Fille de Vicente Menchú Pérez et Juana Tum Kotoja (qui exerçait la profession traditionnelle de sage-femme dans la communauté indigène à laquelle appartenait la famille), Rigoberta Menchú naît dans l'ethniemaya desQuichés auGuatemala le. Plus encore que de nos jours, les ethnies indigènes étaient à l'époque victimes de ségrégation et de discriminations au sein de la population guatémaltèque, et la communauté dans laquelle naquit Rigoberta était par conséquent très pauvre. « Je suis née dans laselva, près de la montagne. Dans une situation n’ayant rien à voir avec ce que l’on peut appeler aujourd’hui civilisation » commentera Rigoberta Menchú. Elle commence à travailler dans unefinca (vaste domaine agricole) de café dès l'âge de cinq ans. Des familles entières étaient convoyées en camion depuis les montagnes vers les plaines côtières. Ce travail provoqua la mort de son petit frère et de l'une de ses amies. Elle a ainsi connu la pression des propriétaires terriens et de l'armée guatémaltèque, qui les soutenait. Rigoberta se rend régulièrement à un couvent pour faire son éducation. À l’âge de 14 ans, des parrains belges financent ses études. Allant à l’école pour la première fois, elle passe l’équivalent de la primaire en France en une année et entre rapidement en secondaire.
Son père était un homme engagé. Il milita pour que des terres soient distribuées à sa communauté composée de 57 familles, toutesmayasquichés, estimant qu'il était anormal que des autochtones vivant sur ces terres depuis des centaines d’années en soient dépossédés. Les terres réclamées appartenaient à l’État. Il emmène dans sa lutte sa fille, Rigoberta. Jeune, elle accompagne son père dans lestribunaux, les bureaux du gouvernement. En raison de ses réclamations, le père de Rigoberta met sa vie en danger, se faisant plusieurs fois rouer de coups. C'est ainsi que depuis sa jeunesse, Rigoberta Menchú a été sensibilisée à la lutte des siens. Elle s'est impliquée dans les luttes revendicatrices des peuples indigènes et paysannes en fondant en 1978 la CUC (Comité d'Unidad Campesina) et RUOG (Representación Unitaria de la Oposición Guatemalteca) dans les comités de direction desquels elle resta jusqu'à 1992. Son travail avec ces associations lui valut une persécution politique qui la contraignit à l'exil.
Laguerre civile guatémaltèque eut lieu de 1962 à 1996, faisant suite à des violences qui duraient depuis des années. Lors de son discours deprix Nobel de la paix, Rigoberta Menchú déclara: « dans la tentative de répression de la rébellion, lesdictatures commirent les plus grandes atrocités. Des villages furent rasés, des dizaines de milliers de paysans furent assassinés, principalement des indigènes, des centaines desyndicalistes et d'étudiants, de nombreux journalistes ayant donné de la visibilité aux événements, des intellectuels et politiques, des religieux et religieuses ».
À l'âge adulte, elle rejoint des membres de sa famille dans leur action contre des militaires et leur violation desdroits humains. En 1979, son frère Patrocino est séquestré, torturé et brulé vif après avoir eu la langue et les orteils coupés. Le, son père et son cousin Francisco Tum comptèrent parmi les 37 personnes qui moururent brûlées dans l'incendie de l'ambassade d'Espagne provoqué par les forces de l'ordre. À ce moment, Rigoberta retourne voir sa mère dans sa terre natale afin de la convaincre de partir. Trois mois après, sa mère est à son tour séquestrée et assassinée. Rigoberta débute alors une vie clandestine hors duGuatemala. Elle prend la direction duMexique. La violence et les répressions la forcent à l'exil en1981.
Pendant que ses frères s'unissent à la guérilla, Rigoberta entame une campagne pacifiste dénonçant la méthode du gouvernement guatémaltèque et la violation des droits de l'homme. Son séjour auMexique lui permet de voir un pays distinct du sien mais pas si différent en matière d'inégalités. Elle consacre son temps aux réfugiés guatémaltèques. Elle devient une personne de notoriété publique symbolisant la violence commise à l'encontre de son peuple. Parallèlement à cette lutte pour la paix, elle s'engage dans le débat public sur la situation de la femme d'Amérique latine, devenant ainsi une activiste féministe.
En 1983,Elizabeth Burgos est primée pour son livre intituléMe llamo Rigoberta Menchú y así me nacío la conciencia[1],Moi, Rigoberta Menchú en français. Rigoberta avait dicté ce livre, et de nombreuses personnes se sont indignées qu’elle ne soit pas aussi primée. Rigoberta préfère le silence sur cette polémique car là n’est pas son combat. Son silence doit porter sa voix dans ce livre. Ce livre connaît un véritable écho et favorise le dialogue de Rigoberta avec l’ONU.
Elle cherche à faire juger l'ex-dictateur militaire duGuatemalaEfraín Ríos Montt, candidat battu à la présidentielle de 2003, devant les tribunaux espagnols, pour des crimes commis contre des citoyens espagnols ; cette tentative échoue. En plus des décès des citoyens espagnols, les accusations les plus graves portaient sur ungénocide contre lepeuple maya duGuatemala.
Rigoberta Menchú s'est impliquée dans l'industrie pharmaceutique indienne en tant que présidente de la compagnieSalud para Todos (« Santé pour tous ») et la compagnie Farmacias Similares, en vue d'offrir demédicaments génériques à bas prix aux populations les plus pauvres.
Rigoberta Menchú est membre de la fondationPeaceJam, une organisation dont la mission est de« former de jeunes leaders qui sont engagés dans un changement positif en eux-mêmes, dans leurs communautés et dans le monde ». Elle voyage à travers le monde et s'adresse aux jeunes lors de conférences PeaceJam.
En2007 et2011, elle est candidate à l'élection présidentielle de son pays, malgré de très faibles ressources financières pour mener campagne. Elle a créé le mouvementWinaq, plateforme regroupant de nombreux mouvements mayas de tout le pays et reçoit le soutien moral et logistique duMouvement vers le socialisme, parti bolivien qui a amené à la victoireEvo Morales[3]. Sa candidature détonne dans un pays où la vie politique est dominée par des politiciens blancs et conservateurs[2]. Néanmoins, elle est éliminée dès le1er tour, ne recueillant que3 % des suffrages.
Rigoberta Menchú est également membre du comité d'honneur de laFondation Chirac[4], lancée en 2008 par l'ancien chef de l'État françaisJacques Chirac pour agir en faveur de la paix dans le monde. Elle est aussi membre honoraire duClub de Rome[5].
Rigoberta est mère. Elle perd l'un de ses fils prématurément en 1997. Afin de surmonter son deuil, Rigoberta Menchú entreprend la rédaction de contes pour enfants.Li Mi'n, una niña de Chimel est son premier livre.El vaso de miel est publié en 2010.
Elle mène des actions humanitaires par l'intermédiaire de sa fondation, la Fundación Rigoberta Menchú Tum[6].
Le Club Quetzal[7], créé en 1997 par un groupe de jeunes collégiens deMont-de-Marsan sur l'initiative de Vincent Simon (président fondateur), est uneONG travaillant pour la défense des droits des Indigènes auGuatemala qui intervient dans les domaines de l'éducation, de la nutrition et du commerce équitable.