Cet article traite deMarie (mère de Jésus) dans les textes religieux. Pour Marie dans les dogmes chrétiens, voirMariologie etThéotokos. Pour les pratiques de vénération, voirCulte marial. Pour un angle de vue spécifiquementmusulman, voirMaryam (mère de Îsâ).
Marie (enaraméen ܡܪܝܡ,Maryam ; enhébreuמרים[3],Myriam ; engrecΜαρία,María ou Μαριάμ,Mariám; enarabeمريم,Maryam) ouMarie de Nazareth est une femmejuive de laprovince romaine de Judée et la mère deJésus de Nazareth. Elle est une figure essentielle duchristianisme, en particulier pour lesorthodoxes et lescatholiques, qui lui attribuent le titre de « Mère de Dieu » et la désignent par les dénominations « Sainte Marie », « Vierge Marie », « Sainte Vierge », « Bonne Dame », « Bonne Mère » et « Notre-Dame ».
Comme pour son fils Jésus, l'historicité de Marie est difficilement accessible. Une grande partie des traditions se trouve dans lalittérature apocryphe, qui développe souvent des thèmes présents dans lestextes canoniques duNouveau Testament[4].
À partir duIIe siècle, le personnage de Marie est développé par les auteurs de nombreux textesapocryphes, notamment leProtévangile de Jacques[5]. Au fil des siècles, la figure de Marie est devenue de plus en plus complexe et importante, aussi bien dans lesdogmes chrétiens que dans la piété populaire, tout comme dans l'art et la littérature[5].
Lesépîtres de Paul, écrites vers l'an 50, sont les textes les plus anciens duNouveau Testament. Elles n'indiquent nulle part le nom de la mère de Jésus[5]. Une seule occurrence, dans l'épître aux Galates, mentionne simplement que Jésus est« né d'une femme »[b 1], sans autre précision, et cette naissance ne présente apparemment rien de particulier[5], elle est ici celle qui assure l'insertion du Sauveur dans la race humaine[6]. Dans le reste ducorpus paulinien et les autres lettres du Nouveau Testament (lesépîtres catholiques), Marie n'est pas évoquée[5].
Dans l'Évangile selon Marc, rédigé vers l'an 70 à 75 Marie est nommée par référence à son fils :« Celui-là, n'est-il pas le charpentier, fils de Marie ? »[b 2].
Les Évangilesselon Matthieu etselon Luc, ainsi que lesActes des Apôtres, tous écrits une quinzaine d'années après celui de Marc, soit vers 80-85, sont beaucoup plus explicites au sujet de Marie.
Ces évangiles, qui sont les seuls à aborder les origines et l'enfance de Jésus, mentionnent Marie dès leur premier chapitre. Marie est présentée par Luc comme« une jeune fille vierge » vivant àNazareth, enGalilée, accordée en mariage àJoseph[b 3]. Matthieu introduit directement Marie comme l'épouse de Joseph et celle par qui Jésus a été engendré[b 4].
Les deux évangélistes relatent les circonstances de la conception de Jésus. Ils indiquent que Marie a été accordée en mariage à Joseph, puis qu'elle a été enceinte par l'action de l'Esprit Saint, sans union avec un homme. Luc, qui n'en a pas été témoin, fait le récit de l'Annonciation par laquelle l'archange Gabriel annonce à Marie qu'elle va concevoir Jésus ; l'évangile selon Matthieu relate, lui, un songe par lequel Joseph est informé de laconception divine de Jésus, ce qui met fin à ses soupçons d'infidélité[b 5],[b 6].
La suite de l'évangile selon Luc fait le récit de laVisitation[b 7] : Marie se rend auprès de sa cousineÉlisabeth, enceinte de six mois, et exprime sa joie par leMagnificat. Elle reste auprès d'elle environ trois mois, puis rentre chez elle. Luc décrit ensuite les circonstances de lanaissance de Jésus : Marie et Joseph doivent se rendre àBethléem pour s'y faire recenser, et c'est là que Marie accouche de Jésus. Lors de laprésentation de Jésus au Temple,Syméon prophétise que Marie éprouvera une grande douleur[b 8].
