« Soldat fusillé pour l’exemple » désigne, dans le langage courant, unmilitaireexécuté après décision d’une juridiction militaire intervenant non seulement dans un cadre légal pour un délit précis mais aussi dans un souci d’exemplarité visant à maintenir les troupes en parfait état d’obéissance.
Il est très difficile d’apprécier le nombre exact de cas, et la part qu’a jouée parfois la volonté « de faire un exemple » d’un cas d’insubordination aufront, pour éviter les paniques généralisées.
La notion de fusillé pour l'exemple a été explicitée par l'arrêt de la Cour spéciale de justice militaire en date du qui a acquitté lesquatre caporaux de Souain et« déchargé leurs mémoires des condamnations prononcées » :« attendu que s'il est contraire à l'idée de justice, que la répression ait été ainsi limitée d'une façon arbitraire, aux seuls caporaux condamnés pour une faute commise par toute une compagnie, il est matériellement établi, et d'ailleurs, non contesté, que ces caporaux ont reçu de leur chef, l'ordre de marcher contre l'ennemi et qu'ils ne l'ont pas exécuté ».
Cette pratique est à distinguer des condamnations à mort après passage encour martiale, avec audition de témoins, conformément au Code de justice militaire, parfois utilisée par les états-majors de différents pays impliqués dans le conflit. Elle ne saurait non plus être confondue avec celle de ladécimation — dans laRome antique, pratique consistant à exécuter un soldat sur dix de façon aléatoire — qui a existé ponctuellement à Rome et dans quelques armées modernes, même si, dans plusieurs affaires d’abus d’autorité et par certains aspects, elle a pu laisser apparaître des points communs.
Après les désastres de son armée et la débandade qui s’ensuit, le gouvernement français autorise par un décret du l’établissement de cours martiales qui permettent l’exécution immédiate d’un soldat. Seul un compte rendua posteriori est demandé. Les exécutions sont nombreuses et marquent les esprits, mais les données historiques manquent cruellement pour donner un bilan chiffré fiable de ces exécutions.
Les fusillés deSaint-Étienne-de-Fursac, trois soldats exécutés en 1871, voleurs de poules ou déserteurs selon les versions, peuvent aussi être mentionnés.
Contrairement aux pratiques qui ont cours durant les périodes de guerre, l’exécution à la suite d'une condamnation à mort en temps de paix est commuée de manière quasi systématique en peine detravaux forcés par décret présidentiel, sauf en de rares cas. Dans son article portant sur les conseils de guerre en temps de paix dunuméro 73 de la Revue d'histoireVingtième siècle, Odile Roynette observe qu'en 1905, sur seize condamnations à la peine capitale prononcées par lesconseils de guerre en France et en Algérie, aucune n'a donné lieu à une mise à mort par un peloton d’exécution[1].
Il faut souligner ici qu'une loi du délègue en temps de paix l’exécution des peines capitales pour les crimes de droit commun à des professionnels de l’exécution civile, la mise à mort se faisant par décapitation parguillotine. Pour les crimes de droit militaire l'exécution reste le peloton d'exécution. Cette loi prend place dans un contexte de montée des tensions avecl’Empire allemand voisin.
L'armée française a comptabilisé, en, un total de 1 008 fusillés dont723 militaires français[2],21 militaires étrangers,176 civils et82 militaires français fusillés sans jugement. Sur les926 personnes jugées, 612 furent condamnées pour désobéissance militaire, 141 pour crimes dedroit commun, 126 pourespionnage, 47 pour motifs inconnus. Sur les82 fusillés sans jugement identifiés dans les archives militaires, 27 furent fusillés pour désobéissance militaire documentée par les archives militaires,55 exécutés ettués sommairement[3].
Suivant la défaite deCharleroi et l’échec de labataille des Frontières, les mêmes causes produisant souvent les mêmes effets, deux décrets du et du sont promulgués, instituant des Conseils de guerre spéciaux, s’ajoutant aux Conseils ordinaires qui continuent de se tenir. Fonctionnant selon une procédure simplifiée et expéditive inspirée des cours martiales de 1870, ces conseils s’exercent jusqu’à leur suppression en.
