Le tableau d'une ville progressant de manière continue ne correspond pas intégralement à la complexité des faits. Son histoire n'a pas été celle d'une croissance continue : aux progrès (de rythmes très variés) ont succédé des stagnations et parfois même des replis. Mais les Romains sont parvenus à résoudre les difficultés internes nées de la conquête sous laRépublique en transformant leursinstitutions républicaines. La fondation de l'Empire parAuguste marque le début d'une période où la conquête romaine atteint les limites du monde connu à l'époque. Lacivilisation romaine, en partie influencée par lesGrecs, influence durablement les régions conquises. À partir duIIIe siècle, le monde romain subit lesgrandes invasions desBarbares venus de l'Europe du Nord et de l'Asie. Pour leur résister, l'Empire a eu besoin de créer une nouvelle structure bureaucratique et militaire. C'est dans ce cadre que s'opère le brillant renouveau duIVe siècle ainsi que l'établissement duchristianisme comme religion d'État. Après laséparation entre l'Orient et l'Occident en395, de nouvelles invasions mettent fin à l'Empire d'Occident en476.
En proie à l'instabilité interne et aux attaques de peuples issus de Germanie pour la plupart, lapartie occidentale de l'Empire (comprenant l'Hispanie, laGaule, laBretagne, l'Afrique du Nord et l'Italie) se scinde en royaumes indépendants à la fin duVe siècle. Lapartie orientale de l'Empire, gouvernée à partir deConstantinople (incluant laGrèce, l'Anatolie, laSyrie et l'Égypte) survit à cette crise. Malgré la perte de la Syrie et de l'Égypte, au profit de l'empire arabo-islamique naissant, l'empire d'Orient poursuit son développement, jusqu'à ce qu'il soit finalement détruit par l'Empire ottoman. Cet empire médiéval et chrétien, appelé « Empire romain » par ses habitants, mais que les historiens modernes dénomment généralement « Empire byzantin », est la dernière étape évolutive, sans interruption dans le pouvoir impérial et l'administration de l'Empire romain.
La civilisation romaine est souvent comptabilisée dans l'Antiquité classique avec laGrèce antique, une civilisation qui a inspiré une grande partie de la culture de la Rome antique. Outre son modèle d'exercice du pouvoir, dont on ne compte plus les princes qui ont voulu l'imiter ou s'en sont inspirés, la Rome antique a contribué grandement à l'élaboration dudroit, des institutions et deslois, de laguerre, de l'art et lalittérature, de l'architecture et latechnologie ainsi que deslangues dans le monde occidental.
Les premiers Romains sont organisés en groupes héréditaires appelésgentes[6] ou « clans ». Pendant longtemps, ce genre de divisions est familier de la majorité desIndo-Européens. Chaque clan se compose d’un agrégat de familles vivant sous la tutelle d’un patriarche, appelépater (motlatin pour « père »)[7]. Chaquegens constitue une unité qui s’autogouverne et chaque membre d’unegens particulière partage les mêmes droits et les mêmes responsabilités que les autres membres[7]. Chacun des clans se gouverne lui-même de façon démocratique (chaque membre peut voter) ou aristocratique (un groupe d’anciens gère les problèmes)[7]. Bien avant la date traditionnelle de lafondation de Rome, une communauté s’est fusionnée en confédération, la ville d’Albe la Longue (Alba Longa) constituant son point de rassemblement[8],[9],[10]. Néanmoins, après un certain temps, le siège de cette confédération se déplace àRome[11],[8],[9].
La naissance de Rome est évoquée dans des récits légendaires racontés parVirgile,Tite-Live etDenys d'Halicarnasse, entre autres. Dans l’Énéide, long poème à la gloire de l'empereurAuguste,Virgile raconte les aventures du troyenÉnée, fils deVénus. QuandTroie est saccagée par lesAchéens, il parvient à s'enfuir de la ville avec son filsAscagne (ou Iule), un groupe de Troyens et en portant son pèreAnchise sur ses épaules. Après de nombreuses aventures et des amours contrariées avecDidon, la reine deCarthage, il débarque dans leLatium où il fonde la ville deLavinium. Son filsAscagne fondeAlbe la Longue. Cette légende permet de donner àJules César et son héritierAuguste une origine divine puisqu'ils se présentent comme les descendants d'Ascagne[13],[14],[15].
AprèsAscagne, douze rois se succèdent àAlbe. Le treizième,Numitor, est détrôné par son frèreAmulius. Pour écarter tout futur rival, celui-ci fait de sa nièce,Rhéa Silvia, unevestale, c'est-à-dire une prêtresse deVesta ayant l'obligation de rester vierge. Mais le dieuMars tombe amoureux d'elle et de leur union naissent des jumeaux,Romulus et Rémus. La jeunevestale est emmurée vivante et ses fils sont exposés sur leTibre (selonDenys d'Halicarnasse de nombreuses versions existent, tout aussi bien sur le viol que sur la peine infligée). Ils sont d'abord recueillis par une louve qui les allaite puis par un couple de bergers qui les élève[16],[17]. Devenus adultes, ils restaurent le trône de leur grand-pèreNumitor et décident de fonder une nouvelle ville. Ils s'en remettent auxauspices pour savoir lequel d'entre eux régnera sur la ville, mais une dispute éclate entre les deux frères. Au cours de la querelle,Romulus tue Rémus. Cette légende prend sa forme définitive à la fin duIVe siècle av. J.-C. Selon la tradition, lafondation de Rome remonte à Les Romains comptent les années à partir de la date supposée de la naissance de leur cité (Ab Urbe condita)[18],[19].
Les recherches archéologiques ont permis de trouver sur lemont Palatin des cabanes de bergers datant du milieu deVIIIe siècle av. J.-C., ce qui correspond à la date légendaire de lanaissance de Rome. Les vestiges trouvés montrent qu'à partir de ce moment, la cité connaît un développement continu[20].
LaMonarchie peut être divisée en deux périodes. La première voit le règne des quatre premiers rois légendaires (Romulus/Titus Tatius,Numa Pompilius,Tullus Hostilius etAncus Marcius), à qui les annalistes attribuent la fondation des institutions politiques et religieuses de la ville. Celle-ci est organisée encuries, leSénat et lescomices curiates deviennent officiels. Rome s’engage dans plusieurs guerres de conquête. C’est à cette époque que serait fondé le port d’Ostie et qu’est construit lepremier pont sur leTibre[21].
Selon ce que rapporte la tradition, les anciens Romains sont divisés en trois groupes ouTribus romuléennes, lesTities, lesRamnes et lesLuceres. L'origine et la composition de ces tribus restent un sujet de débat pour les historiens[22]. Les familles appartenant à l’un de ces trois groupes constituent les premières famillespatriciennes. Afin d’organiser la ville, ces familles patriciennes l’ont divisée en unités appeléescuries, bien que, selon la légende, cette organisation soit imputée au premier roi,Romulus. Chacune des trois tribus est divisée en dix curies[23].
Quelques-uns des clans se gèrent de façon démocratique avec chaque membre possédant le droit de vote. D’autres se gouvernent de façon aristocratique, organisés autour d’un conseil d’anciens. Quand ces clans ont fusionné pour donner naissance à une plus large communauté, les deux méthodes ont été conservées pour gouverner.
Les premiers Romains s’expriment démocratiquement au travers d’unecomitia (« assemblée » ou « comice »). Les deuxprincipales assemblées formées sont connues sous les noms decomices curiates et decomices calates. Les comices sont l’incarnation des tendances démocratiques des premiers clans. Pour mieux respecter la forme dedémocratie directe utilisée par les clans confédérés, les deux comices sont organisées de façon à refléter au mieux les divisions tribales de la ville. Les comices sont donc organisées parcuries. Les membres de chacune des trois tribus (Ramnes,Tities etLuceres) sont assignés à une curie précise, chaque groupe étant divisé en dix curies.
L’équivalent aristocratique des assemblées prend la forme d’un conseil municipal des anciens. Alors que les conseils de chaque clan se composent des anciens des familles dirigeantes du clan, le conseil municipal se compose des anciens appartenant aux clans dirigeants de la ville, conseil qui deviendra leSénat. Celui-ci (selon la légende) se compose de 300 anciens (despatres) venant de chacune des trois tribus et constituant les premiers sénateurs romains[24].
Le peuple et les anciens reconnaissent la nécessité d’avoir un dirigeant politique unique, appelé lerex. Le peuple élit le roi tandis que les anciens le conseillent[24].
La deuxième période, plus riche en événements que la première, voit le règne des trois derniers rois légendaires, l’importante expansion du territoire romain et le développement de laclasse plébéienne avec son intégration partielle à la structure politique de la ville. Enfin, cette seconde période voit les seuls rois étrangers ayant régné sur Rome avec leurs successions basées sur l’hérédité. Lestrois roisétrusques semi-légendaires entament une politique de conquête. Sans se pencher en détail sur le degré de véracité de ces légendes, il est très probable que de telles conquêtes aient bien eu lieu à la fin de laMonarchie. Il devient alors nécessaire de déterminer ce qui doit être fait des peuples conquis[24].
Le premier roi étrusque de Rome,Tarquin l'Ancien, succède àAncus Marcius. Il a été suggéré que Rome a été envahie par lesÉtrusques, bien que cela reste improbable. La ville est située sur une position facilement défendable et son expansion rapide attire les populations de toute la région. La politique libérale de la ville constitue une occasion pour un dirigeant compétent de gagner le trône[25].
Le plus souvent, les habitants dont les villes ont été conquises y demeurent. Leur vie quotidienne et leur système de gouvernement restent les mêmes, mais leurs villes perdent leur indépendance vis-à-vis de Rome. Néanmoins, un certain nombre vient à Rome. Pour acquérir un statut économique viable et légal, les nouveaux arrivants doivent accepter une dépendance envers une famillepatricienne ou envers le roi (qui est lui-même un patricien) ; ils deviennent alorsclients d’une famille patricienne. En fin de compte, ceux qui s’étaient attachés au roi sont libérés de leur dépendance. Ces derniers constituent alors les premiersplébéiens[26].
Comme Rome s’agrandit, de plus en plus de soldats sont nécessaires aux conquêtes. Les non-patriciens appartiennent à la mêmecurie que leurspatrons. En ce temps, l’armée est organisée sur la base des curies, de sorte que les individus dépendants de familles doivent se battre. Néanmoins, quand ils sont délivrés de leur dépendance, ils quittent la curie à laquelle appartient leur patron. Ils ne sont alors plus obligés de se battre, mais ils perdent tout statut politique ou économique[27].
Pour faire revenir cesplébéiens dans l’armée, les patriciens ont dû faire des concessions, dont on ne connaît pas exactement la nature. Une des conséquences est que les plébéiens ont désormais le droit de posséder leurs propres terres. Ils ont maintenant tout intérêt à défendre la ville : si elle venait à être conquise, ils perdraient toutes leurs terres. Néanmoins, il ne leur est donné aucun pouvoir politique[28]. Tous ces éléments qui se mettent en place conduiront auconflit des ordres sous laRépublique.
Pour faire revenir lesplébéiens dans l’armée, le roiServius Tullius abolit l’ancien système qui organise les armées sur la base descuries et le remplace par un système basé sur la propriété terrienne. Suivant la réorganisation deServius Tullius, deux nouvelles unités sont créées. L’armée est divisée encenturies (centuriæ). De futures réorganisations seront plus efficaces en se basant sur lestribus[29]. Lescenturies se rassemblent dans une nouvelle assemblée appeléecomitia centuriata (comices centuriates). À sa création, cette assemblée ne dispose d’aucun pouvoir politique ou législatif. Elle est simplement utilisée comme point de réunion de l’armée[30].
Le mot « république » vient dulatinres publica, ce qui signifie « la chose publique ». Gouverner la cité est donc une affaire publique et collective. La devise de la République estSenatus populusque Romanus, « le Sénat et le peuple romain ». Elle symbolise l'union duSénat romain, où siègent à l'origine lesfamilles patriciennes, et de l'ensemble descitoyens romains. En effet, les Romains sont divisés en deux groupes, lespatriciens et lesplébéiens. Ces derniers forment la masse des artisans et paysans. Ils vivent en dehors de l'organisation patricienne et n'honorent aucun ancêtre particulier. Les patriciens sont souvent propriétaires devastes domaines cultivés. Ils appartiennent à de célèbres familles, lesgentes. Chaquegens a ses propres cultes dont celui des ancêtres et ses traditions. Elle comprend un nombre plus ou moins grand declients qui doivent obéissance à leur « patron » et reçoivent en échange aide et assistance en cas de besoin.
L'histoire des débuts de la République est très obscure : en dehors des découvertes archéologiques, qui ne permettent qu'exceptionnellement une narration des événements, on ne possède pas de sources contemporaines de cette période. On ne peut donc en écrire l'histoire qu'à partir des récits historiques qu'en donnent les Romains eux-mêmes, récits souvent imprécis, parfois contradictoires, où la légende et la réécriture à des fins politiques se mêlent au souvenir des événements les plus anciens. Néanmoins, bien qu'il soit évident que la tradition enjolive les faits pour ne pas donner à Rome le mauvais rôle, il est aujourd'hui admis que la tradition romaine se fonde sur des faits historiques, même s'il est très difficile et souvent impossible de démêler le vrai du faux[34].
Selon les traditions,Junius Brutus, le neveu du dernierroiTarquin le Superbe, est le fondateur légendaire de laRépublique romaine, en Tarquin est renversé, car il use de ses pouvoirs pour instituer une tyrannie. Ses abus sont si extrêmes que le Sénat et le peuple de Rome voient même le concept de la monarchie comme odieux. LeSénat perd le contrôle de l'élection des nouveaux rois sous ladynastie étrusque desTarquins, et c’est cette atteinte à la souveraineté du Sénat, plutôt qu’une tyrannie intolérable, qui pousse lespatriciens, plutôt que le peuple entier, à chasser le dernier roi.Tarquin le Superbe soulève des villesétrusques contre la république naissante qui les vainc.Porsenna, roiétrusque deClusium, assiège alors Rome pour rétablirTarquin, mais renonce devant l’obstination des Romains. Les auteurs modernes remettent en cause tous les divers événements obscurs narrés par les historiographes romains, notamment l'épisode dePorsenna[35]. Cependant, nombre de villes latines se défont du jougétrusque à la fin duVIe siècle av. J.-C. Le tyran se réfugie ensuite àTusculum où il pousse son gendreOctavius Mamilius à la guerre. Allié desLatins, il mène l'ultime combat contre Rome aulac Régille où il est vaincu, puis meurt quelques années plus tard àCumes où il fait de son hôte, le tyranAristodème, son héritier[36],[37].
