Cette région auclimat désertique chaud est aujourd'hui habitée par plus de 400 000 Égyptiens, principalement au nord le long de la frontière israélienne et de labande de Gaza. Les villes les plus connues sontCharm el-Cheikh etTaba, qui sont des destinations touristiques importantes.
Le point le plus élevé, situé au sud de la péninsule, est lemont Sainte-Catherine culminant à 2 642 m[1] et qui est aussi le sommet le plus haut d'Égypte. Lemont Sinaï, (en arabe : جبل موسىDjebel Musa : « Montagne de Moïse », 2 285 m[1]), voisin, est d'après laBible, le lieu oùMoïse aurait reçu lesDix Commandements. Toutefois, les historiens et les archéologues rejettent généralement l'idée que le site marquerait l'emplacement du mont décrit dans la Bible. À proximité des deux sommets se trouve lemonastère Sainte-Catherine, fondé auVe siècle et la plus anciennearchitecture byzantine préservée jusqu'à aujourd'hui[1].
Carte du Sinaï avec la localisation des principales villes.
Le Sinaï a une longueur approximative de 210 km pour une superficie globale de 59 000 km². Les côtes ont une longueur totale d’environ 600 km et la mer dans legolfe de Suez a une profondeur de 80 m. Entre legolfe d’Aqaba s’ajoute une profondeur de 1 830 m.
Le Sinaï est un territoire quasi entièrement désertique mais il est toutefois habité versTaba, près de la ville israélienne d'Eilat, où se trouvent hôtels et casinos. Au sud, le long de la côte, se trouveNuweiba,Dahab etCharm el-Cheikh. La péninsule du Sinaï est aussi peuplée sur la côte nord à proximité de labande de Gaza àEl-Arich.
Dans la partie sud de la péninsule, se trouvent les plus hauts reliefs, dont le sommet le plus haut de l’Égypte, lemont Sainte-Catherine mais aussi lemont Sinaï et le mont Serbal.
La zone orientale de la péninsule est connue comme lavallée du Grand Rift et est une fosse géologique qui s’étend de la vallée duJourdain vers le sud, de l’autre côté de la mer Rouge, auKenya.
À partir de 640, laconquête musulmane de l'Égypte fait du Sinaï une voie de passage ducalifat arabe. Les Égyptiens chrétiens (Coptes), brimés dans leur religion par lesByzantins, opposent peu de résistance : la religion musulmane et la langue arabe remplacent peu à peu le christianisme et la langue copte[4]. Le christianisme subsiste dans l'isolement dumonastère Sainte-Catherine[5].
Les souverains et gouverneurs musulmans de l'Égypte ont le privilège d'assurer la protection dupèlerinage de La Mecque qui traverse le Sinaï. Vers 875,Ahmad Ibn Touloun, gouverneur de l'Égypte pour lecalifat abbasside, fait creuser des puits et des citernes pour ravitailler les pèlerins. La construction de forteresses dans le Sinaï permet aussi aux souverains musulmans de contrôler la circulation maritime sur legolfe d'Aqaba[6].
La fondation duroyaume de Jérusalem en 1099 fait du Sinaï une zone frontière entre le royaume de Jérusalem et l'Égypte musulmane. Le roiBaudouinIer de Jérusalem (1100-1118) mène plusieurs expéditions au cœur de la péninsule. La lagune séparant le nord du Sinaï de la mer Méditerranée, porte encore le nom du roi sous sa forme arabisée delac Bardawil[4].
L'autre figure majeure de l'époque des croisades est le sultanSaladin (1171-1193). On peut encore visiter les deux forteresses deRas Sudr, située sur un éperon rocheux entre le désert et la mer, et de l'île de Graye, aussi appeléeîle du Pharaon, dans le golfe d'Aqaba. Ces édifices avaient pour fonction d'assurer la protection du principal axe de circulation qui reliait les deux parties de l'empire de Saladin, à savoir l'Égypte et laSyrie, tout en contournant par le sud le royaume latin de Jérusalem[4].
