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| Sépulture | Cimetière du Père-Lachaise, Grave of Radiguet(d) |
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Raymond Radiguet est unécrivain etpoètefrançais né le àSaint-Maur-des-Fossés (Seine) et mort le àParis.
Talent très précoce, il a écrit deux romans ayant connu un grand succès critique et populaire,Le Diable au corps etLe Bal du comte d'Orgel, publiés alors qu'il abordait la vingtaine.
Né en juin 1903, Raymond Maurice Radiguet est l'aîné des sept enfants de Jeanne Marie Louise Tournier (1884-1958) et deMaurice Radiguet (1866-1941), illustrateur humoristique.
Après l'école communale, Raymond passe l’examen des bourses et entre aulycée Charlemagne, àParis. Considéré d'abord comme un bon élève sauf dans les disciplines artistiques, il obtient ensuite des résultats scolaires médiocres qui le décident à quitter le lycée en 1914 pour faire l’école buissonnière. Il s’adonne entièrement à la lecture dans la bibliothèque familiale, dévorant les écrivains desXVIIe et XVIIIe siècles, notammentLa Princesse de Clèves deMadame de La Fayette, puisStendhal,Proust, et enfin les poètesVerlaine,Mallarmé,Rimbaud,Lautréamont[1].
En, âgé de quatorze ans, Raymond Radiguet rencontre Alice Saunier (1893-1952), jeune institutrice de dix ans son aînée. C'est une voisine de ses parents qui la chargent de lui donner des leçons particulières[2]. Elle est fiancée avec Gaston Serrier[3], alors au front, dans les tranchées. Sa liaison avec l'adolescent ne dure qu'un an, mais Radiguet s'en inspirera, en 1921, pour écrireLe Diable au corps[4].

En 1918, à15 ans, Radiguet abandonne définitivement ses études et se lance dans lejournalisme. En portant les dessins de son père au journalL'Intransigeant, il rencontre son rédacteur en chef, le poèteAndré Salmon, et lui soumet quelques poèmes[1]. Il se lie avecMax Jacob,Pierre Reverdy,François Bernouard (futur éditeur, en 1920, de ses poèmesLes Joues en feu). Il fait également la connaissance des peintresJuan Gris,Pablo Picasso,Amedeo Modigliani,Jean Hugo, et fréquente les jeunes compositeurs, dontDarius Milhaud (avec qui il crée plus tard la pantomime célèbreLe Bœuf sur le toit),Georges Auric,Francis Poulenc,Arthur Honegger.
Aux débuts duCanard enchaîné, il signe quelques contes sous le pseudonyme de Rajky[6] et publie, sous le même pseudonyme, quelques dessins humoristiques dansL'Intransigeant etLe Rire[7]. Tout en étant journaliste pourL'Éveil etL’Heure, il continue à composer des poèmes[8]. Il en publie quelques uns, sous son pseudonyme puis sous son nom, dans la revueSIC entre et[9].

En juin 1919[11], Radiguet fait la rencontre deJean Cocteau par l'intermédiaire du poète et romancierMax Jacob. C'est le début d'une relation intense et passionnée entre les deux hommes, qui deviennent amants et s'influencent mutuellement sur le plan littéraire jusqu'à la mort prématurée de Radiguet en 1923. La romancière Monique Lange évoque « le passage météorite de Raymond Radiguet dans la vie de Cocteau »[12].
Plusieurs femmes ont également parrainé la brève carrière de Radiguet dans le milieu littéraire et artistique :Eugénie Cocteau (la mère de Jean),Misia Sert etCoco Chanel[13].
Enthousiasmé par les poèmes que Radiguet lui lit, Cocteau le conseille, l’encourage et le fait travailler. Il l’aide ensuite à publier ses vers dans des revues d’avant-garde, notamment dansLittérature, et le présente au secrétaire général duQuai d'Orsay, son amiPhilippe Berthelot.
Au cours de l'année 1920, Radiguet et Cocteau collaborent à plusieurs reprises, notamment autour de l'écriture de la pièceLe Gendarme incompris ou encore du livret d’opéra-comiquePaul et Virginie, dontÉrik Satie doit composer la musique[14]. En mai de la même année, ils co-fondent la revue fantaisiste et avant-gardiste anti-dadaïsteLe Coq, à laquelle participent notammentGeorges Auric, le peintreRoger de La Fresnaye,Paul Morand etTristan Tzara. Radiguet fait paraître dans le premier numéro un article qui débute par ces mots imprimés en capitales :« DEPUIS 1789 ON ME FORCE À PENSER. J’EN AI MAL À LA TÊTE. » Cocteau y publie des vers et cette critique de la critique :« La critique compare toujours. L’incomparable lui échappe. »
Vers 1921, Radiguet abandonne la vie tumultueuse qu’il menait depuis quelques années et s’impose une forte discipline intérieure.« Rien de moins ordonné que sa vie extérieure », écrit plus tard son amiJoseph Kessel,« mais rien de plus harmonieux, de plus équilibré, de mieux construit et de mieux protégé que sa vie intérieure. Il peut traîner de bar en bar, ne pas dormir des nuits entières, errer de chambre en chambre d’hôtel, son esprit travaillait avec une lucidité constante, une merveilleuse et sûre logique. »