L'évangile selon Matthieu, qui cite la naissance de Jésus à Bethléem sans plus de détails, mentionne la présence de Marie lors des épisodes de l'adoration des mages, de lafuite en Égypte, du retour enterre d'Israël et de l'installation à Nazareth[b 9].
Plus tard se produit l'épisode de ladisparition de Jésus à l'âge de douze ans, lors du pèlerinage annuel de ses parents auTemple de Jérusalem, relaté par Luc[b 10] : alors que ses parents repartaient pourNazareth en pensant que Jésus se trouvait avec eux, celui-ci était en fait resté dans le temple pour discuter avec des érudits de laTorah, à la grande inquiétude de Marie.
Marie est peu mentionnée dans la suite des deux évangiles, consacrée à la prédication de Jésus. LesActes des Apôtres, qui relatent les temps de l'église après la résurrection de Jésus, indiquent que Marie est présente avec lesdisciples à laPentecôte[b 11].
Dans l'Évangile selon Jean, la présence de Marie est mentionnée dans deux scènes : lesnoces de Cana et lacrucifixion. Elle n'est jamais mentionnée par son nom. Elle est simplement désignée par le titre de« mère de Jésus », et Jésus s'adresse à elle en l'appelant« femme ».
Dans le récit de la célébration des noces de Cana, elle tient un rôle essentiel puisque c'est elle qui signale à son fils qu'il n'y a plus de vin, le poussant à accomplir un de ses premiersmiracles en changeant de l'eau en vin[b 12].
Dans la scène de la crucifixion àJérusalem,Jean signale la présence de la mère de Jésus près de lacroix et rapporte les paroles que celui-ci adresse à sa mère et audisciple qu'il aimait[b 13] :
« Jésus, voyant sa mère, et près d'elle le disciple qu'il aimait, dit à sa mère : « Femme, voici ton fils. » Puis il dit au disciple : « Voici ta mère. » Et à partir de cette heure-là, le disciple la prit chez lui. »
Marie est l'objet de nombreux développements dans les textesapocryphes à partir duIIe siècle. C'est de là que viennent la plupart des traditions qui la concernent.
Les apocryphes mentionnent notamment le nom de ses parents,Anne etJoachim, sa nativité, son adolescence, sa vie àÉphèse, saDormition et sonAssomption. Bien que ces textes n'appartiennent pas aucanon biblique, certaines fêtes liturgiques des calendriers catholique et orthodoxe se rapportent directement à ces traditions. Les églises sont pleines d'œuvres représentant des épisodes de la vie de Marie tirés des apocryphes, notamment duProtévangile de Jacques, deLaNativité de Marie et deLaDormition de Marie.
Si la plupart des apocryphes sont plus tardifs que le Nouveau Testament, certains d'entre eux, qui concernent Marie, semblent antérieurs auxrécits de la naissance de Jésus dans les Évangilesselon Matthieu etselon Luc[8].Enrico Norelli observe que l'étude de ces récits renseigne sur la place de Marie dans lechristianisme ancien et permet de comprendre pourquoi les traditions sur Marie n'ont pas été intégrées dans les écrits canoniques, alors même que Marie continuait d'occuper une place importante dans les prédications et la tradition chrétiennes.
Une traditionsyriennejacobite datant au plus tôt duIXe siècle raconte que Marie fut emmenée près d'Éphèse par Jean l'Évangéliste après laCrucifixion pour fuir la persécution àJérusalem. Marie est supposée y avoir terminé sa vie terrestre, dans la « maison de la Vierge Marie ». Cette tradition vise probablement à légitimer le siège épiscopal d'Éphèse[13].
Elle est ensuite ramenée miraculeusement à Jérusalem pour être enterrée dans le jardin deGethsemani, ce qui a engendré la tradition dusépulcre de Marie : l'église bâtie à cet emplacement sous le règne deConstantin passe également pour être la maison de la Vierge, ce qui explique que cette tradition, concurrente de la « maison de la Vierge Marie » à Éphèse et de l'abbaye de la Dormition de Jérusalem, y fixe aussi la tombe de ses parentsAnne etJoachim[14]. Toutefois, on ne sait pas où se trouvait ce jardin de Gethsemani. Plusieurs textes apocryphes indiquent que ce jardin se trouvait près du lieu où Jésus a été crucifié. Or il y a une distance importante entre leGolgotha et le lieu appelé Gethsemani depuis leIVe siècle et qui se trouve de l'autre côté de lavallée du Cedron.