Le Sinaï n'est plus à la fin du Moyen Âge la terre chrétienne et le foyer du monachisme de la fin de l'Antiquité. Bien au contraire, cette terre est devenue très largement musulmane, La nouvelle géographie du Sinaï qui se met en place dans les derniers siècles du Moyen Âge est encore largement perceptible aujourd'hui, même si, à son tour, elle est menacée par des transformations profondes et d'une tout autre ampleur : ce sont les migrations des agriculteurs de la vallée duNil qui viennent coloniser les terres nouvellement irriguées de ce désert tandis que letourisme de masse gagne peu à peu l'ensemble des côtes de lamer Rouge[7].
En 1798, l'armée française de l'expédition d'Égypte, commandée parBonaparte, bat les Mamelouks, franchit le désert et tente, sans succès, de conquérir le Levant. Après le retrait des Français, unpacha ottoman,Méhémet Ali, rétablit l'ordre en Égypte où il s'impose comme vice-roi de fait : il fonde ladernière dynastie égyptienne, nominalement vassale des Ottomans jusqu'en 1914.
Dans la carte annexée aufirman du reconnaissant à Méhémet Ali la possession héréditaire de l'Égypte, la frontière orientale du pays est fixée au milieu du Sinaï, le long d'une ligneRafah-Suez. Le Caire se voit néanmoins reconnaître certains pouvoirs administratifs sur le sud de la péninsule dans le but de protéger lespèlerinages à la Mecque[8].
Après leur prise de contrôle de l'Égypte en 1882, la volonté d'assurer la protection ducanal de Suez conduit les Britanniques à prendre le contrôle de la péninsule. En, Jennings Bramly reçoit l'ordre d'installer un poste frontière à Umm Rashrash (l'actuelleEilat). Quelques jours après son arrivée, Rushdi Pasha, commandant ottoman de la place d'Aqaba, lui demande de se retirer et Bramly se replie pour éviter un affrontement contre des forces supérieures en nombre. Doté de troupes supplémentaires, Bramly est de retour quelques jours plus tard avec instruction de s'installer àTaba (Égypte). Entretemps, le lieu a été occupé par les Ottomans qui ont reçu d'importants renforts. L’officier britannique décide donc de s'installer à proximité sur l’île de Faron[8].
Si la situation évolue peu sur le terrain dans les mois qui suivent, l'activité diplomatique est par contre intense. Les Turcs font une première proposition de concession assurant à l'Égypte le contrôle du Sinaï au nord d'une ligneRafah-Suez et au sud d'une ligneAqaba-Suez, tout en conservant pour eux-mêmes un triangle leur permettant de prolonger lechemin de fer du Hedjaz versAqaba etSuez. La proposition est rejetée par les Britanniques, le prolongement de la ligne de chemin de fer menaçant leur contrôle sur lecanal de Suez[8].
Constantinople fait alors une seconde proposition divisant en deux le Sinaï le long d'une ligne allant deEl-Arich au nord àCharm el-Cheikh au sud. Mais les Britanniques rejettent de nouveau une proposition qui ferait dugolfe d'Aqaba une mer intérieure ottomane pouvant servir de base à l'attaque des navires britanniques en route vers l'Inde[8].
Finalement, le gouvernement britannique décide le d'envoyer un ultimatum au sultanAbdülhamid II lui donnant 10 jours pour évacuerTaba et reconnaître comme frontière une ligne allant deRafah àAqaba. Ne pouvant, dans cette affaire, obtenir le soutien de l'Allemagne, de la Russie ou de la France, Constantinople finit par céder aux exigences de Londres[8].
Pose du chemin de fer britannique dans le Sinaï, v. 1916.
En1956, lors de lacrise du canal de Suez, le président égyptienGamal Abdel Nasser nationalise le canal tout en établissant un blocus du port israélien d'Eilat sur la mer Rouge. Il s'attire une riposte conjointe d'Israël, des Britanniques et des Français.Tsahal envahit en quelques jours la péninsule tandis que les Franco-Britanniques mènent une opération aéroportée sur le canal. Les pressions américaines et soviétiques obligèrent les Israéliens à se retirer et l'ONU déploie des forces pour démilitariser la péninsule.
