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Lerenseignement est, selon l'acception, l'information estimée pour sa valeur et sa pertinence auprès d'une organisation, d'un État et son gouvernement, de tout groupe ou particulier, ou bien l'action de fournir ces informations — de les produire.
Le renseignement se définit ainsi par opposition à ladonnée (qui se réfère à la précision de l'information) et aufait (constatation objective). Le renseignement se définit aussi par son usage : c'est une information délivrée (à un gouvernement ou une institution) pour guider des prises de décisions et des actions.
Lorsqu'il s'agit de l'action de produire du renseignement, il consiste en l'ensemble des activités de production et de traitement du renseignement (orientation, recherche, analyse, diffusion). Pour les non-spécialistes et la littérature de fiction, ces activités sont souvent désignées sous le terme usuel d'espionnage, alors définies de manière dépréciative, imaginaire ou réductrice sous le seul angle de la« collecte clandestine d'informations secrètes ou privées »[1]. Pour les spécialistes, l'espionnage correspond néanmoins seulement à un sous-ensemble des actions de renseignement : celles qui sont conduites par l'ennemi.
Par métonymie, le terme de renseignement désigne l'ensemble des organismes qui se consacrent à ces activités. Dans ce sens, ce terme désigne notamment lesservices publics de renseignement ou bien les unités militaires spécialisées[2].
Le mot « renseignement » apparaît dès leXIVe ouXVe siècle, sans avoir son sens moderne. Il dérive du verberenseigner (rare jusqu'auXVIIIe siècle), ayant anciennement le sens « instruire, enseigner à nouveau ». Le verbeenseigner dérive dulatin classiqueinsignare (« indiquer, désigner »).Insignare dériverait de l’adjectifinsignis (« remarquable ») et du nomsignum (« signe »)[3].
Dans le langage courant actuel, un renseignement est, selonLe Grand Robert, « ce par quoi on fait connaître quelque chose à quelqu'un », avec un sens vague ou imprécis, synonyme d'indice, decommunication, de détail, d'information, de référence (administrative ou commerciale), de donnée, de documentation, etc.
Au sens spécialisé (tel que détaillé dans cet article), le termerenseignement (souvent au pluriel) apparaît à la fin duXIXe siècle, comme « information, plus ou moins difficile à obtenir, concernant l'ennemi », dans un contexte militaire, de sécurité ou d'ordre public, ainsi que « la recherche de telles informations ». Il en dérive auXIXe siècle le sens moderne du verberenseigner (« indiquer, désigner »). Puis vers 1920 apparaît l'expression de « service de recherche des renseignements » désignant les organismes étatiques consacrés à cette activité[4] puis plus tard « service de renseignement ».
Parfois dénommé « donnée utile » ou « renseignement utile », le renseignement concerne essentiellement les projets, actions courantes etprises de décision des personnes, le renseignement ayant un caractère d'urgence ou étant considéré comme « précieux ». Ce renseignement utile s'envisage essentiellement comme la compréhension de composants discrets,secrets (voireprivés) d'un adversaire, dans le but de répondre à des interrogations ou d'obtenir les signaux anticipés des mouvements et évènements de l'adversaire.
Le termerenseignement est souvent rapproché de son équivalent anglais « intelligence » : en tant qu'anglicisme, par exemple « l'intelligence économique » qui désigne dans le secteur privé (entreprises) le renseignement économique ; ou bien d'après le terme français « intelligence » pris aux sens « entente (secrète), actions liées à l'entente, communications (secrètes), etc. ». Les activités et le domaine du renseignement sont aussi souvent assimilés à l'« espionnage », qui désigne plus spécifiquement des activités desurveillance (ou de collecte d'information) et les actions desespions.
Le renseignement (avec ses sens multiples) se définit traditionnellement par le moyen de trois approches arbitraires et catégoriques :

Par rapprochement avec la définition donnée par leSénat des États-Unis en1976,« le renseignement est le résultat de la collecte, de l'évaluation, de l'analyse, de l'intégration et de l'interprétation de toutes les informations utiles à la décision ou à la planification, que ce soit dans le domaine stratégique ou dans les activités opérationnelles ».
Cette définition n'est probablement pas exhaustive et nécessite des compléments. Elle décrit les activités de renseignement selon le cycle du renseignement : expression des besoins établis par l'autorité de décision, organisation de la recherche, recueil et analyse des informations produites par la recherche (vraisemblance), évaluation des informations en regard des besoins, mise à la disposition de l'autorité demandeuse sous la forme appropriée.