Quelques légendes suggèrent que la monarchie diffère radicalement de la république naissante. Il est plus probable qu'il y ait eu une transition plus graduelle. Il se peut qu'il y ait eu un renversement rapide de la monarchie, mais le seul changement immédiat à ce moment-là est le remplacement du roi par une magistrature à deux têtes limitée en temps. Les autres changements se sont probablement produits plus progressivement que la tradition ne le suggère.
Labataille du lac Régille, ainsi que l'échec dePorsenna, marque définitivement la fin du règne desTarquins à Rome. En, une alliance est signée avec laLigue latine : lefœdus Cassianum. Elle met fin à la guerre entre Romains et Latins et place Rome à égalité de pouvoir avec tous les membres de laLigue latine réunis. Cela crée autour de Rome un rempart contre lesVolsques et lesÈques[38],[39] puisque Rome s'allie aussi auxHerniques en[40]. L'histoire romaine duVe siècle av. J.-C. est secouée de guerres contre lesVolsques et lesÈques ainsi que parfois lesSabins, mais Rome résiste et repousse les montagnards, leur infligeant de lourdes défaites et des trêves plus ou moins longues, malgré quelques revers[41].
Rome etVéies s'opposent pour des motifs économiques. Grâce àFidènes, située en amont de Rome sur ungué duTibre, Véies contrôle laVia Salaria et le trafic du sel dans la région[42],[43]. Une première guerre, privée, est menée par lesFabiens, massacrés à labataille du Crémère[44]. Ensuite, vers, Rome s'empare deFidènes une première fois[45], qui devient unecolonie romaine, puis définitivement en, année où une trêve de 20 ans est conclue[46]. En, Rome assiègeVéies[47]. La guerre et le siège durent dix ans, jusqu'en, la ville étrusque tombe aux mains des Romains dirigés par ledictateurCamille en l'an[48]. Cette guerre et cette prise sont un événement majeur dans l'histoire romaine : pour la première fois, les soldats-paysans restent dans l'armée plus d'une année entière, sans rentrer chez eux pour l'hiver, et pour la première fois, en compensation, ils reçoivent une paie tirée d'un nouvel impôt payé par les propriétaires terriens, letributum[49]. Le territoire romain double presque de taille et Rome prend l'ascendant dans l'alliance éternelle entre égaux conclue avec laLigue latine, dominant les autres cités. Ainsi, Rome n'a jamais été si forte et aucune cité latine ou étrusque ne semble pouvoir lui faire de l'ombre[50].
Mais en, une horde gauloise, menée parBrennus,écrase l'armée romaine. Les instances religieuses et les objets sacrés sont mis en sécurité àCære, une alliée, avant que les Gaulois ne s'emparent de Rome et assiègent leCapitole, où les derniers défenseurs résistent[51]. Si l'on en croit les traditions, Rome est totalement mise à sac, détruite et brûlée[52], seul leCapitole est épargné, défendu héroïquement (épisode desoies du Capitole notamment[53]). En réalité, il se peut qu'il ne s'agisse que d'un pillage général, les Gaulois dépouillant tout, surtout lestemples, plutôt que d'une mise à sac radicale. Ce sac reste à jamais un traumatisme pour la République romaine, et il se peut donc que les traditions soient très exagérées[54]. Le sac de Rome n'est qu'un événement mineur dans une guerre opposant les tyrans deSyracuse,Denys l'Ancien au début duIVe siècle av. J.-C., alliés desGaulois qu'ils utilisent peut-être comme mercenaires (hypothèse de l'historienneMarta Sordi[55]), auxÉtrusques deCære (Cære et Syracuse luttant pour détenir lapuissance thalassocratique), qui sont visés par l'attaque gauloise, et qui subissent de graves pertes à l'instar de Rome[56].
Au lendemain de la chute de lamonarchie, leSénat et surtout les deux seulsmagistrats récupèrent le pouvoir suprême, et on passe d'unsystème monarchique à unsystème oligarchique. Ce changement de gouvernement ne profite qu'à une minorité, la nouvelle élite : lepatriciat. De nombreuxplébéiens sont très endettés, et subissent donc la loi du patriciat.
En, une série de lois est proposée pour améliorer la situation de laplèbe à Rome. Il s'agit de lois politiques, économiques et sociales, visant à partager le pouvoir suprême entreplébéiens etpatriciens, à lutter contre l'accaparement par les patriciens des terres récemment annexées autour de Rome (ager publicus), et à soulager la plèbe qui est écrasée de dettes : les mesures proposées sont le rétablissement duconsulat, avec obligatoirement un éluplébéien parmi les deux consuls, l'interdiction d’occuper plus de 500jugères sur l’ager publicus et la déduction du capital des intérêts déjà payés et l'étalement du remboursement des dettes sur trois ans, ainsi que la suppression dunexum. Les trois lois, unies en une seule pour le vote, sont approuvées[68]. Leconsulat plébéien ouvre implicitement l'accès à ladictature et à lacensure. Durant toute cette période, la République romaine fait face à une multitude d'ennemis, et est sans cesse en guerre contre des peuplesitaliques, en ayant souvent recours à l'élection d'undictateur pour faire face aux menaces extérieures, et est plusieurs fois proche de la catastrophe, comme lors dusac de Rome en 390av. J.-C.
LeIVe siècle av. J.-C. représente un tournant majeur dans l'histoire de Rome, car il pose les bases de l'expansion qui est suivie par l'extension du territoire romain jusqu’à laCampanie, malgré la résistance forte des montagnardssamnites. Les historiens contemporains identifient plusieurs facteurs qui expliquent ces changements : le traumatisme desinvasions gauloises et les difficultés qui suivirent avec ses voisins, semblent avoir persuadé les Romains de ne plus accepter de menaces et d'entamer une expansion que l'on peut parfois qualifier d'« impérialisme défensif ».
La période qui suit le vote deslois licinio-sextiennes voit l’émergence de tendances alarmantes, tel que le rapprochement continu destribuns et dessénateurs. Vers le milieu duIVe siècle av. J.-C., leconcile plébéien ratifie laLex Ovinia qui permet aux censeurs de décider de l'entrée de n’importe quel magistrat nouvellement élu au Sénat. Lesplébéiens détenant déjà de nombreuses magistratures, leur nombre au Sénat augmente probablement rapidement. Le rapprochement entre les tribuns et le Sénat facilite la création d’une nouvelle aristocratie plébéienne : la plupart des plébéiens élus aux magistratures proviennent d’une de ces familles plébéiennes. Cette nouvelle aristocratie plébéienne se fond bientôt dans l’ancienne aristocratie patricienne, créant une aristocratie combinée « patricio-plébéienne »[69].
En, lesplébéiens font sécession. Pour mettre un terme à cette nouvelle sédition, leslois hortensiennes sont adoptées, qui donnent force de loi aux résolutions de l’assemblée de la plèbe (plébiscites) sans ratification du Sénat. La signification fondamentale de cette loi dans les faits est qu’elle retire aux patriciens toute possibilité de s’opposer aux plébéiens, ce qui entraîne que les sénateurs plébéiens ont dorénavant les mêmes droits que les sénateurs patriciens. Par conséquent, le contrôle de l’État ne retombe pas sur les épaules de la démocratie, mais sur les épaules de cette nouvelle aristocratie « patricio-plébéienne »[70].
Seuls les citoyens propriétaires ont le devoir de se battre pour la République. Les plus riches combattent dans la cavalerie (equites), les autres sont fantassins (pedites)[71]. Après les réformes deCamille[72], ils forment deslégions d'environ4 500 hommes, composées notamment deshastati, les jeunes citoyens (iuniores) bien entraînés en première ligne, desprincipes, eux aussiiuniores, mais plus expérimentés, en deuxième ligne, et destriarii, lesseniores, qui forment la dernière ligne et la réserve. Les plus pauvres combattent en tant quevélites. Il existe aussi destroupes auxiliaires composées de soldats ne jouissant pas de lacitoyenneté romaine qui assistent les légions. Il règne dans lalégion une discipline rigoureuse.
En, Rome est prise par lesGaulois et subit sonpremier sac. Pour les Romains, cet épisode est vécu comme une catastrophe nationale. La cité ne met pas longtemps à se relever de ce désastre[73]. Après quelques accrochages avec ses voisins, notamment lesÉtrusques deTarquinii vaincus et quelques villes latines rebelles, et après avoir fait face à de nouveaux raids gaulois, Rome commence la conquête de l'Italie[74].
Rome a su mettre fin à ses divisions sociales et peut donc proposer un modèle politique séduisant aux aristocraties des autres citésméditerranéennes, atout diplomatique non négligeable. La diplomatie joue en effet dans la conquête romaine un rôle souvent négligé au profit des aspects purement militaires. Ladeditio deCapoue en en constitue le meilleur exemple : pour bénéficier de la protection romaine, la cité campanienne deCapoue se livre complètement à Rome qui voit sa zone d'action traditionnelle brutalement étendue à la riche région qu'est laCampanie[75],[76]. L'interpénétration des élites est si importante que l'on parle parfois d'« État romano-campanien »[77], toujours est-il qu'un mécanisme essentiel des conquêtes à venir s'est mis en place : Rome s'appuie sur les aristocraties locales, ou sur une partie de ces aristocrates, pour étendre son territoire ; en échange, elle offre à ces aristocraties la stabilité politique et l'insertion valorisante dans un ensemble plus vaste, l'accès à une échelle supérieure. Ainsi, lors de lapremière guerre samnite, les Romains interviennent, en, pour protégerCapoue desSamnites. LesSamnites sont vaincus en, mais Rome ne peut exploiter son succès et doit se replier à cause du soulèvement desLatins, qui menacent directement Rome[78].
S'ensuivent lesguerres latines, qui opposent Rome à laLigue latine, entourant en partie le territoire romain. Une tentative de la part des peuples latins d'acquérir leur indépendance de Rome est la principale cause de la guerre. La défaite desLatins voit la dissolution de laLigue latine prononcée, ainsi que l'incorporation de ses territoires dans la sphère d'influence romaine. À cette occasion les Latins obtiennent des droits partiels et différents niveaux decitoyenneté et leurs villes sont transformées, soit enmunicipes, soit encolonies romaines[79]. Entre et, Rome s'impose plus au sud de l'Italie et enCampanie, et stabilise les territoires nouvellement conquis[80].
La fondation romaine deFrégelles à la frontière samnite et de graves tensions àNaples provoquent une réaction hostile immédiate desSamnites. Le conflit durera près de 40 ans. Les Romains remportent les premières batailles, mais après plusieurs années de guerres de frontières, les consuls romains décident, en, de porter la guerre en territoire samnite, initiative qui se termine par la capture humiliante de deux légions par le samniteCaius Pontius à labataille des Fourches Caudines. Les hostilités prennent fin en et la trêve est en faveur des Samnites, qui obtiennent des Romains la cession de lacolonie romaine deFrégelles[81]. Les hostilités reprennent en, et Rome bat une vaste coalition rassemblant lesSamnites, lesÉtrusques, lesOmbriens, lesMarses, lesHerniques, lesPéligniens et lesSalentins[82]. En, lesMarses, lesPéligniens, lesMarrucins et lesVolsques sont à leur tour écrasés et soumis. LesÈques, vaincus par une campagne éclair, sont annexés[83]. En, lesSamnites réussissent à faire pénétrer une armée en Italie du Nord, secondés par leurs alliésétrusques etombriens, qui sont en guerre contre Rome depuis De plus, ils profitent de la présence desGaulois qui depuis font des incursions régulières en Italie du Nord. Les Romains écrasent cette coalition et le territoire samnite est envahi : ces derniers capitulent en, Rome asservit leurs villes et annexe leur territoire[84].
Rome sort desguerres samnites maître de l’Italie centrale et est en contact direct avec les cités grecques qui bordent les côtes sud de la péninsule et qui contrôlent une partie du commerce méditerranéen.Tarente fait appel au jeune roi d'Épire,Pyrrhus Ier, pour ralentir la progression romaine[85]. EnPyrrhus débarque en Italie et vainc les Romains. Les populations encore indépendantes duBruttium et deLucanie font alliance avec Pyrrhus, suivies desSamnites, et le jeune roi remporte à nouveau une « victoire à la Pyrrhus »[85]. Au milieu des campagnes d'Italie, Pyrrhus apporte son secours aux Siciliens contre Carthage ce qui pousse Rome à s’allier àCarthage, pour protéger la Sicile des visées de Pyrrhus. L'avancée de Pyrrhus est foudroyante. Cependant, Pyrrhus se voit contraint de partir de Sicile pour s'occuper d'autres affaires en Italie méridionale[85]. En, les Romains battent enfin Pyrrhus, qui quitte l'Italie et retourne en Épire, laissant une garnison àTarente[85].
LesSallentins et lesPicéniens sont à leur tour soumis. En et, Rome prend et détruit la cité étrusque deVolsinii et les dernièresvilles étrusques indépendantes au sud de l'Arno sont rattachées à la République romaine[86].
À cette époque, la République romaine domine dorénavant une grande partie de l'Italie et permet à la péninsule de se stabiliser et de prospérer pour la première fois de son histoire, l'économie romaine et italienne est florissante. À Rome même, lesinstitutions se consolident et se diversifient, leconflit des ordres prend fin, et l'État se trouve un seul et unique maître du pouvoir : leSénat[87].
À la suite de la chute deTarente en, toutes les terres de la péninsule italienne situées au sud du fleuveArno sont sous domination plus ou moins directe de Rome. De tous ces peuples et villes, aucun n'a réussi à s'opposer longtemps à l'avancée romaine, aucune coalition assez forte n'a réussi à se former pour résister aux forces romaines, car tous ces peuples et ces villes étaient désunis en temps de paix. Rome apporte à l'Italie une stabilité au début duIIIe siècle av. J.-C., à la même époque où lesinstitutions de la République se stabilisent aussi[88].
Toutes les populations et toutes les cités italiennes étaient divisées avant que Rome ne s'impose, et cette dernière réussit à entretenir des différences entre chaque, traitant avec chaque ville et chaque peuple, sous des conditions différentes et pour des statuts différents. De toute l'Italie centrale et méridionale, il ne reste plus que « les Romains, les Latins et les alliés italiens », les seuls à être des hommes libres au sein de la communauté romaine. Il s'agit donc de Rome et des peuples ou cités qui ont été totalement intégrés, des territoires semi-intégrés, et des alliés de Rome, au début par des alliances entre égaux qui deviennent très vite des pactes dominés par Rome[89].