En, àPiquey, loin de Paris, où l’avait entraînéJean Cocteau, Radiguet termineLe Diable au corps.
En 1922, auLavandou cette fois, mais toujours avec Cocteau et ses amis, il écrit son deuxième et dernier roman,Le Bal du comte d'Orgel. Il y raconte l'histoire d'un amour chaste entre un étudiant et une femme de la noblesse, Mahaut d’Orgel. L'intrigue s'inspire de la déception de l'auteur avec la peintreValentine Hugo[16]. Néanmoins, si la figure du comte est inspirée par son ami le comteÉtienne de Beaumont qui donnait des ballets et des fêtes somptueuses connues duTout-Paris, certains historiens voient dans la relation entre l’étudiant et le comte une attirance non-explicite qui s'inspirerait de celle de Cocteau et Radiguet, faisant alors de l'histoire un triangle amoureux.
En 1923,Bernard Grasset lanceLe Diable au corps de façon spectaculaire, sur le thème :« le premier livre d’un romancier de17 ans ». Devant une telle publicité, qu’elle juge de mauvais goût, la critique est surprise, voire moqueuse et hostile. Mais, après la publication, Radiguet reçoit de chaleureuses félicitations d’écrivains tels queMax Jacob,René Benjamin,Henri Massis etPaul Valéry.
Le jeune écrivain écrit dansLes Nouvelles littéraires le jour même de la publication de son roman, le, un article dans lequel il affirme que son roman qui puise pourtant dans sa vie est« une fausse biographie » :
« Ce petit roman d'amour n'est pas une confession […] On y voit la liberté, le désœuvrement, dus à la guerre, façonner un jeune homme et tuer une jeune femme […] le roman exigeant un relief qui se trouve rarement dans la vie, il est naturel que ce soit justement une fausse biographie qui semble la plus vraie[17]. »
Le livre, écrit dans un style très simple, dépouillé de tout effet[16], est un grand succès de librairie et plus de cent mille exemplaires sont vendus en trois mois[18].
Avant sa mort prématurée, Radiguet a eu plusieurs relations amoureuses. Entre avril 1917 et août 1918, il a une liaison avec l'institutrice Alice Saunier, qui a inspiré le personnage de Marthe duDiable au corps. En 1920, il entretient une relation avec la poétesseBeatrice Hastings, après que celle-ci lui déclare son amour dans de nombreuses lettres. De juin 1921 à mai 1922, l'écrivain relationne avec l'artiste Mary Beerbohm. En 1923, il rencontreBronia Perlmutter, mannequin chezPoiret et future épouse deRené Clair[19],[20], qu'il parle d'épouser.
Bisexuel, Radiguet a également eu une relation aujourd'hui reconnue[21] bien qu'encore contestée avec Jean Cocteau. Après leur rencontre en 1919, les deux hommes deviennent amants. En 1922,André Gide entre en rivalité avec Cocteau pour obtenir les faveurs du jeune écrivain. Quand Cocteau sort favori de cette brouille, il fait parvenir à Gide la dédicace suivante : « À mon ennemi Gide, son ami Jean Cocteau ».
Les années 1920 constituent un tournant dans la perception de l’homosexualité masculine en France avec la publication deSodome et Gomorrhe de Marcel Proust en 1922,Le Corydon d'André Gide en 1924, ou encoreLe Livre blanc de Jean Cocteau en 1928. Dans ce contexte, une scène homosexuelle se développe, notamment dans les milieux artistiques. Cependant, l'homophobie latente empêche Radiguet de vivre sereinement sa relation avec Cocteau. Il déclare à ce sujet « Je ne veux pas qu’on m’appelle Madame Cocteau » et a des liaisons avec des femmes en parallèle. En 1919, il nourrit une fascination à sens unique qu'il cache à Cocteau pour la peintreIrène Lagut[22]. Il entretient également une relation avec Valentine Hugo, que Cocteau lui présente lors du bal qui suit la première dePulcinella le 15 mai 1920. Malgré ces complications, les deux hommes restent amants jusqu'à la mort précoce de Radiguet en 1923. Cocteau rédige d'ailleurs une préface pour le deuxième roman du jeune écrivain,LeBal du comte D’Orgel, publié à titre posthume, dans laquelle il exprime toute son admiration.

À la suite d'une baignade (dans laSeine selon certaines sources[23] mais en fait dans lebassin d'Arcachon[24]), Raymond Radiguet meurt emporté par unefièvre typhoïde mal diagnostiquée par le médecin de Cocteau[8], le[25].
Il est enterré àParis aucimetière du Père-Lachaise (56e division).
Le Bal du comte d'Orgel est publié en 1924 parBernard Grasset. Dans sa préface,Jean Cocteau, qui a pris part à la correction des épreuves du roman, évoque les derniers jours du jeune écrivain :
« Voici ses dernières paroles :
« Écoutez, me dit-il le 9 décembre, écoutez une chose terrible. Dans trois jours, je vais être fusillé par les soldats de Dieu. » Comme j’étouffais de larmes, que j’inventais des renseignements contradictoires : « Vos renseignements, continua-t-il, sont moins bons que les miens. L’ordre est donné. J’ai entendu l’ordre. »
Plus tard, il dit encore : « Il y a une couleur qui se promène et des gens cachés dans cette couleur. »
Je lui demandai s’il fallait les chasser. Il répondit : « Vous ne pouvez pas les chasser, puisque vous ne voyez pas la couleur. »
Ensuite, il sombra.
Il remuait la bouche, il nous nommait, il posait ses regards avec surprise sur sa mère, sur son père, sur ses mains.
Raymond Radiguet commence. »

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