Un organisme de renseignement, public ou privé, fonctionne sur le mode des questions et des réponses.[évasif] L'utilisateur du service de renseignement, appelé aussi le client ou consommateur dans une vision anglo-saxonne, pose des questions. Les réponses fournies par le service suscitent de nouvelles questions (cycle), et desfeedbacks.
Selon la nature des organismes et selon les pays, le cycle du renseignement est découpé différemment. Il comprend généralement les cinq étapes suivantes :
Ce modèle du cycle du renseignement ne décrit pas suffisamment ce qui se passe effectivement durant le processus : généralement, l'expression du besoin ne vient pas du client mais de l'intérieur du service de renseignement en fonction de ses carences ; la collecte et l'analyse ont lieu continuellement et en parallèle ; le renseignement « fini » est généralement utilisé tel quel, sans déclencher de nouveau cycle[5].
Dans cette approche, le renseignement (au sens premier d'information estimée) se définit par la différenciation dessources d'information qui sont à son origine. Par extension, ces catégories désignent aussi toutes les activités liées à la collecte et l'analyse de ce type de renseignement technique. Les attributions de certains services gouvernementaux se basent sur ces catégories de sources : par exemple, laNational Security Agency (NSA) gère exclusivement le renseignement électromagnétique américain.
Contrairement à une croyance populaire voulant que le renseignement ne rechercherait que des informations secrètes ou dissimulées, il trouve en réalité beaucoup d'informations essentielles dans l'espace public.
Lerenseignement d'origine sources ouvertes (ouROSO ouOSINT pourOpen Source Intelligence) rassemble toutes les activités et méthodes analytiques mises en œuvre à partir d'informations ouvertes (OSIF), c’est-à-dire d'informations disponibles publiquement : journaux, rapports administratifs publics, documents universitaires,littérature grise, bilans économiques publics, pages du web, etc. Il opère sans difficulté majeure, car généralement sans être confronté à des « cibles » non coopératives. Sa principale difficulté est de repérer et trier les sources pertinentes et fiables dans lebig data et la quantité considérable d'informations physiques accessibles à tous.
Les sources ouvertes sont un fonds documentaire suivi et orienté, utile par exemple pour commencer à évaluer un évènement. Elles aussi riches en potentialité deveille stratégique,par exemple quant à la perception des différences ou des évolutions, qui peuvent constituer autant d'orientations de recherches[pas clair]. Sa prolixité implique de régulièrement redéfinir les secteurs de vigilance, pour répondre aux besoins établis par la planification, ou répondre aux intuitions des analystes (qui jouent donc un rôle important dans la chaîne du renseignement, qui dépend largement de la qualité de leur formation). Ils initient une bonne partie des alertes, et établissent le fondement du renseignement opérationnel, qui se développera d'autant mieux que le renseignement de documentation aura été mieux charpenté et actualisé (pour une bonne part à partir de sources ouvertes). En cas d'engagement à court terme, les opérationnels pourront ainsi disposer d'emblée de dossiers d'objectifs (cartographie à jour, caractéristiques des infrastructures, biographies de personnalités, ethnies, etc.) destinés à faciliter leur adaptation à leur milieu d'engagement.
Le renseignement d'origine humaine (ROHUM ouHUMINT pourHuman Intelligence) est un renseignement directement tiré d'une source humaine d'information. Par extension, il s'agit de toutes les activités et méthodes de collecte (entretien, interrogatoire, enquête…) et d'analyse associées. Pour le grand public, c'est l'activité la plus souvent associée au termeespionnage.
Cette activité repose principalement sur le traitement d'agents par desofficiers traitants et l'analyse ultérieure des renseignements collectés.

Lerenseignement d'origine technique inclut :
Dans cette approche, le renseignement (au sens premier d'information estimée) se définit par la différenciation des domaines d'application finale (décision, action). Par extension, ces catégories désignent aussi toutes les activités liées à la collecte et l'analyse de ce domaine de renseignement.
Le renseignement militaire se concentre sur le recueil, l'analyse et la diffusion d'informations, sur l'activité adverse, ses moyens de défense, ses méthodes, le terrain, et tout domaine pouvant présenter un intérêt militaire. Les activités de renseignement sont conduites à tous les niveaux, tactiques, opératifs et stratégiques, en temps de paix comme dans un conflit.
La plupart desforces armées maintiennent des services de renseignement militaire avec les unités spécialisées pour recueillir l'information de manière spécifique. Elles ont aussi typiquement du personnel de renseignement à chaque échelon, jusqu'au niveau des bataillons. Des officiers de renseignement et les soldats enrôlés affectés au renseignement militaire peuvent être choisis pour leurs capacités et aptitudes particulières (capacités d'analyse et linguistique en particulier). Ils reçoivent habituellement une instruction formelle dans ces disciplines.