Il existe deux types decitoyenneté romaine : les citoyens de plein droit qui jouissent donc de tous les droits et de tous les devoirs, c'est-à-dire notamment le droit de voter et d'être élu, de propriété, de recevoir une solde dans l'armée ainsi que le devoir de servir sous les armes et de payer des impôts ; et ceux qui ont les mêmes droits et devoirs hormis celui de voter et de pouvoir être élu magistrat. Une partie des anciensLatins qui formaient laLigue latine est incorporée à Rome avec la citoyenneté. Rome, de concert avec les Latins, va fonder de nombreuses colonies latines à des endroits stratégiques du territoire romain. Ce système de colonie latine, où les colons ne sont pas citoyens romains, mais possèdent un certain nombre de droits au sein de la colonie quasi indépendante de Rome, va perdurer longtemps, étant à l'avantage de Rome et des colons. Enfin, les alliés sont en bas de la structure administrative romaine. Ils sont le plus souvent liés à Rome par une alliance inégale, et dans tous les cas, ces alliés doivent fournir à Rome un certain nombre de troupes et de fournitures militaires, sans que Rome doive les payer, ce qui soulage les citoyens romains[90].
Ainsi, Rome a su créer autour d'elles, parmi une mosaïque de statuts, un certain équilibre et surtout une prospérité que l'Italie n'a pas connue avant, effaçant en partie les inégalités au sein de l'organisation romaine[91].
Fonctionnement théorique de la République romaine vers lesIIIe et IIe sièclesav. J.-C.
Alors qu'aux débuts de la République ce sont lesconsuls qui détiennent le pouvoir, petit à petit le Sénat émerge et s'impose au sein des institutions romaines. L'assemblée devient permanente et assoit son autorité sur les magistrats romains à la fin duIVe siècle av. J.-C., passant d'un conseil des anciens à l'organe principal du pouvoir dont les magistrats sont les subordonnés. Le Sénat romain est tourné essentiellement vers la politique étrangère. Alors que son rôle dans les conflits armés se limite théoriquement à celui de conseiller, le Sénat finit par superviser ces conflits. LeSénat gère également l’administration civile au sein de la ville. Alors que le Sénat peut influencer la promulgation de lois, il ne fait pas officiellement ces lois. Lesassemblées législatives, qui sont considérées comme l'incarnation du peuple de Rome, font les lois domestiques qui gouvernent le peuple. Le Sénat promulgue des décrets appeléssenatus consultum. Officiellement, il s’agit de « conseils » donnés auxmagistrats, bien qu’en pratique, ces décrets sont souvent suivis à la lettre par ceux-ci[92],[93].
Pendant toute la République, lescitoyens sont répartis encenturies à des fins militaires, et entribus à des fins civiles. Chacun des deux groupes se rassemble pour des buts législatifs, électoraux et judiciaires. Lescomices centuriates sont organisées d’une manière très aristocratique. Selon cette organisation, les classes les plus élevées contrôlent suffisamment de centuries pour obtenir la majorité à chaque vote. Seules, les comices centuriates peuvent élire les consuls, préteurs et censeurs, déclarer une guerre offensive, ou encore valider le cens. Lescomices tributes élisent lesquesteurs, lesédiles curules et lestribuns militaires. Elles ont également le pouvoir d’instruire des cas judiciaires. Leconcile plébéien ne représente pas tout le peuple, car les patriciens en sont exclus. Le concile plébéien élit ses propres représentants (tribuns de la plèbe etédiles plébéiens, considérés comme des magistrats). En effet, le concile plébéien est l’assemblée des tribus plébéiennes alors que les comices tributes sont l’assemblée des tribus « patricio-plébéiennes »[94],[92],[95],[96].
Les magistratures sont électives et annuelles, hormis lacensure et ladictature. Tous les magistrats ont un certain rang de pouvoir. Lesdictateurs possèdent plus de pouvoirs que n’importe quel autre magistrat, suivi desconsuls et despréteurs, magistrats ordinaires. Chaque magistrat peut seulement bloquer par sonveto une action prise par un magistrat de rang égal ou inférieur au sien. Par conséquent, aucun magistrat ne peut s’opposer par sonveto aux décisions duSénat ou desassemblées. Comme lestribuns de la plèbe et lesédiles plébéiens ne sont pas à proprement parler des magistrats, ils ne sont pas concernés par la répartition des « pouvoirs majeurs ». En général, cela fait d’eux des magistrats indépendants des autres. Ils ne peuvent voir leurs actes bloqués par leveto desconsuls. Si un magistrat, une assemblée ou le Sénat ne se conforment pas aux ordres d’un tribun, celui-ci, en usant de l’intercessio, pourra bloquer cette action particulière. Chaque magistrat républicain détient certains pouvoirs (potestas), qui comprennent l’imperium, lacoercitio et l’auspicia (pouvoirs religieux). Ces pouvoirs sont équilibrés par plusieurs contraintes constitutionnelles, incluant la collégialité (collega), le droit des citoyens d’en appeler au peuple (provocatio) et une division constitutionnelle des pouvoirs (provincia). Seul le peuple de Rome (plébéiens etpatriciens) a le droit de conférer ces pouvoirs à un magistrat[94],[92],[97],[98],[99].
À partir de commence le grand affrontement contreCarthage qui marque un tournant dans l'histoire de Rome. Carthage, ancienne colonie phénicienne, a développé d'abord des comptoirs commerciaux, puis des points d'appui et des colonies dans toute laMéditerranée occidentale et notamment à l'ouest de laSicile grâce à son esprit d'entreprise. Rome se méfie des ambitions carthaginoises en Sicile. C'est la cause de lapremière guerre punique qui dure près de vingt-cinq ans. Les Carthaginois prennent d'abord la ville deMessine, reprise par surprise par les Romains, déclenchant le début de la guerre. Il s'ensuit vingt ans de guerres avec des fortunes diverses, les premières victoires sont romaines, puis les Carthaginois se reprennent et arrêtent l'avancée romaine. Finalement, Rome prend le contrôle des mers et la victoire navale devant lesîles Égades contraintCarthage à signer une paix humiliante. Elle abandonne laSicile, puis laSardaigne et la Corse après coup, et paie un fort tribut[100].
Après lapremière guerre punique, Rome s'étend enIllyrie, après avoir vaincu lesLigures, lesInsubres et réduit laGaule cisalpine enprovince romaine[101]. De son côté,Carthage se lance à la conquête de l'Hispanie. Cette expansion inquiète Rome qui fait renaître les hostilités en[102]. Mais la République trouve en face d'elle, en la personne d'Hannibal, un adversaire redoutable, un homme politique et militaire de génie.Hannibal remporte alors dans le Nord de l'Italie une série de victoires et avance vers le sud en traversant lesApennins. Là, il écrase par deux fois, àTrasimène et àCannes, les armées romaines. Les villes alliées à Rome dans le Sud de l'Italie (mais dans le Sud uniquement) se rallient àHannibal. Celui-ci s'installe àCapoue[103]. Rome refuse de s'incliner, remporte plusieurs succès, àNole,Syracuse avecClaudius Marcellus, puis enHispanie et enfin enAfrique sous la direction deScipion l'Africain. Celui-ci a finalement raison d'Hannibal en dans laplaine de Zama, ce qui met fin à ladeuxième guerre punique. Les vaincus, qui perdent leurs possessions extérieures doivent payer un énorme tribut à Rome qui devient la première puissance de la Méditerranée occidentale en[104]. Parmi les raisons du succès romain, on peut citer le refus de la classe politique romaine de s'admettre jamais vaincue, même si elle se divise sur la stratégie à adopter, offensive ou défensive ; la capacité de recrutement romaine, comblant constamment ses pertes, au prix d'une pression épuisante sur ses alliés ; la maîtrise maritime, et la fidélité des peuples alliés entourant Rome d'un glacis protecteur et de la plupart des ports d'Italie du Sud.
Après la mort dePhilippe V de Macédoine en, son fils,Persée déclenche latroisième guerre macédonienne. Initialement, les forces romaines ont des difficultés contre les forces macédoniennes, mais en, les Romains écrasent leurs adversaires àPydna. LaMacédoine est divisée en quatre républiques dirigées par des marionnettes que Rome commande[109]. Rome écrase complètement une rébellion macédonienne et ne se retire pas de la région, formant laprovince romaine deMacédoine, établissant un pouvoir romain permanent sur la péninsule grecque. Entre et, la ligue achéenne se révolte aussi : victoire romaine, pillage et destruction deCorinthe. En, leroyaume de Pergame échoit en héritage à Rome. Il donne naissance à laprovince d'Asie.
En, laguerre des ordres a pris fin par leslois hortensiennes, résolvant ainsi un des grands problèmes des débuts de la République. Néanmoins, il n’y a pas de changement politique important entre et Les lois critiques de cette période sont toujours ratifiées par leSénat. La fin duIIe siècle av. J.-C. voit une aggravation des problèmes financiers pour de nombreux plébéiens. En effet, les longues campagnes militaires tiennent de nombreux citoyens loin de chez eux pour se battre, sans qu’ils ne puissent plus s’occuper de leurs terres, laissées à l’abandon. Les petits fermiers font faillite et convergent alors vers Rome, grossissant les rangs desassemblées populaires, où leur statut économique leur permet, pour la plupart, de voter pour le candidat qui leur promet le meilleur avenir. Une nouvelle culture de dépendance apparaît qui favorisera la montée en puissance des meneurs les plus populaires[110].
Durant toute ladeuxième guerre punique, hormis quelques défections dans le Sud, les territoires latins et alliés de Rome sont restés fidèles à la République, et ont très largement contribué à l'effort de guerre, tant humainement que matériellement. Cependant, lacitoyenneté romaine n'est que très peu étendue et les rancœurs et motifs de révolte s'accumulent contre le pouvoir central à Rome, aveugle. L'organisation générale de l'Italie n'a pas évolué depuis près de deux siècles, alors que le territoire romain s'étend maintenant sur une grande partie du bassin méditerranéen. Ce blocage entraînera une guerre civile terrible au début duIer siècle av. J.-C., connue sous le nom de « guerre sociale », entre les Romains et leurs alliés[111].
La République se retrouve seule maître de toute une partie du bassin méditerranéen où les territoires sont florissants. La prise de laGrèce et d'une partie de l'Asie augmente l'afflux de richesses dans toute la République. Le nombre d'esclaves est démultiplié et leurs biens acquis par Rome. L'apport financier consécutif à toutes ces guerres et ces territoires absorbés est extrêmement important. L'esclavage devient le moteur de lasociété romaine après ladeuxième guerre punique, lorsque les riches Romains commencent à créer des grandes propriétés (Latifundium) dans les provinces conquises[112].
Rome en devenant maître de l'Italie et surtout des cités de laGrande-Grèce définitivement après ladeuxième guerre punique, renforce son hellénisme. Legrec est devenu une seconde langue, largement utilisée dans le commerce, une langue de culture aussi. Les Romains les plus riches envoient leurs enfants dans les écoles grecques. La prise de laGrèce en ne fait que renforcer le phénomène. L'art grec connaît une véritable renaissance au milieu duIIe siècle av. J.-C., et son influence sur l'art italique est considérable. La profonde hellénisation de l'art romain est voulue par le pays dominateur[113].
La guerre profite surtout aux riches. Les rangs des citoyens petits propriétaires se sont éclaircis, surtout pendant ladeuxième guerre punique. Il y a donc moins d'agriculteurs. Les campagnes se couvrent de vastes pâturages. Le blé importé deSicile concurrence celui des petits producteurs latins qui, ruinés, vendent leurs terres à bas prix aux grands propriétaires et s'en vont à Rome rejoindre laplèbe urbaine. Les grandes familles se constituent ainsi d'immenses domaines, leslatifundia, où sont installés des paysans non propriétaires, les colons, et de nombreuxesclaves. Elles forment lanobilitas, la noblesse qui accapare lesmagistratures et remplit leSénat. À côté de cette noblesse foncière, apparaît une nouvelle classe d'hommes d'affaires qui s'enrichissent dans le commerce, la banque et le crédit. Leur richesse leur permet de tenir une place importante dans l'ordre deschevaliers. La noblesse et les chevaliers s'entendent pour exploiter l'empire naissant qui est divisé en provinces. Hommes d'affaires et magistrats issus de la noblesse s'enrichissent en les pillant souvent de manière systématique[114].
En ville par contre, le chômage s'accroît, la main-d’œuvre salariée est concurrencée par la masse desesclaves apportées par les conquêtes. Rome devient une ville bigarrée rassemblant, à côté descitoyens romains, desItaliques, desGrecs, desaffranchis de tous horizons. Cette foule entretient une agitation constante dans la cité. À partir de, les tensions se multiplient entre les riches et les pauvres, d'autant plus que le luxe le plus tapageur a fait son apparition à Rome. Pourtant une tentative de réforme se dessine avec lesGracques, issus d'une grande famille noble. Ils pensent qu'uneréforme agraire est nécessaire pour résoudre le problème de laplèbe, mais les deux frères sont massacrés tour à tour, et leurs réformes abandonnées[115].
DesGermains envahissent laGaule et écrasent à plusieurs reprises lesarmées romaines. Uneréforme militaire profonde est entamée, en admettant, dans les rangs de l'armée, les prolétaires, c'est-à-dire les citoyens non propriétaires, qui n'avaient pas, jusque-là, accès auxlégions. Une armée de pauvres et de non-citoyens succède ainsi aux armées de citoyens propriétaires terriens, mais c'est une armée de métier, prête à se dévouer à son chef et à lui ouvrir la route du pouvoir, d'autant plus si celui-ci est généreux. La nouvelle armée permet à Rome et àMarius de triompher face à deux menaces[116].
Après lesGracques, vient le temps des ambitieux qui luttent pour le pouvoir. Grâce à laréforme militaire et à ses victoires enAfrique et enGaule,Marius domine la vie politique, associant les chefs du parti populaire à son pouvoir. En, commence laguerre sociale, qui oppose leSénat et les Italiens, qui tentent d'obtenir lacitoyenneté romaine. En effet, ceux-ci, bien que faisant partie depuis longtemps de la République et bien que fournissant d'importants contingents militaires à l'armée romaine, n'ont pour la plupart pas acquis le statut de citoyens et sont toujours considérés comme des sujets. Rome réussit à endiguer la rébellion en concédant le droit de cité aux alliés qui ne s'étaient pas révoltés et ensuite à tous ceux qui déposeraient les armes. Par la suiteSylla parvient à vaincre les dernières cités irréductibles. À l'issue de la guerre sociale, les Italiens obtiennent donc le droit à la citoyenneté romaine et l'Italie est unifiée sous un seul statut juridique. Mais les problèmes subsistent. Lesinstitutions républicaines ont du mal à fonctionner normalement. Leschevaliers et lanobilitas s'affrontent pour l'exploitation desprovinces. S'ensuivent les guerres civiles entre Sylla et Marius, tour à tour massacrant leurs opposants dans les rues de Rome, et finissant par ladictature deSylla, qui opère ensuite d'importantes réformes politiques, renforçant le pouvoir des aristocrates et diminuant celui destribuns de la plèbe. Il se retire ensuite de la vie politique[117].
