Capteurs électroniques à base de semi-conducteurs.
Unsemi-conducteur est unmatériau qui a les caractéristiques électriques d'unisolant, mais pour lequel la probabilité qu'unélectron puisse contribuer à uncourant électrique, quoique faible, est suffisamment importante. En d'autres termes, laconductivité électrique d'un semi-conducteur est intermédiaire entre celle desmétaux et celle des isolants.
Le comportement électrique des semi-conducteurs est généralement modélisé, enphysique de l'état solide, à l'aide de lathéorie des bandes d'énergie. Selon celle-ci, un matériau semi-conducteur possède une bande interdite suffisamment petite pour que des électrons de la bande de valence puissent facilement rejoindre labande de conduction. Si unpotentiel électrique est appliqué à ses bornes, un faiblecourant électrique apparaît, provoqué à la fois par le déplacement des électrons et par celui des « trous » qu'ils laissent dans la bande de valence.
La conductivité électrique des semi-conducteurs peut être contrôlée pardopage, en introduisant une petite quantité d'impuretés dans le matériau afin de produire un excès d'électrons ou un déficit. Des semi-conducteurs dopés différemment peuvent être mis en contact afin de créer desjonctions, permettant de contrôler la direction et la quantité de courant qui traverse l'ensemble. Cette propriété est à la base du fonctionnement des composants de l'électronique moderne :diodes,transistors, etc.
Lesilicium est le matériau semi-conducteur le plus utilisé commercialement, du fait de ses bonnes propriétés et de son abondance naturelle même s'il existe également des dizaines d'autres semi-conducteurs utilisés, comme legermanium, l'arséniure de gallium ou lecarbure de silicium.
1833 :Michael Faraday remarque l'augmentation du pouvoir conducteur de certains métaux lorsque l'on augmente la température, contrairement aux métaux classiques dont la résistivité augmente avec la température.
1839 :Edmond Becquerel découvre l'effet photovoltaïque. Il constate une différence de potentiel en éclairant le point de contact entre un conducteur et un électrolyte.
1947 :Herbert Mataré et Heinrich Welker développent à Aulnay-sous-Bois, à la CFSW, le premier « transistor français » réellement opérationnel en même temps et indépendamment des travaux des chercheurs américains, entre 1945 et 1948.
1951 :Herbert Mataré fonde la première compagnie au monde à proposer sur le marché des diodes et des transistors : Intermetall àDüsseldorf.
Schéma théorique établi selon la théorie des bandes d'énergie indiquant suivant les cas la position respective de la bande de valence et de la bande de conduction.
Le comportement des semi-conducteurs, comme celui des métaux et des isolants est décrit via lathéorie des bandes. Ce modèle dispose qu'un électron dans un solide ne peut que prendre des valeurs d'énergie comprises dans certains intervalles que l'on nomme « bandes », plus spécifiquementbandes permises, lesquelles sont séparées par d'autres « bandes » appeléesbandes d'énergie interdites oubandes interdites.
Deux bandes d'énergie permises jouent un rôle particulier :
la dernière bande complètement remplie, appelée « bande de valence » ;
la bande d'énergie permise suivante appelée « bande de conduction ».
La bande de valence est riche en électrons mais ne participe pas aux phénomènes de conduction (pour les électrons). La bande de conduction, quant à elle, est soit vide (comme aux températures proches duzéro absolu dans un semi-conducteur) soit semi-remplie (comme dans le cas des métaux) d'électrons. Cependant c'est elle qui permet aux électrons de circuler dans le solide.
Dans les conducteurs (métaux), la bande de conduction et la bande de valence se chevauchent. Les électrons peuvent donc passer directement de la bande de valence à la bande de conduction et circuler dans tout le solide.
Dans un semi-conducteur, comme dans un isolant, ces deux bandes sont séparées par unebande interdite, appelée couramment par son équivalent anglais plus court « gap ». L'unique différence entre un semi-conducteur et un isolant est la largeur de cette bande interdite, largeur qui donne à chacun ses propriétés respectives.