Le renseignement économique englobe toutes les activités de renseignement liées aux domaines économique, financier, commercial, industriel voire scientifique (civil).
Au niveau des services gouvernementaux, les activités de renseignement économique incluent le soutien aux entreprises nationales publiques et privées, dans l'objectif d'un intérêt national partagé s'inscrivant dans un contexte présenté comme « guerre économique ». Ces activités concernent par exemple : la surveillance et analyse des entreprises et des marchés étrangers, l'espionnage industriel visant à l'obtention de secrets technologiques, la lutte contre l'espionnage industriel étranger, l'analyse des situations et des risques économiques, etc.
Au sein des entreprises privées, l'intelligence économique est l'ensemble des activités légales de collecte et d'analyse d'informations utiles à l'entreprise. Ces informations sont obtenues principalement par des sources ouvertes (journaux, Internet, etc.) : informations sur les produits et les technologies des entreprises concurrentes, sur les marchés et d'une façon générale sur tous les domaines pouvant avoir une influence sur la bonne marche de l'entreprise. Cette définition inclut généralement laveille technologique et toutes les activités légales de renseignement au profit de la compétitivité des entreprises.
En France, depuis les années 1990 et 2000, de nombreuses entreprises privées se sont spécialisées dans les prestations d'intelligence économique et de renseignement d'affaire.
Le renseignement financier concerne la récolte d'information sur les affaires financières d'entités d'intérêt. Ce renseignement permet de dévoiler la nature et la capacité d'une entité, et de prédire ses intentions. Ce type de renseignement concerne généralement le domaine du renseignement criminel (police judiciaire, forces de l'ordre, douanes). Le renseignement financier ne concerne pas nécessairement leblanchiment d'argent (transfert illégal d'argent), mais les techniques du renseignement financier sont utilisées pour détecter ce type d'activité.
Le renseignement de sécurité regroupe l'ensemble des activités de renseignement liées à la protection des intérêts fondamentaux de l'État. Par le passé, dans les États occidentaux, ces activités de renseignement ont été principalement consacrées à la lutte contre les ingérences étrangères dans le contexte de laGuerre froide. Aujourd'hui, elles concernent la lutteanti-terroriste, la lutte contre les réseaux criminels internationaux, et la lutte contre l'espionnage industriel.
Le domaine des actions ouopérations clandestines, opérations illégales d'un État à l'extérieur de son territoire, déborde de celui du renseignement à proprement parler mais les services de renseignement et de sécurité sont l'outil habituel pour ce genre d'opérations, ayant les moyens et l'expérience de la clandestinité[7].
L'espionnage est une pratique certainement aussi ancienne que la guerre. Il est mentionné (dans toutes ses variantes, de la simple reconnaissance de terrain à la diffusion de faux renseignements) dansL'Art de la guerre (dans cet ouvrage de stratégie militaire le plus ancien connu, le général chinoisSun Tzu traite de l'importance des réseaux de renseignement et d'espionnage),L'Iliade et laBible.
Avec l'époque moderne, on assiste à une « professionnalisation » de cette activité, avec la mise en place de bureaucraties, de réseaux pérennes et de réseaux dormants, liés à l'appareil militaro-diplomatique, et sa popularité fait un bond auprès du grand public.
Si cette activité apparaît comme non négligeable pour la compréhension de certains évènements historiques, les recherches historiques sont rares. Elles apparaissent dans les universités américaines depuis une vingtaine d'années, et sont quasi absentes en France. Contrairement à l’idée commune, le secret qui entoure les activités de renseignement n’est pas la raison véritable. Comme l'explique Jean-Pierre Alem, les historiens sont habiles à retrouver les traces estompées des évènements les plus lointains. Or les affaires d’espionnage de ce siècle et du précédent sont beaucoup plus accessibles ; ni les documents ni les témoignages ne font défaut. Au contraire des romanciers, pour les historiens, l’espionnage ne serait peut-être qu’une « activité accessoire, souvent inutile […] indigne de leur attention »[8].
La science des écritures cachées, appeléestéganographie, est maîtrisée par les Chinois longtemps avant que les Grecs la développent[9]. Dans sesHistoires, l'historien grecHérodote rapporte commentDémarate, ancien roi deSparte réfugié auprès du roi des PersesXerxèsIer, utilise ce procédé et prévient ainsi les siens de l'invasion de la Grèce en480 av. J.-C. lors de laseconde guerre médique.
