Izmir, traditionnellement appeléeSmyrne (enturcİzmir ; engrec moderne :Σμύρνη,Smýrni), est une ville deTurquie, située sur lamer Égée près dugolfe d'Izmir. C'est le deuxième port du pays (aprèsIstanbul) et la troisième agglomération turque par le nombre d’habitants (4 425 789 habitants en 2021[1]). Seshabitants sont lesSmyrniotes (İzmirli en turc).
İzmir est la formeturque moderne du nomSmyrne, ville connue depuis l'Antiquité (commeİznik pourNicée). La formeSmyrne a été longtemps préférée en français à la forme turque franciséeIzmir, qui ne s'est imposée qu'auXXe siècle. Aucungentilé formé surIzmir n'est signalé, à l'exception des noms de famillealgériens ettunisiens Zmir, Zemirli, Zmirli ou Zermirline[2].
Smyrne fut fondée vers par lesLélèges sur le site appelé aujourd'huiTepekule (« butte de la tour »), près de l'actuelleBayraklı. Selon lalégende, son nom proviendrait de celui d'une reineamazone. Entre et, elle fit partie duroyaume hittite puis, à la suite de l'effondrement de l'État hittite face aux attaques desPhrygiens, elle devint une citééolienne auXIe siècle av. J.-C.
SelonHérodote[3], les Éoliens perdirent Smyrne à cause d'une imprudence de ses habitants. Ces derniers, après avoir accordé l'asile à desIoniens qui fuyaientColophon à la suite d'une sédition manquée, ne tardèrent pas à organiser une fête à l'extérieur de la ville en l'honneur deDionysos. Les Smyrniotes éoliens ayant quitté leur ville pour rejoindre la fête, les Ioniens fermèrent les portes de la cité et s'en emparèrent.
De à, Smyrne, comme la plupart des cités d'Asie Mineure, soutint le roi duPont (Mithridate VI Eupator) dans sa guerre contre Rome.Sylla, général romain, entreprit la conquête de l'Asie Mineure. Il prit Smyrne et obligea chacun des habitants de la cité à défiler nu en plein hiver. Lors de lapaix de Dardanos (), qui conclut la guerre entre Rome et Mithridate VI, Smyrne, comme la majorité des cités libres d'Asie et d'Égée, entra alors dans laprovince romaine d'Asie.
Dans l'Antiquité, Smyrne était une cité prospère aux multiples communautés :grecs polythéistes, adeptes descultes à mystères ouchrétiens,romains,juifs helléniques,arméniens… Artistiquement, elle est connue pour sesgrotesques : desfigurines en terre cuite dont la particularité est d'exagérer un défaut physique lié souvent à la maladie. Il semble que ces représentations n'étaient pas seulement des objets artistiques ou de divertissement, mais aussi desamulettes ou desex-voto. Smyrne possédait une école demédecine où séjourna le médecinGalien. Il est probable que certaines de ces sculptures servaient à illustrer des maladies comme l'hydrocèle (accumulation anormale de liquide ou de gaz dans untesticule). Une collection de ces objets est visible aumusée du Louvre.
En 1320 elle fut conquise une deuxième fois par lesTurcs deMehmed Bey,émir d'Aydın. Son filsUmur Bey perdit la citadelle du port (enturcLiman Kalesi) au profit desHospitaliers de l'ordre de Saint-Jean de Jérusalem le[7]. Jusqu'en 1402 les Croisés et les Turcs gardèrent leurs positions respectives, les Croisés dans la Citadelle du port et les Turcs dans la « citadelle de velours » (Kadifekale), jusqu'à ce queTamerlan soit victorieux contre les Hospitaliers, et détruise la Citadelle du port en.
En 1426, Smyrne fut conquise pour la troisième et dernière fois par lesTurcsOttomans. L'importance économique et culturelle de Smyrne s'accrut progressivement durant les 500 ans où elle fit partie de l'Empire ottoman, dont elle fut l'une des cités les plus riches, et toujours aussimulticulturelle. Elle était par ailleurs le chef-lieu dusandjak (district) deSaghala et du vilayet (province) d'Aïdin. La ville est d'ailleurs le lieu de naissance deSabbataï Tsevi (1626–1676), « messie » auto proclamé, qui provoqua une importante crise au sein de lacommunauté juive de l'Empire ottoman, dontune partie se convertit alors à l'Islam. Mais les chrétiens aussi furent nombreux à s'y convertir, ne fut-ce que pour échapper à la double-capitation duharaç, conforme à laloi islamique et à l'enlèvement de leurs garçons premiers-nés pour être élevés enjanissaires : ce sont les « linobambakis ».