Près de huit millions d'hommes sont mobilisés de 1914 à 1918[4]. 2 400 poilusont été condamnés à mort et environ600 fusillés pour l’exemple[5],[6], les autres voyant leur peine commuée entravaux forcés. Ces condamnations sont prononcées pour refus d’obéissance,mutilations volontaires,désertion, abandon de poste devant l’ennemi,délit de lâcheté oumutinerie (en 1917). En revanche, les militaires abattus pour refus d'obéissance, ou « exécutions sommaires », qui sont liées à des refus d'ordres — par exemple : refus d'aller au combat, ou mêmeprostration, peur, ce qui était assimilé à un retrait face à l'ennemi — sont bien plus nombreuses et, quand les détails sont connus, les historiens doivent attendre souvent plus de100 ans après la fin du conflit pour consulter les rares archives, car souvent, ces exécutés sont marqués « morts au combat », ou « morts au champ d'honneur »[réf. souhaitée].
L’autorité militaire possède deux leviers : l'un fourni par le législatif, c'est le Code de Justice Militaire, l'autre fourni par l'exécutif, c'est le Règlement sur le service en campagne. Promulgué le sous la signature deRaymond Poincaré,Président de la République, il mentionne dans sonarticle 121 :« Les officiers et les sous-officiers ont le devoir de s'employer avec énergie au maintien de la discipline et de retenir à leur place, par tous les moyens, les militaires sous leurs ordres, au besoin, ils forcent leur obéissance ». Même si le mot « exécution sommaire » n'est pas prononcé,le sens de la phrase ne laisse planer aucun doute[réf. nécessaire].
Ce chiffre de612 fusillés ne prend pas en compte les exécutions sommaires. Celles-ci sont relatées dans les carnets de guerre des soldats. Ainsi lesMémoires d’un troupier d’Honoré Coudray du11e bataillon dechasseurs alpins explicite les exécutions sommaires auxquelles il dit avoir assisté :
en, unchasseur est accusé de dévaliser les morts ; blessé par les artilleurs, il est abattu par son commandant. Coudray commente« le taré P... a trouvé un moyen rapide de suppléer au conseil de guerre... aucun interrogatoire, aucune enquête ». Pour masquer son acte, le commandant inscrit la victime dans la liste des morts au champ d’honneur ;
en, un jeune chasseur de laclasse 1915, paniqué, fuit le front pendant un bombardement. Le commandant le convoque : « monte sur le parapet », le commandant le suit et le tue d’une balle dans la tête.
Outre les informations apportées par Honoré Coudray, ses convictions — fervent partisan de l’ordre, il reproche auxmutins de 1917 leur attitude de rébellion — montrent que la critique des exactions de ces cadres n’est pas liée à un parti pris contestataire[7].
En 1914, les condamnés sont principalement accusés de s’êtrevolontairement mutilé un membre (main, pied).Laisser sa main traîner au-dessus de la tranchée était passible du conseil de guerre[réf. nécessaire]
En 1915 et 1916, on assiste de plus en plus à desdésertions, puis se développent deux formes de crimes :
le refus d’obéissance pour marcher contre l’ennemi. Cette dénomination issue de la justice militaire est le prétexte à des condamnations totalement arbitraires notamment lorsque les généraux n’étaient pas satisfaits d’un repli de troupes ;
l’abandon de poste en présence de l'ennemi. Il s’agit de désertion dans la majeure partie des cas.
En 1917, les condamnations concernent des comportements collectifs. Les célèbres mutineries duChemin des Dames restent gravées dans les mémoires tant par leur caractère exceptionnel que dans la répression qui suivit[9].
ÀCraonne, lors des sanglants assauts commandés par le généralNivelle, ce sont 30 000 hommes qui meurent en10 jours (et 100 000 sont blessés).
