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Lessaints sont des personnes distinguées par différentesreligions pour leur élévationspirituelle et proposés aux croyants comme modèles de vie en raison d'un trait de personnalité ou d'un comportement réputé exemplaire. Certains de ces saints portent le qualificatif de « martyrs » (« témoins »), lorsqu'ils ont payé de leur vie leur attachement à leurfoi.
L'influence d'un saint dépasse parfois l'espace de sa religion propre, quand son rayonnement moral apparaît comme universel.
Dans lejudaïsme, seul Dieu est saint. L'équivalent de l'homme « saint » des autres religions est le « juste », letsadik (צדיק).
LaTorah utilise le terme hébreuqadosh, qui signifie « saint », « séparé » et par extension « pur » (exempt de fautes, de taches), pour désigner Dieu, le « Saint, béni soit-Il »,ha-Qadosh baroukh-Hou (הַקָּדוֹשׁ בָּרוּךְ הוּא).
Le message« Saint pour l'Éternel » se trouvait inscrit sur la plaque d'or (Tsits Hazahav) que portait le grand prêtre qui officiait dans leTemple de Jérusalem. Toute notion primaire de sainteté se rattache à Dieu qui, par son action, peut rendre saint (en séparant, purifiant) l'homme, le peuple, ou le lieu. De même, en employant le même terme de « saint », la Torah désigne le peuple d’Israël comme « un royaume de prêtres (princes, dans ce contexte) et un peuple saint » (Exode 19:6).
Il existe une certaine ligne de séparation entre les religions non chalcédoniennes (juifs, protestants, musulmans) et celles qui pratiquent le culte des saints (catholiques et orthodoxes). La fin de l'Antiquité européenne voit en effet l'avènement duchristianisme,religion monothéiste. Lapiété populaire restant empreinte depolythéisme, les autorités religieuses intègrent cette croyance en autorisant le culte local, voire régional, desaints protecteurs[1]. Dans une entrevue avec la revuePopulaire du centre en 2016,Odon Vallet précise[2] :« Les saints locaux pouvaient servir d’exemple de vertu et il fallait s’inspirer de leur modèle de vie chrétienne. Il y avait là aussi une certaine manière d’imiter le Christ. »
Les titres desaint,bienheureux etvénérable correspondent aux étapes duprocès en canonisation de l’Église catholique visant à reconnaître de manière officielle comme « saint » un défunt baptisé, par opposition aux innombrables saints imaginaires et facétieux créés de toutes pièces au Moyen Âge pour des besoins concrets (saint protecteur,saint guérisseur,saint propitiatoire). Même si l’Église compte d'innombrables saints, pour la plupart inconnus, et que tous les fidèles sont« appelés à être saints en vivant avec amour et en offrant un témoignage personnel dans [leurs] occupations quotidiennes, là où chacun se trouve »[3], elle a souhaité en donner un certain nombre (dont la vie fut marquante par leur sainteté) comme exemple et « ami » à toute la communauté des croyants. Ce processus de reconnaissance se base sur la biographie du candidat, ses œuvres et les témoignages de ceux qui l'ont connu. Il y a alors trois critères essentiels dans le processus de reconnaissance : être mort enodeur de sainteté, c.-à-d. avoir eu un rayonnement spirituel après sa mort (réputation de sainteté qui doit être spontanée, durable, en croissance continue, et généralisée) ; avoir des témoins qui attestent de son martyre ou de sa vertu héroïque ; doit avoir accompli au moins deux miracles. Pour l’Église catholique, reconnaître la personne comme « sainte » revient à affirmer qu'elle se trouve dans la Vie éternelle en présence de Dieu (dans lavision béatifique), et qu'elle représente ainsi tel un frère aîné dans la foi pour le croyant en chemin sur terre. Ainsi, le « saint » devient pour tous à la fois un exemple de vie chrétienne, un enseignement pour le croyant, et aussi un intercesseur auprès de Dieu, tel que le prie par exemple l’Église catholique dans laPréface pour un saint pasteur du Missel Romain : « par l'exemple qu'il a donné, tu nous encourages, par son enseignement, tu nous éclaires, à sa prière, tu veilles sur nous »[4].
