Les rapaces nocturnes et certains rapaces diurnes qui volent lentement près du sol (busards), sont dotés d'un disque facial composé defiloplumes serrées qui ne réfléchissent pas le son (neutralité acoustique). Ces disques faciaux sont comparables à des réflecteurs paraboliques canalisant les sons vers les conduits auditifs externes positionnés derrière les yeux de manière asymétrique, ce qui permet d'analyser finement[1] des décalages entre les différents signaux sonores[2]. Ici il s'agit d'une jolie chouetteEffraie des clochers (Tyto alba), au disque facial bien marqué.Les yeux des rapaces nocturnes sont fixés aux parois orbitaires. Pour compenser cette immobilité, ils disposent d'un cou mobile doté de 14 cervicales, ce qui leur permet de pivoter la tête de 270°, contrairement à 260 chez les diurnes, et possèdent divers modes d'adaptation, mécaniques et hémodynamiques qui évitent d'endommager les vaisseaux sanguins de leur cou et d'interrompre l'afflux de sang vers leur cerveau lors de cette rotation rapide[3],[4]. Ici, il s'agit d'unHibou des marais ou Hibou brachyote (Asio flammeus), que les anglophones nomment « Chouette à oreilles (aigrettes) courtes ».Chasseurs à l'affût, certains rapaces se rapprochent des habitations et des routes, seperchant sur un observatoire élevé pour prélever des cadavresvictimes de collisions contre les édifices, les baies vitrées et les véhicules. Ici uneCrécerelle d'Amérique (Falco sparverius).
Bien que le terme de rapace continue à être utilisé par les ornithologues et les profanes, sa pertinence scientifique est remise en cause dans la mesure où il ne correspond pas à un taxon précis dans lasystématique actuelle et que des analysesgénomiques[5] en 2008 bouleversent l'arbre phylogénétique de ces oiseaux[6].
Rapace est un emprunt aulatinrapax,rapacis derapere « emporter précipitamment[7] ».Linné, à l'origine de laclassification scientifique des espèces, a regroupé tous les rapaces dans le taxon deAccipitres, composé de la famille des rapaces diurnes de trois genresVultur,Falcon etGypaetos et de la famille des rapaces nocturnes comportant un genreStrix. Les autres groupes décrits dans la sixième édition de sonSystema naturæ sont lesGrallae c'est-à-dire leséchassiers, lespics au sens large, lesAnseres — groupe des espèces proches desoies et descanards —, lesGallinae — espèces proches desfaisans et de lapoule domestique —, lesPasseres oupassereaux. Ces groupes faisant miroir à ses six groupes de mammifères.
En français, lesnoms vernaculaires leur ont été donnés soit en fonction de leur morphologie, soit en fonction de leurs cris, soit en fonction de leurs habitudes de vie, notamment alimentaires. Aussi pour la plupart, leurs noms vernaculaires ne correspondent pas à untaxon valide ; lesnoms normalisés en revanche, lorsqu'ils ne se basent pas sur les noms vernaculaires, utilisent en principe les mêmes noms au sein du même taxon.
Les appellations de rapaces les plus courantes sont :
lesaigles, oiseaux aux grandes ailes et aux pattes puissantes, parmi 12 genres ;
lesautours, éperviers de grande taille, parmi 7 genres ;
EnEurope, ce sont laRussie d’Europe (33 espèces nicheuses de rapaces diurnes et nocturnes) et l’Ukraine (29 espèces nicheuses) qui accueillent encore le plus grand nombre de rapaces nicheurs pour tout l'Ouestpaléarctique.
LaFrance a également une grande responsabilité en matière deconservation de la nature pour ces espèces, car si de nombreuses espèces y ont fortement régressé ou ont localement disparu, la France métropolitaine accueille encore plus de 60 % des espèces de rapaces nicheurs en Europe (25 espèces sur 40, dont 23 nicheuses régulières), soit le plus grand nombre d'espèces nicheuses d'Europe de l’Ouest après l’Espagne, qui en compte elle 26 espèces.
