Dusiècle des Lumières à nos jours, le savant devient peu à peu scientifique, chercheur ou ingénieur : le mot « scientifique » évoque aujourd'hui surtout lessciences fondamentales, voire les sciences, technologie, ingénierie et mathématiques mais les savants étaient autrefois aussi les lettrés. Ainsi, leJournal des savants[2] est en France le plus ancien journal littéraire d'Europe. Il fut créé en1665 parDenis de Sallo, conseiller auParlement de Paris, sousColbert et avec un patronage royal à partir de 1701. Lessociétés savantes étaient éclectiques. Il existe toujours des enseignants-chercheurs.
Les statistiques montrent aussi qu'à partir desannées 1980, les équipes scientifiques tendent à devenir plus étoffées et (grâce àInternet notamment) les collaborations interrégionales et internationales ont un coût qui diminue et se font plus nombreuses[3].
Les modes d'évaluation des chercheurs ont beaucoup évolué auXXe siècle, avec depuis les années 1990 une tendance au renforcement des exigences de rentabilité, de productivité et des financements par projet, qui a poussé de nombreuses universités à soutenir une démarche de partenariat avec le privé ou de dépôts debrevets (aux États-Unis, souvent déposés par des chercheurs ou équipes qui publient beaucoup[4]) ou de création destart-ups. Les scientifiques travaillant dans la recherche publique sont soumis à une forte pression de publication (traduite par une formule « Publier ou mourir »), mais il leur est souvent difficile de franchir le seuil des revues à comité de lecture (le, John Ioannidis a montré dans la revuePLoS ONE, via un travail statistique[5], qu’il n’y a que moins de 1 % des scientifiques (soit 150 608 personnes) qui arrivent à gérer leur carrière en réussissant à publier au moins un article par an. Cependant, ces derniers dominent la sphère de l'information scientifique publiée (leur signature figurant sur 41 % de tous les documents publiés)[5]. Et dans les articles les plus cités, ce même groupe d'élite est retrouvé (co-auteurs de 87 % de ces articles)[5]. De plus, le rang des scientifiques ayant publié à plusieurs reprises plus d'un papier par an diminue de façon spectaculaire avec le nombre d’articles publiés par an (deux articles ou plus : 68 221 personnes ; trois ou plus : 37 953 personnes ; quatre ou plus : 23 342 personnes ; cinq ou plus : 15 464 personnes ; 10 ou plus : 3 269 personnes[5]. Une position dominante d'un scientifique dans un domaine donné peut l'amener à agir comme unmandarin ainsi que le présente Jean Labarre[6].
L'avènement de l'Internet, des modes detravail collaboratif et ouvert, de revues « ouvertes » (par exemple :PLOS, qui publie ses articles sous licenceCC-BY-SA) et récemment de mode d'enseignements plus ouverts (ex. :MOOCs) pourraient encore modifier la formation, la formation tout au long de la vie et le travail des scientifiques.
↑Adams JD, Black GC, Clemmons JR, Stephan PE (2005) Scientific teams and institutional collaborations: Evidence from US universities, 1981–1999. Res Policy 34: 259–285. doi: 10.1016/j.respol.2005.01.014 (résumé)
↑Stephan PE, Gurmu S, Sumell AJ, Black G (2007)Who's patenting in the university ? Evidence from the survey of doctorate recipients. Econ Innov New Techn 16: 71–99. doi: 10.1080/10438590600982806.
Garfield E (1996) The significant scientific literature appears in a small core of journals. Scientist 10: 13–15.
Hirsch JE (2005) An index to quantify an individual's scientific research output. Proc Natl Acad Sci U S A 102: 16569–72. doi: 10.1073/pnas.0507655102
Long JS, McGinnis R (1981) Organizational context and scientific productivity. Am Sociology Rev 46: 422–442. doi: 10.2307/2095262 (résumé)
McNamee SJ, Willis CL (1994) Stratification in science: A comparison of publication patterns in four disciplines. Knowledge: Creation, diffusion, utilization 15: 396–416. doi: 10.1177/107554709401500403
O’Brien TL (2012) Change in academic coauthorship, 1953–2003. Science, Technology & Human Values 37: 210–234. doi: 10.1177/0162243911406744
Wray KB (2004) An examination of the contribution of young scientists in new fields. Scientometrics 61: 117–128.