La déclaration reconnaissantvénérable la personne défunte affirme que celle-ci mérite de recevoir une vénération locale ; celle le reconnaissant commebienheureux (béatification) permet ensuite d'en faire l'objet d'un culte plus généralisé ; enfin, celle le reconnaissant comme saint (canonisation) conduit à un culte universel.
De manière concise, la « sainteté » s'exprime comme le désir et lavocation de tout homme à rejoindre leChrist dans un état que l'on nomme « communion ». Il s'agit, selon l'Évangile, d'une action impossible à l'être humain mais pas àDieu et qui se fait par la collaboration de l'être humain à l'action divine dans le monde. Le « saint » est donc toute personne qui parvient à cette proximité.
Tout au long de l’Ancien Testament, on retrouve, comme dans lejudaïsme, l’affirmation que seul Dieu est Saint. Cependant, par lebaptême et l'adoption filiale qui s'ensuit, leschrétiens se trouvent associés et appelés à cette sainteté, une vocation universelle. L'apôtrePaul parle dessaints pour désigner les chrétiens vivant dans telle ou telleville[5]. En ce sens, la sainteté exprime l'état decommunion avec Dieu, dans l'Église, par lebaptême.
Les saints au sens strict sont ceux qui, comme « le bon larron » à qui le Christ dit :« Aujourd'hui, tu seras avec moi auParadis », ont atteint la béatitude éternelle, contemplent Dieu auCiel etintercèdent pour les êtres humains ici-bas (voirListe des saints catholiques).
Parmi lesdéfunts, étaient réputés saints et vénérés comme tels lesmartyrs (mot grec signifiant « témoin ») (leur « baptême sanglant » effaçait tout péché) et lesapôtres (choisis par le Christ). D'autres saints, comme certainsascètes, devaient recevoir la vénération plus tard. Ainsi, dès les premiers temps du christianisme, tous les fidèles ont une vocation à la sainteté et peuvent se trouver dignes de vénération posthume, aussi bien hommes que femmes, philosophes comme simples d’esprit, sans égard à leurs conditions sociales, esclaves ou aristocrates (voirsaint Druon,saint Gerlac ou encoreBenoît Labre auXVIIIe siècle), ce qui constitue une nouveauté radicale[6]. De plus, jusqu'à l’invention de la procédure decanonisation auXIIIe siècle, lavox populi décide de la sainteté, pas la hiérarchie. Celle-là se fonde sur la pureté du saint, et la recherche d’un absolu à travers lafoi. Cette recherche d’absolu peut conduire jusqu’aumartyre, jusqu'à mourir ou endurer destortures pour ne pas abandonner safoi ; le martyre représente, jusqu'à notre époque, un moyen privilégié d’accéder à la sainteté. Dès l'Antiquité tardive, le statut social particulier des saints les distinguent, notamment à travers leur mort, leurs funérailles, la dévotion pour leurs reliques, la construction d'écrins monumentaux (basiliques et églises) pour accueillir ces restes, et leur mémoire entretenue dans desVitae ou desMiracula qui donnent vie à ces« morts très spéciaux[7] ».
Petit à petit, la notion de sainteté s'élargit, et de nombreuses personnalités locales dans l'Église primitive et parmi les populations nouvellementchristianisées ont acquis laréputation de sainteté. Aujourd'hui, la reconnaissance officielle du statut de saint passe par l'inscription dans le calendrier de l'Église appelé « martyrologe ». Pour lescatholiques, les saints forment « l'Église triomphante » et intercèdent auprès de Dieu pour les hommes d'ici-bas (l'Église militante) et pour les défunts auPurgatoire (l'Église souffrante) : il s'agit de lacommunion des saints. Tous ces saints, pas forcément reconnus de manière officielle ici-bas comme tels, sont fêtés ensemble le jour de laToussaint. La fête de la Toussaint, célébrée le1er novembre, signifie, dans le catholicisme, qu'au-delà du nombre restreint de personnescanonisées, c.-à-d. dont on affirme sans ambiguïté la sainteté et auxquels on peut adresser un culte, de nombreux chrétiens, voire non chrétiensstricto sensu (par exempleAbraham,Moïse,David,Job), ont atteint l'idéal chrétien : la communion avec Dieu.