De nombreux apocryphes affirment que le corps de Marie « n'est pas resté dans le tombeau » et se trouve « au ciel ». Mais les textes divergent quant à savoir si ce corps a été réuni à l'âme, et si oui, où et quand cela s'est produit »[15].
Les Églisescatholique etorthodoxe accordent une place essentielle à Marie, qu'elles appellent « Marie de Nazareth »[16],[17], « Sainte Vierge », « Vierge Marie », « Notre-Dame » (plus souvent chez les catholiques) ou « Mère de Dieu ».
L'Église catholique voue un culte particulier à Marie, le culte d'hyperdulie, supérieur au culte rendu aux saints et aux anges. Cette vénération est différente de l'adoration, due à Dieu seul[18]. Au quatrième siècle,Épiphane de Salamine écrivit contre ceux qui vénéraient Marie comme une déesse: "Bien que Marie soit pleine de grâce, sainte et digne de vénération, elle ne mérite pas pour autant l'adoration"[19].
À l'époque moderne, l'Église catholique ajoute les dogmes de l'Immaculée conception et de l'Assomption. En 1477, le papeSixte IV invite à rendre grâce pour l'admirable conception de la Vierge immaculée[20]. En 1854, Pie IX proclame l'Immaculée Conception, un dogme affirmant que la Vierge Marie était libre dupéché originel dès le moment de sa conception[21].
En 1169, le papeAlexandre III enseigne que le corps de Marie est demeuré incorruptible après sa mort[22]. Le papePie XII proclame en 1950 le dogme de l'Assomption, qui affirme que la Vierge Marie, après avoir achevé le cours de sa vie terrestre, fut élevée corps et âme à la gloire céleste[23],[5].
Les deux dogmes catholiques de l'Immaculée conception et de l'Assomption sont ignorés par lechristianisme oriental et rejetés par laRéforme protestante[5]. Pour l'Église orthodoxe, Marie, également très vénérée, a été enfantée dans le péché originel comme tout être humain, et, si elle est « immaculée », c'est par son adhésion à la volonté de Dieu, par sa pureté intérieure et par le fait qu'elle n'a jamais péché.
Le concept ne réapparaît qu'à la fin duXIXe siècle, avec une mention parLéon XIII dans uneencyclique de 1894 sur lerosaire[28], mais surtout avec plusieurs déclarations dePie X, selon lequel Marie participe au pouvoir rédempteur du Christ[29]. L'expression « Marie corédemptrice » est utilisée par deux de ses successeurs.Pie XI s'exprime ainsi en 1935 :« Ô Mère aimante et miséricordieuse […], vous vous êtes tenue debout près de Lui, souffrant avec Lui comme Corédemptrice[30],[31]... » De même,Pie XII emploie une fois ce mot[32].
Leconcile Vatican II aborde les questions mariologiques dans la constitutionLumen Gentium[33]. Or Marie demeure parfois à cette époque l'objet de dévotions héritées des croyances duMoyen Âge[26],[33].Bernard Sesboüé précise que les pères conciliaires ont donc « exprimé un refus net de continuer dans cette voie, qui ne correspond ni à la nature ni à la visée des définitions dogmatiques »[33]. Le concile met fin au débat en rappelant que Jésus-Christ est l'unique rédempteur et que Marie ne saurait être « corédemptrice »[34].
Toutefois, plusieurs années après le concile, le débat se poursuit sous forme de requêtes individuelles et de pétitions en ligne adressées auVatican[24],[26]. Celui-ci, en 1996, réunit à cet effet une commission de quinze théologiens[33]. Cette commission décide à l'unanimité de confirmer la position de Vatican II[35],[33]. L'Académie pontificale mariale internationale reprend ensuite à son compte les termes de la commission[36],[33]. Le cardinalJoseph Ratzinger, alors préfet de laCongrégation pour la doctrine de la foi, développe ce point en 2001 :« Le concept decorédemptrice s'écarte aussi bien de l'Écriture que des écritspatristiques. […] Tout vient [du Christ], comme le soulignent les Épîtresaux Éphésiens etaux Colossiens. Marie aussi est tout ce qu'elle est par lui. Le terme decorédemptrice obscurcirait cette donnée originelle[37]. » Pour sa part, lepape François rappelle fermement que Marie ne saurait être considérée comme « corédemptrice » et ne s'est jamais présentée comme telle[38],[24].
