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Raphaël Geminiani

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Raphaël Géminiani
Raphaël Geminiani lors duTour de France 1954.
Informations
Nom dans la langue maternelle
Raphaël GeminianiVoir et modifier les données sur Wikidata
Nom de naissance
Raphaël Dominique Jean GeminianiVoir et modifier les données sur Wikidata
Surnom
Le grand fusil
Naissance
Décès
Sépulture
Nationalité
Équipes professionnelles
Équipes dirigées
Principales victoires
3 classements annexes sur un grand tour
Classement de la montagne du Tour de France1951
Classement de la montagne du Tour d'Italie1952 et1957
7 étapes dans les grands tours
Tour de France (7 étapes)
1 championnat
Champion de France sur route 1953

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Raphaël Geminiani, également connu sous le nom deGéminiani[1], né le àClermont-Ferrand (Puy-de-Dôme) et mort le àPont-du-Château, est un coureurcyclistefrançais. Professionnel de 1946 à 1960, il remporte sept étapes duTour de France, dont il se classe deuxième en1951 et troisième en1958.Champion de France en 1953, il brille surtout sur lescourses par étapes, et figure parmi les 25 coureurs ayant porté le maillot de leader sur les troisgrands tours.

Pratiquant d'abord le rugby, Raphaël Geminiani travaille dans l'atelier de cycles de son père et suit finalement les traces de son frère aîné Angelo, également cycliste. Il se révèle en remportant lePremier pas Dunlop en 1943 et passe professionnel trois ans plus tard au sein de la formation Métropole-Dunlop dirigée parRomain Bellenger. Il participe à son premier Tour de France en1947.

Excellentgrimpeur, Raphaël Geminiani remporte leGrand Prix de la montagne du Tour de France en 1951 etcelui du Tour d'Italie en1952 et1957. Fidèle équipier, il est un élément de base de l'équipe de France dans lesannées 1950, et accompagneLouison Bobet dans ses troisTour de France victorieux entre1953 et1955. À la fin de sa carrière, il devient directeur sportif et conduit notammentJacques Anquetil à la victoire sur le Tour.

Reconnu pour sa hargne et sa ténacité à vélo, Raphaël Geminiani est avant tout un attaquant infatigable, et ses accélérations répétées lui valent le surnom de« Grand Fusil » que lui attribue Louison Bobet. Personnage haut en couleur, volubile, ses contemporains lui accordent un sens aigu de l'amitié, mais il est aussi reconnu pour son acuité dans les affaires : à l'instar deFiorenzo Magni en Italie, Geminiani est le premier à introduire la publicité extra-sportive dans le cyclisme français en associant son nom à celui de la marque d'apéritifSaint-Raphaël pour fonder l'équipe Saint-Raphaël en 1954.

Biographie

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Jeunes années

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Vue d'une ville dominée par une cathédrale en pierre noire.
Clermont-Ferrand, la ville de naissance de Raphaël Geminiani.

Raphaël Geminiani naît le àClermont-Ferrand, de parents italiens installés dans cette ville en 1923 après avoir fui lerégime fasciste[2]. Son père, Giovanni Geminiani, né en 1893, est un ancien coureur cycliste. Il dirigeait une fabrique de bicyclettes àLugo, enÉmilie-Romagne, incendiée par lesmiliciens qu'il refusait de soutenir. Dès son arrivée à Clermont-Ferrand, il est employé commeajusteur au sein des usinesMichelin, tandis que sa femme travaille à la filature de cette même entreprise[2]. Les époux Geminiani ont quatre enfants : le frère aîné, Angelo, naît en 1917, sa sœur Paule en 1921, tandis qu'une autre fille naît après Raphaël, Rose-Marie, en 1931[2].

Leur mère meurt alors que Raphaël Geminiani n'est âgé que de huit ans. Giovanni Geminiani ouvre un atelier de cycles, avenue Barbier-Daubrée à Clermont-Ferrand, atelier dans lequel Raphaël commence à travailler en 1936 après avoir obtenu soncertificat d'études[3].

Durant sa jeunesse, Raphaël Geminiani pratique d'abord lerugby à XV[4], sport qu'il décrit comme sa passion :« Je vais sans doute surprendre en disant que, si je suis un homme de vélo passionné, ma passion est le rugby. »[5]. Inscrit à l'école des établissements Michelin[4], il est licencié à l'Association sportive montferrandaise où il jouetrois-quarts centre et côtoie les futursinternationaux françaisFranck Fournet etMaurice Siman[5]. C'est en voyant son frère aîné obtenir quelques succès au niveau régional qu'il est finalement tenté par le cyclisme, mais son père le dissuade en raison de son physique (il est trop maigre), d'autant plus qu'il a besoin de lui pour travailler à l'atelier[4].

En 1942, Giovanni Geminiani accepte finalement que son fils Raphaël s'inscrive à l'Union cycliste montferrandaise, dans la catégorie desnon-licenciés. Dès lors, ce dernier s'entraîne assidument en suivant les conseils de son frère, avant de signer sa première licence à l'Amicale cycliste clermontoise en 1943[4].

Débuts cyclistes

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Raphaël Geminiani remporte quelques succès dès ses premières courses, mais dépourvu de connaissances tactiques, il court sans retenue, ce qui lui vaut aussi des échecs retentissants. Son père Giovanni, qui promeut son entreprise de cycles en équipant des coureurs débutants de la région, assure la préparation de son matériel. Il le met aussi au défi de se qualifier pour la finale duPremier pas Dunlop, et d'y briller. Il voit cette épreuve, qui fait alors office de championnat de France juniors, comme un examen de passage pour savoir si son fils peut envisager de faire une carrière cycliste[6].