En 1918, enFrance comme chez les Alliés, on constate un déclin des exécutions. En effet, les commandements militaires comprennent mieux l’état mental des soldats, les conséquences de l'obusite, ce choc psychologique provoqué par les conditions de vie des soldats sous les bombardements.
Voici la répartition par année des563 fusillés pour désobéissance militaire, documentée par les archives des conseils de guerre :
Répartition par année des563 fusillés pour désobéissance militaire, documentée par les archives des conseils de guerre
Année
nombre de fusillés
1914
125
1915
237
1916
110
1917
74
1918
12
1919-1921
5
L’évolution de la justice militaire pendant la guerre
Le code de justice militaire, dans sonarticle 156 précise que« l'accusé peut être traduit directement et sans instruction préalable devant le Conseil de Guerre ».
Le décret du a supprimé les recours auprès du Conseil de révision. Le décret du a suspendu le recours en grâce auprès du Président de la République (le texte signé de Millerand indique :« l'officier qui a ordonné la mise en jugement prendra immédiatement les mesures nécessaires pour assurer l'exécution du jugement » à moins qu’exceptionnellement il n'estime qu’il y a lieu de proposer au Chef de l’État une commutation de peine). Le décret du a autorisé la création des Conseils de guerre spéciaux.
Joseph Joffre réussit à imposer aux politiques la constitution de cours martiales dénommées « les conseils de guerre spéciaux », qui doivent juger rapidement en flagrant délit. Les prévenus sont jugés par une « cour » composée en général du commandant derégiment assisté d'un officier et d'un sous-officier. Ils votent et la majorité scelle le sort du soldat. En cas de condamnation à mort la sentence est applicable dans les24 h selon les préconisations de Joffre. Ainsi les principes d’indépendance des juges, de débats contradictoires et enfin de recours sont abolis. Sur les617 fusillés 407 le sont en 1914 et 1915[10]. Devant les abus révélés par la presse et les associations, le parlement tente d’atténuer cette justice expéditive.
La loi du d'une part supprime les Conseils de guerre spéciaux et d'autre part autorise les circonstances atténuantes pour les crimes et délits « militaires » en temps de guerre comme en temps de paix. Le décret du rétablit les recours auprès du Conseil de révision. Le recours en grâce redevient du ressort exclusif du Président de la République par le décret du, sauf du au où les recours en révision et en grâce sont temporairement suspendus.
En effet ce ne sont pas moins de600 poilus qui sont exécutés durant le conflit du côté français[11], et ce n'est pas l'année 1917 et sesmutineries qui entraînent le plus grand nombre d'exécutions (une cinquantaine), mais bien l'année 1914 avec quelque200 pelotons d'exécution réunis[12]. Ce nombre d'exécutions s'explique par un double mouvement : d'une part la détermination du commandement français à réprimer des actes d'indiscipline susceptibles d'entamer le moral des troupes, composées en grande majorité de soldats issus de laconscription et dont les militaires de carrière doutaient de la fiabilité sur le front ; et d'autre part en raison de la volonté d'acceptation par les troupes combattantes de la forte discipline et d'un tel niveau de répression jugé comme nécessaire au bon déroulement de la campagne. 1916 et la suppression des Conseils de guerre spéciaux vus comme un outil de répression expéditif et brutal, marque un tournant dans la grande guerre, le consensus s'est altéré après deux années de guerre, la discipline intransigeante des débuts est devenue intolérable pour les Poilus.
C'est en partie ce que tend à démontrer Emmanuel Saint-Fuscien dans sa thèse, il écrit dans sa conclusion :« L'autoritarisme ne peut plus s’exprimer en 1916 comme en 1914. […] jusque dans ses formes les plus violentes, l’autorité a dû s’adapter au niveau d’adhésion des hommes. Dès 1916, et plus encore en 1917, la répression ne pouvait s’exercer comme en 1914. L’intensité du rapport de force dépend certes des intentions de ceux qui commandent mais, en pratique, leur autorité est tempérée, limitée, et donc déterminée par le niveau d’adhésion de ceux qui obéissent »[13].
