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Rachitisme

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Rachitisme
Description de cette image, également commentée ci-après
Déformations crâniennes (« tête carrée ») d'un enfant rachitique duNew-York Infant Asylum. Illustration deAn American text-book of the diseases of children (1895).
Données clés

Traitement
MédicamentCalcitriol etergocalciférolVoir et modifier les données sur Wikidata
SpécialitéEndocrinologieVoir et modifier les données sur Wikidata
Classification et ressources externes
CIM-10E55
CIM-9268
OMIM277440, 600081 et 600785 264700, 277440, 600081 et 600785
DiseasesDB9351
MedlinePlus000344
eMedicine985510
MeSHD012279
MeSHD012279
Patient UKVitamin-d-deficiency-including-osteomalacia-and-rickets

Wikipédia ne donne pas de conseils médicauxMise en garde médicale

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Lerachitisme est une maladie de la croissance et de l'ossification observée chez le nourrisson et le jeune enfant. Elle se caractérise par une insuffisance decalcification des os et descartilages et elle est due à unecarence envitamine D et encalcium.

Cette carence est principalement liée à un défaut d'exposition solaire (rayonnementultra-violet), plus accessoirement à descarences alimentaires. Le rachitisme est une maladie socio-géographique, dépendant de lalatitude, duclimat, de lacouleur de la peau, mais aussi de l'alimentation, de l'habillement, et d'unmilieu urbain défavorisé (vie à l'intérieur ou enpollution atmosphérique).

Le rachitisme se présente comme un ensemble de déformations osseuses pouvant avoir des conséquences graves :troubles respiratoires etinfections pulmonaires, ou encore, chez la fille, unbassin osseux étroit et rétréci, futur obstacle à un accouchement.

La gravité de ces conséquences contraste avec la simplicité de laprévention (supplémentation envitamine D). Cependant, si le rachitisme carentiel a presque disparu des pays développés, le déficit en vitamine D reste un problème d'actualité, à l'échelon local comme au niveau mondial.

Histoire

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Préhistoire

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Le rachitisme est très rare durant lapréhistoire et la Haute Antiquité, probablement à cause de l'exposition solaire deschasseurs-cueilleurs, et des premiers agriculteurs[1]. Presque tous les cas observés sur les restes osseux, de la préhistoire auMoyen Âge, proviennent d'Europe septentrionale et de laSibérie[2]. En 1998, on ne connaissait que deux ou trois cas demomies égyptiennes avec rachitisme probable, dont celle d'unbabouin en captivité[1],[3].

Le diagnosticpaléopathologique de rachitisme nécessite des critères précis et techniques, faute de quoi il peut s'agir d'unartefact de « pseudopathologie ». Selon le type de sol (acide et mal drainé), les os enterrés peuvent se décalcifier, et le crâne ou les os longs se déformer sous la pression du terrain, ce qui a pu donner lieu à des diagnostics erronés de rachitisme[4].

Un autre type célèbre de faux diagnostic de rachitisme fut celui de l'anatomo-pathologisteRudolf Virchow qui, en 1872, au vu du crâne de l'Homme de Néanderthal, diagnostiqua un cas d'homme moderne atteint de rachitisme dans son enfance[5].

Antiquité et Moyen-Âge

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Rare dans l'Antiquité, le rachitisme aurait été décrit enmédecine chinoise probablement dès leIIIe siècle av. J.-C., et plus sûrement à partir duVIIe siècleapr. J.-C.[6]. Toutefois, les médecins chinois ont pensé chaque déformation comme une manifestation unique et séparée, en l'attribuant au froid, sans en reconnaitre le tableau d'ensemble complet[7].

La maladie est ignorée chez lesEgyptiens et lesGrecs. SelonMirko Grmek, la rareté du rachitisme enGrèce classique est attestée par l'absence totale, dans les traités gynécologiqueshippocratiques, des déformations pelviennes (partie inférieure du bassin), cause mécanique principale desaccouchements difficiles. Les données ostéo-archéologiques confirment la rareté de ces déformations et la largeur relative dubassin féminin grec antique[2].

Aux yeux des médecins, le rachitisme serait devenu apparent sous l'Empire romain, lié à la concentration urbaine, aux changements des habitudes alimentaires, et à lapaupérisation de certaines couches de la population[2].