À cette époque, Raphaël Geminiani peaufine son entraînement en travaillant pour les services du ravitaillement : il porte ainsi aux mairies des villages environnants deClermont-Ferrand leurs lots detickets de rationnement mensuels, au prix de deux francs du kilomètre[7].

Vainqueur d'un critérium des Espoirs, disputé sur trois manches, il se qualifie ensuite pour le Premier pas Dunlop en prenant la troisième et dernière place qualificative de la finale régionale. La grande finale se déroule le, àMontluçon. Raphaël Geminiani attaque dans la dernière difficulté, à une quinzaine de kilomètres de l'arrivée et s'impose en solitaire.Louison Bobet, son futur rival et coéquipier, est sixième de cette course[8].

Cette victoire lui permet de disputer le championnat de France amateur, au mois d'août suivant, àMontauban. Bien qu'il n'ait jamais disputé de course aussi longue (170 kilomètres), il prend part à la grande échappée du jour, rejointe à seulement 30 km de l'arrivée, avant de connaître une défaillance[9].

L'année suivante, Raphael Geminiani gagne la course de côte de l'omnium de la route, devant son frère Angelo. Celui-ci met fin à sa carrière en cours d'année, à seulement 28 ans, à la suite d'une chute qui lui cause une fracture dufémur, au Grand Prix deChamalières[10]. En, Raphaël Geminiani est conduit par lamilice à la prison deClermont-Ferrand lors de la rafle du quartier de la Plaine. Il en sort quelques semaines plus tard, à laLibération[11],[12].

Poussé par son père, il nourrit l'ambition de devenir coureur professionnel. Dans le même temps, il poursuit son travail à l'atelier[13]. Lors de lasaison 1945, il dispute des courses de plus en plus relevées afin de progresser. Outre ses huit victoires dans des épreuves régionales, il se classe huitième du Grand Prix des Alpes remporté parÉdouard Fachleitner[14]. Une chute en descente au championnat d'Auvergne le contraint à arrêter sa saison[15].

Carrière professionnelle

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Premières saisons et découverte du Tour de France (1946-1948)

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Photographie en noir et blanc.
Romain Bellenger (ici en 1929), premier directeur sportif de Geminiani.

Au début de lasaison 1946, l'ancien coureur professionnelRomain Bellenger, directeur sportif de l'équipe Métropole, lui propose une mise à l'essai. Ses premiers résultats sont plutôt médiocres, mais il se distingue en remportant àChambéry la première étape duCircuit des six provinces, dont il se classe finalement troisième. Bellenger lui fait alors signer son premier contrat professionnel[16]. Geminiani connaît ensuite une série de déceptions : en tête du Grand Prix du Vercors en compagnie dePierre Molinéris, il perd toute chance de victoire quand l'axe de sa roue arrière se brise et doit se contenter de la10e place. Quelques jours plus tard, il abandonne dans la deuxième étape de laRonde de France, blessé au genou par le choc d'une valise dans les vestiaires avant la course. Il remporte néanmoins douze victoires sur des épreuves régionales[17].

Raphaël Geminiani obtient sa première sélection pour leTour de France en1947, au sein de l'équipe Centre-Sud-Ouest. Piégé dans la première étape versLille, il perd plus de 20 minutes sur le vainqueurFerdi Kübler. Le lendemain, il prend part à l'échappée victorieuse versBruxelles, mais il en décroche en cours d'étape et son retard au classement général s'accentue d'un quart d'heure. Dans la troisième étape, il souffre de la chaleur, comme de nombreux coureurs, mais parvient à rallier l'arrivée grâce à l'aide de son compagnon d'infortune,Lucien Teisseire. Il vit un nouveau calvaire dans la quatrième étape, après avoir bu de l'eau non potable. Il finit l'étape mais doit être hospitalisé àStrasbourg, ce qui le contraint à l'abandon[18]. Cette première participation décevante lui vaut de nombreuses critiques et Geminiani envisage un temps de mettre un terme à sa carrière. Comme la saison précédente, il retrouve sa condition sur des épreuves régionales de moindre importance, vainqueur notamment de la Ronde d'Auvergne[19].

Son début desaison 1948 est assez pauvre en résultats, excepté une3e place à laPolymultipliée deChanteloup-les-Vignes. Geminiani est pourtant sélectionné sur leTour de France, toujours au sein de l'équipe régionale Centre-Sud-Ouest. Tout au long de l'épreuve, il est d'une aide précieuse pour son leaderGuy Lapébie, finalement3e de la course, et parvient à se distinguer sur quelques étapes. Il se classe notamment5e àLourdes, après avoir gravi lecol d'Aubisque en compagnie des meilleurs. Auteur d'une course régulière, Geminiani termine ce Tour à la15e place du classement général, ce qui lui vaut d'être accueilli en héros à son retour àClermont-Ferrand[20].

Première victoire d'étape sur le Tour (1949)

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Photographie en noir et blanc d'un peloton de coureurs roulant en ville, acclamés par la foule.
Le peloton du Tour de France 1949.

En 1949, Raphaël Geminiani est retenu parGeorges Cuvelier, directeur technique de l'équipe de France, pour disputer leTour de France dans un rôle d'équipier, malgré un début de saison assez terne : vainqueur duTour de Corrèze et troisième duGrand Prix du Midi libre, il avait été contraint à l'abandon sur leCritérium du Dauphiné libéré, souffrant des genoux[21].

