Cet article concerne les ports de lamer du Nord. Pour les montagnes du nord deTrinidad (Northern Range), voirCordillère Septentrionale (Trinité-et-Tobago).



Le terme de « range nord-européen », ou de « rangée nord-européenne », est la traduction de l'expressionfranglaiseNorthern range, utilisée dans l'enseignement secondaire français[1] pour désigner la concentration des principauxports européens alignés le long dulittoral méridional de lamer du Nord, servant defaçade maritime à un vaste territoire centré sur l'Europe rhénane.
D'autres traductions sont employées, telles que la « rangée du nord », le « rail du nord » ou la « rangée Manche-Nord »[2]ou encore Manche-Sud[réf. nécessaire], ainsi que des abréviations un peu plus restrictives : « A-H » ou « ANTHAM » (Antwerp-Hamburg Range), « ARA » (Amsterdam-Rotterdam-Antwerp Range) ou « ARH » (Antwerp-Rotterdam-Hamburg Range)[3].

La notion de rangée nord-européenne a été développée parAndré Vigarié en 1964[4]. Les principauxports de commerce (s'y rajoutent plusieursports de pêche etde plaisance, bien plus modestes) alignés sur 800 km[n 1] sont d'ouest vers l'est :
Les trois plus importants de ces ports, par leurs dimensions comme par leur trafic sont d'abord leport de Rotterdam (le quatrième port de commerce du monde en 2011, après ceuxde Shanghai,de Singapour etde Tianjin[5]), ensuite leport d'Anvers (17e port mondial et deuxième européen[5]) et enfin leport de Hambourg (26e port mondial et troisième européen[5]). Pour ce qui est du trafic de conteneurs uniquement, Rotterdam est le10e port mondial, Hambourg le14e et Anvers le15e[5].
| Villes | États | Trafic total (en millions detonnes) | Totalvrac solide[n 2] (en millions de tonnes) | Fer[n 3] (en millions de tonnes) | Charbon (en millions de tonnes) | Total vrac liquide[n 4] (en millions de tonnes) | Pétrole brut (en millions de tonnes) | Conteneurs (en millions de tonnes) | Conteneurs (en millions d'EVP) |
|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|
| Hambourg | 130,93 | 25,32 | 9,15 | 5,17 | 14,11 | 4,39 | 89,40 | 8,86 | |
| Bremerhaven | 83,97 | 8,98 | 4,30 | 1,79 | 1,42 | 0 | 65,15 | 6,11 | |
| Wilhelmshaven | 26,17 | 3,31 | 0,01 | 1,59 | 22,83 | 21,44 | 0,01 | 0,02 | |
| Amsterdam | 94,26 | 41,87 | 8,55 | 18,89 | 43,31 | 0,01 | 0,82 | 0,06 | |
| Rotterdam | 441,52 | 78,10 | 32,74 | 25,28 | 214,21 | 98,32 | 125,42 | 11,86 | |
| Zélande[n 5] | 33,99 | 11,93 | 0,67 | 4,77 | 12,01 | 0 | 0,20 | 0,02 | |
| Anvers | 184,13 | 19,10 | 2,74 | 5,72 | 45,27 | 2,55 | 104,06 | 8,63 | |
| Gand | 26,30 | 16,82 | 3,30 | 2,88 | 3,97 | 0 | 0,61 | 0,08 | |
| Zeebruges | 43,54 | 1,62 | 0 | 0,02 | 7,69 | 0 | 20,31 | 1,95 | |
| Dunkerque | 47,62 | 24,40 | 12,13 | 8,14 | 6,86 | 0,04 | 2,40 | 0,26 | |
| Calais | 34,13 | 0,4 | 0,1 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | |
| Le Havre | 63,51 | 2,64 | 0 | 0,98 | 36,67 | 22,46 | 22,73 | 2,30 | |
| Rouen | 21,16 | 8,6 | 0 | 0,6 | 10,5 | 0 | 0,9 | 0,12 |