AuIIe siècle après J.-C.,Soranos d'Éphèse mentionne les déformations des jambes et de la colonne vertébrale des jeunes enfants. Il note que la maladie est plus fréquente dans la ville deRome que dans lescités grecques.Galien décrit plus précisément les genoux cagneux (genu valgum), les jambes arquées, et les déformations duthorax[6].

Ces troubles ne sont plus guère mentionnés, ou de façon peu claire, jusqu'auXVIIe siècle. C'est alors que deux médecins anglais en donnent les premières descriptions modernes (tableau synthétique).

Études cliniques (XVIIe siècle -XIXe siècle)

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Le terme anglaisRickets apparait en 1634 dans leRegistre de décès de la ville de Londres (en). L'origine du terme est très discutée : derucket « souffle court » (dialecte duDorset), derucken « secouer ou tituber », dewricken « tordre » (moyen anglais), derick « entassé ou courbé » (vieil anglais), deriquets « bossu » (normand)[6].

Page de titre deDe rachitide… (Londres, 1650) de Francis Glisson, première description clinique complète du rachitisme.

En 1645,Daniel Whistler (en) publie, àLondres, une thèse médicale intituléeDe Morbo puerili Anglorum, quem patrio idiomate indigenæ vocant The Rickets « De la maladie des enfants anglais populairement appeléethe Rickets ».

En 1650,Francis Glisson en donne une description clinique complète[8], considérée comme un classique du genre, en lui donnant le nom derachitis (dérivé du termegrec pour épine dorsale oucolonne vertébrale) dansRachitide sive Morbo Puerili, qui vulgo The Rickets dicitur.

Le terme savantrachitisme sera adopté enfrançais, alors que leterme vulgairerickets reste communément utilisé en anglais.

Whistler et Glisson voient cette maladie comme d'apparition récente, provenant deDieu, desétoiles ou de lanature elle-même[9]. Glisson décrit une plus grande fréquence de rachitisme chez les enfants desgrandes villes. Il note que la maladie frappe aussi aux « berceaux des riches ».

En effet, le climat moins ensoleillé de l'Europe du Nord, les nouvelles conditionsdémographiques etsocio-économiques (développement urbain) peuvent avoir augmenté les cas de rachitisme. De même, la pratique d'emmailloter les nourrissons et de lessevrer à labouillie decéréales a pu contribuer à unecarence ou un déficit en vitamine D[6].

AuXVIIIe siècle, la maladie devientendémique dans toutes les villes d'Europe du Nord. À Paris,Nicolas Andry créé le terme « orthopédie » en publiantL'Orthopédie,ou l'Art de prévenir et de corriger dans les enfants les difformités du corps, notamment celles liées au rachitisme.Thomas Percival (1740-1804) est le premier à mentionner l'huile de foie de morue dans le traitement du rachitisme[10]. En 1825,Bretonneau etTrousseau introduisent ce traitement en France[11].

À la fin duXIXe siècle, les origines du rachitisme restent obscures. Les uns l'attribuent à une mauvaise alimentation, d'autres au manque de lumière solaire, au manque d'exercice ou à l'air pollué, d'autres encore à une maladie pardégénérescence en rapprochant le rachitisme de lasyphilis congénitale (quelques signes osseux pouvant être similaires)[12].

Études biochimiques

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Il faut attendre leXXe siècle pour véritablement comprendre la naturebiochimique et environnementale de la maladie. En 1908, Leonard Findlay (1878-1947) reproduit la maladie chez leschiots en les maintenant confinés dans des endroits sombres. En 1917, Hess et Unger montrent qu'ils peuvent prévenir le rachitisme, non seulement par l'huile de foie de morue, mais aussi par exposition aurayonnement ultra-violet[6].

À partir de 1919, plusieurs chercheurs, dontEdward Mellanby etElmer McCollum, parviennent à isoler les différentes vitamines D à partir de l'huile de foie de morue. Leurs premières formules chimiques sont établies en 1935 parAdolf Windaus (déjàPrix Nobel de Chimie 1928 pour ses travaux sur lesstérols) qui réalise aussi la synthèse d'un précurseur, laprovitamine D3[11].

Dans les années 1960-1970, le métabolisme des vitamines D est précisé grâce aux méthodes partraceur isotopique[6],[11].