Dans un isolant, cette valeur est si grande (aux alentours de6eV pour le diamant par exemple) que les électrons ne peuvent pas passer de la bande de valence à la bande de conduction : les électrons ne circulent pas dans le solide.
Dans les semi-conducteurs, cette valeur est plus petite (1,12eV pour lesilicium,0,66eV pour legermanium,2,26eV pour lephosphure de gallium). Si l'on apporte cette énergie (ou plus) aux électrons, par exemple en chauffant le matériau, ou en lui appliquant un champ électromagnétique, ou encore dans certains cas en l'illuminant, les électrons sont alors capables de passer de la bande de valence à la bande de conduction, et de circuler dans le matériau.
Structure de bande dusilicium. Le minimum de la bande de conduction est situé sur l'axe Δ, enk ≠ 0, ce qui en fait un semi-conducteur àgap indirect.
On parle de semi-conducteur àgap direct lorsque le maximum de la bande de valence et le minimum de la bande de conduction se situent à des valeurs du nombre d'ondek proches sur le diagrammeE (énergie) -k (nombre d'onde). Inversement, on parle de semi-conducteur àgap indirect lorsque le minimum de bande de conduction et le maximum de la bande de valence se situent à des valeurs distinctes du nombre d'ondek sur le diagrammeE(k).
Le diagrammeE(k) représente la dispersion énergétique d'un semi-conducteur. Il permet de définir spatialement les extrema des bandes de conduction et de valence. Ces extrema représentent, dans un semi-conducteur à l'équilibre, des domaines énergétiques où la densité de porteurs de typep pour la bande de valence et de typen pour la bande de conduction sont importantes.
Dans le cadre des applications enémetteur de lumière (interaction lumière/matière), on privilégie les matériaux àgap direct. En effet, les extrema de bandes étant situés à des valeurs dek semblables, la probabilité de recombinaison radiative des porteurs (rendement quantique interne) est supérieure grâce à la conservation de laquantité de mouvement (même nombre d'ondek).
Caractéristique spécifique aux matériaux àgap direct
Dans le domaine de l'opto-électronique, un paramètre essentiel à la compréhension des phénomènes de générations / recombinaisons de porteurs, est la notion de coefficient d'absorption. Celui-ci a deux caractères communs à l'ensemble des semi-conducteurs àgap direct. Il présente tout d'abord un comportement assimilable en première approximation à une marche d'escalier. Ainsi, pour une énergie incidente inférieure à l'énergie de bande interdite, le matériau est « transparent » au rayonnement incident, et le coefficient d'absorption est très faible. À partir d'une valeur proche de l'énergie de bande interdite, ce coefficient présente une valeur constante aux alentours deα ≈ 104cm−1.
Un semi-conducteur est dit intrinsèque lorsqu'il est pur : il ne comporte aucune impureté et son comportement électrique ne dépend que de la structure du matériau. Ce comportement correspond à un semi-conducteur parfait, c'est-à-dire sans défaut structurel ou impureté chimique. Un semi-conducteur réel n'est jamais parfaitement intrinsèque mais peut parfois en être proche comme lesilicium monocristallin pur.
Dans un semi-conducteur intrinsèque, lesporteurs de charge ne sont créés que par des défauts cristallins et par excitation thermique. Le nombre d'électrons dans la bande de conduction est égal au nombre de trous dans la bande de valence.
Ces semi-conducteurs ne conduisent pas, ou très peu, le courant, excepté si on les porte à haute température.
La formation des bandes interdites étant due à la régularité de la structure cristalline, toute perturbation de celle-ci tend à créer des états accessibles à l'intérieur de ces bandes interdites, rendant le gap plus « perméable ». Ledopage consiste à implanter des atomes correctement sélectionnés (nommés « impuretés ») à l'intérieur d'un semi-conducteur intrinsèque afin d'en contrôler les propriétés électriques.