Lacryptographie est également utilisée depuis l'antiquité. Le plus ancien « document » chiffré est une tablette d'argile, retrouvée enIrak, et datant duXVIe siècle av. J.-C.[10]. Une de ses utilisations les plus célèbres pour cette époque est en Grèce lascytale et à Rome lechiffre de César[11].
Les historiens grecs font souvent mention d'espions employés par les chefs des armées pour s'éclairer sur les forces ennemies.
LesRomains emploient dans le renseignement militaire desbeneficiarii, soldats libérés des corvées militaires : lesexploratores et desspeculatores remplacés à l'époque de l'Empire par desfrumentarii. Certains commerçants romains pratiquent l'espionnage économique voire politique. Les empereurs romains, craignant les complots et les assassinats, utilisent lesdelatores (en)[12]. Un système d'espionnage centralisé apparaît sous le règne d'Auguste grâce à la mise en place d'un service postal à l'échelle de l'Empire, lecursus publicus[13].
Les sources rapportent que lesNormands emploient en plusieurs occasions des méthodes assimilables à l'espionnage et à la désinformation[14].
L'Empire byzantin organise un service d'espions disséminés chez les puissances voisines et chez les Barbares[15].
Les relations entre l'Occidentchrétien et l'Orient musulman par le biais des pèlerinages à Jérusalem sont fréquemment marquées par des soupçons d'espionnage envers les pèlerins. En720,Willibald prêtre anglo-saxon en pèlerinage en Terre sainte, se fait arrêter àHoms sous l'accusation d'espionnage[16].
Vers867,Bernard, un moine de l'Abbaye du Mont-Saint-Michel parti en Terre sainte est étroitement surveillé par les autorités musulmanes. En1217, maître Thietmar, frère mineur deWestphalie, subit à son tour des contrôles et la captivité. En1323, Symon Semeonis, un frère mineur irlandais est également suspecté d'espionnage.
En dehors de ces simples affaires de suspicion, il y a effectivement des Occidentaux à voyager en territoiremusulman pour recueillir des informations en vue d'organiser de nouvelles croisades. Ainsi dans la première moitié duXVe siècle, Emmanuel Piloti traverse différents territoires de l'Islam (Égypte, Palestine, etc.), et à son retour adresse à son maître Philippe le Bon, duc de Bourgogne — qui en février 1454 s'était engagé par lesVœux du faisan à partir en croisade — un rapport intituléTraité sur le passage en Terre sainte et selon le propre aveu de son éditrice en 1997, son titre devrait être corrigé enTraité d’Emmanuel Piloti sur l’Égypte et les moyens de conquérir la Terre sainte[17].
Les conflits entreCapétiens etPlantagenêts, notamment laguerre de Cent Ans, furent des périodes d'emploi fréquent d'observateurs, souvent des gens du cru stipendiés et qualifiés dans les sources d'« espié ».
Charles de Blois, assiégeantQuimper, fut espionné au profit des Anglais par une pauvresse à laquelle pourtant il avait offert des aumônes.
Dans les années 1425-1429, le duc de Bretagne disposa d'un espion chez son allié anglais, à Londres. Son réseau était, semble-t-il, dirigé par le sire duJuch en plusieurs occasions ambassadeur de Bretagne en Angleterre.
Dans les années 1430 et 1440, les Anglais employèrent différents habitants du Cotentin pour surveiller les mouvements de troupes françaises.
Bibliographie
C'est avecLouis XI de France que se développent réellement l'espionnage et l'action subversive : refusant systématiquement l'affrontement militaire avec son ennemiCharles le Téméraire plus fort que lui, il l'emportera finalement en lui suscitant sans fin des ennemis, de larévolte de Liège en 1468 (provoquée par des agents français, et dont Louis XI devra publiquement soutenir la répression par Charles) jusqu'à la guerre déclarée à Charles par laConfédération des cantons suisses en 1474, encouragée et financée par Louis XI, guerre qui verra Charles et l'État bourguignon périr[18].
AuXVIIIe siècle, leprince de Conti dirige un service de renseignement appelé le « Secret du Roi » dont l'un des agents les plus célèbres est lechevalier d'Éon,transformiste de talent. La plupart des payseuropéens mettent en place unservice de renseignement appelécabinet noir, chargé de l'inquisitionpostale (lettres privées ouvertes clandestinement, lues, copiées par un secrétaire spécial attaché au cabinet du directeur, recachetées et réexpédiées à leur destinataire) et decryptographie. Ces services disposent de bureaux du Chiffre pour décrypter toutes les correspondances secrètes et emploient descryptologues fort bien payés et comblés d'honneur, telles les dynasties deRossignol en France (ils ont notamment mis au point leGrand Chiffre), d'Argenti (Giovanni et Matteo Argenti travaillant au service de la papauté) à Rome ou deWallis en Angleterre qui ont accès aux affaires les plus secrètes[19].