Pathogénie

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Voir les sources, le métabolisme et le rôle osseux de la vitamine D

Article détaillé :vitamine D.

Le rachitisme est une carence en vitamine D entrainant un trouble deminéralisation du squelette en croissance, de la naissance à l'adolescence. Chez l'adulte et lespersonnes âgées, cette carence participe à l'apparition de troubles osseux analogues appelésostéomalacie etostéoporose.

Causes de la carence

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Flacon de vitamine D, supplément alimentaire lors durationnement au Royaume-Uni en 1940-1945.

La cause principale est la réduction de l'exposition solaire qui ne permet plus de produire de vitamine D3 naturelle (cholécalciférol) au niveau de lapeau (source essentielle principale). Cette carence peut être aggravée par des apports alimentaires insuffisants (dénutrition,malnutrition, manque decalcium…) ou encore desmaladies digestives parmalabsorption. L'apport alimentaire et lelait maternel, non supplémentés, sont une source très faible de vitamine D. Le lait maternel ne contient que 1,5 à 3 % du tauxplasmatique maternel, soit environ 20 à 60 UI par litre de lait, quantité insuffisante pour couvrir les besoins quotidiens dunourrisson[13],[14].

Les autres causes sont beaucoup plus rares :maladies génétiques dumétabolisme de lavitamine D, maladies génétiques du métabolisme desphosphates, maladiesrénales ouhépatiques.

La réduction de l'exposition solaire est liée à un ensemble de facteurs socio-géographiques. Les facteurs naturels et climatiques sont la latitude, la saison, l'altitude, l'atmosphère (brumes,brouillard…) La géographie du rachitisme peut être modifiée par le régime alimentaire (les peuples les plus proches des pôles dépendent de la mer pour leur survie).

Il en est de même pour les modifications liées à l'activité humaine et aux facteurs culturels au cours de l'histoire : urbanisation (rues étroites et sombres, pollution de l'air par poussières et fumées -chauffage domestique au charbon),allaitement maternel prolongé suivi d'un sevrage auxféculents (régime carencé), confinement saisonnier ou permanent des enfants, habitudes vestimentaires,travail des enfants et des jeunes mères (en milieu agricole ou en milieu industriel)[15]

Certains régimes alimentaires (non supplémentés) peuvent favoriser le rachitisme comme ceux constitués presque uniquement depain traditionnel comme lechapati ou lepita, ou decéréales (riz, maïs) et féculents. Ce type de régime trop riche en fibres, enphytates et enlignines diminue l'absorption de calcium. S'il est exclusif et prolongé, il peut conduire à des situations de rachitisme, même en exposition solaire adéquate[16].

Conséquences

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L'ensemble dusquelette est concerné (jusqu'aunanisme dans les cas extrêmes[1]), mais les lésions les plus spécifiques s'observent au niveau desos longs, aucartilage de croissance desmétaphyses[13]. Ces os longs se déforment et se courbent sous le poids du corps, d'abord auxmembres inférieurs, puis auxsupérieurs dans les formes sévères[1].

Renflement visible au niveau du poignet.

Lesépiphyses sont l'objet d'un remodelage (letissu osseux nonminéralisé s'accumule de façon anarchique) aboutissant à un élargissement des extrémités des os : bourrelets ounodosités osseuses visibles ou palpables notamment au niveau descôtes, despoignets ou deschevilles.

Au niveau des os plats, le défaut de minéralisation provoque deszones de ramollissement avec des zones d'épaississement. Les déformations du crâne donnent un aspect de « grosse tête carrée »[1].

Ce même défaut retentit sur ladentition (retard d'éruption, dents fragiles,caries précoces) et lesystème musculaire (faiblesse et perte de tonus,hernies fréquentes, retard à tenir la tête, à la position assise, debout, à la marche).

Le rachitisme à lui seul (sans autre maladie associée) menace rarement la vie de façon immédiate et directe, mais il constitue unhandicap compromettant la qualité de vie. Il peut indirectement causer à moyen ou long terme des problèmes graves. Chez les filles, les déformations du bassin entrainaient à l'âge adulte desaccouchements difficiles voire impossibles par voie naturelle. Dans les deux sexes, les déformations thoraciques entrainaient des difficultés respiratoires avecinfections fréquentes (« poumon rachitique »)[13],[17].