L'Église catholique romaine — par le biais de lacanonisation — déclare être sûre de la présence des saints inscrits aumartyrologe romain auparadis. Ils font donc l'objet d'un culte public (à l'instar de l'Église orthodoxe) ditculte dedulie (dugrecδοῦλος /doûlos, « serviteur », lequel s'oppose auculte delâtrie (du grecλατρεία /latreía, « culte, adoration ») qui n'est dû qu'à Dieu. Dans le cas deMarie, mère de Jésus, une exception est admise, qui se nommehyperdulie et qui semanifeste dans les sites d'apparition.
Le culte de dulie revêt deux formes, la vénération (hommage respectueux qui inclut des prières devant leurs images et leurs reliques, et des fêtes liturgiques en leur honneur) et l'invocation (adresse directe au saint ou adresse à Dieu par l'intermédiaire du saint, pratique appeléeintercession).
Lors de chaqueliturgie eucharistique, aussitôt après la consécration, le prêtre élève les saints dons consacrés vers l'assistance desfidèles et proclame ;« les saints dons sont pour les saints ! », et les fidèles ou les chantres protestent ;« Un seul est saint, un seul est Seigneur, Jésus-Christ, à la gloire de Dieu le Père ». La sainteté, selon les orthodoxes, consiste en une participation à lavie duChrist et les saints portent ce qualificatif dans la seule mesure où ils sont christophores, c.-à-d. assezhumbles et obéissants en la personne du Christ pour représenter fidèlement sonimage et en être uneicône.
L'Église orthodoxe ignore la notion de « bienheureux », le mot est synonyme de saint. Elle ignore aussi les procès encanonisation ou le nombre minimum demiracles requis pour proclamer saint un fidèle décédé. Lorsque la vénération de la mémoire d'undéfunt se répand parmi les fidèles, le synode de l'Église concernée se réunit autour du primat (patriarche ou archevêque) et étudie la question de la sainteté de cette personne. Il arrive souvent que quelques icônes aient déjà été peintes à sa mémoire. La proclamation de la sainteté de la personne en question se fait ensuite (au cours d'une cérémonie officielle appelée glorification)[8] en même temps que la détermination d'un (ou plusieurs) jour(s) de fête liturgique, la composition d'untropaire (hymne en l'honneur du nouveau saint) et un office complet. Le canon iconographique du saint s'élabore ensuite petit à petit.
Dans le calendrier orthodoxe, le premier dimanche après laPentecôte se trouve consacré à la mémoire de tous les saints.
Catégorie : saint orthodoxe,canonisation par lavox populi confirmée par lesynode de l'Église locale.
Catégorie : saint non chalcédonien,canonisation par lavox populi et par lesautorités de l'Église locale.
Leprotestantisme se distingue du reste du christianisme entre autres par son refus duculte des saints (et de leursreliques). LaBible déclare sainte toute personne ayant accepté lesang deJésus versé à laCroix comme nécessaire et suffisant pour effacer sespéchés, car tous sontpécheurs devant Dieu (cf.Hébreux 10.29 etRomains 3.10-18). Ce sens du motsaint comme synonyme dechrétien est le plus courant dans le protestantisme. Cette confession insiste sur l'affirmation dusalut à l'initiative de Dieu seul (sola gratia,sola fide, « seule la grâce, seule la foi... »), ce qui implique que « Dieu seul connaît ceux qui lui appartiennent ». De ce fait, les protestants s'abstiennent de déclarer quiconque plussaint que les autres, d'autant que la conception de l'après-vie varie selon les dénominations, voire les personnes. Dans le protestantisme classique (luthérien ouréformé), on appelle courammentsaints les personnages duNouveau Testament, sans que cela donne lieu au moindreculte, car pour l'ensemble des protestants, ce dernier n'est dû qu'àDieu seul (Soli Deo gloria, « à Dieu seul la gloire »). Par tradition, plusieurs pays protestants ont conservé commepatron le saint réputé avoir joué le plus grand rôle dans leurévangélisation :sainte Brigitte enSuède,saint Olav enNorvège, etc.