Cette section contient une ou plusieurslistes. Le texte gagnerait à être rédigé sous la forme de paragraphes synthétiques. Les listes peuvent demeurer si elles sont introduites par une partie rédigée et sourcée, de façon à bien resituer les différents éléments (novembre 2020).
Le, le généralRené Boutegourd ordonne, sans jugement, l’exécution « pour l’exemple » de sept soldats du327e régiment d’infanterie[16].Ce n’était pas le moment de regarder en arrière, il fallait se faire tuer sur place plutôt que de reculer d’un pouce., se justifie-t-il plus tard[17]. Les poilus sont accusés d’avoir, « par lâcheté », quitté leur position aux avant-postes lors d’une attaque auxEssarts-lès-Sézanne, sur le front de laMarne. Après une première salve, trois condamnés sont toujours vivants[18]. Une deuxième salve est ordonnée à laquelle ils survivent encore.« L’adjudant qui était là vint pour nous donner le coup de grâce en nous logeant une balle dans la cervelle. […] Quand il eut tiré sur les 2 premiers, il dit au capitaine qui commandait qu'il ne pouvait plus continuer, que ça lui faisait trop de peine. Le capitaine lui dit de s'assurer si nous étions bien morts. […] Il dit au capitaine que nous étions tous morts et le capitaine emmena le peloton »[19]. Le rescapéFrançois Waterlot se présente le lendemain au commandant du bataillon et demande à partir en première ligne. Gracié, il retourne au combat et meurt sur le front en 1915[20]. Les sept condamnés sont réhabilités en 1926[21].
LesMartyrs de Vingré du298e régiment d’infanterie — le caporal Henri Floch, les soldats Jean Blanchard, Francisque Durantet, Pierre Gay, Claude Pettelet et Jean Quinault — sont réhabilités solennellement par la Cour de cassation le.
Gustave Cerna, du 1er régiment de hussard, fut condamné à mort le 20 septembre 1914 pour « refus d'obéissance devant l'ennemi et d'outrages par paroles et menaces envers son supérieur » le 8 septembre 1914 à Barbonville en Meurthe et Moselle.
L'exécution deMata Hari représentée dans un film de 1920.
Jean-Julien Chapelant, sous-lieutenant commandant la3e section de mitrailleuses du98e régiment d’infanterie, a été capturé avec une poignée de survivants. Blessé, il réussit à regagner les lignes françaises. Pourtant, il est condamné à mort pour « capitulation en rase campagne ». Le, il est fusillé attaché à son brancard dressé contre un pommier[22].
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Lesfusillés de Flirey :Félix Baudymaçon de la Creuse a été fusillé avec le soldat François Fontanaud, le caporal Antoine Morange et le soldat Henri Prébost, à la suite du refus collectif de sa compagnie, du63e régiment d’infanterie, de remonter à l’assaut. Ils ont été réhabilités en 1934 par la Cour spéciale de justice militaire, cette dernière comprenant des anciens combattants[23].
Les soldatsCamille Chemin et Édouard Pillet, du37e régiment d’infanterie coloniale, ont été condamnés à mort à cause d’un malentendu. Leur capitaine les a désignés pour rester à l’arrière afin de surveiller des sacs. Un nouveau capitaine est nommé, celui-ci les considère comme déserteurs. Ils sont condamnés et exécutés. Ils seront réhabilités en 1934[24].
Lucien Bersot, du60e régiment d’infanterie, condamné à mort pour refus d’obéissance; il avait refusé de prendre un pantalon maculé de sang. Il a été réhabilité en 1922[23].
Les caporaux de Souain, les quatre caporaux Théophile Maupas, Louis Lefoulon, Lucien Lechat et Louis Girard, du336e régiment d’infanterie, ont été condamnés à la suite du refus collectif de la compagnie de remonter à l’assaut. Ils ont été réhabilités en 1934 par la Cour spéciale de justice militaire, cette dernière comprenant des anciens combattants.
Le soldat Jean-Baptiste Bachelier, né aux Sorinières (Loire-Atlantique) est fusillé le à25 ans[25][source insuffisante].