Chez l'animal

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Pélican blanc se nettoyant les plumes au soleil, avec des sécrétions de sa glande uropygienne.

La plupart des vertébrés (despoissons osseux auxprimates) dépendent de l'exposition solaire pour leurs besoins en vitamine D[18]. Le foie destéléostéens marins est bien connu pour sa richesse en vitamine D (utilisation traditionnelle de l'huile de foie de morue)[19].

Le rachitisme peut les affecter en phase de croissance osseuse. Il s'agit alors d'un rachitisme expérimental (reproduction en laboratoire) ou en situation de confinement à l'abri de la lumière (animaux nés encaptivité).

Chez lesoiseaux, l'ablation de laglande uropygienne (située au niveau ducroupion) entraine un rachitisme, même en situation d'exposition solaire. Cette glande sécrète, entre autres, une provitamine D qui se dépose sur lesplumes pour être convertie en vitamine D à la lumière solaire[19].

Une question reste problématique, celle de l'absence de rachitisme chez desanimaux nocturnes,frugivores ouinsectivores, comme certaines espèces dechauves-souris. L'hypothèse proposée est que ces animaux se nourriraient aussi de fruits ou autres végétaux (champignons) qui ont été séchés au soleil durant la journée. Processus au cours duquel se ferait une conversion de l'ergostérol végétal envitamine D2, susceptible d'avoir une activité anti-rachitique[20].

Épidémiologie

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Données historiques

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Historiquement, le rachitisme prend de l'importance lors de l'urbanisation de l'Europe centrale et du nord à la fin du Moyen Âge. Cet accroissement est maximum au début de l'ère industrielle dans les mêmes régions, lié au climat, à la pollution urbaine et aux conditions de vie. Au tout début duXXe siècle, des auteurs signalent que plus de 80 % des enfants de moins de 4 ans des grandes villes d'Europe du Nord présentent dessignes cliniques de rachitisme, avec des variations saisonnières[16].

Enfant souffrant de malnutrition avec symptômes de rachitisme : jambes arquées et poignets enflés.

Aux États-Unis, le rachitisme apparait dans les grandes villes (New York,Boston,La Nouvelle-Orléans) vers la fin duXIXe siècle, en étant plus fréquent chez lesNoirs que chez lesBlancs, notamment lors de la migration des familles noires du sud agricole vers le nord industriel. On considérait alors comme presque normal, un rachitisme modéré des jeunes enfants noirs en zone urbaine.

En général, le rachitisme se voit principalement dans les pays faiblement ensoleillés, dans les pays où les enfants sortent peu, dans les zones urbaines défavorisées (pollution, manque de lumière) et plus souvent chez les individus à peau foncée. En 1967 et 1970, W. F Loomis propose une théorie[21] selon laquelle la peau claire des populations vivant loin de l'équateur, dans les régions de faible ensoleillement, serait le résultat d'une évolution naturelle ayant pour résultat d'éviter le rachitisme (la peau foncée filtrant davantage lesUV, ce qui limite les cancers de la peau mais limite aussi la synthèse de vitamine D)[15],[16].

Si cette théorie est généralement acceptée en ce qui concerne lacouleur de la peau humaine, la vitamine D, et lescancers de la peau, elle parait moins pertinente pour la répartition du rachitisme. En effet cette répartition en sus de la latitude, dépend aussi du climat, de l'altitude, de l'alimentation et de facteurs socio-économiques. De plus le diagnostic de rachitisme peut varier selon les critères utilisés : sur la seule clinique, on ne distingue que les cas avérés les plus sévères, sur des critères biochimiques, on peut ajouter tous les cas potentiels, à risque plus élevé (déficience et non carence en vitamine D)[16].

Données modernes

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Le rachitisme est devenu rare dans les pays développés grâce audépistage précoce et surtout au traitementprophylactique. Il persiste toutefois un risque de déficience en vitamine D chez lesadolescents selon leur mode de vie enhiver, ou encore chez lesmigrants asiatiques enGrande-Bretagne. Enfin, il existe aussi un rachitisme lié à lamaltraitance de l'enfant, ou du moins à une négligence éducative.