Dans les premiers jours de la Grande Boucle, Geminiani obtient plusieurs places d'honneur tandis que l'équipe de France connaît une série de déceptions. Cinquième de la troisième étape àBoulogne-sur-Mer, puis de la dixième étape versPau, il remporte son premier succès sur l'épreuve en s'imposant àColmar, lors de la dix-neuvième étape, au terme d'une échappée menée en compagnie deJean-Marie Goasmat. Raphaël Geminiani termine finalement au25e rang du classement général[21].

Sa saison s'achève tristement : une violente chute sur la piste du vélodrome deCaen, où il se produit derrière une moto, lui cause une fracture de l'os sphénoïde et quinze jours d'hospitalisation[22].

Co-leader de l'équipe de France (1950-1951)

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Geminiani affiche une grande condition dès le début de lasaison 1950 : très offensif sur leCritérium national, il se classe deuxième duGrand Prix du Midi libre puis remporte laPolymultipliée. Dès lors, il exige de figurer parmi les coureurs protégés au sein de l'équipe de France pour le prochainTour, ce que le nouveau sélectionneurJean Bidot accepte[23].Louison Bobet et lui se présentent donc comme les fers de lance de l'équipe, et lors des premières étapes, Geminiani participe à plusieurs échappées qui lui permettent de prendre de l'avance sur les favoris. Au soir de la première étape pyrénéenne versSaint-Gaudens, alors que l'ensemble des coureurs italiens se retirent, il se hisse au deuxième rang du classement général, à moins d'une minute deFerdi Kübler. Il recule les jours suivants, mais se montre offensif dans la traversée des Alpes. Vainqueur de la dix-septième étape àGap, il accélère de nouveau le lendemain dans l'ascension ducol de Vars, tandis qu'un orage éclate. Il sert alors de point d'appui à l'attaque de Louison Bobet dans lecol d'Izoard, qui s'impose à l'arrivée et effectue un rapproché au classement général. Jouant l'équipier pour Bobet, Geminiani profite de sa défaillance en fin d'étape versSaint-Étienne pour porter une attaque dans les derniers kilomètres ducol de la République. Vainqueur pour la deuxième fois en trois jours, il remonte lui aussi au classement général et achève finalement ce Tour au4e rang, tandis que Bobet monte sur la troisième marche du podium[24].

Photographie en noir et blanc d'un cycliste vêtu d'un maillot frappé de la croix suisse et portant l'inscription La Perle.
Hugo Koblet devance Geminiani sur le Tour 1951.

En 1951, Raphaël Geminiani accumule les succès : vainqueur duGrand Prix du Midi libre et de laPolymultipliée, il s'impose également dans la septième et dernière étape duCritérium du Dauphiné libéré àGrenoble malgré deux chutes dans la descente ducol de Porte[25]. De nouveau sélectionné pour leTour au sein de l'équipe de France, il y affiche une forme étincelante en remportant la neuvième étape chez lui, àClermont-Ferrand[26]. Pour autant, il ne peut rien devant la supériorité d'Hugo Koblet : déjà vainqueur du contre-la-montre àAngers, puis auteur d'une démonstration en solitaire versAgen, le Suisse s'empare du maillot jaune dans les Pyrénées[27], et malgré les attaques répétées de Geminiani, notamment sur les pentes dumont Ventoux lors de la dix-septième étape, il remporte l'épreuve.

La forme de Geminiani décline en fin de Tour, mais il parvient à conserver la deuxième place du classement général devant un autre Français,Lucien Lazaridès, tout en s'adjugeant leGrand Prix de la montagne[28].

Au terme de la saison, Raphaël Geminiani souhaite quitter la formation Métropole qui lui refuse une revalorisation et avec laquelle il est pourtant lié jusqu'à la fin de l'année 1952. Il signe un contrat avec les cycles Terrot, mais à la suite d'une bataille juridique, son directeur Pierre Dion est exclu de l'Association des directeurs sportifs et Geminiani est placé sur la liste noire par les responsables des marques françaises, qui s'interdisent de l'engager. Sollicité parFausto Coppi, il rejoint alors avec la formation italienneBianchi[29].

La découverte du Tour d'Italie (1952)

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Photographie en noir et blanc d'un peloton cycliste en course.
Raphaël Geminiani mène le peloton sur une étape du Tour 1952.

Raphaël Geminiani brille tout d'abord surMilan-San Remo, dont il se classe quatrième après avoir animé la course. Son contrat lui laissant toute liberté de courir en France, en dehors de ses engagements italiens, c'est ainsi qu'il remporte leCircuit boussaquin, comme deux ans plus tôt, malgré l'alliance d'autres coureurs contre lui[30].

Pour la première fois de sa carrière, il prend le départ duTour d'Italie. Équipier modèle de son leader, Fausto Coppi, Raphaël Geminiani l'épaule sur les principales étapes de montagne, notamment dans la traversée desDolomites, et tandis que Coppi remporte le classement général, Geminiani gagne leGrand Prix de la montagne[31].

Numéro un de l'équipe de France en l'absence de Louison Bobet, blessé, Raphaël Geminiani aborde leTour 1952 avec de grandes ambitions. Pourtant, dans la cinquième étape versNamur, il s'épuise dans la défense du maillot jaune de son coéquipierNello Lauredi et subit une grave défaillance[32]. Écarté du jeu pour le gain du Tour, il se console en remportant deux étapes : il gagne tout d'abord àMulhouse, dans la huitième étape, après s'être échappé sur les pentes duBallon d'Alsace, puis s'impose àBagnères-de-Bigorre, dans la dix-septième étape[33]. Il est finalement onzième de ce Tour de France, à plus d'une heure de Coppi[34].