En 374,Épiphane de Salamine écrivit que l'on ne savait si Marie était morte ni si elle avait été ensevelie. Plus tard, Théotecnè de Livias (mort vers 600) et Modeste de Jérusalem (mort vers 630) ont cherché à étudier le mystère de l'élévation de Marie au ciel en le mettant en rapport avec les dogmes mariaux déjà reconnus. Ils inaugurèrent la formulesumpta quia immaculata (montée au ciel parce que immaculée).
Par ailleurs, Germain de Constantinople (mort en 733), André de Crète (mort en 740) etJean Damascène (mort en 749) ont approfondi la foi en l'élévation corporelle au ciel de Marie[39].
Pour les orthodoxes comme pour les catholiques, Marie est restée toute sa vie sans jamais pécher, de sa naissance à son « endormissement » dans la mort. Les orthodoxes parlent deDormition et non de mort, tandis que les catholiques évoquent sonAssomption.
L'Assomption est undogme catholique selon lequel, au terme de sa vie terrestre, Marie a été « enlevée corps et âme » au ciel. Le, ce point de foi, en réalité fort ancien dans la mémoire de l'Église, est finalement défini sous forme de dogme par laconstitution apostoliqueMunificentissimus Deus du papePie XII, sous le sceau de l'infaillibilité pontificale. Les catholiques fêtent l'Assomption le 15 août.
Les orthodoxes emploient le terme de Dormition depuis leVe siècle. Ce dogme signifie que la Vierge, morte sans souffrir, est vivante dans un état de paix spirituelle. Ils critiquent le nom d'Assomption, qui entretient l'ambiguïté en laissant croire que la Vierge a été enlevée au Ciel de son vivant.
La fête de la Dormition, le, se présente comme une célébration de la vie éternelle :« Tu es passée à la Vie, toi qui es la mère de la Vie »[40].
Luther insiste sur l'humilité de Marie et son accueil de la grâce[42].Calvin affirme qu'elle a besoin du pardon, et refuse, à la différence de Luther, de célébrer les fêtes mariales. Il n'accepte pas l'appellation « Mère de Dieu ».
L'adoption des dogmes de l'Immaculée Conception en1854 et de l'Assomption en1950 par l'Église catholique creuse un nouvel écart entre elle et les Églises orthodoxes et protestantes qui estiment que ces dogmes établis tardivement ne reflètent pas une réalité historique ou spirituelle mais constituent des excès duculte marial (Mariolâtrie).
Lesméthodistes n'ont pas d'écrits officiels ou d'enseignements sur Marie, sauf ce qui est mentionné dans l'Écriture et les enseignements œcuméniques. Ils considèrent essentiellement que le Christ a été conçu dans son sein par l'Esprit-Saint et qu'elle a donné naissance au Christ en étant vierge.John Wesley, le principal fondateur du mouvement méthodiste au sein de l'Église d'Angleterre, estime que Marie« est restée une vierge pure et sans tache »[43]. L’Église méthodiste considère que Marie était vierge avant, pendant et immédiatement après la naissance du Christ[44].
De ceci, lesÉglises méthodistes unies rejettent les notions de Mariecorédemptrice oumédiatrice. Ils rejettent également la vénération des saints, de Marie et des reliques : ils estiment que le respect et la louange sont réservés à Dieu seul. Cependant, ils approuvent l'étude de la vie de Marie et des biographies de saints, car celles-ci sont considérées comme des exemples pour les bons chrétiens[45].
À l'exception de ces deux passages, leNouveau Testament ne fait pas allusion à la naissance de Jésus[46]. SeulPaul l'évoque, dans l'Épître aux Galates (4:4), où il indique que Jésus est« né d'une femme » (il écrit le motgunê, « femme mariée », et nonparthenos, « jeune fille vierge »), sans s'attarder sur les circonstances de cette naissance[46].
