Schéma moléculaire de la dissolution du chlorure de sodium dans l'eau : le sel est le soluté, l'eau le solvant.
Unsolvant est unesubstance,liquide ousupercritique à sa température d'utilisation, qui a la propriété dedissoudre, dediluer ou d'extraire d’autres substances sans les modifier chimiquement et sans lui-même se modifier. Les solvants sont utilisés dans des secteurs très diversifiés tels que ledégraissage, lespeintures, lesencres, la détergence, lasynthèse organique, et représentent des quantités considérables en ce qui concerne le tonnage et le chiffre d'affaires.
En Suisse romande et en Belgique, on utilise le terme anglaisthinner pour les solvants organiques destinés à la dilution des peintures.
Le terme « solvant organique » se réfère aux solvants qui sont descomposés organiques qui contiennent desatomes decarbone. Habituellement, les solvants ont unpoint de fusion faible et s'évaporent facilement. Les solvants permettent de dissoudre lesréactifs et d'amener les réactifs en contact. Ils ne réagissent pas chimiquement avec le composé dissous : ils sont inertes. Les solvants peuvent aussi être utilisés pour extraire les composés solubles d'un mélange, l'exemple le plus commun étant l'infusion dethé dans de l'eau chaude.Les solvants sont souvent des liquides transparents avec une odeur caractéristique. Laconcentration d'une solution est la quantité desoluté dans un certain volume de solvant.
Pour les solutions liquides (phase uniforme liquide contenant plusieursespèces chimiques), si l'une des espèces est très largement majoritaire (au moins un facteur 100), on l'appelle le « solvant ». C'est le cas de l'eau pour les solutions aqueuses (par exemple une solution aqueuse desulfate de cuivre : l'eau est le solvant et lesionssulfate et cuivre(II) les solutés).
En règle générale, les atomes ou molécules de même nature s'assemblent pour former un liquide ou unsolide (uncristal ou un solide amorphe). Dans le cas d'une solution, le solvant empêche les atomes ou molécules de s'assembler, il les disperse. Dans le cas de l'eau, cela se produit selon deux phénomènes :
unesolvatation (pour l'eau unehydratation) : si les molécules du solvant sontpolaires, elles peuvent entourer les espèces dissoutes et former un « bouclier ».
Il existe de nombreuses classifications des solvants : en fonction de la nature chimique du composé, de sapolarité, de ses propriétés physico-chimiques[1], de son secteur d'utilisation, de sa toxicité, de son origine (pétrolière ou agrosourcée), etc.
Espècesnon ioniques : la majorité des solvants actuels sont des espèces nonioniques.
Espècesioniques : tandis que la plupart des solvants sont de nature moléculaire (formés d'une seule espèce neutre), il existe une nouvelle classe de solvants, appelésliquides ioniques, constitués d'anions et decations. Les liquides ioniques sont dessels fondus possédant un point de fusion inférieur à100 °C et unetension de vapeur quasiment nulle (ils sont non-volatils). Ils constituent une alternative de plus en plus sérieuse aux solvants moléculaires classiques et sont désormais très utilisés enélectrochimie. De nombreuses recherches actuelles s'intéressent à leur utilisation pour la séparation des métauxradioactifs et pourraient aboutir à des solutions particulièrement écologiques pour le retraitement desdéchets radioactifs.
Il est important de préciser que l'origine du solvant n'a pas de conséquence sur satoxicité ; un solvant agrosourcé peut être néfaste pour l'homme ou l'environnement (cas dufurfural).
Les solvantsagrosourcés (appelés aussibiosolvants) proviennent de la valorisation de la biomasse végétale (bois, sucre, huiles végétales,huiles essentielles). Les exemples les plus connus sont les alcools (méthanol,éthanol, etc.), lefurfural, leglycérol ou encore desesters comme le lactate d'éthyle.
Ladissolution peut se faire parréaction chimique entre des espèces du solvant (en général des ions) et le solide. Le cas le plus fréquent est celui de la dissolution par unacide : lesprotons H+ (ou dans l'eau, lesions oxonium H3O+) provoquent uneoxydation du solide2M + 2H+ → 2M+ + H2(l'atome de solide M cède unélectron à l'ion H+ qui peut alors former une molécule dedihydrogène), l'ion M+ étant alors soluble dans le solvant.
À haute température (au-delà de2 000 °C), leverre (dioxyde de silicium SiO2) est liquide. On peut donc y dissoudre un certain nombre de produits qui sont, eux, solides à cette température.
