
Unsifflement est leson aigu que produit un flux constant d'air sur l'ouverture d'une petite cavitérésonante. Le flux sur les aspérités de l'ouverture crée desturbulences que la résonance transforme en ondes stationnaires harmoniques, dont la vibration se transmet à l'espace ambiant.
On appelle aussisifflement les sons similaires[a]. Plusieurs animaux, dont lesoiseaux siffleurs, produisent de tels sons. Enmécanique, un sifflement peut aussi bien provenir de l'échappement d'un gaz sous pression que de pièces solides en mouvement.
Plusieurs espèces animales, y compris les humains, émettent des signaux sifflés. Les hommes sifflent aussi pour faire de lamusique.
La communication par le son a l'avantage, pour l'homme comme pour l'animal, d'être effective de nuit comme de jour, avec la particularité utile ou non, par rapport à la communication visuelle, de ne pas permettre la localisation précise de la source. C'est une communication diffuse, d'un émetteur vers tous[1].
Les sifflements, dont l'énergie se situe principalement dans la région de 1 à 2,5 kHz, servent fréquemment pour la transmission designaux. Cette région est celle où l'audition humaine est la plus sensible ; dans la nature comme dans les assemblées humaines, lebruit de fond a une tonalité plus grave[2]. Le sifflement dure plus qu'un son d'origine impulsionnelle, comme un claquement, et pour cette raison se perçoit sans ambiguïté dans un environnement très bruyant. Le sifflement se détache bien sur le fond, une qualité nécessaire à la signalisation[b].

De nombreuxoiseaux, ditsoiseaux siffleurs émettent un chant qui rappelle un sifflement. Le sifflement aigu duserpent forme une classe à part, au moins pour ce qui est du son, fortement teinté de bruit de souffle, et certainement pour ses associations mentales. Beaucoup decris d'animaux sont des sifflements, comme ceux de lamarmotte.
Legrand dauphin ne possède pas decordes vocales. Il produit un sifflement généré à travers lelarynx au moyen de six poches d'air placées près de l'évent[4]. Certainsochotonas (ou pika) aux cris stridents sont surnommés « lièvres siffleurs ».
Les sifflements de perturbation et de combat de la grandeblatte de Madagascar proviennent du passage de l'air forcé à travers leursstigmates situés sur l'abdomen[5].

L'espèce humaine peut siffler sans l'aide d'aucun objet. La technique ordinaire utilise seulement lalangue et leslèvres qui modèlent la cavité buccale que limitent les parties dures du palais et des dents. Avec lesdoigts on obtient un son similaire, mais plus fort ; le sifflement entre les dents, qui limite la cavité résonante à l'espace entre la langue et les incisives, donne un son plus aigu[c]. Le sifflement humain a toujours trois ou quatre partiels harmoniques puissants, ce qui garantit son émergence dans une grande variété de bruits de fond[6].
Le sifflement sert pour appeler quelqu'un, attirer l'attention, montrer sa présence, sa surprise ou son admiration ; selon le contexte et le message à communiquer, la puissance, la durée et la régularité du timbre seront adaptés.
Les spectateurs sifflent généralement pour manifester leur mécontentement ou réprobation à l'inverse d'une acclamation, lors d'un concert, d'une rencontre sportive ou à l'égard d'une personnalité. AuXIXe siècle, les entrepreneurs favorisaient le succès d'un spectacle en engageant des « claqueurs » ; il arrivait que la concurrence, ou les ennemis de l'auteur, envoyassent des siffleurs pour perturber les principaux acteurs ou la représentation[7].
Le signal sifflé peut suivre des codes simples, comme dans l'arbitrage sportif, plus élaboré comme dans les sifflements de l'ancienne marine à voiles[8], ou entièrement codé, utilisant par exemple lecode Morse.
À travers le monde, certaines communications humaines se font parlangage sifflé. Ces signaux se constituent à partir de la langue parlée de ceux qui les utilisent, qui les considèrent comme une des façons de parler, au même titre que la voix de tête, le chuchotement ou la parole chantée[9].
EnAmazonie, auMexique, dans laCordillère des Andes, enAsie du Sud-Est, enTurquie, pour communiquer à plusieurs centaines de mètres, la forme sifflée se substitue à la langue parlée. EnFrance, des habitantsoccitans communiquaient ainsi en sifflant entre les flancs des vallées du village d’Aas dans lesPyrénées-Atlantiques françaises[10].
EnAsie du Sud-Est, lesHmongs sifflent pour communiquer pendant les échanges amoureux. Lestons de la langue Hmong modèlent le sifflement[11]. Le sifflement, moins identifiable et portant plus loin que la parole, offre l'avantage d'un certain anonymat aux amoureux, tout comme les modernes messageries en ligne[12].
Dans la plupart des cultures, on distingue le sifflement qui sert de signal du sifflement mélodique, que l'on inclut dans les activités musicales[13]. Comme pour la voix, cette distinction se rapporte à l'usage plutôt qu'au son lui-même. Le sifflement est généralement considéré comme une forme inférieure de musique[14], désignée par le diminutif de sifflotement, sans doute parce que n'importe qui peut siffler une mélodie sans apprentissage particulier. Les études depsychologie de la musique reconnaissent en l'aptitude à siffler une mélodie unecapacité cognitive musicale des plus courantes[15].