Söll a récapitulé les points de vue desPères apostoliques et des premiersPères de l’Église concernant Marie :Ignace d'Antioche parle dans saLettre aux Éphésiens (7, 2) du mystère de la virginité de Marie, qu'il place à côté de ceux de la conception et de la mort du Seigneur.Justin de Naplouse défend surtout la virginité de Marie avant l'enfantement, et introduit pour la première fois un parallélisme entreÈve et Marie (Dialogue, 100, 5) permettant de préciser la contribution de Marie au caractère salvifique de l'incarnation.Irénée de Lyon approfondit la comparaison entre Ève et Marie, définissant Marie comme « avocate d'Ève » (Contre les hérésies II, 22, 4).Tertullien défend la virginité de Marie lors de la conception de Jésus (De monog, 82, De carne Christi, 24) tandis queClément d'Alexandrie etOrigène soutiennent la virginité perpétuelle de Marie (avant la conception de Jésus, après son enfantement et jusqu'à la fin de la vie de Marie).Hippolyte de Rome parle de la liberté de Marie face au péché[48]. EnfinIrénée de Lyon enseigne que la Vierge Marie est devenue par son obéissance la Nouvelle Ève qui a permis de revenir sur la désobéissance d'Ève lors dupéché originel (Contre les hérétiques 19, 1)[49].
Se fondant notamment sur l'ouvrage deRaymond Edward Brown,The Birth of Messiah (1999),Enrico Norelli observe que les « énoncés sur la conception de Jésus par une vierge chez Matthieu et Luc » n'ont « qu'une fonction christologique, et non mariologique » : ils servent à étayer l'idée d'une identité divine de Jésus, qui ne serait pas né comme tout autre être humain, bien plus qu'ils ne procèdent d'une idéalisation de la figure de Marie. Ainsi, au moment où ont été rédigés les évangiles, l'intérêt porté à Marie était « orienté par la personne de Jésus »[50].
Il n'en va pas de même pour lavirginité perpétuelle de Marie, qui est acceptée par les théologies catholique et orthodoxe mais refusée par la majorité des théologies protestantes. Les premiers dirigeants protestants croyaient à la virginité perpétuelle de Marie, notammentUlrich Zwingli[51] etJohn Wesley, l'un des fondateurs du méthodisme[52].
Les évangiles mentionnent les « frères de Jésus » (Mt 12,46 ; Mc 3,31 ; Lc 8,19) qui ont eu des interprétations différentes. L'Église catholique, à la suite deJérôme, conclut que les « frères de Jésus » étaient des cousins de Jésus (enfants de la sœur de lavierge Marie, que Jérôme identifie avecMarie, femme de Cleopas), tandis que l'Église orthodoxe, à la suite d'Eusèbe et d'Épiphane, affirme qu'ils étaient issus d'un mariage de Joseph antérieur à celui avec Marie[53].
Daniel Marguerat pense au contraire que les accusations de naissance illégitime sont une réponse polémique à l'affirmation chrétienne de la conception virginale[59].
Maryam,Mariam ouMeryem (en arabe : مريم), est le nom de la mère deÎssâ (nom de Jésus dans leCoran). Elle est la fille d'Imran (Joachim), et est aussi appelée « sœur d'Aaron »[C 1].
La mère de Jésus est considérée comme vierge dans leCoran, tournée vers Dieu dès sa naissance, jamais fiancée ou mariée (mais seulement protégée et guidée parZakarie, « Zakaria » (en arabe : زكريا). Le Coran reprend une tradition proche de celle retenue par la « Grande église » sur la conception miraculeuse de Jésus (ou Îsâ) par l'action du souffle de Dieu (Rûh)[C 3].
Le prophèteMahomet la décrit comme étant l'une des rares femmes ayant atteint le degré de « perfection », à travers sa dévotion intense à Dieu et sa patience lors de l’épreuve de l'enfantement miraculeux, que sa communauté accueillera par la suspicion et l'accusation. Le Coran la présente à l'opposé des femmes maudites deLoth et deNoé, comme l'une des deux femmes bien accueillies au paradis, elle et Assiya (l'épouse du pharaon rencontré par Moïse), dans la sourate« Les femmes »[C 4] et dans la sourate dite de« la table servie »[C 5]. Selon Michael Marx, le respect à l'égard de Marie renforce l'image positive de Jésus dans le Coran[64].