Champion de France (1953)

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Photographie en noir et blanc d'un cycliste en course.
Raphaël Geminiani en plein effort au milieu desannées 1950.

En 1953, Geminiani signe un contrat avec la marque française Rochet, qui s'engage en contrepartie à lancer sur le marché, à titre d'essai, les cycles Geminiani. Plutôt discret lors des premières épreuves de la saison, il affiche une bonne condition surParis-Roubaix. Longtemps en course pour la victoire, il doit abandonner en raison d'un bris de cadre[35]. Pour la première fois, une équipe nationale française s'aligne sur leTour d'Italie. Dirigée comme sur le Tour de France parMarcel Bidot, elle est bâtie autour de ses deux leaders, Louison Bobet et Raphaël Geminiani. Ce dernier ne connaît pas la même réussite que l'année précédente : il n'obtient, au mieux, qu'une quatrième place dans l'étape entreVicenza etAuronzo di Cadore, et se classe finalement30e duGiro, loin deFausto Coppi, vainqueur de l'épreuve pour la cinquième fois[36].

Les efforts produits en Italie lui permettent néanmoins de maintenir une condition physique étincelante et de briller sur les routes duCritérium du Dauphiné libéré. Placé les deux premiers jours, il gagne la troisième étape àAvignon, après s'être débarrassé de ses compagnons d'échappée dans la descente dumont Ventoux, rendue périlleuse par la pluie. Pour autant, il court de façon plus mesurée que par le passé, gérant mieux ses efforts. Il est finalement quatrième de ce Critérium, et présenté logiquement comme l'un des favoris au titre dechampion de France, disputé cette année-là àSaint-Étienne sur un parcours plus sélectif, avantageant les grimpeurs[37].

Tandis queLouison etJean Bobet profitent du ravitaillement àRive-de-Gier pour s'échapper, en compagnie deGilbert Bauvin, un groupe de quatre coureurs qui comprend notamment Geminiani etAntonin Rolland les rejoint dans la montée ducol de l'Œillon. À soixante kilomètres de l'arrivée, Geminiani place une accélération décisive. Seul en tête, il reste un temps sous la menace de Rolland, mais il parvient à maintenir un écart suffisant pour franchir la ligne en premier[38].

En bonne condition sur les premières étapes duTour de France, Raphaël Geminiani est cependant un ton au-dessous de Louison Bobet qui apparaît comme le véritable leader de l'équipe de France[39]. À la sortie des Pyrénées, la menace la plus sérieuse pour la victoire finale semble venir du vétéran bretonJean Robic : Marcel Bidot décide alors d'un mouvement de course d'envergure sur l'étape entreAlbi etBéziers. Dès le départ, des coureurs de l'équipe de France, parmi lesquels Bobet,Nello Lauredi et Geminiani, passent à l'offensive et creusent un écart important avec les autres favoris. Déjà relégué à près de dix minutes, Robic chute et perd toutes ses chances de victoire. Si l'opération est une réussite, elle fait naître des tensions dans l'équipe : Lauredi et Geminiani devancent Bobet sur la ligne d'arrivée, le privant ainsi de précieuses secondes de bonifications[40]. Grâce à l'intervention de Marcel Bidot, le conflit s'éteint et Bobet s'engage à céder l'ensemble de ses primes si ses équipiers l'aident à ramener lemaillot jaune à Paris, ce qu'il fait avec succès[41].

En fin de saison, Raphaël Geminiani est présenté comme l'un des favoris duchampionnat du monde qui se dispute àLugano. Il est le seul à suivreFausto Coppi quand ce dernier accélère dans la principale difficulté du parcours, mais une nouvelle attaque de ce dernier le fait céder : tandis que l'Italien remporte le titre mondial, Geminiani doit se contenter de la neuvième place[42].

Création de sa propre équipe (1954)

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Plaque émaillé portant le nom Saint-Raphaël écrit en rouge et l'inscription apéritif de France en noir.
La marque d'apéritifSaint-Raphaël sponsorise l'équipe de Raphaël Geminiani.

Au début desannées 1950, le contexte économique est peu favorable pour les marques de cycles, en proie à des difficultés financières. La firme Rochet, qui emploie Geminiani, lui impose une réduction de salaire qu'il n'accepte pas. Dominique Fonzi, constructeur de vélos installé àMontluçon, lui propose de courir sur des machines à son propre nom[43]. L'accord est conclu et Geminiani s'associe à la marque d'apéritifSaint-Raphaël pour créer l'équipe Saint-Raphaël-R. Geminiani[44]. Il suit ainsi l'exemple du coureur italienFiorenzo Magni qui, la même année, a conduit la première marque extra-sportive à créer son équipe, le fabricant de produits de soinNivea[45],[46].

Photographie en noir et blanc montrant des coureurs d'une même équipe alignés devant le peloton avant le départ d'une course.
L'équipe de France au départ du Tour 1954. Geminiani est le deuxième à droite.