Mais rapidement de nouvelles révoltes entraînent de nouvelles expéditions militaires favorisant ainsi l'émergence de nouveaux généraux vainqueurs qui se disputent le pouvoir.Pompée etCrassus font face aux rébellions et aux ennemis de Rome, avec succès.Pompée s'allie alors àCrassus et àJules César en pleine ascension politique. Les trois hommes se partagent le pouvoir et forment lePremier Triumvirat. De à,Jules César fait laconquête de la Gaule indépendante, s'attirant ainsi prestige et richesse. Il peut alors se consacrer à son ambition suprême, la conquête du pouvoir à Rome. Il sait qu'il peut compter sur la loyauté de ses légions et de soutiens politiques à Rome. Pendant ce temps,Crassus trouve la mort contre lesParthes àCarrhes enPompée profite alors de l'absence deJules César pour être nomméconsul unique par leSénat en et mettre fin à l'incessante agitation politique qui secoue la ville. Fin, début la noblesse romaine confie àPompée la mission de protéger l'Italie. César fort de troupes aguerries par 9 ans de combat en Gaule fait la conquête de l'Italie puis bat les armées dePompée enHispanie puis àPharsale en Les derniers partisans dePompée sont battus enAfrique enCésar reste le seul maître de Rome après 4 ans de guerre[118].
Il organise unemonarchie qui ne dit pas son nom. Il est nommé par leSénatdictateur pour 10 ans puis dictateur à vie en Il est « élu »consul tous les ans et est aussicenseur et porte le titreimperator, chef suprême des armées. Il détient aussi l'inviolabilitétribunicienne. Il réorganise leSénat en l'ouvrant à des familles non romaines originaires des provinces. Il pratique une politique favorable aux pauvres : remise des dettes, lotissement des vétérans, grands travaux pour embellir Rome. Il meurt assassiné auxides de mars par un complot dirigé parBrutus etCassius[119].
À la mort deJules César,Octave, son petit-neveu et fils adoptif,Marc Antoine, son lieutenant et le consul en exercice, etLépide,maître de cavalerie du défunt dictateur, s'entendent pour se partager le pouvoir. Ils forment leSecond Triumvirat. Leur premier objectif est devenger la mort de César.Cassius etBrutus sont tués en lors de labataille de Philippes.Octavien obtient le titre d’Imperator et plusieurs territoires (Corse, Sardaigne…) en, bien que le triumvirat de cinq ans soit renouvelé par le traité de Tarente, la même année[réf. nécessaire]. Après la destitution du triumvirLépide parOctave, ce dernier et Marc Antoine se retrouvent face à face. Le conflit est inévitable.Marc Antoine allié à Cléopâtre estbattu àActium en Octave poursuit alors méthodiquement la conquête de l'Orient, jusqu'en août Lorsque Marc Antoine et Cléopâtre se suicident,Octave reste le seul maître de Rome. De plus, l'opinion publique est lasse des désordres et desguerres civiles, elle réclame un régime stable, fût-il autoritaire[120].
Auguste (Octave), le premier empereur de Rome, se voit attribuer le pouvoir proconsulaire pour dix ans. Il divise l'Empire en provinces sénatoriales (pacifiées) et impériales (où se trouvent les forces armées). Il prend le contrôle absolu de l’armée, dont il assure le financement et est protégé en permanence par lagarde prétorienne, stationnée dans l’Urbs (jusqu’alors aucune troupe n’avait résidé à Rome). LeSénat conserve ou reçoit d’importantes prérogatives dans les domaines de l’administration civile (Rome,Italie,provinces), des finances, de la justice et de la monnaie. Auguste entend qu’il soit, en face de l’armée (réformée, qui devient définitivement une armée de métier), le seul élément civil qui compte dans l’État. Sous le principat d'Auguste, Rome est divisée enquatorze « régions ». Des travaux sont entrepris pour stabiliser les rives duTibre. Afin de lutter contre les incendies, assez fréquents dans la capitale, uncorps de vigiles est instauré, et de nouveauxaqueducs sont construits. De très nombreux autres monuments seront construits sous son règne[123],[124].
À sa mort, c'est son dernier fils adoptif,Tibère, fils d'un premier mariage deLivie, qui devient empereur. L'Empire prospère et accumule des fonds qui contribuent alors à assainir les finances, mais son règne est aussi marqué par les meurtres de personnalités politiques, et il meurt haï[125],[126].Caligula, son petit-neveu et petit-fils par adoption, troisième fils deGermanicus, prend par la suite le pouvoir. Pendant six mois, les Romains peuvent se féliciter d'un empereur juste, utile et libéral, qui leur font oublier la sinistre fin du règne deTibère ; mais une grave maladie fait changer dramatiquement Caligula, qui devient un tyran. Une énième conspiration a raison de lui et c'estClaude, son oncle, qui lui succède[127],[128]. Malgré son manque d'expérience politique,Claude se montre un administrateur capable et un grand bâtisseur public. Son règne voit l'Empire s'agrandir : cinq provinces s'ajoutent à l'Empire dont laBretagne, en43, laLycie, laMaurétanie, laNorique et laThrace. Il étend lacitoyenneté romaine à beaucoup de provinces, dont la Gaule où il est né. Mais c'est un empereur faible, et il meurt empoisonné à l'instigation d'Agrippine en54, après avoir, sur les conseils de celle-ci, adopté son filsNéron[129]. Les premières années du règne de Néron sont connues comme des exemples de bonne administration, puis de nombreux scandales éclatent, ainsi legrand incendie de Rome. Mal entouré, il prend de mauvaises décisions et exige un suicide (celui de trop) de l'excellent général Corbulo, provoquant la rébellion de plusieurs de ses pairs. L'empereur est démis par leSénat et se suicide[130],[131]. C'est la fin desJulio-Claudiens.
À la mort deNéron, l'Empire connaît une première crise. Des généraux,Galba,Othon etVitellius sont tour à tour nommés empereurs par leurs troupes puis assassinés en69[132].
C'est finalement le chef de l'armée d'Orient,Vespasien, un Italien, qui devient empereur donnant ainsi naissance à la dynastie desFlaviens. Il rétablit l'ordre et la paix à Rome, ainsi que dans les provinces révoltées. Pour asseoir son pouvoir, l'empereur va s'inspirer du modèle augustéen en reprenant les grands thèmes de son règne ainsi qu'en monopolisant les magistratures supérieures. À l'échelle de l'Empire, il mène une politique entre continuité et innovation. Tout comme ses prédécesseurs, il multiplie les constructions publiques, notamment leColisée qu'il entreprend. D'autre part, il recourt à de véritables innovations dans le domaine financier. Les frontières de l'Empire se stabilisent et se fortifient avec la construction d'un système défensif surveillant les peuplades barbares outre rhéno-danubiennes (Germains,Daces,Sarmates,Chattes)[133],[134]. Son filsTitus, qui a joué un grand rôle sous son règne, lui succède, mais n'est empereur que deux ans. Le deuxième fils deVespasien devient alors à son tour empereur[135]. La conquête de laBretagne parAgricola se poursuit avec brio etDomitien lance une offensive surprise contre le peuple germain duRhin le plus puissant à l'époque, lesChattes, qu'il vainc. La présence romaine en Bretagne et en Germanie est sérieusement renforcée. Mais très vite la situation se dégrade sur le Danube. LesDaces viennent de s'unir et Domitien intervient en personne avec lagarde prétorienne pour les chasser. Finalement, après des revers de généraux romains,Domitien préfère traiter et fait la paix avec le roi dace,Décébale, qui devient un roi client et perçoit des subsides. Au début du règne, Domitien se montre libéral et juste. Il est loué pour son sens de la justice, de la religion. Cependant son naturel inquiet, sa tendance à voir des complots partout, sa violence et son autoritarisme assombrissent la fin de son règne. Il est assassiné en96 par une conspiration de palais[136].
LeSénat a déjà prévu un remplaçant en la personne deNerva qui donne naissance à la dynastie desAntonins. Il adopte son successeurTrajan, un Romain d'Hispanie. Cinq empereurs remarquables sur six choisissent, de leur vivant leur successeur, car ils n'ont pas de fils, toutefois le choix se porte toujours sur de proches parents. Les règnes deTrajan et de son successeurHadrien correspondent à l'apogée de l'Empire romain.
Trajan, tout en s'attachant à favoriser l'agriculture et à développer l'administration, fait la conquête de laDacie, de l'Empire parthe et annexe l'Arabie. L'empereur développe aussi la romanisation de l'Empire. La conquête de laParthie ne lui survit pas[137]. L'empereurHadrien s'attache à mener une politique plus défensive. Sous son règne, dans plusieurs régions frontières, enAfrique et enBretagne notamment, des fortifications importantes se développent, souvent appeléeslimes. Par ailleurs, Hadrien s’attelle à améliorer le fonctionnement de l'Empire. Dans la continuité d'un effort commencé par d'autres empereurs, il s'attache à favoriser l'intégration des provinciaux, notamment par la création de colonies honoraires : alors que le terme colonie désignait le plus souvent l'installation de colons romains, il est désormais un titre honorifique concédé à une cité et qui donne la citoyenneté romaine à tous ses habitants[138].
Le règne d'Antonin le Pieux n'est pas marqué de conquêtes, mais plutôt par une volonté de consolidation de l'état actuel. C'est traditionnellement durant son règne qu'on considère que l'Empire romain est à son apogée, du fait de l'absence de guerre et de révolte majeure enprovince. C'est pourtant cette politique défensive et attentiste qui annonce les difficultés financières et militaires de l'Empire romain[139].Marc Aurèle etLucius Verus succèdent à Antonin. Le second meurt au bout 8 ans de règne, sans grand acte. Le premier est connu pour être un empereur-philosophe stoïcien. Sur le plan intérieur, il accomplit une œuvre législative importante. Il passe 15 ans sur le front du Danube à lutter contre lesBarbares. L'Empire entre en effet dans une période bien moins propice : ses voisins aux frontières semblent plus puissants, l'Empire doit faire face à des difficultés agraires, des famines, à l'épidémie de lapeste antonine[140],[141]. Marc Aurèle choisit son fils,Commode comme successeur. L'assassinat de celui-ci, qui s'est comporté en tyran durant une grande partie de son règne, met fin à la dynastie desAntonins.
C’est finalement le général de l'armée duDanube, l’AfricainSeptime Sévère qui prend le pouvoir. Il comble de bienfaits l'armée dont il augmente les effectifs et renforce le pouvoir impérial. Les prétoriens qui ont fait et défait tant d'empereurs sont recrutés parmi les légions duDanube fidèles àSeptime Sévère. Il sauve un temps l'Empire de l'anarchie et entame d'importantes réformes politiques, militaires, économiques et sociales. Le brassage culturel qu'apporte l'Empire s'accroît, les religions venues d'Orient deviennent plus populaires dans l'Empire, en particulier le culte deMithra parmi les militaires. Cet aspect a parfois été exagéré par les historiens qui ont décrit les Sévères comme une dynastie orientale, jugement considérablement relativisé aujourd'hui[142].
Il nomme ses deux filsAuguste, mais à sa mort,Caracalla s'empresse de tuer son jeune frèreGeta. Il est connu pour avoir publié en212, lecélèbre édit qui porte son nom donnant à tous les hommes libres de l'Empire la citoyenneté romaine. Il meurt assassiné sur le front parthe sur ordre dupréfet du prétoireMacrin qui ne réussit à prendre sa place que peu de temps. Il nomme son propre filsDiaduménienCésar puisAuguste en218, mais sont tous deux assassinés[142]. Le cousin de Caracalla,Élagabal devient ensuite empereur, mais tout occupé au culte du dieu du même nom il laisse le gouvernement à sa grand-mère,Julia Mæsa. Il est tué par les prétoriens et son cousinSévère Alexandre lui succède pour un règne de 13 ans. Après son assassinat, l'Empire sombre dans une période bien plus troublée, traditionnellement qualifiée d'« anarchie militaire », terme cependant impropre, car si le pouvoir impérial est parfois divisé, il n'est jamais absent.
Les empereurs portent le titre d'imperator, chef suprême des armées. Pendant toute la durée de l'Empire romain, la victoire est un puissant facteur d'affermissement du pouvoir. L'empereur vaincu se voit facilement contester le pouvoir par un autre général ambitieux. Tous les empereurs prennent l'habitude de se faire élireconsul pour montrer la continuité entre les institutions républicaines et leprincipat. Cela leur confère aussi l’imperium, le pouvoir de contraindre et d'être obéi de tous[143]. Ils ont aussi l’imperium proconsulaire ce qui leur donne le pouvoir de gouverner toutes les provinces. En tant que détenteurs de la puissance tribunitienne, ils possèdent l’intercessio, c'est-à-dire le droit de s'opposer à n'importe quelle décision des magistrats de l'Empire. CommeJules César, ils portent le titre degrand pontife qui fait d'eux les chefs de la religion romaine. Ils reçoivent un serment de fidélité personnelle de tous les habitants de l'Empire.
Jusqu’à la fin de l’Empire byzantin, la succession d'un membre de la famille au feu empereur n'est pas automatique. Le pouvoir n'appartient ni à un individu, ni à une dynastie. Ainsi, il y a des risques importants de guerres civiles à chaque fin de règne. La période desAntonins, où l'empereur choisit son successeur hors de sa famille, et où il n'y a pas de troubles lors de la prise de pouvoir du nouvel empereur, est une exception[143]. Le Sénat et le peuple sont pénétrés par la crainte d’une guerre civile à chaque succession. Ils acceptent donc avec empressement l'idée qu’un descendant du prince régnant prît la suite de son père. Un des devoirs de tout empereur est de préparer la transmission pacifique de son trône. Le choix le plus logique est, même aux yeux des Romains, de désigner son fils ou d’en adopter un. En cas de crise, un général porté en triomphe par ses soldats peut par les armes accéder au pouvoir suprême. Lagarde prétorienne chargé de veiller à la sécurité des empereurs joue un rôle grandissant dans les complots et les assassinats qui jalonnent la période impériale.
