Cet article concerne rupture de pleine communion en cours entre le patriarcat orthodoxe deMoscou etcelui de Constantinople. Pour la scission de 1666 au sein de l'Église russe, voirRaskol.
Par unTomos de 1923, lepatriarcat de Constantinople avait accordé l’autonomie sous sa juridiction à l’Église d’Estonie. Cette autonomie fut unilatéralement infirmée par le patriarcat de Moscou et une éparchie estonienne de l’Église orthodoxe russe fut instaurée sous l'occupation soviétique. En 1996, à la demande de certaines paroisses rattachées à l’Église estonienne en exil enSuède, le patriarcat de Constantinople a réactivé le Tomos de 1923. Il existe désormais en Estonie deux Églises orthodoxes : l’Église orthodoxe autonome d’Estonie sous la juridiction de Constantinople et unexarchat des paroisses russes dépendant de Moscou[12].
Le 14 septembre 2018, l'EOR décrète qu'elle est « forcé[e] de suspendre la commémoration liturgique dupatriarche Bartholomée de Constantinople, et a le profond regret de suspendre également toute concélébration avec les hiérarques du patriarcat de Constantinople, ainsi que d’interrompre la participation de l’Église orthodoxe russe aux Assemblées épiscopales, aux dialogues théologiques, aux commissions multilatérales et à toutes les autres structures dans lesquelles président ou co-président des représentants du patriarcat de Constantinople »[16],[note 1].
Le 11 octobre 2018, le patriarcat de Constantinople a évoqué officiellement une future reconnaissance de sa part de l'autocéphalie de l'Église orthodoxe de l'Ukraine, jusqu'alorsde facto sous la juridiction canonique du patriarcat de Moscou[17]. L'Église orthodoxe russe déclare le 15 octobre que « le patriarcat de Constantinople empiète sur son territoire canonique »[18] et qu'il est impossible pour elle « de demeurer en communioneucharistique avec [l]es hiérarques [du patriarcat de Constantinople], sonclergé et seslaïcs. Désormais, et jusqu’à ce que le patriarcat de Constantinople désavoue ses décisions anticanoniques, il est impossible à tous lesministres de l’Église orthodoxe russe deconcélébrer avec les clercs de l’Église constantinopolitaine, et aux laïcs de participer aux sacrements célébrés dans leurs églises »[19],[note 2].
↑« Pendant que vous dormiez. Affaire Khashoggi, otage à Cologne et schisme orthodoxe : les informations de la nuit »,Courrier international,(lire en ligne, consulté le)
↑Anis Issa, « Un an après le schisme ukrainien, le monde orthodoxe n’en finit pas de se diviser »,La Croix,(ISSN0242-6056,lire en ligne, consulté le)
↑Jean-Sylvestre Mongrenier,Le monde vu de Moscou : Dictionnaire géopolitique de la Russie et de l'Eurasie postsoviétiques, Presses universitaires de France,, 676 p.(ISBN978-2130825159).
↑(en) Volodomyr Shuvayev,AFP, « How Geopolitics Are Driving the Biggest Eastern Orthodox Schism in a Millennium » [« Comment la géopolitique alimente le plus grand schisme orthodoxe depuis un millénaire »],Stratfor,(lire en ligne, consulté le)
↑Natalka Boyko et Kathy Rousselet, « Les Eglises ukrainiennes : Entre Rome, Moscou et Constantinople »,Le courrier des pays de l'Est,,p. 39-50(lire en ligne)
↑« Déclaration du Saint-Synode de l’Église orthodoxe russe à la suite des empiétements du Patriarcat de Constantinople sur le territoire canonique de l’Église russe | Église orthodoxe russe », surmospat.ru,(consulté le) :« L’accueil dans la communion de schismatiques et d’une personne frappée d’anathème par une autre Église locale avec tous les « évêques » et les « clercs » qu’elle a ordonnés, l’empiétement sur des territoires canoniques étrangers, la tentative de renier ses propres décisions historiques et ses obligations, tout cela place le Patriarcat de Constantinople hors de l’espace canonique et, à notre grand regret, fait qu’il nous est impossible de demeurer en communion eucharistique avec ses hiérarques, son clergé et ses laïcs. Désormais, et jusqu’à ce que le Patriarcat de Constantinople désavoue ses décisions anticanoniques, il est impossible à tous les ministres de l’Église orthodoxe russe de concélébrer avec les clercs de l’Église constantinopolitaine, et aux laïcs de participer aux sacrements célébrés dans leurs églises. »
↑De facto enUkraine les deux églises, celle d'obédience russe et celleredevenue autocéphale, coexistent et sont représentées, parfois côte-à-côte, dans beaucoup de paroisses : l'Église orthodoxe d'Ukraine rattachée au Patriarcat de Moscou comptait (en 2016) 12 334 églises officiellement enregistrées et environ 200 monastères, soit bien plus que toute autre branche religieuse en Ukraine, tandis que les autres Églises ukrainiennes orthodoxes comptaient 4 921 communautés enregistrées et environ 60 monastères : voirReligion Information Service of Ukraine -Релігійні організації в Україні (станом на 1 січня 2016 р.) — State-recognised religious organizations as of 2016. Même si le Patriarcat de Constantinople a des prérogatives œcuméniques liées à sa prééminence honorifique sur les autres Églises orthodoxes, les deux Patriarcats de Constantinople et de Moscou sont canoniquement égaux : le premier n'a aucune obligation de continuer à reconnaître la primauté de Moscou sur Kiev, pas plus que Moscou n'a aucune obligation de reconnaître l'autocéphalie de Kiev. Il n'est pas impossible que le conflit puisse être résolu par une reconnaissance croisée des deux obédiences, comme enMoldavie où depuis 2002, selon une décision de laCour européenne des droits de l'homme, deux obédiences coexistent après dix ans de conflit territorial entre l'église roumaine de Moldavie (dépendant duPatriarcat de Bucarest) et l'église russe de Moldavie (dépendant duPatriarcat de Moscou) : jusqu'en 2002, chacune revendiquait seule la légitimité canonique, les « pro-roumains » arguant de l'obédience historique du Moyen Âge jusqu'en 1836 auxMétropoles moldaves deSuceava puis deIași, et de 1918 à 1944 auPatriarcat de Roumanie et les « pro-russes » arguant de l'obédience au Patriarcat de Moscou de 1836 à 1918 et depuis 1944 : voir Jean-Arnault Dérens :Orthodoxie en Moldavie: les défis identitaires d’un petit pays malmené par l’histoire, « Religioscope », 9 avril 2005 sur[1].