75 % des rapaces diurnes d’Europe occidentale se reproduisent sur le territoire français.
Sur 23 espèces de nicheurs réguliers en France métropolitaine, sept sont considérées comme très rares (moins de cent couples) et quatre n’excèdent pas 2 000 couples.
286 000 à 392 000 couples reproducteurs, soit 21 % des effectifs de rapaces ouest-européens étaient estimés présents (par l'IFEN), mais l'essentiel de ces populations est fourni par deux espèces seulement : laBuse variable qui constitue 43 % du total des effectifs de rapaces et lefaucon crécerelle (25 %)[9].
Les régions Auvergne, Rhône-Alpes, Provence-Alpes-Côte d’Azur et Midi-Pyrénées, grâce à des paysages variés, un climat favorable et un bon degré denaturalité du territoire (pour l'arrière-pays au moins) comptent parmi celles où les rapaces nicheurs sont les plus abondants.
La France d'outre-mer est également responsable[10] de la protection d'un très important patrimoine écologique, parmi les plus riches du monde, incluant une importante faune rapace, notamment enGuyane (80 % des rapaces connus et encore présents dans les DOM-TOM au début des années 2000). Près de 40 % de ces espèces sont rares ou localisées voire endémiques. L’autour à ventre blanc (plus de 2 500 couples) enNouvelle-Calédonie y estendémique, comme l'est lebusard de la Réunion sur l'île de La Réunion ou l’épervier de Frances àMayotte[11].
Les rapaces en tant queprédateurs supérieurs sont très sensibles à la présence et aux variations d’abondance des proies ou de leurs cadavres (dans le cas des rapaces charognards). Parce qu'ils sont, dans leréseau trophique, situés au sommet de la« pyramide alimentaire », ils sont également sensibles aux taux depolluants ou contaminantsbioaccumulés par leurs proies. Les pesticides et métaux lourds sont des causes importantes de disparition ou régression de nombreuses espèces de rapaces. Pour ces raisons, ils sont considérés comme de bonsbio-indicateurs de l’état de leur environnement et de son évolution.
Dans une nature préservée, le nombre d'individus présents sur un territoire et la variété en espèces dépendent du nombre de proies disponibles. Mais hormis dans les forêts primaires africaines et quelques endroits relativement épargnés par les pollutions, le nombre de rapaces par hectare est également de plus en plus contrôlé par le degré de contamination de leurs proies ; la contamination par le plomb issu du plomb de chasse est ainsi la première cause de disparition duCondor de Californie et reste une cause importante desaturnisme aviaire pour l'aigle et de nombreuses autres espèces (la mort induite par ingestion de plomb a été décrite pour au moins 15 espèces d’oiseaux de proies diurnes[12],[13],[14]).
D'autres « puits écologiques » peuvent affecter les populations, en particulier leslignes à haute tension et leroadkill qui sont des causes significatives et importantes de mortalité ou blessures graves de rapaces. Le phénomène dit depollution lumineuse pourrait également affecter certaines espèces, nocturnes notamment.
Les rapaces n'influent sur le nombre de proies disponible que s'il y a prolifération de ces dernières sur un long terme. La diminution des proies est en fait toujours liée à d'autres facteurs, par exemple l'urbanisation, lapériurbanisation, lafragmentation écologique du territoire de l'aigle ou diverses formes depollution. Quand la quantité de proies diminue, le nombre de rapaces diminue, ou l'espèce disparaît localement. Mais elle peut aussi disparaître à cause de la pollution, alors que ses proies sont encore présentes. Ces dernières peuvent alors pulluler et plus facilement véhiculer certaines microbes ou parasites (ex. :tiques véhiculant lamaladie de Lyme,échinocoque...). C'est pourquoi les rapaces sont considérés par les scientifiques comme des espèces utiles, à protéger, et de très bons indicateurs biologiques de la qualité des milieux où ils vivent ou devraient vivre.