Étant donné sonassomption, la vénération se porte non pas sur les traditionnelles reliques corporelles, mais sur des reliques de contact (vêtements funèbres, ceinture…)[66].
De nombreuses églises et sanctuaires mariaux revendiquent la possession de ce type de reliques en se fondant sur des récits légendaires issus de traditions probablement originaires de Jérusalem[67], comme le vêtement de la Vierge conservé dans l'église Sainte-Marie-des-Blachernes[68].
Au cours des siècles, de nombreuxmiracles et « apparitions » ont été attribués à Marie dans l'Église catholique, qui n'en a toutefois reconnu que 18 à ce jour. Plusieurs sites d'apparitions mariales sont devenus des lieux de pèlerinages importants (Guadalupe,Médaille miraculeuse,Lourdes,La Salette,Fatima). Certains ont revendiqué des guérisons après avoir prié Marie. L'Église catholique indique que« par son intercession répétée [Marie] continue à nous obtenir les dons qui assurent notre salut éternel »[69].
Sans vénération et dévotion comme les catholiques et les orthodoxes, l'Église anglicane reconnait tout de même la maternité divine, la virginité et la sainteté exemplaire de Marie[70], etla position luthérienne affirme qu’un protestant peut exprimer avec joie dans sa foi la place que leCredo attribue à Marie. Il est à même de louer Dieu pour ce qu’il a donné à Marie d’être et de faire[71].
Cela étant, les théologiensprotestants ont tendance à souligner le fait que le culte marial, et certains aspects de la théologie mariale qui le justifient, ne sont étayés par aucuntexte biblique. Le pasteur de l'Église réforméeAlain Houziaux rend compte de cette divergence dans ces termes : « Il est bien évident que le développement de la théologie mariale n'a pas son fondement dans l'Écriture sainte. Quel problème cela peut-il poser ? Aucun pour l'Église catholique. Pour celle-ci, la source de la vérité promulguée et révélée ne réside pas seulement dans l'Écriture mais aussi dans la Tradition et le Magistère »[72].
De plus, le protestantisme ne reconnaît pas Marie comme médiatrice, intermédiaire entre leChrist et les hommes ; le culte marial perd ainsi sa justification. SelonAlain Houziaux, dans le catholicisme, « c'est Marie qui a pris la place qui était primitivement dévolue auChrist. Au fond, c'est elle qui est devenue médiatrice, rédemptrice, avocate auprès du Juge suprême. […] Certes, la théologie [catholique] officielle ne substitue jamais Marie au Christ qui reste unique Médiateur conformément à ce que dit 1 Timothée 2,5. […] Mais la piétépopulaire, peut-être parce qu'elle n'a jamais compris et admis la théologie du sacrifice vicaire et rédempteur du Christ, voit en la Vierge Marie l'image du pardon, du salut et de la miséricorde et substitue souvent cette image à celle du Christ trop complexe et incompréhensible puisqu'il est à la fois crucifié et Juge, victime et Tout puissant, homme et Dieu »[72].
Certains chrétiensévangéliques, considèrent Marie comme une simple servante du Seigneur qui ne peut donc pas posséder de pouvoir, guérir les gens ou révéler des choses nouvelles. Toujours selon ces théologiens évangéliques, les miracles attribués à Marie ne permettent pas de rapprocher quelqu'un du Dieu de laBible et ne peuvent donc être considérés comme étant d'origine divine[73].
Jean Calvin, dans sonTraité des reliques (1543), « énumère les nombreusesreliques dont les églises d’Europe se font les sanctuaires et dont l’amoncellement suffit à les dévaloriser, quand ce n’est pas le ridicule de certaines pièces. Calvin écrit par exemple à propos des « reliques de la Grotte du Lait »[74], et donc du lait de Marie vénéré dans les églises, que« tant y a que si la sainte vierge eût été une vache et qu’elle eût été nourrice toute sa vie, à grand peine en eût-elle pu rendre telle quantité »[75],[76]. En effet, d'innombrables couvents et villes exposent, dit Calvin, des fioles contenant du lait de Marie.