Lasaison 1954 n'apporte pas les résultats escomptés. Blessé une première fois en début de saison, Geminiani souffre ensuite d'une fracture d'unevertèbre lombaire à la suite d'un accident sur leCritérium du Dauphiné libéré. Il peine à retrouver la forme mais reçoit tout de même sa sélection pour leTour de France, lors duquel il est d'une aide précieuse pourLouison Bobet, de nouveau vainqueur du classement général. Alors qu'uneinduration s'ajoute à ses douleurs lombaires, Geminiani choisit d'abandonner à l'issue de la dix-septième étape àGrenoble, et de ne pas repartir le lendemain[47].

L'homme des trois Grands tours (1955)

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Photographie en couleur d'un cycliste portant un maillot bleu-blanc-rouge.
Coéquipier de Geminiani,Jean Dotto gagne leTour d'Espagne 1955.

En 1955, Geminiani prend pour la première fois le départ duTour d'Espagne, au sein d'une équipe de France rassemblée et dirigée parSauveur Ducazeaux. Tandis que son coéquipierGilbert Bauvin remporte les deux premières étapes, Geminiani prend la tête du classement général à l'issue de la cinquième étape àLérida. Dès lors, les Italiens et les Espagnols s'allient contre lui, ce qui profite à son coéquipierJean Dotto qui prend la tête de laVuelta lors de la dixième étape àCuenca, en se glissant dans une échappée qu'Italiens et Espagnols laissent filer, trop occupés à surveiller Geminiani. À l'arrivée quelques jours plus tard, Dotto remporte le classement général et Geminiani se classe troisième, confirmant le succès de l'équipe de France, première au classement par équipes[48].

Moins d'une semaine après l'arrivée de laVuelta, Raphaël Geminiani s'aligne au départ duTour d'Italie. Au terme de la douzième étape àScanno, remportée parGastone Nencini, il devient le premier Français à endosser lemaillot rose. Il le perd trois jours plus tard dans le contre-la-montre versRavenne, mais peut toujours prétendre à la victoire finale car il n'accuse que 40 secondes de retard sur Nencini. Ses espoirs s'envolent à la veille de l'arrivée : dans le final versSan Pellegrino Terme, tandis qu'il accompagneFausto Coppi etFiorenzo Magni en tête de course, il est victime d'une crevaison, comme de nombreux coureurs derrière eux, sur une route fraichement empierrée[49].

Au départ duTour de France, Raphaël Geminiani sent le poids des efforts consentis sur les épreuves précédentes. Très discret dans les premières étapes, il assume pleinement son rôle d'équipier auprès deLouison Bobet dans la première alpestre versBriançon, accompagné d'Antonin Rolland qui prend lemaillot jaune[50]. Le lendemain versMonaco, Geminiani est distancé dans les premières ascensions du parcours, concédant plus de neuf minutes de retard à mi-course. Lancé à la poursuite deJean Robic, il refait peu à peu son retard et rejoint les hommes de tête, parmi lesquels figureCharly Gaul, au pied de la dernière difficulté du jour, la montée deLa Turbie. Gaul accélère le premier mais Geminiani le contre et s'isole en tête, avant de filer dans la descente pour remporter une nouvelle victoire d'étape sur le Tour de France[51]. Dans les Pyrénées, alors que Louison Bobet prend la tête du général, Geminiani assure la défense de cette position face aux assauts des grimpeurs comme Charly Gaul etJean Brankart : Bobet remporte son troisième Tour consécutif et Geminiani se classe finalement sixième[52]. À seulement quelques semaines d'intervalle, il réussit ainsi l'exploit de briller sur les troisGrands tours, une performance saluée par de nombreux suiveurs comme l'ancien vainqueur de la Grande BoucleAndré Leducq, qui en fait son favori pour l'année suivante[53].

En fin de saison, il se distingue une nouvelle fois auchampionnat du monde deFrascati, en Italie, finissant à la huitième place malgré une fringale[54].

Période de hauts et de bas (1956-1957)

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Photographie en noir et blanc d'un cycliste marchant à côté de son vélo.
Raymond Louviot (ici en 1943) dirige Geminiani au sein de l'équipe Saint-Raphaël en 1957.

La saison 1956 de Raphaël Geminiani est largement perturbée par une blessure au genou, causée par une chute au Grand prix d'Eibar. Au début du mois de mai, il doit même subir l'ablation duménisque de son genou droit. Rassuré sur sa condition après avoir mené une longue échappée en solitaire auTour du Luxembourg, Geminiani prend le départ duTour 1956 au sein d'une équipe de France divisée. En difficulté lors des premières étapes, disputées sur un rythme très élevé, il ne semble pas en mesure de jouer les premiers rôles et obtient son pire classement dans l'épreuve, avec une49e place finale. Dix jours après la fin du Tour, il remporte sa seule victoire de la saison auBol d'or des Monédières[55].

L'année suivante,Raymond Louviot prend la direction sportive de l'équipe Saint-Raphaël-R. Geminiani, renforcée par l'arrivée de jeunes coureurs commeRoger Rivière etGérard Saint. Avec son amiFerdinand Devèze, Raphaël Geminiani participe auTour de Côte d'Ivoire. Opposé à une faible concurrence, il gagne sept étapes, en plus du classement général. Comme en 1955, il souhaite ensuite participer aux troisGrands tours[56]. Entre-temps, au mois de février, il participe à la création du premier syndicat cycliste, l'Union des Cyclistes Professionnels Français, dontLouison Bobet est élu président[57].