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La tête de l'aigle royal est petite, munie d'un bec crochu très puissant et d'une arcade sourcilière prononcée.La quasi-absence d'arcade sourcilière chez les faucons est compensée par desmoustaches noires et retombantes qui réduisent l'éblouissement, à l'instar de l'eye black, graisse antireflet appliquée sous les yeux de certains sportifs américains[15].
Oiseaux de proie, les rapaces possèdent lesprincipales caractéristiques anatomiques des oiseaux mais présentent aussi plusieurs adaptations à la chasse (bec pointu, crochu et puissant pour saisir ses proies et déchiqueter leur chair, pattes munies de griffes fortes et recourbées appeléesserres, yeux occupant le 2/3 de l’espace du crâne et sont supportés par l'anneau sclérotique).
La majorité des rapaces diurnes possèdent un processus supra-orbitaire de l'os préfrontal développé en une sorte d'arcade sourcilière saillante qui agit comme unpare-soleil[16].
Ils présentent une caractéristique inhabituelle chez lesvertébrés supérieurs : ils ont undimorphisme sexuel inversé de la taille (femelles plus grandes que les mâles) qui semble lié aurégime alimentaire et à lacompétition intra-sexuelle. Chez les rapaces nocturnes, ce dimorphisme se situe plus souvent au niveau de la masse corporelle que de la taille, et est plus marqué à des moments clefs de l'effort reproducteur où intervient lepartage des tâches. Les cas de dimorphisme sexuel de la couleur sont plus rares[17].
Les mâles prédatant d’autres oiseaux sont plus petits et possèdent une plus grande mobilité et efficacité de chasse ainsi que des coûts réduits et des risques liés au vol (collision contre la proie ou un obstacle)[18]. La plus grande taille des femelles serait liée soit à la compétition pour obtenir un mâle plus efficace dans la prédation et qui l'approvisionne en période de couvaison, ou pour obtenir un meilleur territoire vacant, pour produire plus d'œufs, avoir plus d'énergie pour les couver, défendre plus efficacement son nid, ou encore pour se prémunir contre les périodes de pénurie alimentaire quand elle est en période denidification en se constituant des réserves énergétiques[19],[20].
Lesystème digestif des rapaces ne leur permet pas de digérer la totalité du corps des animaux qu'ils ingèrent, sauf celui duGypaète barbu, ce qui explique que presque tous les rapaces rejettent par la bouche des restes sous forme depelotes de réjection qui contiennent lespoils, lesos ou lachitine de leurs proies.
Les pelotes sont les traces les plus simples à examiner pour les ornithologues. Elles permettent aux spécialistes d'identifier l'espèce qui les a rejetées ainsi que les espèces consommées. Ces pelotes prouvent par exemple que les milans ne mangent pas lesperdrix et que les chouettes mangent essentiellement des petits rongeurs mais aussi des insectes. L'étude des fientes et pelotes permet de connaître précisément les régimes alimentaires et leurs variations annuelles, et aussi de détecter certains parasites ou microbes, mais ces études sont plus difficiles à mener.
Si les rapaces sont jugés aujourd'hui majestueux et si leur rôle bénéfique pour l'environnement — notamment pour la non-prolifération des rongeurs ou des passereaux ou l'assainissement des carcasses mortes — n'est plus remis en cause, il n'en a pas toujours été ainsi. Lafauconnerie, sport de noble, n'atténuait pas la perception négative qu'avait la population de ces oiseaux.Buffon déclarait :« [...] les oiseaux de proie sont ignobles, immondes et lâches [...] »[réf. nécessaire]. Ceci est peut-être lié à la proximité des rapaces avec la mort, d'abord en tant queprédateurs (pareille mésaventure de considération est arrivée auLoup), mais aussi en tant quecharognards (vautours mais aussi aigles). Cette opinion dépréciative s'est aussi appliquée par le passé aux métiers qui avaient affaire avec la mort et conduisaient au rejet des personnes les exerçant comme les « croque-morts » ou lesbourreaux.