Dans les pays ensoleillés, le rachitisme peut exister enMéditerranée orientale,Éthiopie etMoyen-Orient,Inde du nordetc. surtout dans les villes, selon des facteurs culturels (habillement, alimentation, confinement des petits enfants ou des jeunes femmes, etc.)[15]. Il est rare enAfrique tropicale, et ne survient que dans des circonstances particulières (nourrissons trop vêtus, reclus dans un endroit sombre) par crainte superstitieuse[16],[22].

Le rachitisme est aussi répandu chez les enfants migrants ou transplantés, d'unerégion subtropicale à un pays froid ou tempéré[22].

Description clinique

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La forme clinique classique est celle du nourrisson et du petit enfant, le plus souvent en rapport avec une carence maternelle en vitamine D durant la grossesse.

Le rachitismenéonatal est rare, survenant seulement chez les nouveau-nés de mère avec carence très sévère (mère déjà carencée pour elle-même, avec retentissement sur son propre squelette).

Forme débutante

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Le plus souvent, le rachitisme se distingue cliniquement à partir de l'âge de 3 mois par la persistance prolongée de la mollesse des os du crâne (lepariétal et l'occipital sont normalement mous pendant les 3 premiers mois). Cette mollesse qui persiste au-delà est appelée « craniotabès ». Il s'agit d'une zone de ramollissement de taille variable, de la consistance analogue aucelluloid. Elle siège en plein os à distance des sutures, elles-mêmes ramollies.

Ce craniotabès tardif peut s'accompagner d'une ébauche de bourrelet osseux aux poignets, aux chevilles, et au niveau des côtes. Appelés « nouuresépiphysaires » et « chapelet costal », ce sont les deux signes cliniques majeurs pour le diagnostic[13].

Non prévenu ou non traité, le rachitisme évolue vers une forme complète du petit enfant. Les signes osseux restent les signes principaux, ils sontindolores,symétriques et diffus (une déformation isolée exclut le rachitisme).

Forme complète

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Le craniotabès persiste avec élargissement ramolli des sutures crâniennes, retard à la fermeture desfontanelles, retard de l'éruption dentaire,caries précoces, voûte dupalais enogive.

Le crâne subit des déformations :plagiocéphalie symétrique (aplatissements latéraux, aspect de tête carrée), front olympien (saillie des bosses frontales), crâne natiforme (saillie des bossespariétales).

Genu valgum ou jambes arquées en X d'un garçon de 11 ans.

Les atteintes des membres sont les plus caractéristiques. Les bourrelets ou renflements osseux sont d'abord palpables au poignet, bord externe duradius (précoce), et à la cheville (au-dessus de la pointe de lamalléole externe), puis visibles.

Les déformations osseuses prédominent aux membres inférieurs (aggravées par la station debout et la marche), en restant plus discrètes aux membres supérieurs. L'aspect le plus fréquent est legenu varum (jambes arquées en parenthèses) ; plus rare est la déformation inverse ougenu valgum (jambes arquées en X). La crête dutibia peut faire saillie « en lame de sabre ». Ces déformations indiquent un rachitisme sévère. Plus tardivement, unecoxa vara (déplacement de la tête du fémur) peut apparaitre avec une « démarche en canard ».

Ces déformations retentissent sur le bassin osseux qui s'aplatit ou se rétrécit. Chez les filles, c'est une future source éventuelle dedystocie osseuse (accouchement difficile par bassin étroit), cause historique importante de décès maternel lors de l'accouchement.

Au niveau duthorax, le chapelet costal est très évocateur. Il s'agit denodosités saillantes et symétriques de la jonction entre les côtes osseuses et le cartilage costo-sternal (côtes etsternum). Elles sont alignées selon une ligne oblique en bas et en dehors, à partir de la ligne mamelonnaire (axe vertical passant par le mamelon). À ne pas confondre avec la saillie normale de l'extrémité antérieure des côtes, en dos d'âne asymétrique.

Les autres déformations thoraciques sont l'aplatissement antéro-postérieur, l'élargissement à la base, la projection dusternum en avant (thorax « encarène » ou « enbréchet de poulet » oupectus carinatum), ou au contraire sternum enfoncé (pectus excavatum).