En1967, l'Égypte ordonne le retrait des forces onusiennes, redéploie ses troupes dans le Sinaï et reprend son blocus d'Eilat. Laguerre des Six Jours s'achève par une victoire complète des Israéliens qui ferment le canal et gardent le contrôle complet de la péninsule pour en faire une zone tampon et exploiter ses ressources pétrolières. Le pétrole brut du Sinaï est transporté par mer jusqu'à Eilat d'où unoléoduc l'envoie aux raffineries d'Ashkelon. Par la suite, les Israéliens développent une extraction degaz naturel àYamit, au nord-est, et desforages offshore dans legolfe de Suez[9].
En1973, durant laguerre du Kippour les Égyptiens forcent laligne Bar-Lev, construite le long de la frontière entre le Sinaï et l'Égypte. Toutefois, les Israéliens repoussent finalement l'attaque et prennent pied sur la rive égyptienne. L'intervention dessuperpuissances met fin aux combats : les Égyptiens échouent à récupérer le Sinaï qui reste sous occupation israélien.
Depuis1982, laForce multinationale d'observateurs au Sinaï surveille la frontière. La ville deCharm el-Cheikh devient la « vitrine moderne » de l'Égypte qui y organise régulièrement des sommets internationaux. Les autorités égyptiennes et israéliennes coopèrent pour entraver les trafics d'armes vers labande de Gaza par des tunnels clandestins et l'immigration clandestine vers Israël. Cependant, depuis 2011, desgroupes armés insurgés liés àAl-Qaïda mènent des attaques visant les forces égyptiennes et des cibles civiles.
Contrairement à l'idée reçue, le Sinaï n'a rien d'une terre désertique. On y trouve des rivières, comme leWadi el-Arish et de très grandespalmeraies, dont celles d'Aïn Khudra, d'AÏn Umm et d'Aïn Furtâga.
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La rétrocession du Sinaï à l'Égypte a eu lieu à la suite des négociations de 1975 après laguerre du Kippour.
Le Sinaï a une importance stratégique : la frontière que la péninsule partage aussi bien avec l’enclave palestinienne qu’avec l’État hébreu la rend particulièrement sensible.
Le politologue Hassan Nafea en parlant de la guerre d’, dans le quotidien Al-Masri al-youm, a écrit : « Cette guerre a montré que les Arabes pouvaient prendre l’initiative de mener une guerre militaire contre Israël, dépasser leurs divergences et se rebeller contre les forces qui dominent l’ordre mondial. Israël et les États-Unis ont juré que cela ne se reproduirait pas. Ainsi une autre stratégie a été mise en place. Lesaccords de Camp David, en n'instaurant pas une politique de développement économique et social, n'ont pas permis une meilleure prise en charge des problèmes des populations du Sinaï. Et le régime de Moubarak a opté pour la poigne sécuritaire et l’humiliation duchâtiment collectif. Ce qui a donné naissance à des groupes armés ».
Le Sinaï est majoritairement peuplé deBédouins, originaires de la péninsule arabique. Cette filiation, hautement revendiquée, explique en partie la tension qui les oppose au pouvoir central égyptien. Ces tribus ont des ramifications enJordanie, enIsraël ou enPalestine et les frontières ne sont pas des obstacles pour eux.
En 2000, avec laseconde intifada, un trafic d'armes et de toutes sortes de marchandises s'est installé et son essor est devenu très important depuis l'arrivée duHamas au pouvoir à Gaza en 2007. La situation n’a pas changé sous le régime deMohamed Morsi, président du au. Il semble même qu’elle ait empiré avec un climat d’opacité totale.
La frontière israélo-égyptienne en mars 2008.
Cinq principaux acteurs s'affrontent : le Hamas, Israël, l’armée égyptienne, la police, les tribus bédouines et les groupesdjihadistes. « Le Sinaï s’est-il soustrait à l’autorité de l’État ? » (Ahmad Al-Sawi dans le quotidien Al-Shorouk)[15]. Depuis la révolution égyptienne, survenue en, des armes lourdes d’origine libyenne sont assemblées àEl-Arich, puis envoyées de l’autre côté de la frontière. Le trafic bat son plein en utilisant de nombreux tunnels dispersés tout au long de la frontière avec Gaza. Le Sinaï, terre historique de trafic reliant l’Afrique à l’Asie, est devenu le royaume de tous les possibles (nourritures, médicaments, ciment, cigarettes, drogues et organes). Les forces de l’ordre sont chassées et tuées dans cette région du pays par les trafiquants. « Ils (entre autres les membres des mouvements islamistes dont Al-Takfirwal-Hijra, groupe créé au début des années 1970, minoritaire mais très violent) veulent éliminer la police pour prendre le pouvoir dans le Sinaï » confie un habitant de Cheikh Zouwayed, village des environs d’El-Arich (capitale du gouvernorat égyptien du Sinaï Nord). Depuis la révolution et durant la présidence de Morsi, ils ne se cachent plus. Les attaques se sont multipliées contre le gazoduc égyptien qui alimente Israël et le Royaume deJordanie.