Dans l'islam, lewali, « proche deAllah, l'ami de Allah » (walī Allāhولي الله) peut être considéré (bien qu'avec une certaine prudence) comme l'équivalent du saint chrétien. Il se caractérise par ses grandes qualités d'âme, son renoncement aux biens matériels et sa profonde piété.
D'une manière général, lesunnisme réprouve lescultes autres que celui adressé àDieu, et le Coran qualifie d'associateurs ceux qui s'opposent à l'affirmation de l'unicité de Dieu. C'est pourquoile culte des « saints » est interdit dans le sunnisme[réf. nécessaire].
Cependant, comme le sunnisme ne connaît pas de hiérarchie il n'y a pas d'autorité du culte chargée de décerner le titre de saint ou sainte, et il n'a donc pas de saints au sens officiel, contrairement par exemple à l’Église catholique.
Certains pays d'Afrique, notamment auMaghreb, pratiquent souvent un culte des saints, (parfois appelés aussimarabouts). Des formes desoufisme assez hétérodoxes, dont on retrouve lestariqa dans l'ensemble des communautés musulmanes, connaissent aussi des « wali », terme généralement traduit par « saint » dans les ouvrages d'islamologie en français, bien que le sens de « wali » soit souvent synonyme de « guide vers Dieu » ou de « maître ».
Malek Jân Ne'mati, née dans leKurdistan iranien, est vénérée comme une sainte et surnommée Cheikh Jâni ou encore Sainte Janie. Décédée à Paris en 1993 (87 ans), elle est ensevelie dans le village deBaillou.
Lechiisme reconnaît aussi un équivalent des saints, en la personne desImams. Leurs tombeaux donnent lieu à despèlerinages qui attirent souvent de très grandes foules, par exemple, enIrak, lamarche d'arbaïn, commémorant la mort deAl-Hussein ibn Ali.
L'hindouisme compte de nombreux saints (qui peuvent être appeléssant oubhakta) et qui sont reliés au courant de labhakti. Ils proviennent de nombreuses lignées, mais s'inscrivent dans le courantvishnouite[9]. Parmi les plus célèbres, on peut mentionnerKabir,Namdev,Samarth Ramdas(en) etTukârâm. Lessant ont connu leur âge d'or entre lesXIIIe et XVIIe siècles[9].
Le termesanskrit « ārya » — « noble » — serait plus adéquat. Il désigne tout bouddhiste entré dans la voie(marga), ou plus précisément qui a atteint au moins le premier stade de ce qu'on appelle lesQuatre êtres nobles. Une fois entrés dans ce chemin en coupant progressivement lesliens qui les retiennent dans le cycle des renaissances (samsâra), ils parcourent quatre étapes, au cours d'un certain nombre de vies qu'il leur reste à vivre avant d'atteindre la libération complète (nirvâna) de laroue des existences :sotapanna,sakadagamin,anagamin etarhat — c'est ce dernier qui entre dans le nirvana, l'Absolu[12].
Dans ce cadre de référence, lebodhisattva n'est pas à proprement parler un « être noble », car il n'a pas brisé (de manière volontaire) les liens, mais la qualité de son éveil peut cependant le faire ranger parmi lesāryas, selon leMahāyāna. Paul Magnin[13] voit en lui le« symbole d'un nouveau mode de sainteté »
↑RéginePernoud,Les Saints au Moyen Âge - La sainteté d’hier est-elle pour aujourd’hui ?, Paris,Plon,, 367 p.(ISBN2-259-01186-1), p. 23-30
↑(en)Peter Brown,« The Very Special Dead », dansThe Cult of the Saints, Its Rise and Function in Latin Christianity, Chicago, Chicago University Press,,p. 69-85
↑Michel Dubost, Stanislas Lalanne,Le nouveau Théo, Mame,,p. 394
Galimard Flavigny, Bertrand,Guide des saints et de leurs attributs : reconnaître et identifier plus de 700 figures chrétiennes, Nimes, De Vecchi, 2014.