Geminiani se classe cinquième et meilleur français duTour d'Espagne, avant de se mettre au service deLouison Bobet sur leTour d'Italie[58]. Alors que ce dernier est devancé parCharly Gaul etGastone Nencini au classement général, les coureurs français passent à l'offensive entreCôme etTrente, dans la dix-huitième étape, pendant que Gaul s'arrête pour satisfaire un besoin naturel. Le Luxembourgeois est repoussé à plus de huit minutes et le maillot rose échoit à Nencini qui a suivi l'attaque des Français. Ce dernier possède seulement 19 secondes d'avance sur Bobet au classement général, un écart pourtant suffisant car le Français ne parvient pas à distancer l'Italien dans les dernières étapes, malgré le soutien de Geminiani. Comme en1952, ce dernier remporte leGrand Prix de la montagne[59].

À l'instar de Louison Bobet, Raphaël Geminiani renonce finalement auTour de France. Engagé sur leTour de Suisse, il gagne le contre-la-montre par équipes et se classe deuxième d'une étape arrivant àBâle, avant d'abandonner en raison d'unebronchite. Comme la saison précédente, il s'adjuge leBol d'or des Monédières, mais n'est pas sélectionné pour lechampionnat du monde[60].

Un maillot jaune du Tour à l'écart de l'équipe de France (1958)

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En 1958, Raphaël Geminiani réussit son meilleur début de saison : vainqueur de la première étape duTour de Sardaigne, il se classe deuxième duGrand Prix de Monaco, quatrième deParis-Nice, dixième deMilan-San Remo, puis deuxième duCritérium national, où il favorise la victoire de son coéquipierRoger Hassenforder[61]. AuTour d'Italie, il prend part à de nombreuses échappées où il déploie toute son énergie, ce qui lui vaut des commentaires élogieux de la part des autres concurrents. Il se classe finalement huitième du Giro, sans pouvoir gagner d'étape[62]. Dans les jours qui suivent, il manque de peu de glaner un deuxième titre dechampion de France, seulement devancé au sprint par le tenant du titreValentin Huot[63].

Photographie en noir et blanc d'un cycliste portant une casquette à la visière relevée.
Adolphe Deledda (ici en 1954) dirige Raphaël Geminiani sur le Tour 1958.

Bien qu'il affiche une excellente condition physique, Raphaël Geminiani est écarté de l'équipe de France pour leTour 1958 par son directeur technique,Marcel Bidot, sous la pression deJacques Anquetil. Ce dernier, vainqueur sortant, se considère comme l'unique leader de l'équipe. Il accepte de courir avecLouison Bobet, triple vainqueur de l'épreuve, mais refuse la présence de son fidèle équipier Geminiani, craignant que leur proximité remette en cause son propre statut au sein de l'équipe[64]. Excédé, Geminiani laisse éclater sa colère et s'engage alors au sein de l'équipe régionale Centre-Midi, dirigée parAdolphe Deledda[65]. Avant le départ, il promet de mener la vie dure à l'équipe de France, et se fait photographier tenant un âne qu'il baptise Marcel[66].

Suivant les favoris lors des premiers jours de course, Raphaël Geminiani passe à l'offensive dans la sixième étape versSaint-Brieuc. Il s'emploie pour faire vivre l'échappée victorieuse et, s'il ne se mêle pas à la lutte pour la victoire d'étape, il prend plus de dix minutes d'avance sur le peloton[67],[68]. Deux jours plus tard, il obtient la sixième place dans le contre-la-montre deChâteaulin, dans un exercice qui n'est pas sa spécialité[67]. À l'issue de la première étape de montagne entreDax etPau, Geminiani fait bonne figure : présent dans le groupe des favoris à l'arrivée de l'étape, il endosse lemaillot jaune pour la première fois de sa carrière, avec seulement trois secondes d'avance surVito Favero[69]. Ce dernier le lui ravit dès le lendemain àLuchon : arrivé dans le même temps que Geminiani, il prend la deuxième place de l'étape derrièreFederico Bahamontes, ce qui lui permet d'empocher trente secondes de bonification et de prendre la tête du classement général[70].

Dans la dix-huitième étape, qui consiste en un contre-la-montre sur les pentes dumont Ventoux, Geminiani perd plus de six minutes sur le vainqueurCharly Gaul, mais il limite l'écart avec les autres favoris et reprend ainsi le maillot jaune[71]. Le lendemain, versGap, il place une attaque alors que Gaul vient de crever. Deuxième de l'étape derrièreGastone Nencini et devantJacques Anquetil, il profite de cette échappée pour repousser Gaul à plus de dix minutes[72]. Alors que la victoire finale lui semble promise, Geminiani s'effondre dans la dernière étape alpestre, versAix-les-Bains, disputée dans des conditions météorologiques difficiles[73]. Victime d'un incident mécanique dans l'ascension ducol de Porte, il s'épuise à rejoindre les autres favoris qui l'attaquent tour à tour[73]. À bout de forces, il ne peut contrer l'attaque de Charly Gaul et recule à la troisième place du classement général[74]. Il achève finalement le Tour à ce même rang, et monte ainsi sur le podium final pour la deuxième fois de sa carrière[75].

Fin de carrière (1959-1960)

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En début d'année 1959, Raphaël Geminiani et son jeune coéquipierRoger Rivière proposent àMarcel Bidot une « entente des quatre grands » du cyclisme français lors du prochainTour de France[76]. Mis devant le fait accompli,Jacques Anquetil etLouison Bobet acceptent, non sans préciser qu'ils s'y estiment contraints, mais cet accord de principe vole en éclats lors d'une discussion entre les quatre coureurs[77]. À l'approche du départ, Marcel Bidot les réunit à nouveau et finit par obtenir un accord que personne ne croit tenable[78].