Néanmoins, ce qui amène à nuancer cette appréhension passée globalement négative et apeurée des rapaces par l'homme, est le fait que l'aigle est une figure fréquente enhéraldique, où sa force, la noblesse de son port et la majesté de son vol ont toujours symbolisé les visées expansionnistes et impériales : c'est ainsi que l'aigle se retrouve dans les armoiries de nombreux pays, telles celles de l'Allemagne, duMexique, de l'Égypte, de l'Albanie, de laPologne ou encore de l'Autriche. Il était l'emblème deslégions romaines (chacune avait sonaigle), et il a servi de symbole et d'armoirie pour lesPremier etSecond Empires français. De même leGrand Condor des Andes était révéré par lescivilisations précolombiennes, notamment par lesIncas, en tant que messager detranscendance, intercesseur entre la terre et le ciel, car grâce à la hauteur exceptionnelle de son vol, il disparaît parfois de la vue des hommes dans l'azur[21].
De ce fait, il était l'animal-totem du monde d’en haut(Haqay Pacha enquechua) dans la cosmovision andine, et faisait le lien entre le monde des vivants et le divin, emportait l'âme des défunts, et portait les messages des vivants à leurs ancêtres[22]. D'ailleurs, on retrouve le condor dans les armoiries de presque tous les pays andins :Venezuela,Colombie,Équateur,Bolivie, anciennes armoiries duPérou (1821-1825), etChili. Enfin c'est l'aigle pêcheur ouPygargue à tête blanche qui sert de symbole à lanation américaine.
Toujours est-il que les chasseurs tuaient probablement les rapaces dès qu'ils le pouvaient, et ce jusqu'à une époque récente. Si les ornithologues comprennent le rôle des rapaces dans l'écosystème au début duXXe siècle, l'extermination continue. Une distinction est cependant faite entre rapaces utiles et nuisibles, celle-ci est visible dans la première loi internationale sur la protection des oiseaux. On estime que près de quinze millepygargues à tête blanche sont tuées de 1917 à 1940 auxÉtats-Unis. Des primes étaient même versées en France pour l'abattage des rapaces « nuisibles », on a pu ainsi estimer de deux cent à trois cent mille le nombre de rapaces abattus par an.
En France, il a fallu attendre1964 pourprotéger certaines espèces. Certains chasseurs peu scrupuleux continuent malgré tout à les abattre. En1972, un nouvel arrêté protège tous les rapaces diurnes et nocturnes en France.
Lafauconnerie s'est transformée presque partout avec d'autres objectifs que la chasse (ce qui n'est alors plus considéré comme de la fauconnerie), par exemple des rapaces sont des centres d'attraction destinés à attirer les touristes dans certains parcs à thèmes comme lechâteau des Milandes[23], lechâteau de Fauquemont[24], lechâteau de Bouillon[25], etc.
↑Cette perception auditive en relief permet aux rapaces nocturnes de pouvoir continuer à chasser les yeux bandés. CfPierre Darmangeat,Rapaces de France, Artemis,,p. 14.
↑La France et la biodiversité : enjeux et responsabilité ; Comité français pour l’UICN, janvier 2005. UICN - France, Paris, 8 p.
↑Données IFEN "Faune et flore : Les rapaces nicheurs", de février 2007 (Voir)
↑Locke L.N. & Frien d M. (199 2).Lead poisoning of avian species other than waterfowl. InLead poisoning in waterfowl, D. J. Pain. Ed. Intl. Waterfowl and Wetland Res. Bureau, Slimbrige. 16 : 19-22
↑Pain D.J. & Amiard-Triquet C. (1993).Lead poisoning in raptors in France and elsewhere. Ecotoxicology and Environmental Safety. 25 : 183-192.
↑Falandysz J., Yamashita N., Tanabe S., Tatsukawa R., Ruciñska L ., Mizera T. & Jakuczun B. (1994). Congener-specific analysis of polychlorinated biphenyls in white-tailed sea eagles Haliaeetus albicilla collected in Poland. Archives of Environmental Contamination Toxicology. 26 : 13-22