Joseph Gabrielli, soldat du140e régiment d’infanterie. Pauvre d’esprit, illettré et ne parlant que lecorse, il avait perdu le contact avec sa compagnie après s’être fait soigner d’une blessure reçue lors d’une attaque. Condamné pour abandon de poste le et fusillé le jour même, il fut réhabilité par la Cour spéciale de justice le.
Les sous-lieutenantsHenri Herduin etPierre Millant, du347e régiment d’infanterie. Pour s’être repliés surVerdun alors qu’ils étaient à court de munitions et dans l’impossibilité de recevoir des renforts, avec ce qui restait de leur compagnie (une quarantaine d’hommes), ils furent exécutés sans jugement àFleury-devant-Douaumont le. En 1921,Louis Barthou le ministre de la Guerre, écrit aux familles en indiquant, que les deux fusillés sont morts pour la France alors que ces fusillés ne sont pas réhabilités juridiquement. Ces compensations honorifiques et militaires sont complétées par des réparations financières. Ils seront réhabilités officiellement en 1926[26],[27],[28].
Le caporalJoseph Dauphin, du70e bataillon de chasseurs à pied condamné à mort le à la suite de la mutinerie de Beuvardes (car sous l’effet de l’alcool, les permissions ayant été refusées), il aurait tiré quelques coups de fusil et lancé à la cantonade des « propos séditieux ». Avant cette condamnation il avait reçu en 1915, laCroix de guerre avec palmes pour plusieurs actes héroïques. Promu caporal, il reçut par trois fois une citation pour sa conduite exemplaire au combat. Il n’a pas été réhabilité. Fusillé le à Ventelay (Marne). Cultivateur, marié, père d’un enfant. Inhumé au cimetière militaire de Cormicy (Marne).
Des milliers de combattants bulgares sur les 650 000 mobilisés sont accusés devant les cours martiales entre septembre 1915 et novembre 1916. 2 500 sont condamnés à mort et 800 exécutés[29].
Bien que sa participation à la guerre ne commence que le et que son nombre de belligérants ne soit pas le plus important, l’Italie serait le pays qui a exécuté le plus grand nombre de ses soldats.
Le chef de l’État-major,Luigi Cadorna rend plus sévères des lois déjà lourdement répressives. Il prescrit aux officiers de recourir à une justice sommaire. Il relégitime la décimation, disparue depuis longtemps[30]. Au moins 1 050 militaires sont passés par les armes dont 270 sans jugement. De plus, un nombre indéterminé mais important de soldats meurt dans des bombardements et des mitraillades ordonnés contre les troupes qui se retiraient, fuyaient ou tentaient de se rendre à l’ennemi[31]. En 1919, une commission d'enquête est confiée au général Tommasi qui constate l'illégalité de nombreuses exécutions[32].
« La mémoire de plus de mille Italiens tués par les pelotons d’exécution interpelle aujourd’hui notre conscience d’hommes libres et notre sens de l’humanité. »
— Sergio Mattarella, Président de la République italienne, Chef des forces armées et Président du conseil suprême de défense, au colloque « L’Italie dans la Guerre mondiale et ses fusillés : ce que nous savons (ou pas) », à Rovereto les 4 et 5 mai 2015[33]
La France avec953 fusillés, chiffre obtenu par le service historique de la défense en 2014 mais dont la méthodologie a été critiquée par l'historienAndré Bach[34], se situerait en deuxième position devant leRoyaume-Uni et les pays duCommonwealth avec au total306 fusillés[35],[36],[37],[38],[39],[40],[41]. L'Allemagne indique 48[42] et leCanada25 fusillés[43]. Il y eut aussi de nombreuses exécutions dans l'arméerusse. L’arméeaméricaine fait état de36 exécutions. La justice militaire belge a prononcé 220 condamnations à mort mais 9 ou 12 soldats belges seulement ont été exécutés[44]. Aucun ne l'a été après le[45].