La technique du dopage augmente la densité des porteurs à l'intérieur du matériau semi-conducteur. Si elle augmente la densité d'électrons, il s'agit d'un dopage de typeN. Si elle augmente celle des trous, il s'agit d'un dopage de typeP. Les matériaux ainsi dopés sont appelés semi-conducteurs extrinsèques.
Le dopage de typeN consiste à augmenter la densité en électrons dans le semi-conducteur. Pour ce faire, on inclut un certain nombre d'atomes riches en électrons dans le semi-conducteur.
Par exemple, dans un cristal desilicium (Si), chaque atome de silicium a quatre électrons de valence ; chacun de ces électrons formant uneliaison covalente avec un électron de valence d'un des quatre atomes voisins. Pour doper ce cristal de silicium enN, on y insère un atome ayant cinq électrons de valence, comme ceux de lacolonne V (VA) de latable périodique : lephosphore (P), l'arsenic (As) ou l'antimoine (Sb).
Cet atome incorporé dans le réseau cristallin présentera quatre liaisons covalentes et un électron libre. Ce cinquième électron, qui n'est pas un électron de liaison, n'est que faiblement lié à l'atome et peut être facilement excité vers labande de conduction. Aux températures ordinaires, quasiment tous ces électrons le sont. Comme l'excitation de ces électrons ne conduit pas à la formation de trous dans ce genre de matériau, le nombre d'électrons dépasse de loin le nombre de trous. Les électrons sont desporteurs majoritaires et les trous desporteurs minoritaires. Et parce que les atomes à cinq électrons ont un électron supplémentaire à « donner », ils sont appelés atomes donneurs.
Le dopage de typeP consiste à augmenter la densité en trous dans le semi-conducteur. Pour le faire, on inclut un certain nombre d'atomes pauvres en électrons dans le semi-conducteur afin de créer un excès de trous.Dans l'exemple du silicium, on inclura un atome trivalent (colonne III du tableau périodique), généralement un atome debore. Cet atome n'ayant que trois électrons de valence, il ne peut créer que trois liaisons covalentes avec ses quatre voisins créant ainsi un trou dans la structure, trou qui pourra être rempli par un électron donné par un atome de silicium voisin, déplaçant ainsi le trou. Quand le dopage est suffisant, le nombre de trous dépasse de loin le nombre d'électrons. Les trous sont alors desporteurs majoritaires et les électrons desporteurs minoritaires.
Une jonctionP-N est créée par la mise en contact d'un semi-conducteur dopéN et d'un semi-conducteur dopéP. La jonction entraîne l'égalisation desniveaux de Fermi par décalage des bandes.
Si l'on applique une tension positive du côté de la régionP, les porteurs majoritaires positifs (les trous) sont repoussés vers la jonction. Dans le même temps, les porteurs majoritaires négatifs du côtéN (les électrons) sont attirés vers la jonction. Arrivés à la jonction, soit les porteurs se recombinent (un électron tombe dans un trou) en émettant un photon éventuellement visible (DEL), soit ces porteurs continuent leur course au travers de l'autre semi-conducteur jusqu'à atteindre l'électrode opposée : le courant circule, son intensité varie en exponentielle de la tension.Si la différence de potentiel est inversée, les porteurs majoritaires des deux côtés s'éloignent de la jonction, bloquant ainsi le passage du courant à son niveau. Ce comportement asymétrique est utilisé notamment pour redresser lecourant alternatif.
La jonctionP-N est à la base du composant électronique nommé « diode », qui ne permet le passage du courant électrique que dans un seul sens. De manière similaire, une troisième région peut être dopée pour former des doubles jonctionsN-P-N ouP-N-P qui forment lestransistors bipolaires. Dans ce cas-là, les deux semi-conducteurs de même type sont appelés « émetteur » et « collecteur ». Le semi-conducteur situé entre l'émetteur et le collecteur est appelé « base » ; il a une épaisseur de l'ordre du micromètre. Lorsqu'on polarise la jonction émetteur-base en direct, celle-ci est passante alors que la jonction base-collecteur est bloquée. Cependant la base est assez fine pour permettre aux nombreux porteurs majoritaires injectés depuis l'émetteur (fortement dopé) de la traverser avant d'avoir le temps de se recombiner. Ils se retrouvent ainsi dans le collecteur, produisant un courant contrôlé par ce courant de base.