LeConseil des Dix vénitien met au point pour le développement de son activité un service de délation bénévole ou professionnel (service d'agents secrets appelés les « Confidents ») grâce auxbouches du lion (it) duPalais des Doges, ces sortes de boîtes aux lettres où l'on peut glisser une dénonciation. Trois membres de ce Conseil, lesinquisiteurs d'État, sont spécialisés dans l'analyse de ces lettres et utilisent un bras armé,Messer Grande ouCapitan Grande, chargé desopérations clandestines. Ce système de délation, source de renseignements privilégiée de la police politique et du contre-espionnage vénitien, sévit jusqu'auXVIIIe siècle[20].
LeComité de sûreté générale, créé par la Convention le 2 octobre 1792 lors de laRévolution française, reçut et encouragea les dénonciations. Il établit des dossiers contre des hommes politiques et les transmit au ministère public. Il recruta des « espions », appelés les « mouches », et particulièrement desindicateurs de prison comme Jean-Baptiste Dubois ditDossonville, Louis-Guillaume Armand etLouis-François de Ferrières-Sauvebeuf. Il monta toutes les grandes « affaires » politiques de l’époque, notamment les amalgames tels que les procès des Girondins, celui desHébertistes ou Exagérés, celui des Dantonistes ouModérés et celui dit des« chemises rouges ».
De nombreuses personnes eurent à connaître de l'espionnage et du contre-espionnage, du Directoire à l'Empire, notammentCharles-Maurice de Talleyrand etJoseph Fouché, mais aussi : Méhée de Latouche, Galon-Boyer,Mme de Bonneuil,Mme de Rochechouart, Sandillaud du Bouchet, tous les ambassadeurs de Napoléon dont Bourrienne, Sémonville, Otto et Beurnonville, le préfet de police Desmarets et son parent le banquier Perrégaux.
Charles Louis Schulmeister fut réputé être un agent au service de l'empereurNapoléonIer[21].
Avant 1870, la Prusse parait avoir été avantagée par les capacités de l'espion de Bismarck,Wilhelm Stieber. Après laguerre franco-prussienne de 1870, les relations entre laFrance et l'Empire allemand sont entremêlées d'accusations d'espionnage : il y eut d'abord l'affaire Schnaebelé en1887, mais surtout l'affaire Dreyfus en1894, qui débuta par une affaire d'espionnage, ainsi que l'affaireAlfons Paoli Schwartz.
Cela se poursuit jusqu'à laPremière Guerre mondiale, au cours de laquelleMata Hari est fusillée pour espionnage en temps de guerre. Durant ce conflit, 126 militaires français sont également fusillés pour ce motif[22].
EnEurope, l'Abwehr, service de renseignement allemand dirigé par l'amiralWilhelm Canaris, affronte son équivalentbritannique leMI5, tandis que les différents services de contre-espionnage, en particulier alliés comme leComité XX, s'efforcent de protégerUltra et de tromper les services équivalents de l'Axe.
Dans lePacifique, théâtre d'opération gigantesque, l’espionnage allié parvient à percer les codes utilisés par l'Axe.
Contrairement à une idée reçue, laCentral Intelligence Agency (CIA) n'a pas été créée en 1947 pour contrer l'URSS et ses services secrets, mais pour éviter unnouveau Pearl Harbor, symbole de l'échec des services de renseignement américains, en coordonnant et évaluant les renseignements relatifs à la sécurité nationale, mais laguerre froide a rapidement façonné cette agence qui se voit chargée d'opérations clandestines à l'étranger[23].
En Russie, après la mort de Staline en mars 1953, leMGB fusionne avec leMinistère des Affaires Intérieures (MVD) qui devient un an plus tard leKGB.
En 1993, lors de la construction dubâtiment Juste Lipse, à Bruxelles, des mouchards sont installés dans les murs. Ces écoutes sont découvertes dix ans plus tard. Ce bâtiment est très sensible, car il est le principal lieu de prise de décisions entre chefs d’états européens[24],[25].
En 2013,Edward Snowden révèle que laNSA serait à l'origine des écoutes duJuste Lipse et d'un système d'écoute à grande échelle desinstitutions européennes[25],[26].