On peut aussi dissoudre les solides dans d'autres types de verre, par exemple le métaborate delithium ou le tétraborate de lithium, utilisés pour diluer les matériaux à analyser enspectrométrie de fluorescence X (technique de préparation dite de la « perle fondue »).
Bien qu'ayant lieu à haute température et avec un solvant différent, le principe est similaire à la dissolution dans l'eau (dispersion solvatation, dissolution acide).
Plusieurs raisons (telles que la raréfaction des ressources pétrolières, la réglementation de plus en plus stricte sur l'utilisation de composés volatils, toxiques ou reprotoxiques) incitent les industriels et académiques à se tourner vers de nouveauxsolvants alternatifs, souvent appelés « solvants verts »[5]. Il n'existe pas de définition officielle d'un solvant vert mais plusieurs définitions peuvent être mentionnées : l'adjectif « vert » peut faire référence aux 12 principes de lachimie verte[6] dans le cas où le solvant rempli un ou plusieurs de ces principes (synthèse avec économie d'atomes, issu de matières premières renouvelables...). Cependant, le terme « solvant vert » peut être employé dans différents cas, comme dans le cas où le solvant n'est pas toxique, ou bien qu'il estbiodégradable ou encore qu'il provient de ressources renouvelables. Ainsi, le terme « vert » peut correspondre à différentes définitions. C'est pourquoi différentes familles de solvants sont qualifiées de « solvants verts » : les solvants agrosourcés[7], lesliquides ioniques, lesfluides supercritiques, les polymères liquides.
Les solvants agrosourcés sont, comme leur nom l'indique, issus d'agro-synthons (petites molécules d'origine renouvelable pouvant être obtenues à partir decellulose, d'hémicellulose, de lignine, d'huile végétale, etc.) Leglycérol et le lactate d'éthyle sont deux exemples représentatifs de cette famille de solvants. Leur origine non pétrolière les classe parmi les solvants verts.
Les liquides ioniques sont classés parmi les solvants verts du fait de leur non volatilité. Cependant, de nombreux doutes subsistent sur la toxicité de ces composés. Les liquides ioniques les plus étudiés sont les dérivés imidazolium, mais leur toxicité prouvée tend les académiques à se tourner vers des structures moins toxiques pouvant même parfois être issues de ressources renouvelables. C'est par exemple le cas de l'acétate de choline.
Les fluides supercritiques sont classés parmi les solvants verts car ils sont inertes. L'exemple le plus utilisé est leCO2 supercritique. L'inconvénient de cet exemple est lié aux risques que présentent les installations industrielles mettant en œuvre des fluides supercritiques (sous pression).
Les polymères liquides sont aussi cités parmi les solvants verts du fait de leur non volatilité et, pour certains, de leurbiocompatibilité. Lespolyéthylène glycols, notés PEG, font partie de cette famille.
De nombreux solvants présentent des risques pour la santé, ce qui est d'autant plus inquiétant qu'en2003, 14,7 % de la population salariée était exposée à des solvants (contre 12,3 % en 1994 ; étudesINRS) ; il n'est pas nécessaire de travailler dans une usine chimique pour être en contact avec des solvants toxiques, les professionnels de la peinture, de laplasturgie, de l'imprimerie, du nettoyage, du funéraire, de la blanchisserie, etc. subissent aussi leurs effets néfastes.
Plusieurs types d'éthers de glycol ont été ainsi mis en cause dans des cas decancers graves ; neuf ont été classésreprotoxiques (dangereux pour les fœtus des femmes enceintes).
Enfin, de nombreux composés chimiques ont fait l'objet d'études faibles avant leur mise sur le marché et les risques réels qu'ils nous font courir sont mal connus. D'où l'importance du projet européenREACH qui pourrait obliger les industriels à mieux tester leurs produits, et l'importance du travail des comités d'hygiène (CHSCT en France) sur ces questions dans le cadre de l'entreprise. L'air des habitations peut aussi receler de nombreux solvants (issus des colles, peintures et vernis, mais aussi des produits d'entretien), d'où la recommandation d'aérer chaque pièce au moins 10 minutes chaque jour.
↑M. Durand, V. Molinier, W. Kunz et J.-M. Aubry,Classification of Organic Solvents Revisited by Using the COSMO-RS Approach,Chem. Eur. J., 2011, 17, 5155–5164.DOI10.1002/chem.201001743
↑Nicolas Rabasso, Chimie organique: hétéroéléments, stratégies de synthèse et chimie organométallique, De Boeck Supérieur, 2009