Lecorps expéditionnaire portugais a eu un homme fusillé pour avoir voulu se rendre à l'ennemi. Il a été le seul condamné à mort au Portugal auXXe siècle. La peine de mort a été abolie au Portugal en 1867 pour les civils et en 1911 pour les militaires mais elle a été réintroduite en 1916 pour des crimes de guerre. Le soldat a été réhabilité en 2017. « C'est réhabiliter la mémoire d'un soldat condamné à une peine contraire aux Droits Humains et aux valeurs consolidées de la société portugaise. », a déclaré le Ministère de la Défense portugais[46].
Le Monument deRiom est un des raresMonuments aux morts pacifistes ; il est situé dans le département duPuy-de-Dôme enAuvergne. Il est dédié à la mémoire des poilus fusillés pour l’exemple et a été édifié grâce à l’action de l’Association républicaine des anciens combattants, fondée notamment parHenri Barbusse (premier président de l’ARAC) et des proches (dontPaul Vaillant-Couturier etBoris Souvarine…), anciens combattants de la Première Guerre mondiale et souvent militants de laSFIO. Il y est inscrit :« Aux victimes innocentes des conseils de guerre 1914 - 1918 et à celles de lamilice et de laGestapo 1939 - 1944 ». Le monument en lave de Volvic, qui se trouve dans lecimetière des Charmettes de Riom, a la forme d’un obélisque posé sur une base quadrangulaire. Élevé à l’initiative de l’ARAC et de son président local, Julien Favard, avec l’appui d’Étienne Clémentel et de la municipalité de Riom, il a été inauguré le, dans un climat de polémique[47]. Après laSeconde Guerre mondiale, ont été associées à cet hommage les victimes de laGestapo et de la Milice.
Sur la tombe de Félix Baudy àRoyère-de-Vassivière, ses amis ouvriers maçons ont déposé une plaque commémorative avec l’inscription « Maudite soit la guerre - Maudits soient ses bourreaux - Baudy n’est pas un lâche - Mais un martyr ».
Le a été inauguré àSuippes située dans ledépartement de laMarne, un monument à la mémoire descaporaux de Souain fusillés pour l’exemple le à Suippes. La réalisation du monument a été confiée au sculpteur Denis Mellinger dit Melden. Il s’est inspiré d’un dessin de Jacqueline Laisné[48].
Le 6 avril 2019, à l'initiative de la Libre Pensée, un monument est inauguré àChauny pour la réhabilitation des 639 Français fusillés pour l'exemple[49].
LeShot at Dawn Memorial est un monument anglais près de Alrewas dans leStaffordshire en mémoire des306 soldats fusillés pour l’exemple durant la Première Guerre mondiale[50].
En Italie, le maire deCercivento fait apposer en 1996 une plaque à la mémoire de quatre soldats fusillés dans ce village pour avoir refusé une mission suicide[51].
Ils n’ont pas choisi leur sépulture : c’est une sculpture monumentale en bronze de quatre mètres de haut réalisée par le sculpteurHaïm Kern pour le mémorial duplateau de Californie à Craonne. Ce mémorial a été inauguré parLionel Jospin en 1998, le jour de son discours visant à réintégrer les soldats fusillés pour l’exemple dans leur honneur.
Un long dimanche de fiançailles, film deJean-Pierre Jeunet, d'après le roman deSébastien Japrisot, sorti en 2004. L’héroïne du film, Mathilde jeune boiteuse romantique part à la recherche de son amoureux Manech, présumé mort. Celui-ci, avec quatre de ses compagnons, a été accusé de mutilation volontaire et condamné à mort. Ils seront conduits jusqu’à un avant-poste nommé « Bingo crépuscule » et abandonnés à leur sort dans ceno man’s land qui sépare les deux camps. Mathilde mène son enquête et découvre des indices qui vont l’amener à retrouver Manech.
Le téléfilmBlanche Maupas dePatrick Jamain sur un scénario d’Alain Moreau, diffusé le surFrance 2, retrace la vie le combat de Blanche jouée parRomane Bohringer, épouse de Théophile Maupas (Thierry Frémont), pour la réhabilitation des soldats fusillés pour l’exemple[52].