L'alignement et la proximité de ces ports favorisent la concurrence mais aussi la complémentarité entre ces ports. Ils sont reliés entre eux parcabotage (d'estuaire en estuaire) ainsi que parvoie fluviale, grâce au réseau decanaux grand gabarit qui sillonnent les Pays-Bas et la Belgique (canauxGand-Terneuzen,de l'Escaut au Rhin,Albert,Canal maritime d'Anvers à Bruxelles,d'Amsterdam au Rhin, etc.). Ainsi, pour les importations de pétrole, de charbon et de minerai de fer, Rotterdam sert dehub à toute la façade, recevant les pétroliers, minéraliers et porte-conteneurs géants, puis réexpédiant vers ses voisins une partie de son approvisionnement sur de petitsfeeders (navires collecteurs). Hambourg a la même fonction vis-à-vis des ports de la Baltique, notamment par lecanal de Kiel.
Pour les conteneurs, les navires assurant les lignes trans-océaniques (Europe-Amérique et Europe-Asie) font desescales successives le long de l'axe (y incluant les ports anglais deSouthampton,Tilbury,Thamesport (en) etFelixstowe), principe renforcé par le fait que les armateurs (Maersk,CMA-CGM,MSC,Hapag-Lloyd, etc.), qui sont parfois aussi les opérateurs des terminaux, considèrent la zone Anvers-Rotterdam comme une entité unique.
Rotterdam et sa voisine Anvers sont des exemples de ce jeu de concurrence et de complémentarité. Les enjeux économiques sont tels quel'État néerlandais cherche à freiner le développement du port belge en limitant[réf. nécessaire] ledragage de l'Escaut, empêchant les plus gros navires de remonter jusqu'auport d'Anvers. En conséquence, c'est leport de Rotterdam qui approvisionne les raffineries d'Anvers en pétrole depuis 1971, leur envoyant de 20 à 30 millions de tonnes de brut par an paroléoduc.

Ces ports se chargent de l'accueil des grands navires de commerce (pétroliers,porte-conteneurs,minéraliers,rouliers,méthaniers, etc.) dans des terminaux spécialisés (terminaux pétroliers,conteneurs,terminaux charbonniers…), bordés par de vastes zones de stockage (réservoirs depétrole, parcs àconteneurs, entrepôts, stocks decharbon en tas, parkings à véhicules…), deszones industrielles (raffineries de pétrole, usineschimiques,sidérurgiques…), des chantiers de réparation navale et des infrastructures de transport souventintermodales (terminaux fluviaux et canaux à grand gabarit, accès et axes autoroutiers, gares ferroviaires de marchandises et voies ferrées électrifiées…).
Étant donné la construction d'infrastructures portuaires adaptées à chaque fois à un seul type de navires, la forte concurrence entre les ports a entraîné une spécialisation des différents ports. Seuls les plus importants restent polyvalents, avec une gamme diversifiée determinaux[6] :

Étant donné le caractère sablonneux du littoral de la mer du Nord (particulièrement gênant le long de lamer des Wadden), les plus anciens ports sont en retrait du littoral, essentiellement en fond d'estuaire ou sur unbras de mer : Rouen sur laSeine (à 120 kilomètres de la mer),Bruges sur l'ancienneZwin, Anvers sur l'Escaut (à 80 km de la mer), Rotterdam sur laNieuwe Maas (une des branches dudelta de la Meuse et du Rhin), Amsterdam sur l'IJ, Emden sur l'Ems, Brême sur laWeser et Hambourg sur l'Elbe (à 100 km de la mer). Ne font exceptions à ce principe que quelques ports construits à grands frais sur le littoral, tels que Dunkerque, Zeebruges et Wilhelmshaven.
L'augmentation destirants d'eau des navires a obligé ces ports d'une part à se développer vers l'aval, que ce soit par la création d'unavant-port en eau profonde (Le Havre puisAntifer pour Rouen, Zeebruges pour Bruges, Flessingue vis-à-vis d'Anvers, IJmuiden pour Amsterdam, Bremerhaven pour Brême et Cuxhaven pour Hambourg) ou par une « marche vers la mer » (cas de Rotterdam sur une longueur de 42 kilomètres jusqu'auxterre-pleins deMaasvlakte et deMaasvlakte 2 gagnés sur la mer), d'autre part àdraguer continuellement les estuaires, voir à creuser des chenaux (leNieuwe Waterweg pour Rotterdam ; leNoordzeekanaal pour Amsterdam) y compris en pleine mer (l'Eurogeul et le Maasgeul pour Rotterdam ; l'IJgeul pour Amsterdam).