La fonction degrand pontife procure aux empereurs un caractère sacré. De plus dans les croyances populaires,Scipion l'Africain,Marius etSylla ont un caractère divin.César développe autour de lui une légende de divinité prétendant descendre deVénus et d'Énée. L'empereurAuguste met en place leculte impérial. Il fait diviniserCésar et ainsi, en tant que son héritier, il s'élève au-dessus de l'humanité. Il se dit fils d'Apollon. Il associe aussi toute la communauté au culte du génie familial devenant ainsi le père de tous, d'où son titre de père de la patrie.Auguste refuse d'être divinisé de son vivant. Il laisse cependant se construire des temples qui lui sont consacrés surtout dans l'Orient habitué à considérer ses souverains comme des dieux vivants, à condition que son nom soit associé à celui de Rome divinisée. Le mouvement se poursuit après sa mort. Tous les empereurs se placent sous l'auspice d'un dieu. Peu à peu, ils sont assimilés à des dieux vivants dans tout l'Empire. Après la mort ils reçoivent l'apothéose. LesAntonins prennentJupiter capitolin comme dieu suprême. Pendant le règne d'Hadrien, la divinisation de l'empereur vivant progresse encore en Orient. L'idéologie impériale revêt des aspects plus philosophiques. L'empereur doit sa réussite à son mérite (Virtus) et à la protection divine[144].
Leculte impérial est aussi une manière d'habituer les habitants de l'Empire, si dissemblables par la culture et les croyances à respecter le pouvoir de Rome à travers un empereur divinisé. Dans tout l'Empire, on restaure ou on construit des temples consacrés au culte impérial. Des cérémonies sont organisées en l'honneur de l'empereur. C'est l'occasion pour la communauté de se retrouver dans des processions devant des sacrifices, des banquets et toutes sortes de spectacles.
L'Empire romain sousHadrien, avec des frontières stabilisées, vers l'an120.
Dans les provinces sénatoriales, le gouverneur, unproconsul ou unpropréteur, est nommé par leSénat. Ces provinces sont en paix et il n'y réside aucune légion en permanence. Dans les provinces impériales le gouverneur, unlégatpropréteur ouprocurateur, est nommé par l'empereur. L'Égypte est dirigée par unpréfet pris dans l'ordre équestre nommé par l'empereur. Cependant l'empereur dispose de pouvoirs de contrôle dans toutes les provinces. Il peut nommer des légats extraordinaires dans les provinces sénatoriales. Partout dans l'Empire, les domaines impériaux, les impôts indirects et les mines sont administrés par un procurateur nommé par l'empereur. L'Italie jouit d'un statut privilégié. Elle échappe à l'impôt foncier et est administrée directement par le Sénat.
Lesgouverneurs sont nommés pour une durée de 4 à 6 ans. Ils gardent des liens étroits avec le pouvoir central grâce à une correspondance très suivie. Ils doivent veiller aux impôts, à l'ordre public, au recensement, au respect des propriétés. Ils disposent d'une administration très réduite. De fait, ils interviennent dans la vie des provinces surtout pour juger un citoyen romain, juguler les troubles importants à l'ordre public, résoudre les difficultés financières des cités. La plupart des questions administratives sont réglées à l'échelon local dans le cadre de lacité. Celle-ci constitue pour les Romains, le cadre de vie idéal. Là où il n'en existait pas, essentiellement en Occident, les Romains en ont créé.
Dans la capitale, on trouve autour du souverain des organismes et des hommes qui l'aident à gouverner. Le conseil du prince dont il s'entoure pour prendre les décisions capitales est composé d'hommes choisis pour leurs compétences militaires, juridiques ou diplomatiques. Le conseil devient peu à peu permanent et prend une place prépondérante dans le gouvernement de l'Empire. Lepréfet du prétoire est le personnage le plus important de l'entourage impérial. Il dirige lagarde prétorienne et est le commandant en second lors des expéditions militaires. Il finit même par menacer le pouvoir impérial.
Jusqu'au milieu duIIe siècle, l'armée reste une armée de conquête.Auguste annexe l'Illyrie et tente vainement de conquérir laGermanie. Il fixe les frontières de l'Empire auRhin et auDanube.Claude fait la conquête de laBretagne,Trajan, celle de laDacie, de l'Arabie. Il fait l'éphémère conquête de laParthie. À partir d'Hadrien, le plus important est de maintenir l'Empire et non plus de conquérir de nouveaux territoires. Une des priorités d'Hadrien est d'enclore l'espace romain derrière une muraille destinée à protéger l'Empire des barbares. On lui doit le fameuxmur d'Hadrien au nord de laBretagne[145]. Ses successeurs continuent son œuvre. Aux frontières de la Germanie, de l'Orient et de l'Afrique, des murs sont érigés. On a fini par leur donner le nom delimes bien qu'en latin, limes signifie simplement chemin de patrouille à la frontière. Desvoies stratégiques permettent de circuler facilement jusqu'aux frontières pour les défendre en cas d'attaque. En tout, les Romains ont9 000 km de frontière à défendre. L'armée reste cantonnée aux frontières. Les gouverneurs des provinces frontalières qui accueillent deslégions sont choisis avec soin par l'empereur, car ils en assurent le commandement. En tout,400 000 hommes repartis en 30légions (25 à l'époque d'Auguste) défendent les frontières.
L'armée romaine comprend à peu près150 000 légionnaires decitoyenneté romaine et engagés pour 20 ans. Ils sont doublés par destroupes auxiliaires recrutées parmi les non-citoyens et qui reçoivent la citoyenneté romaine au bout de 25 ans de service militaire. À partir d'Hadrien, une partie des auxiliaires se distinguent de l'armée romaine, car ils gardent leur armement traditionnel[145]. Les Italiens, qui auIer siècle étaient encore majoritaires dans les légions, répugnent de plus en plus à faire leur service militaire. Il faut donc aller chercher les recrues dans les provinces qui, quand elles sont très romanisées, rechignent elles aussi à partir à l'armée. Les soldats se recrutent donc de plus en plus dans les provinces les moins romanisées même si, auIIe siècle, lagarde prétorienne et les officiers (centurions) sont toujours recrutés parmi les Italiens. L'Italie demeure aussi le principal lieu de recrutement pour la formation de nouvelles légions comme ce fut le cas sousMarc Aurèle (Legio III Italica). L'armée romaine est devenue néanmoins une armée de métier qui a amalgamé les divers peuples de l'Empire. Son unité provient d'un esprit de corps donné par un entraînement rigoureux, une discipline de fer élevée au rang de divinité, une religion spécifique des camps autour des dieux romains traditionnels et duculte impérial, un encadrement de qualité. On doit au corps des ingénieurs militaires la construction de canaux, deroutes, d'aqueducs, et de fortification de cités. La présence de l'armée aux frontières est un grand facteur de développement économique pour ces zones et un puissant instrument deromanisation.
Les 80 millions d’habitants de l'Empire appartiennent par naissance ou par fortune à des groupes sociaux différents. On naît esclave, homme libre ou citoyen romain. Lesesclaves n'ont aucun droit. Ils mènent une vie très dure dans les grands domaines ou dans les mines. En ville leur sort est plus clément. Ils travaillent comme domestiques, artisans et même professeurs ou artistes pour les plus lettrés. Certains tiennent boutique et versent une somme à leur maître pour pouvoir travailler. Ils peuvent ainsi payer leur affranchissement. Les sujets de l'Empire sont des hommes libres qui ne sont pas citoyens romains. Ils peuvent témoigner en justice. Ils doivent toutefois s'acquitter d'un impôt supplémentaire : letributum. On est citoyen romain par naissance, par décret ou après 25 ans de service militaire. La plupart des citoyens exercent de petits métiers. À Rome, il existe200 000 citoyens pauvres pour qui les distributions gratuites de l'annone sont vitales.
Les plus riches sont regroupés dans l'ordre équestre ou l'ordre sénatorial sur décision de l'empereur. Dans cette société d'ordres : ordre sénatorial, ordre équestre ou ordre décurional, lanobilitas se distingue une reconnaissance de l'origine et non pas par un statut. Cependant, lanobilitas perd certains de ses marqueurs sociaux. AuIIe siècle la procession des portraits disparaît. Elle est en effet désormais réservée aux seules funérailles impériales[146].
Au début de l'Empire, lasociété n'est pas figée. Les esclaves, surtout urbains, peuvent être facilement affranchis par leur maître. Peu à peu tous les hommes libres accèdent à la citoyenneté. L'édit de Caracalla, en212, fait de tous les hommes libres des citoyens romains, ce qui « renforce l'unité morale de l'Empire »[147]. Cependant, les Barbares soumis par la force ainsi que les basses couches de la population égyptienne ne reçoivent pas la citoyenneté[147]. Ainsi, àVolubilis, les paysans isolés et les tribus semi-nomades voisines de la cité restent des sujets de l'Empire, sauf quelques chefs récompensés ainsi de leur soutien[148]. Mais peu à peu, les distinctions se font entre leshonestiores, les puissants, et leshumiliores, les humbles. Ils sont traités de manière inégale devant la justice : à la distinction juridique entre citoyen et non-citoyen s'est substituée une distinction sociale entre riches et pauvres.
Dans presque toutes les cités de l'Empire, on vit à l'heure romaine. Selon certaines estimations[149],Rome, la capitale compte plus d'un million d'habitants sous le Haut-Empire (fourchette de 600 000 à 1,2 million[150]). Les Romains l'appellent tout simplement l'urbs, la ville. Elle est avecAlexandrie, la plus grande ville du monde romain. Depuis leIer siècle, la ville a été beaucoup embellie par les empereurs. Ces nombreux monuments symbolisent la grandeur de Rome et l'art de vivre des Romains. Lesforums, lieux de vie politique sous la République, sont devenus des ensembles monumentaux comprenant desbasiliques, de nombreuxtemples, des arcs de triomphe et des bibliothèques. La colline duPalatin est occupée par les palais impériaux, la maison des Augustes. Mais Rome est avant tout dans l'imagination populaire, la ville des jeux. Plusieurs monuments exceptionnels leur sont consacrés : lecircus Maximus entre lemont Palatin et l'Aventin, LeColisée, le plus grandamphithéâtre du monde romain, consacré auxjeux du cirque, essentiellement des combats degladiateurs. Lesthermes apparaissent à la fin de la République. Les empereurs en construisent de nombreux pour les loisirs de laplèbe romaine. Pour acheminer l'eau dont les thermes et une population nombreuse ont besoin, de nombreuxaqueducs sont construits. AuIer siècle, ils peuvent acheminer vers la ville près d’un million de mètres cubes d'eau en un jour. La ville a grandi au cours des siècles de manière désordonnée. Les rues sont étroites et sinueuses. En64, après l'incendie de Rome, Néron fait reconstruire la ville avec des axes larges et aérés. Les plus riches vivent dans de vastesvillas, alors que les plus modestes vivent dans des immeubles collectifs, lesinsulæ.
Les grandes métropoles commeCarthage,Antioche refleurissent. Les Romains construisent partout dans l'Empire des villes au plan régulier appeléplan hippodamien. La ville s’organise autour de deux axes, lecardo et ledecumanus. On y trouve tous les monuments typiques de la romanité. Les villes ont à leur tête un sénat local appelé curie recruté parmi les riches habitants de l'Empire. Ils forment l'ordre décurional. C'est en son sein que sont élus les magistrats :édiles — chargés de la police des marchés et de la voirie —,duumvirs — magistrats ayant des attributions judiciaires —, duumvirs quinquennaux — élu tous les cinq ans et assurant des fonctions censoriales. L'ordo des décurions doit gérer les finances (pecunia publica) et le territoire de la cité, assurer l'ordre public et les relations avec le pouvoir central. Les décurions et surtout les magistrats financent en grande partie sur leurs fonds propres, la construction de monuments et des temples. À des sommes légalement définies et exigées, ils peuvent ajouter volontairement un don de leur part. Cette pratique appeléeévergétisme occupe une place importante dans la construction et la vie des cités. L'évergétisme permet aux aristocrates des cités de manifester leur libéralité et leur faste, il peut être un outil d'autocélébration, appuyer une stratégie familiale, le monument donné rappelant la gloire de la famille sur des générations, en même temps qu'il fonde une cohésion politique et sociale : le don de l'évergète peut être conçu comme un contre-don qui répond au respect dont lui témoigne la cité et au pouvoir politique qu'elle lui a conféré. Fêtes, spectacles et distributions variées, souvent issues de l'évergétisme, contribuent, dans les cités, à l'élaboration puis au maintien d'une culture municipale, d'une cohésion civique. Si l'historiographie a vu autrefois dans l'évergétisme un facteur expliquant l'abandon des fonctions politiques par les aristocraties locales, cette hypothèse n'est plus actuellement reçue, et l'on n'imagine plus une désertion généralisée des curies.
Dans les villes de l'Ouest de l'Empire, lelatin se répand tandis que l'Est reste fidèle à lalangue grecque.
En règle générale, la plupart des richesses produites viennent des campagnes et de l'agriculture. Sous le Haut-Empire, la tendance à la concentration foncière se confirme. Lanobilitas ou les temples d'Orient possèdent de vastes domaines. Mais le plus grand propriétaire de l'Empire, c'est l'empereur lui-même qui agrandit ses biens en confisquant ceux de ses opposants. Le centre du grand domaine oulatifundium est lavilla, la demeure du maître avec ses dépendances. Si l'idéal affiché est celui de l'autarcie, car c'est le patrimoine foncier et l'autosuffisance qui fonde la dignité sociale, il existe d'importantes régions de cultures commerciales. La principale culture est celle des céréales qui permet de nourrir tous les habitants du domaine. Les agronomes romains conseillent de réserver une partie de la superficie à des cultures commerciales comme la vigne et l'olivier. La petite propriété n'a pas disparu pour autant. Elle demeure l'idéal de la société romaine, mais son importance s'est réduite. Si sous l'Empire, l'agriculture a peu évolué, techniquement elle a diffusé certaines pratiques. L'existence de gains de productivité n'est pas exclue par certains auteurs.
Les principales activités artisanales sont effectuées dans les campagnes, mais aussi dans les villes : production textile, fabrication et entretien des outils, production de poterie. Pendant très longtemps les historiens conçurent les villes antiques comme uniquement consommatrices ; après des discussions importantes cet avis est considérablement relativisé. D'importantes régions minières existaient en Espagne et dans les régions danubiennes. Mais là aussi, lesprogrès techniques sont minimes. Le travail manuel et l'activité mercantile sont, pour les classes instruites, une source de mépris, une chose réservée aux classes inférieures et aux esclaves. L'existence d'esclaves a peut-être aussi constitué un obstacle au développement du progrès technologique. Toutefois, les recherches archéologiques récentes relativisent aussi fortement les anciens jugements portés sur certains domaines : les archéologues et historiens s'accordent par exemple aujourd'hui sur la diffusion importante et précoce du moulin à eau dans l'Empire romain.