Fucilati in prima ligna / Fusillés en première ligne, film documentaire de Jackie Poggioli, sur lesCorses fusillés pour l’exemple au cours de la Première Guerre mondiale. Durée78 minutes, produit par France3 Corse, première diffusion le. Parmi les chercheurs interviewés figure le général André Bach. À la suite de ce documentaire, l'Assemblée de Corse a voté à l'unanimité, en, une motion demandant la réhabilitation des fusillés.
Exposition sur la campagne pour la réhabilitation des fusillés pour l'exemple « Maudite soit la guerre »[53].
Très peu, environ une quarantaine[54] sur 600, ont été rétablis dans leur honneur dans les années 1920 ou 1930, à force d’acharnement et de courage de la part des familles de victimes soutenues par les associations d’anciens combattants et par laLigue française pour la défense des droits de l’homme et du citoyen.
La famille du soldat fusillé pour l’exemple était doublement touchée du deuil. Le frère d'Henry Floch indique lors de l’inauguration du monument de Vingré en 1925[55] :« Nous avons vécu dans une atmosphère affreuse de la suspicion illégitime et la honte injustifiée ». Le fils de Pettelet autre fusillé de Vingré a dû être retiré de l’école, son éducation est confiée à un précepteur. La veuve Pettelet a reçu des insultes et des menaces, elle sort dans la rue avec un pistolet pour se protéger[56].
En 2006, l’affaireLéonard Leymarie a amené le sénateur de laCorrèzeGeorges Mouly(R.D.S.E.) à attirer l’attention d’Hamlaoui Mekachera, alors ministre délégué aux anciens combattants, sur les « fusillés pour l’exemple ». Il lui a demandé l’état de la réglementation actuelle quant à l’inscription du nom des fusillés pour l’exemple réhabilités sur lesmonuments aux morts des communes, où ils ne figurent pas[57]. En effet, jusqu’en 2008, le nom de Leymarie est demeuré absent du monument aux morts deSeilhac érigé en 1924. Mais sa réhabilitation avait échoué malgré les efforts répétés à trois reprises de la Ligue des droits de l’Homme entre 1921 et 1925. Sa fiche, visible sur le site Mémoire des hommes, mentionne pourtant une réhabilitation sans donner la moindre date. En revanche, àSeilhac, la mention « Mort pour la France » avait été ajoutée avant 1919 à son acte de décès transcrit le sur le registre d’état civil (acteno 12). Cette mention existait sur l’acte de décès du305e RI (no 99), établi àAmbleny (Aisne) le et contresigné par deux témoins, un caporal et le médecin aide-major du dit régiment. Dans sa réponse, le ministre a rappelé que les noms des militaires fusillés pour l’exemple puis réhabilités peuvent être inscrits sur les monuments aux morts communaux, s’ils se sont vu attribuer la mention « mort pour la France ». Cette décision d’inscription incombe aux communes, sous la tutelle du préfet. Il n’existe toutefois aucune obligation d’inscription pour les communes.
L’article L. 488[58] ducode des pensions militaires d’invalidité et des victimes de la guerre distingue cinq catégories de morts pour la France :
les militaires qui ont été tués à l’ennemi ;
ceux qui sont morts de blessures de guerre ;
les décédés de maladie contractée en service commandé en temps de guerre ;
les victimes d’accident survenu en service ;
ceux qui sont morts à l’occasion du service en temps de guerre[59].
Quatorze Conseils généraux ont pris position pour la réhabilitation des fusillés pour l’exemple : l’Aisne (le), l’Allier, l’Ardèche, la Corrèze, le Doubs (en[62]), la Haute-Garonne, l’Hérault, la Loire, l’Oise, le Rhône (le), la Haute-Saône, la Somme, l’Essonne (le[63]), la Nièvre (délibération du conseil général le)
En, l’Assemblée de Corse a adopté à l’unanimité une motion demandant la réhabilitation des soldats fusillés pour l’exemple pendant la Première Guerre mondiale.
