l'abstention de s'approprier les biens des autres, la pureté et le contrôle des sens, Manu a ainsi déclaré que tout cela peut être considéré comme le résumé duDharma pour les quatrevarna d'Ārya (« Nobles » ensanskrit : brahmanes, kshatriya, vaïshya, shudra)[18]. »
Le svastika était particulièrement familier desBritanniques ayant servi dans l’armée des Indes, commeRudyard Kipling, dont les livres étaient protégés par une couverture portant ce signe, jusqu'à ce que le symbole devienne trop lié au nazisme. L'une des nouvelles deHistoires comme ça (édition 1911), « Le crabe qui jouait avec la mer », incluait une illustration pleine page due à l'auteur représentant un socle de pierre en forme de svastika, mentionné dans la légende comme « marque magique ». L'image fut supprimée dans les éditions ultérieures.
À partir de la fin duXIXe siècle et jusque peu avant laSeconde Guerre mondiale, le svastika a joui d'une certaine popularité dans le monde occidental. Il fut employé comme porte-bonheur, par exemple sur des cartes de vœux anglaises ou sur des pendentifs de montre de poche publicitaires émis en1925 parCoca-Cola. Il fut adopté comme emblème par des clubs sportifs, des organisations, des entreprises et même des unités militaires, mais dans un esprit sans rapport avec l'idéologienazie.
L'armée de l'airlettonne utilisa également un svastika (appeléPērkonkrusts, « croix du [dieu-]tonnerre ») de1918 à1934. D'autres unités l'utilisèrent comme insigne. Des organismes lituaniens, au nombre desquels le mouvementfasciste Perkonkrusts, le choisirent comme emblème.
Le svastika fut lelogo de la compagnie suédoiseASEA, faisant désormais partie du groupeAsea Brown Boveri, de 1883 à 1933.
La compagnie de navigationislandaiseEimskip, fondée en1914, utilisait encore récemment un svastika.
Le comte suédois Von Rosen ayant offert son premier avion à l'armée de l'air finlandaise, celle-ci adopta son emblème, un svastika bleu, en1918.
La tête d'Indien qui sert de symbole à l'Escadrille La Fayette, à l’origine un groupe de volontaires américains arrivés en France en1916 pour soutenir l'effort de guerre, comporte comme ornement un svastika.
LaSociété théosophique fondée àNew York en1875 avait adopté le svastika bouddhique, pointant vers la gauche et positionné à 45°, dans son sceau.
Une localité du Nord de l’Ontario fondée en1906, aujourd’hui bourgade deKirkland Lake, porte le nom deSwastika, qu’elle a toujours refusé d’abandonner malgré les pressions[19]. Une société minière, « SwastikaMining Company », y fut fondée en1908 en vue de la prospection d’or.
Dans l'Occident moderne, le svastika pointant vers la droite, et généralement incliné de 45 degrés, avait été adopté comme emblème par leparti national-socialiste allemand et letroisième Reich, il a par conséquent acquis après laSeconde Guerre mondiale une forte connotation politique le liant aux crimes contre l'humanité allemands (voirShoah) et auracisme. Certains groupes politiques extrémistes l'utilisent encore (voircroix gammée nazie).
Le svastika est également présent dans les mythes slaves pré-chrétiens. Il est dédié au dieu slaveSvarog ou Rod[20].
Pour les Slaves, le svastika est un signe magique manifestant la puissance et la majesté du soleil et du feu. Il a été utilisé comme décoration cultelle sur des urnes cinéraires (ręce boga)[21]. Le svastika est aussi employé dans les rites, la construction, la broderie sur les vêtements, les tapis et il orne des ustensiles ménagers ainsi que, aujourd'hui, de nombreux habitsfolkloriques. On le retrouve sur les habits orthodoxes.
Adolf Hitler s'est servi du svastika comme symbole de l'aryanisme. Le drapeaunazi comprend un svastika dextrogyre incliné à45 degrés (comme lacroix de saint André, d’ailleurs utilisée par la28e division SS Wallonie suivant lacroix de Bourgogne) de couleur noire sur un disque blanc exactement au centre d'un drapeau rouge. Il est alors appelé croix gammée nazie[23]. Après laSeconde Guerre mondiale, en raison de l'importance et de l'extrême violence des crimes perpétrés par les nazis, les représentations de la croix gammée sont évitées comme motif de décoration en Europe (alors qu'avant le nazisme, les frises avec des croix gammées en Europe ne connotaient rien de négatif). L'utilisation de la croix gammée nazie est d'ailleurs réprimée par la loi dans plusieurs pays européens.
En dehors de sa valeur de symbole religieux, le svastika apparaît souvent comme motif dans des constructions. Dans le mondegrec etromain ainsi que dans les lieux de culte des religions abrahamiques, il est difficile de savoir s’il est porteur d’un sens ou n’est qu’un simple ornement. En voici quelques exemples :
les dallagesmédiévaux, à l'exemple des illustrations ci-dessous. L'église conventuelle de l'abbaye des Dames cisterciennes de Fontenelle, àMaing en était pavée auXIVe siècle ;
l'architecture de la Renaissance enFrance : sous le règne deFrançois Ier, lechâteau de Chambord comporte dans la décoration murale d'une de ses salles une fresque ponctuée de svastikas ;
En dehors de ces motifs décoratifs, mais de façon beaucoup plus rare, le svastika peut également apparaître dans le plan au sol d'un édifice constitué de quatre ailes en « L ». On retrouve par exemple ce type de configuration dans un complexe de bâtiments de la base navale deCoronado àSan Diego, construit en 1967-1970 (architecte : John Mock) (32° 40′ 34″ N, 117° 09′ 28″ O). En2007 laNavy s'est engagée à apporter des modifications architecturales destinées à cacher cette forme, uniquement visible du ciel.
↑« Ce n’est pas parce que Hitler a fait un mauvais usage de ce symbole pour propager son régime de terreur, de racisme et de discrimination, qu’il faut en interdire l’usage pacifique », considèreRamesh Kallidai, à propos de l’initiative allemande d’interdire le svastika dans les pays européens[12]. »
↑Le jaïnisme, Vilas Adinath Sangave, traduction de Pierre Paul Amiel, relue et corrigée par Nalini Balbir, Professeur à la Sorbonne Nouvelle, Guy Trédaniel éditeur, page 149,(ISBN2-84445-078-4)
: document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.
Jean Chevalier et Alain Gheerbrant,« Svastika », dansDictionnaire des symboles, Paris, Robert Laffont,coll. « Bouquins »,,p. 912-913.
De Milloué, Le svastika ou croix gammée symbole religieux,Bulletin de la Société d'anthropologie de Lyon, tome 1/2, 1882. pp. 189-197(lire en ligne, consulté le 23 août 2019)