Le refus du culte marial a partie liée dans le protestantisme avec une réhabilitation de lasexualité et une conception de la femme différente de celle du catholicisme : en revalorisant« le corps et l'amour charnel, Luther rompait définitivement avec l'idéalisation de la femme dans le culte marial et avec sadiabolisation en tant que pécheresse et séductrice »[77].« Marie immaculée heurte non seulement la foi des protestants mais elle entre aussi en complète confrontation avec leur idéal féminin. Dès laRéforme, ceux-ci privilégient le mariage au célibat, le travail à la contemplation, et font de la femme, bonne ménagère éduquée, une aide et une alliée de l’homme. La sexualité s’en trouve peu à peu complètement réhabilitée, ouvrant la voie à une évolution plus générale des rapports hommes-femmes.NiÈve ni Marie devient ainsi l’un des slogans de la penséeféministe chrétienne. La formule, utilisée comme titre d’un ouvrage paru à la fin des années 1990, exprime le refus de porterle poids de la faute et de la condamnation d’Ève, archétype de la femme, ou encore d’être jugée à l’aune dumodèle de soumission qu’a pu être Marie »[78].
Groupe des Dombes,Marie dans le dessein de Dieu et la communion des saints. Dans l’histoire et l’Écriture. Controverse et conversion, Bayard-Centurion, 1998 et 1999(ISBN978-2227310926). Les deux ouvrages ont été réunis en un volume.
Jean-Paul II,Le Rosaire de la Vierge Marie : Lettre apostolique du Pape Jean-Paul II à l'Episcopat, au clergé et aux fidèles sur le Rosaire,Salvator,, 52 p.(ISBN978-2-7067-0334-8).
ÉlieMélia,Cahier d'Orgemont,vol. 58,(lire en ligne), « Marie dans l'Église orthodoxe ». Exposé de l'archiprêtre Élie Mélia dans le cadre des rencontres du Groupe d'échanges et de travaux œcuméniques.
Thierry Murcia,« Marie de Magdala et la mère de Jésus », dansRevue des Études Tardo-antiques, Figures du premier christianisme : Jésus appelé Christ, Jacques “frère du Seigneur”, Marie dite Madeleine et quelques autres, (Textes de la session scientifique THAT, Paris-Sorbonne, 3 février 2018), Supplément 6, 2018-2019,p. 47-69
↑« Le Messie, Jésus, fils de Marie, est l'Apôtre de Dieu et son verbe qu'il jeta dans Marie : il est un esprit venant de Dieu. »Le Coran,« Les Femmes », IV, 169,(ar)النساء
↑Michael O'Carroll,C.s.sp.,Mediatress of All Graces, Newman Press, Westminster, MD, 1958, p. 167-170 et p. 189-193.
↑abcd eteHendro Munstermann,« Marie corédemptrice ? ».Marie corédemptrice ? Débat sur un titre marial controversé, éditions du Cerf (coll. « Théologies »), 2006, 104 p. Présentation du livre et résumé du débat.
↑Ludwig Ott,Fundamentals of Catholic Dogma, Mercier Press Ltd., Cork, Ireland, 1955, p. 256.
↑Dans la lettre encycliqueAd Diem illum laetissimum du 2 février 1904, Pie X écrit : « Quand vint pour Jésus l’heure suprême, on vit la Vierge debout auprès de la croix, saisie sans doute par l’horreur du spectacle, heureuse pourtant de ce que son Fils s’immolait pour le salut du genre humain […]. La conséquence de cette communauté de sentiments et de souffrances entre Marie et Jésus, c’est que Marie “mérita très légitimement de devenir la réparatrice de l’humanité déchue” (Eadmeri Mon., De Excellentia Virg. Mariæ, c. 9), et, partant, la dispensatrice de tous les trésors que Jésus nous a acquis par sa mort et par son sang […]. Du fait que Marie l’emporte sur tous en sainteté et en union avec Jésus-Christ et qu’elle a été associée par Jésus-Christ à l’œuvre de la Rédemption, elle nous méritede congruo, comme disent les théologiens, ce que le Christ Jésus nous a méritéde condigno, et elle est le ministre suprême de la dispensation des grâces. »
↑Le 30 novembre 1933, Pie XI déclare :« Le Rédempteur se devait, par la force, d’associer sa Mère à son œuvre. C’est pour cela que nous l’invoquons sous le titre de Corédemptrice. Elle nous a donné le Sauveur. Elle l’a conduit à son œuvre de rédemption jusqu’à la croix. Elle a partagé avec lui les souffrances de l’agonie et de la mort en laquelle Jésus consommait le rachat de tous les hommes. ». Cf.L'Osservatore Romano,1er décembre 1933.