Le, le conseil régional de Champagne-Ardenne vote un vœu pour la réhabilitation jugeant notamment que« tous ces hommes ont été injustement dépossédés de leur honneur. Il appartient à la République de le leur rendre et de réparer cette injustice comme le demandent leurs descendants et nombre d'associations. Le conseil régional apporte son soutien à cette réhabilitation pleine, publique et collective de tous les « fusillés pour l'exemple » de la guerre de 1914-1918 et demande au président de la République de prendre une décision forte en ce sens ».
En 2008, le secrétaire d’État à la Défense et aux Anciens combattants,Jean-Marie Bockel, a indiqué qu’il réfléchissait à une réhabilitation, « au cas par cas », de mutins de la Première Guerre mondiale, afin queNicolas Sarkozy puisse « prendre une orientation d’ici le »[68]. À la suite de cette annonce des journaux nationaux évoquent cette question[69]. Leprésident de la République Nicolas Sarkozy a rendu hommage à tous les morts de la Première Guerre mondiale le, y compris les soldats français fusillés par leur commandement[70],[71].
Le, des sénateurs communistes ont déposé une proposition de loi relative à la réhabilitation collective des fusillés pour l’exemple de la guerre de 1914-1918 comportant un article unique ainsi rédigé : Les « fusillés pour l’exemple » de la Première Guerre mondiale font l’objet d’une réhabilitation générale et collective et, en conséquence, la Nation exprime officiellement sa demande de pardon à leurs familles et à la population du pays tout entier. Leurs noms sont portés sur les monuments aux morts de la guerre de 14-18 et la mention « mort pour la France » leur est accordée[72].
En 2013, l'historienAntoine Prost remet un rapport au ministre délégué aux anciens combattants,Kader Arif. Le chef de l'ÉtatFrançois Hollande devait s'appuyer sur ce document afin de prendre une décision[73], mais il ne semble pas avoir décidé[74].
En 2014, le généralAndré Bach publie des statistiques publiques, mises à jour en 2015, au sein du Prisme14-18[75].
Dans la nuit du jeudi au vendredi 14 janvier 2022, l'Assemblée Nationale a voté pour une réhabilitation de plus de 600« fusillés pour l'exemple » lors de laPremière Guerre Mondiale. Ce texte, porté par le députéinsoumisBastien Lachaud, stipule que :« Les militaires en service dans les armées françaises du 2 août 1914 au 11 novembre 1918 ayant été condamnés à mort pour désobéissance militaire ou mutilation volontaire (…) et dont la condamnation a été exécutée, font l'objet d'une réhabilitation générale et collective, civique et morale ». En outre la proposition de loi adoptée demande que les noms des soldats soient inscrits sur les monuments aux morts et qu'un monument national soit érigé[76].
Le gouvernement britannique a, en 2006, par voie législative, réhabilité les306 soldats britanniques fusillés[35],[77],[78]. Les cinq fusillésnéo-zélandais ont été réhabilités en 2000, et lesCanadiens honorés l’année suivante[79],[78].
En 1998, le ministre de la Défense,Carlo Scognamilio, (centre droit) souhaite que l'Italie réhabilite les fusillés :« Comment ne pas être du côté de ceux qui tentèrent d'éviter une mort inutile, stupide ? Les pauvres soldats qui furent fusillés par nos pelotons d'exécution ne furent pas moins héroïques que ceux qui sont morts au combat »[67].
En 2014, l’évêque Santo Marcianò de l’Ordinariat militaire en Italie demande la réhabilitation des fusillés :« Rien ne peut justifier une telle violence, jointe à la diffamation, à la honte, à l’humiliation »[80].
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↑chiffres officiels donnés par le gouvernement fin juin 1917, voir H. Castex, op. cit.Guy Pedroncini évalue ces condamnations à mort entre 60 et 70. Ces chiffres ont récemment fait l’objet d’une réévaluation à la baisse : selon l’historienDenis Rolland il y aurait eu environ30 exécutions.
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