Entre-temps, Geminiani peaufine sa préparation sur leTour d'Espagne, qu'il abandonne avant la dernière étape : victime d'une chute, il souffre d'un déplacement de l'omoplate et d'un déchirement musculaire[79]. Aussi, dès les premières étapes du Tour de France, Geminiani reconnaît qu'il n'est pas en mesure de bien figurer au classement général[80]. Tandis que Bobet, blessé, finit par abandonner, la rivalité entre Anquetil et Rivière profite àFederico Bahamontes, qui remporte le Tour[81]. Geminiani se classe finalement28e de sa dernière Grande Boucle[80].

Au début du mois de, il se rend avec d'autres cyclistes enHaute-Volta pour participer à un critérium cycliste dans le cadre de la commémoration du premier anniversaire du statut de colonie autonome de ce pays. Peu avant le départ,Louison Bobet déclare forfait, et Geminiani propose alors à son amiFausto Coppi de prendre sa place[82],[83]. Après leur retour en Europe, quelques jours avantNoël, Coppi téléphone à Geminiani pour lui proposer de composer avec lui une équipe cycliste comprenant des coureurs français et italiens. Au cours de la discussion, les deux hommes échangent sur leur état de santé, et se disent tous les deux grippés[84].

Photographie en noir et blanc d'un monument funéraire.
La sépulture deFausto Coppi àCastellania.

Dans l'après-midi du, Geminiani est pris de tremblements et de fièvre, puis hospitalisé. Une prise de sang finit par diagnostiquer une infection parasitaire parPlasmodium falciparum, autrement dit unemalaria mortelle. Les doses massives dequinine qui lui sont administrées le sauvent, tandis que Coppi, atteint du même mal mais dont les médecins refusent d'accepter le diagnostic, meurt le[85]. Apprenant le décès de son ami quelques jours plus tard, Geminiani est inconsolable et se reproche de l'avoir invité en Afrique[83].

Il reprend l'entrainement au mois de février suivant, mais peine à retrouver une condition physique satisfaisante. Il abandonne sur les premières courses qu'il dispute mais s'offre un dernier succès en gagnant la troisième étape du Circuit des monts d'Auvergne, dont il prend la deuxième place du classement général. LeCritérium du Dauphiné libéré est sa dernière compétition : dans la première étape entreValence etOrange, il met pied à terre après seulement 85 km de course et reste allongé de longues minutes sous un cerisier. Le jour même, il annonce sa retraite sportive[86].

Après-carrière

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Raphaël Geminiani à lafoire du livre 2010 deBrive-la-Gaillarde

Après sa carrière de coureur cycliste, Raphaël Geminiani devient directeur sportif. Durant l'intersaison 1961-1962, les équipes françaises connaissent un jeu de « chaises musicales »[87]. Geminiani devient l'adjoint de Paul Wiegant au sein de la formationHelyett-Saint-Raphaël qui accueilleJacques Anquetil, mais après des résultats décevants en début d'année, il prend seul la direction de l'équipe[88]. Anquetil vit mal le succès de son équipierRudi Altig sur leTour d'Espagne et remet en cause l'autorité de Geminiani, mais ce dernier obtient finalement son adhésion en l'assurant d'une place de leader unique sur le prochainTour de France[89]. La collaboration entre les deux hommes, poursuivie à partir de 1965 dans l'équipe Ford France puis de 1967 à 1969 au sein de la formationBic est couronnée de succès[90]. Geminiani est notamment à l'origine de « l'exploit de légende » que constituent les victoires d'Anquetil obtenues surCritérium du Dauphiné libéré etBordeaux-Paris en moins de vingt-quatre heures, lors de lasaison 1965[91]. En tant que directeur sportif, il remporte quatre fois leTour de France : avec Jacques Anquetil, de 1962 à 1964, puis avecLucien Aimar en1966[92].

Raphaël Geminiani dirige ensuite les équipesHoover-de Gribaldy en 1971, De Kova-Lejeune au début de lasaison 1973, Sporting - Sotto Mayor en 1975,Fiat France en 1977,Fiat en 1978 et 1979,La Redoute entre 1984 et 1985 et enfinCafé de Colombia en 1986[90]. Il est également consultant pour différents médias, signant des chroniques pourFrance-Soir etLa Montagne, officie comme chauffeur de presse sur le Tour de France[92], et signe plusieurs ouvrages consacrés au cyclisme, y compris desautobiographies, commeMes quatre vérités en 2010[93].

Photographie en noir et blanc montrant deux hommes dans une voiture de course.
Raphaël Geminiani (au volant) etRoger Rivière participent auRallye Monte-Carlo 1962.

Raphaël Geminiani diversifie ses activités. En 1962, il participe auRallye automobile Monte-Carlo, formant un équipage avec un autre ancien coureur cycliste, son coéquipierRoger Rivière, à bord d'uneFord Anglia[94]. En 1969, il apparaît dans le film documentaire deMarcel Ophüls,Le Chagrin et la Pitié[95] où il affirme ne pas avoir vu d'Allemands à Clermont-Ferrand, bien que ceux-ci aient été omniprésents pendant la Seconde Guerre mondiale dans cette ville[96],[97]. Il devient aussi patron de bar et restaurateur à Clermont-Ferrand, sur laplace de Jaude[98].

Il vit sa retraite àPérignat-sur-Allier, dans lePuy-de-Dôme, dont il est élu auconseil municipal de 1995 à 2001[99]. Il s'installe ensuite à la résidence Le Bruchet, unemaison de retraite située dans la commune[100],[98]. En 2015, lors d'une cérémonie en sa présence, son nom est donné à la nouvelle salle omnisports de la ville[99],[101].