Le son du sifflement et le principe de sa production par changement de forme des cavités buccales rappellent ceux de l'ocarina. Les attaques sont peu marquées et seul le souffle du siffleur limite la durée du son. Lahauteur n'est pas fixe, l'intonation musicale dépend de l'interprète, qui peut passer d'une note à l'autre par unglissando[16]. Le sifflement par resserrement des lèvres (Pucker whistling) est certainement la forme la plus commune de sifflement mélodique.
Le sifflement est une production musicale sans instrument, qui n'est néanmoins pas considérée comme une musique vocale. Le compositeurMalcolm Arnold l'utilise logiquement dans le film de 1957Le Pont de la Rivière Kwaï, qui se déroule parmi des prisonniers de guerre. Ceux-ci doivent faire de la musique, mais vivent dans le dénuement, sans instruments. Le sifflotement est une pratique musicale populaire, comme en témoignent les chansonsSiffler en travaillant dans le filmBlanche-Neige et les Sept Nains ;Parce que çà (siffler) me donne du courage, de l'orchestreJacques Hélian ;Siffler sur la colline, deJoe Dassin. Des artistes demusic-hall et devaudeville sont siffleurs professionnels. Leclassement des documents musicaux en usage dans les bibliothèques publiques en France répertorie les enregistrements de musique sifflée à la cote 5.83.
Les manuels desavoir-vivre condamnent le sifflotement, particulièrement à table[17]. Le sifflotement s'associe, populairement, au genre masculin[18].
Les siffleurs musiciens professionnels parviennent à une étendue de troisoctaves, ce qui leur ouvre un assez vaste répertoire. Un« championnat du monde des siffleurs » a eu lieu en 2012[19],[20] ; un évènement semblable avait eu lieu en 2006[21].
Le plus célèbre des siffleurs est sans doute le musicienAlessandro Alessandroni, qu'on entend dans les films deSergio Leone[22].Curro Savoy s'en est fait une spécialité exclusive.
Plusieurs autres artistes ont enregistré des titres avec des sifflements :
Des siffleurs figurent parmi tous les styles de formations folkloriques de plusieurs pays.
Quelques artistes ont composé pour sifflement, en dehors des musiques de divertissement. Une musicologue a retrouvé une partition du temps deLouis XIV[24]. En 1913,Arthur Pryor (en) composeThe Whistler and His Dog (Le Siffleur et son chien), interprété plus tard par de nombreuses formations demusique de genre comme celle du siffleur Mario Juillard, de l'accordéonisteAimable et plusieurs grands orchestres comme leParagon Ragtime Orchestra (en).
Des interprètes individuels sifflent au cinéma :
Les ensembles de siffleurs se font entendre sur le thème de plusieurs films.Souvent sous un rythme de marche américaine de parade, propice aussi aux défilés de majorettes, le refrain est repris par un groupe de siffleurs, puis le couplet entonné par des chœurs masculins, des fifres, tambours et un ensemble de cuivres. L'orchestreMitch Miller est réputé pour ce genre d'accompagnement ou les « siffleurs scouts routiers »[réf. nécessaire] :
Les musiques sifflées se retrouvent aussi à la télévision : la première version du générique de l'indicatif télévisé de30 millions d'amis surTF1, sur les animaux de compagnie en 1976, était sifflée parJean-Pierre Hutin[27]. Le sifflement de Glynn, l'épouse du compositeur du thème deX FilesMark Snow, se mélange au synthétiseur dans la version finale de cette musique. En 1968, lasignature sonore siffléeQuand l'Arc en Ciel s'achève(Where the Rainbow ends) interprété par le siffleur de l'orchestreTony Hiller (en) fut utilisée à la radioEurope 1[réf. souhaitée].
N'importe quel tube, celui d'un os creux[28], le canon d'une clé[29], le capuchon d'un stylo a bille, peut servir à produire un sifflement en soufflant fortement sur l'extrémité ouverte. La vibration de l'air dans un tube a été étudiée depuis l'Antiquité en vue de fabriquer desinstruments à vent. La physique de l'onde stationnaire dans un tuyau ouvert ou fermé à ses extrémités était déjà connue deMarin Mersenne auXVIIe siècle. Ce principe, appliqué à la fabrication des instruments de musique, donne laflûte de Pan et laflûte traversière.
Lesifflet, avec une ouverture en biseau qui intercepte partiellement le flux d'air, remplace la bouche dans beaucoup d'usages comme signal ou dans la musique. Avec un volume résonateur, il est l'élément fondamental des instruments classés enorganologie comme desaérophones à biseau. La turbulence produite excite une résonance comme dans le cas précédent. La plupart des sifflets destinés à des signaux acoustiques sont fabriqués selon ce principe.
Un tube de dimensions appropriées produit un sifflement plus ou moins aigu selon sa taille, lorsqu'on souffle à son extrémité ouverte. Il se perfectionne ensifflet pour la signalisation et enflûte pour un usage musical[d].
Souffler fortement sur une membrane, qui peut être un brin d'herbe ou une bande de plastique d'emballage, tendue parallèlement à la bouche en travers du flux d'air, produit aussi un sifflement.
Dans plusieurs cultures humaines, de l'Amérique centrale[30] à laChine ancienne, le souffle relie le sifflement musical ou non auxesprits[31].