Un service de renseignement est une organisation gouvernementale consacrée au renseignement, c'est-à-dire à la collecte d'information au moyen d'espionnage, d'interception de communication, decryptanalyse, de coopération avec d'autres institutions, et d'évaluation dessources publiques. Ces mêmes services sont généralement responsables de l'ensemble desactions clandestines entreprises à l'étranger.
Malgré son intitulé, leSecret Service fondé en 1865 n'a jamais été un service gouvernemental comparable aux services de renseignement modernes. C'est à l'entrée desÉtats-Unis dans laSeconde Guerre mondiale qu'un véritable service de renseignement est créé le 13 juin 1942, l'Office of Strategic Services (OSS), sur le modèle des services britanniques.
En 1947, l'OSS est remplacé par laCentral Intelligence Agency (CIA), une des agences les plus influentes et connues au monde, chargée du renseignement à l'étranger et de la plupart des opérations clandestines. LaNational Security Agency (NSA), fondée en 1952, est chargée, de son côté, du renseignement électromagnétique (interception des communications). Le contre-espionnage sur le territoire américain et le renseignement intérieur sont gérés principalement par leFederal Bureau of Investigation (FBI).
En 2013,Edward Snowden fait denombreuses révélations, parmi lesquelles l'existence des programmesPRISM etXKeyscore, permettant respectivement l'accès aux données des clients deGoogle,Facebook,YouTube,Microsoft,Yahoo!,Skype,AOL etApple[27] et la surveillance des internautes du monde entier[28] et de pays alliés dont l'Union européenne[29].
Le commerce illégal de drogue, les terroristes et les acteurs gouvernementaux sont tous des cibles des agences de renseignement d'aujourd'hui. Au moins 57 personnes ont été inculpées par les États-Unis entre 2008 et 2011 pour avoir tenté d'espionner au profit de laChine[30].
Selon les informations publiées par ledépartement de la Justice des États-Unis, Marc Baier, Ryan Adams et Daniel Gericke, ont travaillé pour une entreprise américaine qui a fourni des cyber-services conformes à l'ITAR à une agence gouvernementale des ÉAU aux termes d'unTechnical Assistance Agreement (TAA) délivré parDirectorate of Defense Trade Controls (DDTC) et signé par la société américaine, le gouvernement des ÉAU et son agence de renseignement pertinente[31]. Le 14 septembre 2021, ils ont admis qu'ils avaient travaillé pourDarkmatter, une entreprise de cybersécurité des ÉAU, pour pirater des ordinateurs, des serveurs et d'autres gadgets électroniques aux États-Unis. Ils ont aidé les agents de renseignement émirati avec une cyber-technologie avancée pour les aider à vioder des ennemis potentiels ou des rivaux politiques[32]. Le 26 août 2022, ces anciens responsables du renseignement américain ont été exclus des activités d'exportation d'armes en vertu d'un accord annoncé par le département d'État. Il a été interdit de participer à toute activité soumise a laRéglementation américaine sur le trafic d'armes au niveau international pendant 3 ans[33].
À la suite de larévolution bolchévique de1917 est fondée la VTchéKa, chargée du renseignement intérieur, extérieur, de la sécurité et de la lutte contre les opposants. En contrepartie, l'Armée rouge se dote en octobre 1918 de son propre service de renseignement, laIVe direction principale de l'état-major général de l'Armée rouge. Après la Seconde Guerre mondiale, ce service sera renommé : il deviendra le Glavnoe Razvedyvatel'noe Upravlenie (GRU),Direction générale des renseignements de l'État-major.
Ultérieurement, la VTchéKa changera plusieurs fois de nom :Tchéka,Guépéou,NKVD,NKGB,MGB,MVD. Mais ses tâches resteront les mêmes. Petite différence toutefois : quand l'ancienne Tchéka devient le NKVD ou MVD, les services de sécurité soviétiques perdent en autonomie ; ils ne sont alors qu'une branche des différents services de police d'URSS, le NKVD englobant aussi bien le contre-espionnage que la police, les pompiers ou leGoulag. Les services de sécurité et de renseignement extérieurs, au sein du NKVD, sont réunis dans le GUGB (Direction principale de la sécurité d'État) du NKVD.
LaGuerre froide arrivant, Staline décide de s'inspirer du modèle de la CIA. Est alors créé le KI, le Comité d'information, qui regroupe le renseignement extérieur politique et le GRU. Mais l'expérience échoue.