Conscient des difficultés de l’Égypte à contrôler le Sinaï,Tel-Aviv avait autorisé le l’opération Aigle : 2 500 soldats et 250 chars égyptiens ont été autorisés à pénétrer dans la péninsule, restée sous le contrôle de la police et d'une force multinationale de défense (FMO - 1 656 soldats de onze pays différents) de l'ouest de la bande de Gaza au nord jusqu'àTaba etCharm el-Cheikh au sud, depuis la conclusion des accords de Camp David[16]. En 2013, après le renversement de Mohamed Morsi, les forces de sécurité dans la péninsule du Sinaï sont en proie à des attaques quasi quotidiennes de militants.
La population qui subit les violences de la police et de gangs armés se révolte pendant des mois contre l’absence de réactions du pouvoir. L’État avait commencé à construire un canal (Le canal Al-Salam[17], un projet du plan de développement pour le Sinaï pour la période 1997-2017) pour apporter de l’eau du Nil et faciliter l’agriculture. En 2013, les travaux étaient arrêtés.
La situation du centre de la péninsule est particulièrement inquiétante. L’Égypte n’y construit ni hôpitaux, ni écoles, alors que c’est la zone la plus pauvre du pays. Depuis la révolution, la population attend davantage du gouvernement. La création d’une Autorité générale pour le développement du Sinaï avait été bien perçue, mais les résultats se font attendre.
Des habitants ont été enlevés, et les auteurs de ces enlèvements n’ont pas été retrouvés. De nombreux kidnappings de soldats ont lieu par des Sinawis afin de se faire entendre mais aussi afin de faire libérer leurs prisonniers et les prisonniers appartenant aux groupes islamistes.
En, l'une des revendications du nouveau mouvement Tamarod (« rébellion ») en Égypte, qui est pour une grande part à l'origine de la destitution du président Morsi le, aurait demandé un référendum pour, entre autres, annuler les accords de Camp David afin de redonner sa souveraineté au pays. Ils estiment qu'Israël et les forces internationales installées dans la partie nord-est du Sinaï empêchent l'armée égyptienne de lutter efficacement contre les bandes armées et le terrorisme[19].
La proposition de créer un État palestinien dans le Sinaï avec Gaza comme capitale est émise en 2023[20].
À la suite d'un attentat suicide perpétré le ayant tué 30 soldats et blessé 29 autres, l’Égypte décrète l'état d'urgence pour trois mois sur la partie nord du Sinaï. L’état d'urgence couvre un périmètre allant de la ville deRafah sur la frontière avec labande de Gaza, jusqu'à l'ouest d'El-Arich. Évoquant « des soutiens de l'étranger » le président égyptienAbdel Fattah al-Sissi décide de fermer jusqu'à nouvel ordre le point de passage de Rafah entre labande de Gaza et l’Égypte[21]. Le l’Égypte a entamé la mise en place d’une zone-tampon à sa frontière avec la bande de Gaza obligeant des dizaines de familles à quitter ce secteur du nord du Sinaï. Abdel Fattah al-Sissi avait promis« une réponse implacable à la menace existentielle que représentent les jihadistes pour l’Égypte ». Il a annoncé que de nombreuses mesures allaient être prises dans cette zone frontalière « pour traiter le problème à sa racine »[22].
Depuis, l’Égypte est divisée en 27muhāfaza, soit 27gouvernorats. En général, ceux-ci prennent le nom de la ville principale. Chaque gouvernorat est dirigé par un gouverneur qui est désigné par leprésident de la République.