Il meurt le à 99 ans[102],[103] dans une clinique dePont-du-Château[104]. Il est inhumé dans le caveau familial au cimetière deDoranges[105].

Style, personnalité et caractéristiques

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Regards contemporains et postérité

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Le journalisteJacques Augendre décrit Raphaël Geminiani comme« un excellent grimpeur, doublé d'un attaquant », et le considère comme« le prototype du routier par étapes »[92]. Il est aussi l'un des meilleurs descendeurs du peloton de son époque, comme le montre sa victoire àMonaco sur leTour de France 1955, lors de laquelle il prend des risques insensés pour rejoindre et distancer les différents coureurs dans une descente rendue périlleuse par l'orage, alors qu'il accusait un retard de onze minutes sur les hommes de tête en cours d'étape[106].Pierre Chany considère d'ailleurs cette victoire comme l'un des plus beaux exploits de l'histoire du cyclisme[107].

Jean Bobet, qui l'a côtoyé comme coureur, met en avant sa ténacité :« Le style facile ne lui convient pas. Il pédale dans la hargne au contraire, avec ses jambes, avec ses pieds, ses bras, ses épaules, son nez même. Il aime se maltraiter comme il maltraite son matériel, et il savoure d'autant plus son plaisir que ses ravages sont importants. Il marche au fouet. Plus il se flagelle, plus il rue[108]. » Il voit également Geminiani comme« unTalleyrand du vélo, au motif qu'il s'accommode de tous les règnes (Coppi,Bobet,Rivière,Anquetil,Merckx…) »[108], tandis que Christophe Penot le considère plutôt comme« unMurat, c'est-à-dire un hussard spontané, chaleureux, courageux et populaire, servi par une insolente santé », ce qui explique sa longévité et sa régularité dans les courses par étapes[106].

Louison Bobet, son coéquipier et ami, qui le décrit comme« un grand escogriffe au visage en lame de couteau »[109], est aussi à l'origine du surnom de « Grand Fusil » qui lui est attribué lors duTour de France 1955, en raison de ses attaques incessantes[93]. Personnage haut en couleur,« pittoresque, lyrique, somptueux », selon Jean Bobet, Raphäel Geminiani est doté d'un caractère impulsif et volubile, reconnu pour ses« coups de gueule », comme le souligne Jacques Augendre[92]. Il loue chez lui non seulement le sens de la course et le sens des affaires, mais aussi celui de la communication, de la repartie et de l'amitié[92]. PourPierre Chany :« Il tape sur la table au bon moment. Il éclate de rire au bon moment. Il geint au bon moment. Il attaque au bon moment. Il sait se taire au bon moment. Bref, il fait tout au bon moment. C'est un grand comédien et un sacré coureur[92]. » Jean Bobet le qualifie encore de« personnage rabelaisien idéal », plaçant l'amitié au-dessus de tout[108].

Geminiani et la question du dopage

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Dans un entretien accordé auMiroir des sports en, Raphaël Geminiani reconnaît avoir eu recours audopage au cours de sa carrière, et en légitime la pratique :« Il est normal qu'un coureur prenne des stimulants : ce sont les médecins qui le recommandent. Il existe des produits, qui loin d'être nuisibles, rétablissent l'équilibre. Moi, j'ai disputé douze Tours de France et un nombre élevé de courses en ligne. Je prenais des stimulants sous surveillance médicale, bien entendu. Pourquoi ? Parce que, lorsque dans une journée, j'avais perdu deux ou trois kilos, comme le font aujourd'hui certains coureurs, il fallait bien compenser cette perte d'énergie et les stimulants m'y aidaient. Le danger ce n'est pas dans leur emploi, mais dans leur abus. Si personne n'en prenait, il n'y aurait pas un seul coureur qui terminerait le Tour de France, tant l'épreuve est pénible[110]. » Il ajoute :« Si un garçon, sous contrôle médical sérieux, utilise un médicament qui, sous une forme ou sous une autre, lui permettra d'augmenter son énergie et son tonus, il n'aura fait que ce que la raison lui recommande de faire[110]. »

En 2017, lors de la publication de la biographie qu'il coécrit avec Jean-Marc Millanvoye sur son ancien coureur,Il était une fois Jacques Anquetil, Geminiani affirme que le dopage n'est pas le seul déterminant dans la réussite d'un coureur :« Dopage ou pas, il y a des gars qui sont faits autrement que d'autres. Dans chaque sport, il y a des types hors norme, comme le judokaTeddy Riner[111]. » De même, il condamne la décision de retirer les sept victoires sur le Tour de France deLance Armstrong, qu'il juge scandaleuse[111].

Palmarès

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La présente section dresse les principaux éléments du palmarès de Raphaël Geminiani[90],[112],[113].

Palmarès année par année

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Résultats sur les grands tours

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Tour de France

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12 participations :

Tour d'Espagne

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3 participations :

Tour d'Italie

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5 participations :

Hommage

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Le, le jour du centenaire de la naissance de Geminiani, la municipalité deClermont-Ferrand attribue son nom à une tribune du stade Philippe-Marcombes[114].

Publications

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Notes et références

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  1. L'usage des deux formes est attesté par les sources secondaires centrées sur lui. Les sources relevant de l'état-civil utilisent la forme sans accent.
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Voir aussi

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Bibliographie

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