La paix et la prospérité du Haut-Empire entraînent un accroissement des activités commerciales. La Méditerranée au cœur de l'Empire romain connaît un trafic intense. La piraterie est très réduite grâce aux flottes de guerre des empereurs qui patrouillent en permanence. Les navires se hasardent de plus en plus en haute mer pour raccourcir la durée des traversées. Mais pour les trajets courts ou moyens, les marins préfèrent le cabotage le long des côtes. LaMéditerranée est ouverte de mars à octobre, c'est-à-dire que la navigation y est autorisée. En hiver, il n'y a pas de navigation. Les grands ports méditerranéens sontOstie, le port de Rome,Alexandrie enÉgypte etCarthage enAfrique. Les liens commerciaux atteignent aussi laBaltique, l'Afrique noire via les caravanes transsahariennes, l'Inde et laChine. On voit donc que l'Empire n'est pas un espace clos. Le goût pour les produits de luxe des Romains alimente le grand commerce international. En ce sens l'Empire prolonge les deux derniers siècles de la République, mais la domination économique italienne dans certains domaines — céramiques de qualité, amphores, vins — cède la place, avec le temps, aux productions provinciales.
Les historiens s'interrogent encore sur les raisons de la crise profonde que traverse l'Empire romain auIIIe siècle. Certaines causes extérieures à l'Empire peuvent l'expliquer. En Orient, l'Empire parthe déliquescent laisse la place à l'Empire sassanide dans le second quart duIIIe siècle. Cet empire puissant, bien structuré et agressif fait peser une pression constante sur les provinces d'Asie. Dans le Nord-Est de l'Europe, les Germains orientaux qui vivent dans les régions de la mer Baltique entament une lente migration vers le Sud et le Sud-Est européen. Ce faisant, ils chassent les autres tribus qui se trouvent sur les territoires qu'ils traversent. Celles-ci cherchent à trouver refuge dans l'Empire romain en espérant y trouver de nouvelles terres et un riche butin[151]. Leurs incursions mettent en évidence la faiblesse de la stratégie défensive romaine. En effet, les légions sont massées aux frontières. Une fois franchie la région frontière, les barbares peuvent ravager sans presque aucune entrave les provinces. Le dispositif militaire romain, et l'organisation du pouvoir impérial sont aussi très peu adaptés à une guerre simultanée sur deux fronts, en Orient et sur l'ensembleRhin-Danube.
Les difficultés internes sont dues à l'éloignement de plus en plus grand des militaires prêts à imposer de lourds sacrifices aux civils pour protéger l'Empire des menaces d'invasions et de la classe possédante qui accepte difficilement l'accroissement de ses charges fiscales. Sur le plan politique, cela se traduit par la montée de l'ordre équestre, titulaire des grandes préfectures et de plus en plus présente dans les provinces comme gouverneur à la place de la classe sénatoriale[152]. De plus à partir de250, l'Empire romain est touché par des épidémies qui entraînent, au moins régionalement, une dépopulation et une crise économique dont souffrent principalement l'Occident déjà ravagé par les incursions germaniques.
L'état le plus récent de la recherche relativise cependant le caractère général et continu de la crise. LeIIIe siècle est désormais plutôt décrit comme marqué par quelques grandes crises mieux définies du point de vue chronologique : crise politique en238, deux graves crises dans lesannées 250 et260, la période la plus dure pour le pouvoir impérial. Mais l'accent est désormais aussi mis sur la diversité des situations régionales, le maintien d'une prospérité en Afrique, sur l'existence de périodes de redressement ou sur les capacités de relèvement et de résistance, induisant plus une période de mutation qu'une crise et un déclin continus.
La période comprise entre235 et268 est assez mal connue. Seize empereurs se sont succédé, faits et défaits par le sort des armes. Les empereurs sont créés par un nouveau groupe, l’État-major de l’armée. Il choisit le nouvel empereur, qui est ensuite avalisé par leSénat. Le rang impérial est devenu, aux yeux des militaires, le grade le plus élevé dans la hiérarchie des officiers[143]. Ainsi,Maximin Ier le Thrace est le premier militaire de carrière à devenir empereur par la volonté seule de ses soldats[153]. Il déploie une grande énergie pour sécuriser la frontière face auxDaces et auxSarmates. Il exige de la classe sénatoriale et des provinces de lourds impôts pour faire face aux dépenses militaires qui atteignent la moitié du budget de l'État. Cette pression fiscale provoque lafraude fiscale de sénateurs dont la fortune dépasse les millions de sesterces[154] et la révolte des grands propriétaires d'Afrique qui portent au pouvoirGordien Ier en association avec son filsGordien II en238. Ils sont rapidement battus. Maximin est tué devantAquilée de même quePupien etBalbin, choisis par le Sénat comme nouveauxAugustes. À la fin de238,Gordien III, le petit-fils deGordien Ier, devient empereur[155]. Il périt assassiné à l'instigation dupréfet du prétoire,Philippe l'Arabe qui doit éliminer plusieurs concurrents avant d'être tué en affrontantDèce.Dèce est le premier empereur tué par des barbares, lors de la lourde défaite d'Abrittus face auxGoths en251.Trébonien Galle etÉmilien se succèdent à un rythme rapproché. Ce dernier ne règne que quatre-vingt-huit jours. La légitimité impériale qui reposait sur la victoire est soumise à rude épreuve : la crise militaire encourage les usurpations : les armées cherchant un général efficace et les régions menacées désirant un empereur proche pour les protéger.
Valérien règne associé à son filsGallien. Celui-ci est le dernier aristocrate à parvenir à l'Empire[156]. Ils doivent faire face aux incursions desAlamans et desFrancs enGaule et à l'offensive du souverain sassanideSapor enSyrie. En260,Valérien est même fait prisonnier par les Perses et finit ses jours comme esclave en Iran.Gallien resté seul empereur parvient à arrêter une invasion des Alamans en les battant en Italie du Nord. Il abandonne laDacie conquise parTrajan qui est devenue trop difficile à défendre et fixe la frontière de l'Empire sur leDanube. Mais il doit faire face à de nombreuses usurpations, celle deMacrien et deQuiétus en Orient, de Régalien enPannonie et dePostume en Gaule qui proclame l'empire des Gaules.
Les successeurs deGallien sont tous des militaires à qui l'armée a donné une grande rigueur et la foi en l'éternité de l'Empire romain. L'Empire est devenu militaire. À partir de réformes entamées sous Gallien — exclusion des sénateurs du commandement militaire — lesempereurs illyriens font face à la crise et réorganisent la défense de l'Empire.Aurélien réunifie l'Empire en mettant un terme aux sécessionspalmyrénienne etgauloise etfortifie Rome.
Gallien entame une mutation profonde de la stratégie militaire. Il répartit en profondeur les moyens de défense en plaçant dans les principaux nœuds routiers de l'Illyrie des détachements des légions frontalières. Il constitue une importante cavalerie avec un commandement autonome. Il exclut les sénateurs des emplois militaires et les remplace par des chevaliers. Il fait entrer dans l'armée des barbares vaincus amorçant par là même la « barbarisation » de l'armée[157]. L'armée absorbe une part toujours plus grande des ressources de l'État. Un impôt spécial, l'annone militaire, est prélevé pour son entretien.
Les fonctions de général en chef et de chef de guerre victorieux que tient traditionnellement l'empereur sont renforcées dans ces périodes de guerres incessantes. À côté des qualificatifs habituels commefelix, on associe de plus en plus le termeinvictus. En effet, un empereur vainqueur peut espérer la fidélité de ses sujets et de ses troupes. En cas de défaite militaire, des concurrents apparaissent parmi les autres généraux. Les empereurs essaient cependant de trouver une légitimité en transformant leculte impérial.Aurélien est divinisé de son vivant. Sur ses monnaies, on peut trouver l'inscriptiondeus et dominus natus (dieu et seigneur de naissance).
Les difficultés duIIIe siècle donnent à penser aux Romains qu'ils ont été abandonnés par les dieux et il s'ensuit une période où les citoyens refusant de participer aux cultes publics, comme leschrétiens et les Juifs, sont persécutés.Dèce, à partir de250 puisValérien renouvelle l'obligation de sacrifices, ce qui entraîne des persécutions envers les réfractaires. En260, son filsGallien publie unédit de tolérance qui constitue la première légitimation officielle du christianisme par les autorités romaines[158] et est maintenu par ses successeurspendant 40 ans.
L'opposition entre lanobilitas et l'homme nouveau est plus vivace que jamais. L’Empire passe entre les mains de familles n'ayant jamais exercé la fonction impériale. Les empereursnovi laissent à leur famille la noblesse en héritage. Leshonestiores des provinces d'Occident et les dirigeants des peuples barbares voisins, acquièrent eux aussi lanobilitas qui les incorpore aux couches les plus élevées. En ce qui concerne la noblesse romaine, elle garde un immense prestige social, mais perd presque toute son autorité politique[146].
Quelques mois après son arrivée au pouvoir,Dioclétien comprend qu'il ne peut diriger seul l'Empire et confie àMaximien le soin de s'occuper de l'Occident en tant queCésar puis d'Auguste. En293, il donne àMaximien un adjoint qui porte le titre deCésar,Constance Chlore, et s'en choisit lui-même un,Galère. C'est ainsi que les besoins de l'Empire donnent par hasard naissance à latétrarchie, c'est-à-dire le pouvoir à quatre. Il n'y a pas de partage territorial de l'Empire romain, mais, les quatre hommes se répartissent le commandement des troupes et les secteurs dans lesquels ils interviennent.Dioclétien reste cependant au sommet[159]. Cette nouvelle organisation permet d'éliminer les usurpateurs qui semaient le trouble en Gaule, de repousser les barbares. La victoire sur lesSassanides permet de renforcer la présence romaine enMésopotamie avec la constitution de cinq nouvelles provinces[160]. La politique intérieure deDioclétien est dans lignée des empereurs duIIIe siècle. Il renforce la divinisation de la fonction impériale. Il déclenche la dernière et la plus violente des persécutions contre les chrétiens.
En313, deux empereurs restent en lice, Constantin Ier, installé à Nicomédie, etLicinius. Ce dernier est vaincu une première fois en316 puis définitivement éliminé en324.Constantin, premier empereur à s'être converti au christianisme, reste alors le seul souverain. Cette même année, il choisit l'ancienne colonie grecque deByzance, installée sur la rive européenne du détroit duBosphore pour fonder une nouvelle capitale qui portera son nom,Constantinople. Construite sur le modèle deRome, elle est inaugurée en330.
QuandConstantin meurt en337, il n'a pas réglé sa succession. Ses trois fils se partagent l'Empire, mais finissent par se disputer. Finalement l'Empire est réuni sous l'autorité du second fils de Constantin Ier,Constance II qui nomme deux Césars aux pouvoirs très réduits. Le nouvel empereur poursuit la politique de son père. Un des Césars,Julien, responsable de la Gaule, remporte une grande victoire sur lesAlamans en357. Ses soldats le proclament empereur à son corps défendant àLutèce.Constance II meurt l'année suivante.Julien, cousin du défunt empereur renonce au christianisme par amour de la pensée grecque, d'où son surnom d'apostat. Il tente de restaurer les anciennes religions en rouvrant les temples et en obtenant de nombreusesapostasies. Il meurt après 18 mois de règne, en363, dans une escarmouche au retour d'une campagne contre les Perses.
En395,Théodose le Grand meurt, après avoir partagé l'Empire entre ses deux fils.Arcadius l'aîné reçoit l'Orient etHonorius l'Occident. Ce partage est dans la continuité des règnes précédents. Le partage se veut purement administratif. L'unité de l'Empire doit donc être préservée. Mais l'Occident d'Honorius est affaibli par des années de guerres civiles et contre les barbares. Il a perdu une grande partie de ses troupes. L'économie de l'Occident demeure fragile alors que celle d'Orient est florissante.
Lacrise duIIIe siècle a transformé le pouvoir impérial qui est devenu absolu. Le Sénat n'a plus aucune influence. On est passé deprincipat audominat. Les empereurs de l'Antiquité tardive bénéficient aussi d'une construction idéologique qui a peu à peu assimilé les empereurs à des divinités vivantes et justifient ainsi leur pouvoir absolu. PourConstantin comme pourDioclétien, l'autorité impériale est de nature divine[161].Dioclétien etGalère, son fils adoptif, se prétendent descendants deJupiter. Ils prennent le surnom deJovien, son collègue Maximien ainsi que son co-césar celui d’Herculien. Cette sacralisation du pouvoir impérial a aussi pour but d'enlever toute légitimité aux usurpateurs éventuels puisque seul l'empereur est élu des dieux, et que seul son successeur est légitime. En312,Constantin choisit lechristianisme parce qu'il lui donne une légitimité nouvelle et au-dessus de toutes les autres[162].
Constantin ne cherche pas à affirmer une filiation divine. Il prétend plutôt avoir été investi par le Dieu des chrétiens pour gouverner l'Empire. La monnaie de l'époque montre une main sortant du ciel et lui tend une couronne. L'empereur agit comme unclerc dans sa manière d'exercer le pouvoir. ÀConstantinople, il construit son palais comme si c’était une église ; il affirme avoir reçu une vision duChrist comme s’il était unapôtre ; il agit comme unévêque lors duconcile de Nicée convoqué par lui-même, mais il ne l’est pas[163].Constantin affirme qu'il est le représentant de Dieu sur la terre. En son intelligence se reflète l’intelligence suprême[164]. Il s'entoure d'un faste incroyable pour exalter la grandeur de la fonction impériale. Désormais la romanité et la religion chrétienne sont liées.Eusèbe de Césarée, reprenant les thèses deMéliton de Sardes[165], élabore, à cette époque, lathéologie de l'empire chrétien. Pour lui, l'unification politique a permis l'unification religieuse. L'empereur est dans ce cadre, le serviteur de Dieu et comme l'image de fils de Dieu, maître de l'univers[166]. L'empereur reçoit aussi la mission de guide vers le salut et la foi chrétienne. Son intervention grandissante dans les questions religieuses se trouve ainsi légitimée ainsi que lecésaropapisme.