Par décret de1954 est créé leKGB, chargé aussi bien du contre-espionnage que des gardes-frontières, du renseignement extérieur, de la lutte contre les opposants ou de la protection des personnalités. Lui font concurrence le GRU, rattaché a l'Armée rouge, mais aussi leMVD, c'est-à-dire la police. Le ministre de l'Intérieur sousBrejnev, Chtchelokov, n'aura de cesse d'essayer de réduire le poids du KGB sur le plan intérieur.
Le KGB a néanmoins un avantage de taille sur la police et le GRU : d'une part, il peut surveiller ces deux organismes, par le biais de la3e direction du KGB (contre-espionnage militaire), par exemple, en recrutant des officiers du GRU ou en essayant d'y démasquer les traîtres (ce rôle revient à la2e sous-section du1er département de la3e direction du KGB, à l'intérieur de l'URSS, et à la sécurité interne du renseignement extérieur du KGB, la section « K » de la Première direction principale, dans les ambassades, consulats, délégations, etc.). Concernant lapolice, est créée en 1982 au sein de la3e direction la section « M », chargée de la lutte contre la corruption au sein des forces armées (y compris la police). Le KGB a donc en premier un moyen d'interférer dans le travail de ces deux organisations concurrentes.
D'autre part, le KGB peut doubler ses deux concurrents. En effet, rien n'interdit au KGB de collecter des renseignements militaires ; c'est même un de ses rôles, et ainsi il concurrence le GRU dont c'est la mission. Et rien n'interdit non plus au KGB d'enquêter (ce qui est aussi un de ses rôles) dans les affaires de crime organisé, de terrorisme ou de lutte contre la corruption, doublant ainsi leMVD (ministère de l'Intérieur, police).
La chute de l'URSS en 1991 change la donne, et le KGB est divisé en plusieurs services indépendants : l'ex-direction du renseignement extérieur du KGB (1re Direction générale) devient le SVR, service de renseignement extérieur. Le service de protection des personnalités est désormais directement rattaché au président de la fédération de Russie, il se nomme le FSO, tout comme un autre service beaucoup moins connu, le GUSP (Direction principale des programmes spéciaux, en fait l'ex-15e direction du KGB, chargée de la construction desbunkers protégeant les dirigeants en cas de guerre).
LeGRU ne voit pas son statut modifié, de son côté, tandis que les services chargés de la création des codes secrets (8e direction du KGB) et du cassage des codes utilisés par les adversaires (16e Direction générale) sont rassemblés dans un service fédéral, laFAPSI. Enfin, le KGB perd ses pouvoirs d'instruction, et ses unités d'élite entrent dans le giron du concurrent, le ministère de l'Intérieur. Les services chargés de la sécurité intérieure (protection des secrets économiques, industriels, du contre-espionnage, de la sécurité des transports, antiterrorisme et lutte contre lecrime organisé) sont rassemblés dans le FSK, lequel, insécurité puisguerre de Tchétchénie aidant, regagne très vite ses pouvoirs d'instruction et d'écoutes (dès 1993). En remplacement du FSK est créé en 1995 leService fédéral de sécurité de la fédération de Russie (FSB), avec les mêmes missions. Les unités d'élite reviennent dans le giron du FSB cette année-là, et en 2003, les gardes-frontières sont rendus au FSB[34].
Cette nation à une très longue tradition dans le renseignement remontant auMoyen Âge. Toutefois, ce n'est que depuis 1909 que ses services ont une existence continue. Les services britanniques contemporains sont les suivants :
Le SIS et le GCHQ ont la particularité d'être des services de recherche de renseignement, mais pas d'analyse, qui est faite par le client.
Durant la Seconde Guerre mondiale, leSpecial Operations Executive (SOE) fut un acteur important de la guerre secrète. Un service duForeign Office, l'Information Research Department (« département de recherche de renseignement »), fondé en 1948, fut dissous en 1977.
EnIsraël, leShabak est le principal service de renseignement intérieur. À l'extérieur, le service principal est leMossad (1951) ; il gère le renseignement, l'antiterrorisme et les actions clandestines hors des frontières d'Israël. Ce service s'est notamment fait connaître du public par le kidnapping ducriminel de guerre naziAdolf Eichmann en 1960.
À l'étranger, les objectifs du Mossad sont prioritairement les pays arabes et le terrorisme auMoyen-Orient. Ce service est reconnu dans le monde pour sa grande capacité de collecte, basée sur un large réseau d'informateurs issus notamment de ladiaspora juive.