Le peintreAlexandre-Gabriel Decamps fut l'un des principaux artistes des scènesorientalistes, bien qu'il n'ait visité qu'une seule fois le Moyen-Orient, en 1828. DansLa Patrouille turque, neuf hommes d'une patrouille à pied accompagnent Cadji-Bey, le chef de la police, lors de sa tournée[10].
Le nouveau port (1870) est construit par l'entreprise Dussaud et les deux premières lignes de chemin de fer relient Smyrne à Kassaba et àAïdin en 1856. Tout cela concourt à projeter la ville dans l'ère moderne, mais avec un paradoxe qui pèsera lourd en 1922 : alors qu'elle est une ville de l'Empire ottoman, lesTurcs, majoritaires dans l'agglomération mais pauvres et exerçant les professions les plus pénibles, y sont relégués dans les villages de la périphérie et le quartier aux ruelles étroites et tortueuses de Kadifekale, tandis que les « Francs » et les Grecs, riches commerçants pour la plupart, occupent le front de mer et le centre-ville de style européen : leKonak[11].
Dans les dernières semaines de la guerre, lescivils ottomans chrétiens,Grecs ouArméniens, surtout deIonie mais plus largement d'Anatolie, craignant les représailles turques à la suite desnombreux massacres perpétrés par les troupes grecques envers les populations turques[réf. nécessaire], affluent en masse à Smyrne : ils sont plus de 200 000 le lorsque les troupes grecques évacuent la ville. Il ne reste plus alors dans le port que des navires étrangers (anglais, français, italiens et américains) qui recueillent en priorité leurs propres ressortissants et repoussent les barques des civils grecs ou arméniens qui tentent de les aborder. Les noyades se multiplient tandis que les premières troupes turques réinvestissent le lekonak, après avoir été acclamées en libératrices par les musulmans en périphérie de la ville et à Kadifekale. Les exactions commencent : jusqu'au, la ville est livrée aux pillages, à la vindicte populaire et aux exécutions sommaires contre les populations chrétiennes accusées de« collusion avec l'occupant ». Lemétropolite de Smyrne,Chrysostome de Smyrne, qui avait refusé de s'embarquer avec les derniers officiels grecs, est lynché sur la grande place, au vu des sentinelles françaises du consulat qui ont ordre de ne pas intervenir pour préserver la sécurité des ressortissants français. Les tentatives du consul américain Horton pour organiser l'évacuation sont désavouées par son gouvernement.
Le, unincendie éclate dans le quartier arménien. Il s'étend rapidement à tout lekonak, alors que de nombreux biens se trouvaient toujours abandonnés sur place. En une semaine, il détruit presque tout lekonak et y fait près de 2 000 morts[13],[12],[14]. L'origine de ce désastre reste inconnue et fortement disputée : les Grecs et les Arméniens en imputent la responsabilité aux pillards, tandis que les Turcs accusent les chrétiens de s'être livrés à une politique de terre brûlée pour empêcher que leurs biens n'échoient aux troupes kémalistes. Mais les témoignages, notamment celui deGeorge Horton, affirment que le quartier arménien était gardé par les troupes kémalistes qui y interdisaient la libre circulation.
Le consul Horton dénonce l'indifférence internationale, et la flotte grecque est autorisée le à revenir à Izmir : elle évacue jusqu'au 180 000 réfugiés, prélude de l'échange de populations musulmanes et chrétiennes qui a lieu entre la Turquie et la Grèce l'année suivante, selon les dispositions dutraité de Lausanne (1923). Dans son ouvrage paru en 1926,The Blight of Asia, Horton affirme que les autorités kémalistes ont sciemment provoqué la destruction de Smyrne pour rendre impossibles tout retour ou indemnisation des réfugiés expulsés[15].
La ville, où seuls les quartiers musulmans furent épargnés par l'incendie, ce qui semble confirmer le témoignage de Horton[16] sera progressivement reconstruite d’après les plans de l'urbaniste René Danger[17]. La ville accueille tous les ans dans la première semaine de septembre, depuis 1936, la Foire internationale pour laquelle a été aménagé un grand parc au centre de la ville : leKültürpark.