Le nombre de soldats par légion n'a fait que diminuer depuis la réforme deMarius à la fin duIIe siècle av. J.-C. Il est passé de6 000 à5 000 sous leHaut-Empire et est certainement autour de2 000 au début du règne deDioclétien[167].Dioclétien augmente le nombre de militaires. Il confie à des soldats souvent d'origine barbare, leslimitanei[160], le soin de défendre lelimes. Les légions de manœuvres sont de taille plus réduite — 1 000 légionnaires — mais sont plus nombreuses que sous la période précédente. Elles passent de 39 à 60. Elles sont chargées d'intercepter les Barbares qui ont réussi à franchir une frontière de plus en plus fortifiée. La nécessité de la défense de l'Empire justifie l'abandon deRome comme résidence impériale au profit de villes plus proches des frontières :Trèves,Milan,Sirmium,Nicomédie.Constantin achève la transformation de l'armée et met en place lecomitatus, l'armée de campagne. Son commandement est confié à unmagister peditum pour l'infanterie et unmagister equitum pour la cavalerie[168]. En cas de besoin, des maîtres des milices peuvent être créés pour une région particulière comme enIllyrie. Dans les provinces et les diocèses exposés, les troupes peuvent être dirigées par uncomes ou undux. Cette armée est particulièrement soignée par les empereurs.
On suppose que l'armée romaine duIVe siècle compte entre250 000 et300 000 hommes. Pour pallier les difficultés de recrutement,Dioclétien impose de nouvelles règles. Les propriétaires doivent désormais fournir des recrues à l'armée romaine. Au cours duIVe siècle, ils obtiennent le droit de remplacer les recrues par une somme en or, l'aurum tironicum[169]. Ce système est supprimé en375, mais uniquement pour l'Orient. Un nombre significatif de citoyens cherche à fuir l'enrôlement dans l'armée en partant dans le désert, en se coupant le pouce ou en devenant clerc. Les lourdes condamnations envers les déserteurs, l'hérédité du métier de soldat n'évitent pas les difficultés de recrutement, ce qui pousse les empereurs à faire appel aux barbares.
Au début duVe siècle, l'armée d'Occident comprend théoriquement200 000 hommes aux frontières, deslimitanei presque tous d'origine barbare, et50 000 hommes dans l'armée de manœuvre, lecomitatus. Le paradoxe de cette armée est que les frontières sont défendues par des soldats issus de peuples qui cherchent à envahir l'Empire[171].
Flavius Felix,consul en428,Rome, ivoire d'éléphant, ancien trésor de l’abbaye Saint-Junien deLimoges.
SousDioclétien, les distinctions entre provinces sénatoriales et provinces impériales sont supprimées. En297, il les divise en entités plus petites, les faisant passer de 47 à plus de 100. Ces nouvelles provinces sont regroupées en 12diocèses dirigés par desvicaires équestres qui obéissent directement aux empereurs. Cette multiplication des circonscriptions administratives et des échelons administratifs est perçue comme étant plus efficace pour lutter contre les maux de l'Empire. En312, on compte 108 provinces, 116 en425[172].
Constantin divise l'Empire en grandes circonscriptions dont les limites sont fluctuantes, les préfectures régionales avec à leur tête un préfet du prétoire. Les préfets y ont de grandes prérogatives civiles et judiciaires[173]. Chaque niveau administratif — préfecture régionale, diocèse, province — a sa capitale, ses bureaux, ses fonctionnaires. Le pouvoir impérial est ainsi plus présent à chaque échelon, mais la masse salariale des fonctionnaires est multipliée par quatre et les grands pouvoirs qu'ils possèdent sont des facteurs d'autonomie et de corruption[174].
L'organisation du pouvoir central est elle aussi transformée. Lepréfet du prétoire est remplacé par le questeur du Palais sacré qui rédige les édits. Ce dernier dirige le consistoire sacré, qui remplace le conseil de l'empereur. Lemaître des offices dirige le personnel administratif, les fabriques d'armes et lesscholæ de la garde ; lemaître des milices, l'infanterie et la cavalerie ; lecomte des largesses sacrées, le fisc ; le comte de la fortune privée, lares privata, c'est-à-dire la caisse privée de l'empereur, les revenus personnels de ce dernier étant issus essentiellement du revenu de ses immenses domaines. La grande nouveauté est cependant la grande augmentation des fonctionnaires travaillant dans les bureaux centraux. Une foule de notaires, de chargés de mission et agents secrets (lesagentes in rebus aussi nomméscuriosi), près de1 000 fonctionnaires auVe siècle[175], et d'employés divers font de l'Empire romain une véritable bureaucratie[168]. Cette administration centrale pléthorique contribue à l'isolement de l'empereur par rapport au reste de la société.
Les finances sont avant tout destinées à soutenir l'armée. L'annone militaire a été progressivement mise en place à partir de la dynastie desSévères. Elle est, sousDioclétien, payée en nature ou en espèces. Pour faire face aux dépenses accrues, l'empereur ordonne que soit recensées, toutes les ressources de l'Empire, hommes, bétails et autres richesses. Ce recensement, qui a lieu tous les quinze ans, sert de base pour établir, un nouvel impôt, lacapitation. La fiscalité pèse essentiellement sur les habitants des campagnes. Outre la capitation, ils doivent payer lajugatio sur les biens fonciers. Les sénateurs doivent s'acquitter de lacollatio glebalis tous les quatre ans. Sous le règne deThéodose, la fiscalité se durcit encore provoquant des révoltes (Antioche en387). En théorie, les revenus de lares privata doivent subvenir à la cour et à la famille impériale, mais une part grandissante de cette caisse est dévolue aux immenses besoins de l’État.
L’économie romaine est une économie essentiellement agricole. La trilogie méditerranéenne domine la production :blé,vigne (vin),olivier (huile). LaSicile, l’Afrique, l’Égypte, lesGaules et l’Espagne produisent les céréales qui ravitaillent les grandes villes de l’Empire. L’élevage de chevaux, indispensable pour les jeux et pour l’armée est concentré enHispanie, enAfrique, enSyrie, enThrace et enAsie. À cette époque, deux secteurs de l’économie peuvent être qualifiés d’industriels. Il s’agit de l’exploitation minière et de la production decéramique sigillée. Celle-ci est liée à l’exportation de produits agricoles. C’est donc dans les grandes régions de production qu’on trouve les principaux ateliers de céramique. Une quarantaine de fabriques d’armes sont disséminées dans l’Empire. Elles font partie des industries de l’État, tout comme les fabriques d’armures, de vêtements pour les soldats et les teintureries[176].
AuIVe siècle les préfectures de la ville et du prétoire s’ajoutent auconsulat comme charges permettant d’entrer dans lanobilitas.Constantin prend la décision de supprimer l’ordre équestre dont les membres entrent presque tous dans l’ordre sénatorial. Le nombre desénateurs passe de 600 à2 000 membres[177]. LeSénat créé àConstantinople compte lui aussi2 000 membres. L’ordre sénatorial oriental est recruté parmi les notables des cités provinciales grecques[178]. Lanobilitas romaine se caractérise aussi par sa résistance à l’adoption du christianisme. Attachée au culte des ancêtres, à la culture gréco-romaine, à la philosophie, elle répand une nombreuse littérature antichrétienne[179]. Cependant, au milieu duIVe siècle, les grandes familles romaines se convertissent peu à peu au christianisme. Les invasions barbares n’empêchent pas l’aristocratie sénatoriale de garder sa richesse foncière et son influence jusqu’auVIIIe siècle. Elle monopolise les charges de comte et d’évêque[180].
Depuis leIIIe siècle, l’Empire romain se nourrit des apports barbares. Le rôle essentiel despeuples fédérés dans l’armée romaine a déjà été évoqué. Ils ont aussi peuplé les régions septentrionales de l’Empire menacées de dépopulation. Les décrets deValentinien Ier interdisant les mariages romano-barbares montrent qu’il existe déjà un métissage non négligeable à cette époque. Les cas d'officiers barbares vivant dans l’Empire et romanisés sont fréquents auIVe siècle.
Les Romains révolutionnent le support écrit des livres, en lui donnant la forme moderne que nous connaissons : ils généralisèrent lecodex, volume de feuilles reliées plus maniable et plus aisé à lire que le traditionnel rouleau. Le livre est devenu un objet maniable, facile à transporter, à ranger, lisible par un seul individu. Mais il reste un objet cher, même si le nombre de volumes en circulation augmente considérablement. L'usage du parchemin, plus solide, mais plus coûteux s'étend aux dépens du papyrus. Le passage devolumen aucodex, parfois de taille très réduite, a comme conséquence la perte d'une partie des textes antiques qui ne sont plus consultés[182]. La place de l'écrit dans la société devient de plus en plus importante.
À partir duIVe siècle, la source de la littérature est essentiellement chrétienne. La correspondance de quelques grands esprits du temps, très bien conservée, permet d'avoir une connaissance fine des mentalités de l'Antiquité tardive. Larhétorique grecque est utilisée par lesPères de l'Église, que ce soit pour rédiger des sermons, expliquer les textes saints ou tenter de convaincre les non-chrétiens. L'hagiographie se multiplie. Tout en racontant la vie dessaints à la manière deSuétone ouPlutarque, elle se concentre sur les vertus chrétiennes desaints pour en faire des exemples pour le lecteur. AuxVIe et VIIe siècles, le genre hagiographique multiplie les récits de miracles, qui l'emportent sur l'exemple moral[183]. Il n'est donc pas étonnant que l'œuvre majeure de l'Antiquité tardive soit une œuvre religieuse. Il s'agit de l'œuvreLa Cité de Dieu d'Augustin d'Hippone, achevée en423. Il réplique de manière magistrale aux détracteurs du christianisme qui rendaient la religion responsable dusac de Rome de410. Dans sa théorie des deux cités, il développe l'idée que Rome est une cité terrestre donc mortelle. La cité des chrétiens est le royaume de Dieu qui les attend après la mort. Ils ne doivent donc pas lier leur foi chrétienne à l'existence de Rome même s’ils doivent servir l'Empire loyalement.
Pendant longtemps a prévalu l'idée qu'au début duIVe siècle, les provinces d'Orient sont majoritairement acquises au christianisme. En Occident, les provinces méditerranéennes sont plus touchées par la nouvelle religion que les autres. Mais partout dans cette partie de l'Empire romain, les campagnes restent profondément polythéistes[184]. Aujourd’hui, l’ampleur de la christianisation de l’Empire est remise en question[185]. Il semble qu'en312, les chrétiens ne représentent que 4 à 5 % de la population totale de l’Empire.
Constantin se convertit auchristianisme lors de sa campagne contreMaxence en312. En313, l'édit de Milan proclame la liberté de culte et prévoit de rendre aux chrétiens les biens qui leur avaient été confisqués pendant la grandepersécution de Dioclétien. Cette conversion pose le problème des relations entre l'Église et le pouvoir[163]. Entouré d'évêques,Constantin intervient dans les disputes doctrinales de l'Église. Un de ses objectifs est de rétablir la paix civile dans l'Empire. Il lutte contre ledonatisme en Afrique et l’arianisme en Orient. Il préside même leconcile de Nicée en325 qui reconnaît leChrist comme Dieu et homme à l’unanimité, mêmeArius acquiesçant à cette doctrine[165]. Mais il continue sa prédication et est excommunié. Les ariens adoptent des positions très favorables au pouvoir impérial, lui reconnaissant le droit de trancher les questions religieuses d’autorité.Constantin finit par se convertir à cette forme de christianisme et se fait baptiser sur son lit de mort par unprêtre arien[160]. Cette conversion à l'arianisme est contestée par l'Église catholique et par certains historiens. Son fils,Constance II est un arien convaincu. Il n'hésite pas à persécuter les chrétiens nicéens plus que les païens. Malgré ses interventions dans de nombreuxconciles, il échoue à faire adopter un credo qui satisfait les ariens et les chrétiens nicéens. Ses successeurs, soucieux de paix civile observent une stricte neutralité religieuse entre les ariens et les nicéens. Ladéfaite d'Andrinople face auxWisigoths ariens permet aux catholiques orthodoxes de passer à l'offensive.Ambroise de Milan, voulant défendre lecredo de Nicée contre les ariens, qualifie l'hérésie de double trahison, envers l'Église et envers l'Empire[186].
Gratien finit par s’orienter vers une condamnation de l'arianisme sous l’influence conjuguée de son collègueThéodose et d’Ambroise. L’empereur d’Orient promulgue des lois qui interdisent les doctrines s’opposant à la foi de Nicée[187]. L'empereur de lapars orientalis a, en380, dans l'édit de Thessalonique, fait du christianisme une religion d'État. Comme son collègue, il promulgue des lois anti-hérétiques[188]. Il convoque un concile àAquilée, en381, dirigé parAmbroise. Deux évêques ariens sont excommuniés. L'Église catholique est devenue assez forte pour résister à la cour impériale. Après la mort deGratien, le parti arien est de nouveau très influent à la cour. À leur instigation, est promulguée une loi, le 23 janvier386, qui prévoit la peine de mort pour toute personne qui s’opposerait à la liberté des consciences et des cultes[189].Ambroise refuse de concéder unebasiliqueextra-muros aux ariens fort du soutien du peuple et des hautes sphères deMilan. La cour impériale est obligée de céder. Grâce à des hommes commeAmbroise, l'Église peut ainsi s'émanciper de la tutelle impériale, surtout en Occident et même revendiquer la primauté du pouvoir spirituel sur le temporel en rappelant à l'empereur ses devoirs de chrétien. Les chrétiens ont aussi besoin de la force publique pour faire prévaloir leur point de vue. Ainsi,Porphyre de Gaza obtient de l'impératriceEudoxie, qu'elle fasse fermer par son épouxArcadius les temples polythéistes de Gaza.
Les empereurs donnent aux membres du clergé de nombreux privilèges. Ils sont dispensés des prestations fiscales imposées aux citoyens. Lesévêques se voient reconnus des pouvoirs de juridiction civile. Les personnes poursuivies par le pouvoir bénéficient du droit d'asile, ce qui permet de les soustraire à la justice impériale. Enfin les clercs ne dépendent pas des juridictions ordinaires et se trouvent ainsi placés au-dessus du droit commun.Constantin donne à l'Église une personnalité juridique qui lui permet de recevoir des dons et des legs. Ceci lui permet d'accroître sa puissance matérielle. AuVe siècle, elle possède d'immenses domaines dont certains dépendent des institutions charitables de l’Église. Le développement de ses institutions lui permet d'occuper un vide laissé par les systèmes de redistributions païens, en s’intéressant aux pauvres en tant que tels et non en tant que citoyens ou que clients[190].