↑« Pour avoir été associée avec le Roi des Martyrs dans son ineffable œuvre de la rédemption humaine, comme Mère et comme corédemptrice… » Pie XII, Émission à la radio aux pèlerins à Fatima, 13 mai 1946,Acta Apostolicae Sedis 38, 1946,p. 266.
↑« C’est pourquoi la bienheureuse Vierge est invoquée dans l’Église sous les titres d’« avocate,auxiliatrice, secourable, médiatrice », tout cela cependant entendu de telle sorte que nulle dérogation, nulle addition n’en résulte quant à la dignité et à l’efficacité de l'unique Médiateur, le Christ »,« Aucune créature en effet ne peut jamais être mise sur le même pied que le Verbe incarné et rédempteur. » Cf.Lumen Gentium, VIII, 62.
↑« Tels qu'ils sont proposés, les titres apparaissent ambigus, car on peut les comprendre de manières différentes. Il est apparu, de plus, que l'on ne doit pas abandonner la ligne théologique suivie par le concile de Vatican II, qui n'a voulu définir aucun d'entre eux. Dans son magistère, il n'a pas employé le motCorédemptrice et il a fait un emploi très sobre des titres deMédiatrice et d'Avocate. En réalité, le terme deCorédemptrice n'est pas employé par le magistère des Souverains Pontifes, dans des documents importants, depuis l'époque dePie XII. »
↑« Il n'est pas opportun d'abandonner le chemin tracé par le concile de Vatican II. »
↑Voici quel est notre Dieu, Plon/Mame, 2001, p. 215-216.
↑(de)Ulrich Zwingli,Huldreich Zwinglis Sämtliche Werke,vol. I, Heinsius,(lire en ligne),p. 385.« Je crois fermement que [Marie], selon les paroles de l'évangile en tant que Vierge pure a enfanté pour nous le Fils de Dieu et dans l'accouchement et après l'accouchement est resté pour toujours une Vierge pure et intacte »
↑(en)John Wesley,The Works of the Rev. John Wesley, Londres, Thomas Cordeux,, 427 p.(lire en ligne),p. 112.« Je crois qu'il s'est fait homme, joignant la nature humaine à la nature divine en une seule personne ; étant conçu par l'opération singulière du Saint-Esprit, et né de la bienheureuse Vierge Marie, qui, aussi bien après qu'avant qu'elle l'ait enfanté, a continué une vierge pure et sans tache »
↑Cette relique, rapportée de Palestine vers 472 par deux patrices, est déposée dans une châsse et placée dans cette église sur ordre de l'empereur Léon I. Cf.Pierre Maraval,Lieux saints et pèlerinages d'Orient : histoire et géographie des origines à la conquête arabe, Cerf,,p. 98.
↑Irena Backus, dans Jean Calvin,Traité des reliques, texte présenté parIrena Backus, Genève : Labor et fides ; Paris : diff. du Cerf, 2000, quatrième de couverture,http://www.laboretfides.com/?page_id=3&product_id=80001. Calvin consacre un chapitre aux "Reliques de la sainte Vierge Marie" : "De ses cheveux, il y en a à Rome, à Sainte-Marie sur Minerve, à Saint-Salvador en Espagne, à Macon, à Cluny, à Noërs, à Saint-Flour, à Saint-Jaquerie, et en autres plusieurs lieux. Du lait, il n'est à métier de nombrer les lieux où il y en a, et aussi ce ne serait jamais fait; car il n'y a si petite villette ni si méchant couvent, soit de moines, soit de nonnains, où l'on n'en montre"
↑Liliane Crété,Le Protestantisme et les femmes : aux origines de l'émancipation, Labor et Fides, 1999,p. 41.