Après laSeconde Guerre mondiale, Izmir connaît un boom démographique en partie dû à l'exode rural depuis les provinces orientales. Le projet d'extension deLe Corbusier, invité par la municipalité en 1939 puis en 1948, n'est pas réalisé. La ville présente cependant un aspect très moderne, que seuls viennent atténuer les quartiers du port (lekonak, ancien quartier « franc ») et les pentes de la citadelle de Kadifekale.
Devenue entièrement turque, Izmir a conservé sa tradition de ville ouverte sur l'Occident. Il reste à Izmir des traces et des liens de la présence d'une communauté francophone, dont une église catholique et le lycée catholique Saint-Joseph, établi par lesFrères des écoles chrétiennes en 1880, qui poursuit sa mission, bénéficiant du labelLabelFrancÉducation.
En 2020, la ville a été endommagée par leséisme de 2020 en mer Égée, qui a été l'événement sismique le plus meurtrier de cette année-là. 117 personnes sont mortes et 1 034 autres ont été blessées en Turquie, toutes sauf une originaires de la ville d'Izmir[18].
Une vue panoramique sur le quartier Alsancak d'Izmir.
Gare Alsancak (1858).
Gare Basmane (1876).
Alsancak, Izmir.
Cumhuriyet Meydanı (place de la République).
Cumhuriyet Meydanı (place de la République).
Chambre de commerce d'Izmir.
Crowne Plaza Hotel et centre commercial d’Özdilek.
Izmir possède plusieurs universités, les plus anciennes étant l'université d'Égée (Ege Üniversitesi, 1955) et l'Université du 9-Septembre (Dokuz Eylül Üniversitesi, 1988).Récemment[Quand ?] se sont ouvertes des universités privées : Université d’économie àBalçova et Université Yaşar àBornova (ville).
Le festival de musique d'Izmir se déroule chaque été, en partie dans des sites historiques comme le théâtre d'Éphèse. Dans le parc de la Culture se tiennent de nombreuses manifestations, dont la foire du livre et la foire internationale de la pierre (en avril). La municipalité a inauguré, en 2008, le Centre culturel Adnan Saygun, du nom du plus célèbre compositeur turc.
Comme dans la plupart des villes de l'Ouest, à Izmir on y danse lezeybek. Leboyoz et le Izmir Köftesi sont des plats typiques d'Izmir. On y cuisine généralement des plats à base d'huile d'olive et différentes sortes de salades comme le ısırgan otu salatası qui est une salade à base de grandes orties, d'huile d'olive, d'une gousse d'ail écrasée, de jus de citron et d'Orange, de fromages en grains et de grains de grenades.
Selon l'orientaliste anglaisRichard Pococke, Smyrne comptait environ 100 000 habitants en 1739 (84 000 Turcs, 8 000Grecs, 6 000Juifs et 2 000Arméniens) ; selon le diplomate françaisJoseph Michel Tancoigne[19], Smyrne comptait en 1812 106 000 habitants (60 000 Turcs, 25 000 Grecs, 10 000 Arméniens, 6 000 Européens (principalement Français, Anglais, Italiens, Hollandais, Allemands et Russes), et 5 000 Juifs)[20]. En 1848, le voyageur-historienBaptistin Poujoulat écrit dansRécits et souvenirs d'un voyage en Orient que la ville comporte 150 000 habitants, « dont près des deux cinquièmes sontGrecs ; le reste est Turc, Arménien, Juif et Européen. »[21]. Dix ans plus tard, l'abbéPierre Azaïs[22] parle d'une ville de 160 000 habitants, dont 80 000 Turcs, 60 000 Grecs et Arméniens et 20 000Francs[23], c.-à-d. Occidentaux.
Izmir bénéficie d’unclimat méditerranéen, avec un été chaud et sec avec des maxima de 32 °C (moyenne de 27 °C), et un hiver doux, avec des minima de 6 °C (moyenne de 10 °C). Entre mai et septembre, il pleut très peu, mais il peut y avoir des orages violents et de fortes pluies causant des inondations.
En hiver, la neige reste seulement quelques heures et ne tombe pas chaque année. Contrairement à la neige, le grésil et la neige mouillée sont plus fréquents et ils tombent plus ou moins chaque année. Les températures tombent rarement au-dessous de zéro, et les gelées sont légères et éphémères.