En septembre2009, l'Union européenne a lancé son programme IMPROVE[4] (pourImplementing Manufacturing Science Solutions to Increase Equipment Productivity and Fab Performance). Premier projet de recherche européen visant une meilleure efficacité dans l'industrie des semi-conducteurs, il était doté de37,7 millions d'euros. Cepartenariat public-privé associait des producteurs européens de semi-conducteurs à de grands instituts de recherche, universités et producteurs de logiciels (trente-cinq partenaires en tout en 2009).
Le programme était en place pour durer pendant36 mois (finalement ouvert pendant3,5 ans), avec trois thèmes principaux[4] :
Mesure virtuelle (Virtual Metrology) ;
Maintenance anticipée (Predictive Maintenance) ;
Planification du contrôle adaptatif (Adaptive Control Planning).
Depuis le début duXXIe siècle, le marché des semi-conducteurs s'accroît de façon quasi-continue.
En 2020, les entreprises américaines produisent 48 % des puces dans le monde, mais les 70 usines situées aux États-Unis ne représentent que 12 % de la fabrication mondiale de semi-conducteurs, contre 37 % en 1990. Le marché américain étant à cette date de208 milliards de dollars pour 250 000 emplois directs.
En 2021, au premier trimestre le marché mondial de la production de puces est estimé à101 milliards d'euros[5]. 75 % de la fabrication mondiale de puces est concentrée enAsie de l'Est. La Chine, partie en 1990 de presque rien, produit en 2019 environ 12 % de la production mondiale, et devrait devenir leader mondial d'ici 2030 (avec 24 % du marché, grâce à des subventions gouvernementales estimées à cent milliards de dollars)[6].
Fin août 2022,Joe Biden signe leChips Act, un plan d'investissement de 52 milliards de dollars dans l'industrie américaine des microprocesseurs avec pour objectif d'encourager la production des puces électroniques sur le sol américain[7].
En 2024, Taïwan produit à elle seule plus de 60 % des semi-conducteurs dans le monde[8].
Évolution du chiffre d'affaires des plus importants fabricants mondiaux de semi-conducteurs et parts de marché, en millions de$ (fonderies etfabless exclues).
La crise liée à lapandémie de Covid-19 a souligné la dépendance de l'industrie européenne aux semi-conducteurs fabriqués en Asie. En effet, la pénurie qui s'est ensuivie a freiné grandement la production des pays membres de l'Union européenne[12].
Le 8 février 2022, la Commission européenne a proposé de débloquer43 milliards d'euros pour réduire sa dépendance envers l'Asie[13].« Nous nous sommes fixé l’objectif d’avoir 20 % du marché mondial en 2030 » avait déclaré à l'occasion, la présidenteUrsula von der Leyen.
Le 1er février 2023, le groupe américain Wolfspeed et l'équipementier allemand ZF annoncent la construction à Endsdorf dans la Sarre de« la plus grande usine au monde » pour produire des puces en carbure de silicium. Après les projets d'Infineon àDresde et d'Intel àMagdebourg, c'est le troisième projet d'usine de semi-conducteurs en Allemagne[14].
Soitec (Bernin) Elle n'est pas à proprement parler une entreprise de composants, elle produit le substrat en SOI qui permet la fabrication de certains de ces composants ;
↑Comme souvent en histoire des sciences, la paternité de cette découverte est parfois remise en cause, pour être attribuée àJulius Edgar Lilienfeld, qui, en1930, avait déjà déposé un brevet concernant le principe du transistor à effet de champ. Cependant, Bardeen, Shockley et Brattain restent universellement reconnus comme les pères de cette invention.
↑a etbFrancois FrancisBus,L'époque ou les puces font leurs lois : histoire des semi-conducteurs vécue de chez Texas Instruments, Books on demand,(ISBN2-322-25685-4 et978-2-322-25685-3,OCLC1225066813).