Pendant tout leIVe siècle, les cultes polythéistes traditionnels continuent à être pratiqués, de même que les cultes à mystère d'origine orientale comme ceux deMithra, deCybèle, d'Isis et deSérapis malgré des restrictions progressives. Les textes chrétiens qui les dénoncent violemment, les dédicaces, les ex-voto, ou d'attestations de travaux dans les temples en sont autant de témoignages[191]. En Égypte,Chenouté, abbé du monastère Blanc en Haute-Égypte et mort vers466, rapporte dans ses œuvres sa lutte contre les païens, qu’il appelle « les Grecs »[192]. L'historien païenZosime nous apprend à ce sujet que la nouvelle religion n'était pas encore répandue dans tout l'Empire romain, lepaganisme s'étant maintenu assez longtemps dans les villages après son extinction dans les villes.
Constantin n’intervient guère que pour interdire les sacrifices nocturnes, les pratiques desorcellerie et demagie, les rites d’haruspice privée, ce qui relève de lasuperstitio. Il a toujours cherché, même après324, à ménager les païens. Il garde toute sa vie le titre degrand pontife, ce qui en fait le chef de la religion traditionnelle il manifeste en général la plus grande tolérance vis-à-vis de toutes les formes de paganisme[162]. En effet, l'écrasante majorité des sujets de l'empereur est encore païenne. Il se doit donc de les ménager. En356,Constance II interdit tous les sacrifices, de nuit comme de jour, fait fermer des temples isolés et menace de la peine de mort tous ceux qui pratiquent la magie et la divination[193]. L'empereurJulien, acquis au paganisme, promulgue en361 un édit de Tolérance permettant de pratiquer le culte de son choix. Il exige que les chrétiens qui s’étaient emparés des trésors des cultes païens les restituent. Ses successeurs sont tous chrétiens. En379,Gratien abandonne la charge deGrand Pontife. À partir de382, à l’instigation d'Ambroise, évêque de Milan, l’autel de la Victoire, son symbole auSénat, est arraché de laCurie, tandis que lesVestales et tous les sacerdoces perdent leurs immunités. Le, une loi de Théodose interdit à toute personne d’entrer dans un temple, d’adorer les statues des dieux et de célébrer des sacrifices, « sous peine de mort »[194].
En392,Théodose interdit lesJeux olympiques liés àZeus et àHéra, mais aussi à cause de la nudité du corps des compétiteurs, le culte du corps et la nudité, étant dénigré par le christianisme. Peu à peu, les temples abandonnés tombent en ruines. D’autres sont détruits comme leSérapéum d'Alexandrie dès391, le temple de Caelestis, la grande déesse carthaginoise héritière deTanit en399. Par ailleurs, le christianisme lui-même se trouve imprégné des anciens rites païens. Certaines fêtes traditionnelles romaines sont toujours fêtées à la fin duVe siècle, comme la fête deLupercales consacrée à la fécondité et aux amoureux. Pour l'éradiquer, le papeGélase Ier décide en495 de célébrer la fête desaint Valentin, le14 février, un jour avant la fête desLupercales pour célébrer les amoureux. Il s'agit donc bien d'une tentative de christianisation d'un rite païen. Les Africains continuent de célébrer des banquets aux jours anniversaires des morts directement sur les tombes. AuVIe siècle,Césaire d'Arles dénonce dans ses sermons à ses fidèles les pratiques païennes qui subsistent dans le peuple. Le port d'amulettes, les cultes aux arbres et aux sources n'ont pas disparu de la Gaule méridionale. Les plaintes des clercs sont nombreuses jusqu'à la fin de l'Antiquité tardive.
En376, menacés par lesHuns, lesWisigoths demandent asile à l’Empire. Deux cent mille d’entre eux sont établis au sud duDanube, enMésie[164] en échange de levée de recrues. Mais ils sont exploités par les fonctionnaires romains et ne tardent pas à se révolter. Des esclaves, des colons et des travailleurs des mines se joignent à eux pour ravager laThrace. Sans attendre l'arrivée de son neveuGratien, retenu par lesAlamans enGaule, l'empereurValens engage le combat avec sa seule armée et est tué lors de labataille d’Andrinople en378 où la cavalerie wisigothe met à mal la légion romaine. Le nouvel empereur de la partie orientale de l'Empire,Théodose Ier, pacifie rapidement les Balkans et réussit à conclure un nouveaufœdus avec lesGoths en382[195],[196]. Les Goths ont le droit de s'installer en Thrace. Ils conservent leurs propres lois et ne sont pas soumis aux impôts romains. Ils sont donc quasi indépendants même s'ils s'engagent à servir dans l'armée romaine comme fédérés, c'est-à-dire sous le commandement de leurs propres chefs. Théodose Ier profite de cette période de répit avec les Goths pour conclure une paix avec lesSassanides qui durera jusqu'en502[197].
Après la mort de Théodose (395), lesWisigoths dirigés parAlaric pillent laMacédoine, laThessalie, la Grèce.Arcadius négocie à prix d'or leur retrait vers l'ouest.Stilicon, général d'originevandale et tuteur des deux jeunes empereurs, est empêché de les combattre par le souverain d'Orient. En402, alors que lesOstrogoths envahissent les provinces danubiennes, les Wisigoths pénètrent enItalie. En410, ilssaccagent Rome. Cet épisode est ressenti comme une catastrophe par les Romains. Les païens y voient la conséquence de l'abandon des dieux traditionnels.Saint Jérôme y voit le châtiment des pêchés des hommes[198].Saint Augustin affirme lui qu'il n'y a aucun lien entre le christianisme et l'Empire[199]. L’établissement définitif desWisigoths dans le sud de la Gaule et enHispanie met fin à leurs raids.
Mais entre-temps, le, lesVandales, lesSuèves, lesAlains et lesAlamans franchissent leRhin bientôt suivis par lesBurgondes. Ils ravagent la Gaule tandis que l'île de Bretagne est définitivement abandonnée par les légions romaines. Le puissant parti anti-barbare présent à la cour impériale obtient une épuration de l'armée et de l'administration en Italie, la privant des défenseurs efficaces et fidèles[200]. L'empereur, installé àRavenne, est contraint d'accepter l'installation de nouveauxroyaumes barbares en Gaule[201]. En429, lesVandales envahissent l'Afrique dont ils font la conquête en 10 ans. Ils privent l'Italie d'un de ses greniers à blé, leur flotte contrôlant la Méditerranée occidentale. Ils sont en outre desariens fanatiques et persécutent les Romains orthodoxes[202]. La cour impériale est obligée de conclure desfœdus avec les envahisseurs. En435, les Vandales obtiennent à leur tour le statut de fédérés en Afrique orientale[203]. Dans le Nord-Ouest de l'Hispanie, le roi suèveHerméric crée un véritableroyaume autour de sa capitaleBraga en obtenant unfœdus en437-438. Les provinces danubiennes restent fidèles à l'Empire, mais passent sous l'autorité deConstantinople. L'Empire romain d'Occident se réduit à l'Italie et une partie de la Gaule.
En488,Théodoric le Grand, roi desOstrogoths, envahit l'Italie, alors aux mains d'Odoacre, à la demande de l'empereur d'OrientZénon[204] qui se considère comme le seul maître de l'Empire. Après la prise deRavenne en493, lapuissance des Ostrogoths s'étend en Italie,Sicile,Dalmatie et au nord de l'Italie[205]. En sa qualité de représentant du pouvoir impérial, Théodoric tente d'étendre son pouvoir sur les autres royaumes barbares, ariens comme lui. Pour Théodoric, les Goths sont les protecteurs des Romains. L'administration romaine subsiste donc. La politique et la culture romaines ont une grande influence sur les Goths. L'empereur romain lui confère même le titre de roi. Le royaume ostrogoth d'Italie est un excellent exemple de la collaboration entreConstantinople et les rois barbares.
AuVe siècle, l'Orient connaît une longue période de prospérité économique. Les caisses de l'État regorgent de numéraires en or[206]. Sous le règne deThéodose II, la ville deConstantinople continue à s'agrandir et reçoit une nouvelle enceinte, lemur de Théodose. Un code juridique est publié, leCode de Théodose. Cependant l'Empire est déstabilisé par des conflits religieux violents, entrenicéens etariens et à partir de430 entrenestoriens etmonophysites. À partir de440, lesHuns menacent l'empire d'Orient. Un tribut et l'octroi d'une dignité romaine àAttila permettent d'éloigner le danger.Marcien, époux de Pulchérie, la sœur deThéodose II, règne de450 à457.Léon Ier est le premier empereur d'Orient à recevoir la couronne des mains dupatriarche de Constantinople. Son petit-filsLéon II ne règne que quelques mois. C'est donc son gendreZénon qui revêt la pourpre impériale pendant quinze ans de476 à491. C'est sous son règne que le dernier empereur romain d'OccidentRomulus Augustule est destitué parOdoacre. Il est donc le seul empereur du monde romain, mais son autorité sur l'Occident n'est que théorique[207]. Sous le règne d'Anastase (491-518), la guerre contre les Perses reprend. LeSénat choisit ensuite un officier macédonien,Justin (518-527) dont le neveu,Justinien gravit tous les échelons de la carrière administrative.
Justinien Ier (527-565) est parfois considéré comme le dernier empereur romain. Estimant que tout territoire qui a été romain le reste inaliénablement[204], il consacre une grande partie de son règne à vouloir reprendre aux Barbares les terres de la romanité et fait de l'Occident son premier objectif. Il envoieBélisaireconquérir l'Afrique sur les Vandales en quelques mois. Il profite de l'affaiblissement de l'Italie après la mort deThéodoric pour intervenir dans la péninsule en535. La conquête est plus difficile que prévu et n'est définitive qu'au terme d'une guerre dévastatrice entre552 et554. En554, les Byzantins font la conquête d'une partie de l'Espagne wisigothique jusqu'àCordoue. De plus, les conquêtes de Justinien sont fort coûteuses. Il néglige la menace perse qu'il écarte momentanément par le paiement d'un tribut et celle desSlaves et desAvars qui apparaissent au nord de l'empire d'Orient. Il sacrifie ainsi l'avenir de régions vitales pour l'empire d'Orient ou byzantin pour poursuivre le rêve d'un empire universel. Il n'arrive pas non plus à réconcilier les tenants de l'orthodoxie romaine et les monophysites.
Cette reconquête épuise Rome et l'Italie et n'est guère durable. En568, seules les régions deRavenne et deRome sont encore aux mains de Byzantins. Le reste de l'Italie est devenulombard. Sous le règne d'Héraclius (610-641) l'empire d'Orient prend un caractère grec inéluctable. Le titre deBasileus remplace celui d'Auguste, les provinces deviennent desthèmes. L'expansion de l'islam déclenche également lesguerres arabo-byzantines. LaSyrie,Jérusalem, l'Égypte, laMésopotamie sont définitivement perdues après six siècles de romanité. Le monde byzantin remplace définitivement le monde romain oriental.
L’art romain est l'art produit dans les territoires de la Rome antique, depuis lafondation de Rome (), selon la chronologie traditionnelle, partiellement confirmée par l'archéologie, jusqu'à la chute de l'Empire d'occident ().
Pour l'architecture, la sculpture, la mosaïque et la peinture :
Sauf indication contraire ou complémentaire, les informations contenues dans cette section proviennent du siteAmiata Records..
Synaulia, Music of Ancient Rome, Vol. I – Wind Instruments (Musique de la Rome antique, Vol. I – Instruments à vent) - Amiata Records, ARNR 1396, Florence, (25 titres - 59 min - 10 juillet 2007)
Synaulia, Music of Ancient Rome, Vol. II – String Instruments (Musique de la Rome antique, Vol. II – Instruments à cordes) - Amiata Records, ARNR 0302, Rome, (16 titres - 57 min - 10 juillet 2007)
↑Les troupeaux pouvaient ainsi« franchir le Tibre pour gagner les riches pâturages de plaine des territoires de la rive droite du fleuve. Là, la multitude des sentes de montagne rejoignait les routes principales, les via Salaria en provenance des hauts pâturages de la Sabine, et futures viae Latina et Appia en provenance des monts Albains. Le contrôle des points de passage sur le Tibre, à hauteur de Passo Corese, de Fidènes, de Ficana ou de Rome devait ainsi revêtir une importance certaine pour l'activité pastorale qui était encore l'activité dominante des populations de l'intérieur accidenté ». CfThierry Camous,Le roi et le fleuve. Ancus Marcius Rex aux origines de la puissance romaine, Belles Lettres,,p. 132.
↑L'archéologie met en évidence des traces d'occupation saisonnières dès lePaléolithique.
↑Alberto Angela,Une journée dans la Rome antique: Sur les pas d'un Romain, dans la capitale du plus puissant des empires, Payot, 06/04/22 6 avril 2022, 384 p.(ISBN9782228930376),p. 29
Un nombre assez important de textes historiques de l'Antiquité, rédigés enlatin ou engrec, nous sont parvenus par l'intermédiaire de copies. Bien que leur contenu soit souvent sujet à caution, ils sont une source majeure d'information sur l'histoire politique de la Rome antique. On peut citer, parmi ceux dont le sujet est le plus général :
Œuvre monumentale retraçant l'histoire de Rome depuis les commencements jusqu'à la mort deDrusus en Cependant, il ne nous reste que les premiers livres, jusqu'auxguerres samnites, puis ladeuxième guerre punique jusqu'à labataille de Pydna en Pour les périodes les plus anciennes, Tite-Live admet ne pouvoir distinguer entre la légende et la réalité, mais il est une source très fiable à partir duIVe siècle av. J.-C.
Œuvre qui retrace l'histoire de Rome des débuts jusqu'à l'an, mais hormis des fragments sur les débuts de la République, il ne nous reste que la dernière moitié, fiable, traitant desguerres civiles romaines et de l'Empire.
Il s'agit des biographies des douze premiersimperatores de Rome, deJules César àDomitien. Son œuvre est assez fiable bien qu'il se montre parfois peu critique et n'hésite pas à colporter rumeurs et calomnies.
LesAnnales vont de14 à68 et sont en partie perdues. LesHistoire vont théoriquement de68 à96, mais seule la partie traitant des années69 et70 est conservée.
Eusèbe de Césarée (trad. Émile Grapin),Histoire ecclésiastique,1911 ([[ lire en ligne]]).
Son récit est le plus souvent rationnel et précis, mais ce n'est pas un historien objectif : comme il l'indique lui-même, il fait œuvre d'apologiste et de propagande pour le christianisme et il omet certaines informations.
Seule la partie traitant des années353 à378 a été conservée.
D'autres textes donnent des informations précieuses sur des événements précis. En outre, lalittérature latine, dont on a conservé de nombreux textes, fournit de nombreux renseignements sur la mentalité et l'histoire culturelle de Rome.
La version du 30 mai 2008 de cet article a été reconnue comme « bon article », c'est-à-dire qu'elle répond à des critères de qualité concernant le style, la clarté, la pertinence, la citation des sources et l'illustration.