L'augmentation du trafic maritime et son corollaire l'aménagement de vasteszones industrialo-portuaires ont comme conséquences une importantepollution atmosphérique due à la navigation (les navires brûlant dumazout comme carburant) et à l'industrie (leraffinage et lasidérurgie sont parmi les plus gros pollueurs), uneartificialisation deslittoraux (réduction deszones humides dans lesestuaires, construction deterre-pleins avec du sable dragué en mer, couverture de vastes zones par de l'asphalte, canalisation des cours d'eau) et une augmentation des risques de pollution des eaux, des airs et des sols (naufrage,marée noire, incendie, inondation, etc.).
Ces problèmes écologiques longtemps méprisés sont devenus des facteurs contraignants pour les projets de développement des infrastructures portuaires, que ce soit aux Pays-Bas, en Belgique, en Allemagne ou en France, avec la montée en puissance politique desmouvements écologiques. En plus des législations de chaque État (par exemple laloi Littoral française de 1986), l'Union européenne fait plus ou moins appliquer sesdirectives : ladirective Oiseaux en 1979 (améliorée en 2009), ladirective Habitats Faune Flore en 1992, ladirective sur l'eau en 2000 et ladirective pour le milieu marin en 2008.
La solution appliquée depuis le début des années 2000 pour concilier le développement économique et la protection de l'environnement a été d'une part quelquesmesures conservatoires (création de petitesréserves naturelles et d'aires marines protégées) ainsi que desmesures compensatoires :
La rangée nord-européenne est la deuxièmefaçade maritime mondiale (après les ports chinois de lamer Jaune : portsde Tianjin,de Qingdao,de Qinhuangdao,de Dalian, deYingkou, deTangshan, deLianyungang, etc.) et la première européenne[n 7] (devant ceux de l'ouest de laMéditerranée : portsde Marseille, d'Algésiras,de Valence,de Gênes, deTrieste,de Barcelone, etc.). Elle sert de principaleinterface commerciale entre l'Europe et le reste du monde, servant de débouché de lamégalopole européenne.
Sonarrière-pays (Hinterland enallemand, notion utilisée parAndré Vigarié) correspond aux régions les plus densément peuplées et riches d'Europe, qui forment ce queRoger Brunet a appelé lamégalopole européenne (surnommée aussi la « dorsale européenne » ou la « banane bleue ») : laBelgique, lesPays-Bas, l'Allemagne, le Nord-Est de laFrance, laSuisse, l'Autriche et le nord de l'Italie.
Chacun des ports est relié à son arrière-pays par des réseaux de transport de fret très denses, qu'ils soient :
Quant à son avant-pays (Foreland en anglais), la majorité des échanges de la rangée nord-européenne se fait avec les ports des autres façades européennes, ceux desîles Britanniques (portsde Felixstowe, d'Immingham,de Londres, deNewcastle,de Liverpool, deMilford Haven, etc.), de lamer Baltique (dePrimorsk, deSaint-Pétersbourg, deGöteborg, deGdańsk,de Copenhague, etc.) et de lamer Méditerranée (de Marseille, d'Algésiras,de Valence,de Gênes, deTrieste,de Barcelone, etc.).
Les échanges en dehors de l'Europe se font principalement au sein de latriade, avec les ports d'Amérique du Nord (la façade orientale des États-Unis : portsde New York,de Baltimore, deHampton Roads, etc.), d'Asie du Sud-Est (portsde Singapour,Port Kelang,de Tanjung Pelepas, etc.), de Chine (de Shenzhen,de Ningbo,de Shanghai,de Qingdao,de Tianjin, etc.), de Corée (ports deBusan, deGwangyang, etc.) et du Japon (portsde Yokohama,de Nagoya,de Kōbe, etc.), essentiellement pour desproduits manufacturés (textile, électronique, véhicules, etc.), transportés par porte-conteneurs ou parrouliers.
Les échanges avec l'Amérique du Sud, l'Afrique, le Moyen-Orient, l'Asie du Sud et l'Océanie sont principalement constitués d'importations dematières premières (minerai de fer du Brésil, pétrole du golfe de Guinée, gaz du Golfe persique, etc.).
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