Notons aussi l'Aman, renseignement militaire israélien, ainsi que le « Nativ », chargé du renseignement en direction des pays d'Europe de l'Est[réf. nécessaire] [Information douteuse] ; leMalmab pour la sécurité militaire intérieure (contre-espionnage militaire) et leLakam, chargé du renseignement scientifique.
Héritier duDeuxième Bureau et duBCRA de la Résistance, leService de documentation extérieure et de contre-espionnage (SDECE) est fondé en 1946 et remplacé en 1982 par laDirection générale de la Sécurité extérieure (DGSE) chargée du renseignement humain et technologique hors des frontières françaises.
Le renseignement intérieur était géré principalement par laDirection de la surveillance du territoire (DST, contre-espionnage et antiterrorisme) et en partie par laDirection centrale des Renseignements généraux. Au, ces deux services ont été remplacés par laDirection centrale du renseignement intérieur (DCRI) qui devient le, ladirection générale de la Sécurité intérieure (DGSI). Leservice central du renseignement territorial (SCRT) remplace les anciens Renseignements généraux. Le SCRT est par la suite remplacé par ladirection nationale du renseignement territorial (DNRT).
Au niveau international, les services français sont reconnus pour leur compétence dans le renseignement lié auxpays arabes et critiqués parfois pour leur travail d'espionnage industriel, en direction notamment des États-Unis[35].
Fondé en 1983, leGuoanbu ou ministère de la sécurité de l'État est probablement le principal service de renseignement extérieur et de contre-espionnage de larépublique populaire de Chine. Il est aussi chargé des gardes-frontières et de la lutte contre les opposants politiques.

Les activités du renseignement sont le thème principal duroman d'espionnage, ungenre littéraire né au début duXXe siècle. Ce genre est communément assimilé à un sous-genre duroman policier, à tort selon certains spécialistes qui le rattachent à la « fiction militaire », voire à la « fiction politique ».
L'origine de ce genre est communément rattachée à des auteurs britanniques. Ce sont encore ces écrivains qui influenceront l'évolution du genre, faisant persister « l'hégémonie britannique sur le roman d'espionnage » jusqu'à nos jours.
Au sens moderne du terme, le roman d'espionnage est un roman (une fiction) ayant pour cadre principal le « monde du secret » : celui des services de renseignement modernes, des opérations militaires spéciales, des opérations clandestines des États, des espions professionnels… Ces romans ont généralement pour trame historique le cadre géopolitique contemporain (actuel).
Une distinction importante est faite entre les romans réalistes (souvent écrits par d'anciens professionnels du renseignement) et les romans dits « fantastiques » (ou fantaisistes), dans lesquels les principes et les méthodes décrits ne correspondent pas au monde réel du renseignement. À l'exemple de la série James Bond, ces derniers romans s'inscrivent dans un univers commun de l'espionnage véhiculant de nombreux clichés.
Le roman d'espionnage est communément associé à des productions commerciales (roman populaire) sans aucune valeur littéraire. Gabriel Veraldi souligne particulièrement la persistance de ce préjugé dans la culture française, à l'opposé de la culture anglo-saxonne : peut-être en raison d'une différence culturelle dans le jugement des activités d'espionnage, mais aussi certainement d'un contexte différent entre le monde de l'édition anglo-saxonne et celui de l'édition française.

Le film d'espionnage est ungenre cinématographique lié à l'espionnage de fiction, dans un traitement réaliste ou comme base fantaisiste. De nombreux romans d'espionnage ont été adaptés au cinéma, même si dans de nombreux cas (telJames Bond) le ton général des œuvres a été modifié.
Le film d'espionnage apparaît avec lecinéma muet, dans le contexte paranoïaque de la littérature d'invasion et le début de laPremière Guerre mondiale. On trouve ainsi les filmsbritanniquesThe German Spy Peril[36] (1914) etO.H.M.S.[37] (1913).
Alfred Hitchcock popularisa ultérieurement le film d'espionnage dans les années 1930 avec ses thrillersL'Homme qui en savait trop (1934),Les 39 marches (1935),Agent secret (1936) etUne femme disparaît (1938).
La popularité des films d'espionnage est souvent considérée à son apogée durant les années 1960, quand les craintes de laguerre froide correspondaient avec le désir des spectateurs de trouver de l'excitation et du suspense dans les films. À cette époque apparaissent d'un côté des films réalistes comme l'adaptationL'Espion qui venait du froid (1963), de l'autre côté des films fantaisistes comme la série des James Bond à partir de 1962.
Les films d'espionnage connurent un regain d'intérêt à la fin des années 1990, bien que ceux-ci furent plutôt des films d'action avec des éléments d'espionnage, ou des comédies.
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