Une seule déformation, unique et isolée, exclut le rachitisme, en relevant d'autres causes. Le rachitisme se distingue par son caractère diffus et multiple.

Il existe enfin une perte detonus musculaire, nette et constante, avec retards de développement (de la tenue de la tête à la marche). Cettehypotonie retentit sur la colonne vertébrale, entrainant unecyphose d'attitude facilement réductible (souple, non raide et non bloquée). Dans les cas sévères, le ventre est gros, flasque et étalé avec hernies fréquentes.

Signes radiologiques et biologiques

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Radiologie

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Radiographie conventionnelle auxrayons X d'un enfant de deux ans atteint de rachitisme, présentant ungenu varum (fémurs arqués) prononcé, ainsi qu'une diminution de l'opacité osseuse suggérant une faibleminéralisation osseuse.

Laradiologie confirme le diagnostic, et il est inutile de les multiplier. Le défaut de minéralisation des os longs s'observe particulièrement sur les radiographies de face d'un poignet et des genoux : retard ou irrégularités despoints d'ossifications attendus pour l'âge (maturation squelettique), lignes métaphysaires irrégulières donnant un aspect « en toit depagode », la corticale de ladiaphyse est amincie, la densité osseuse est diminuée donnant un aspect vermoulu. Les os longs s'incurvent.

Au niveau du thorax, le chapelet costal clinique donne un aspect radiologique, surtout visible de profil, « en bouchon de champagne » des jonctions chondro-osseuses. En sus des déformations osseuses, on peut observer des atteintes pulmonaires par troubles de laventilation.

Biologie

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Les signes sanguins les plus constants sont l'abaissement desphosphates et l'augmentation desphosphatases alcalines, qui traduisent les réactions et perturbations de la construction osseuse en situation de carence en vitamine D et calcium.

La baisse de calcium dans le sang (hypocalcémie) n'existe que dans la moitié des cas.

Le dosage de la vitamine D sous sa forme hydroxylée 25-(OH)D (forme de réserve hépatique) peut être utile pour adapter le traitement. Le dosage simultané de la forme précédente avec la forme 1,25-(OH)2D (forme active rénale) permet de distinguer différents rachitismes autres que le rachitisme carentiel[23].

Il existe de nombreuses autres anomalies biologiques qui ont de la valeur pour la recherche, mais de peu d'intérêt en pratique courante[13].

Évolution et complications

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Sous traitement curatif, l'amélioration est rapide. L'hypocalcémie se corrige en quelques jours, les autres signes biologiques comme le tonus musculaire en quelques semaines, la minéralisation osseuse en un à trois mois. Les déformations des os longs se corrigent lentement en plusieurs années[13]. La normalisation est d'autant plus lente que le rachitisme est traité tard.

Non traitée, l'évolution peut être spontanément favorable quand la croissance se ralentit (vers l'âge de 2 ans), et le rachitisme guérit (n'évolue plus) vers l'âge de 3 à 4 ans. Cela se fait au prix de séquelles permanentes : déformations thoraciques et de la colonne vertébrale. Les déformations des membres peuvent s'estomper avec l'âge.

Les complications sont celles de l'hypocalcémie (qui peut être révélatrice, apparaître en premier) :convulsions,tétanie. Les troubles cardiaques parhypocalcémie sont rares, mais graves (pronostic vital)[13].

Les autres complications sont infectieuses et respiratoires, ou liées à la faiblesse de la musculature (hernies), ou encore des épisodesanémiques ou digestifs. Les plus graves sont les complications pulmonaires(pneumonies) qui engagent aussi le pronostic vital dans les pays dépourvus d'infrastructures sanitaires.

  • Enfants d'une même famille souffrant de rachitisme, Paris, vers 1912.
    Enfants d'une même famille souffrant de rachitisme, Paris, vers 1912.
  • Femme souffrant de nanisme et de rachitisme, vers 1912.
    Femme souffrant denanisme et de rachitisme, vers 1912.
  • Radiographie du thorax.
  • Radiographie de mains et poignets.
    Radiographie de mains et poignets.

Formes cliniques

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Rachitismes carentiels

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Le rachitisme carentiel peut s'associer avec d'autres maladies infectieuses et métaboliques, en particulier lescorbut (carence envitamine C).

Un rachitisme avec fractures multiples à la radio doit faire penser à unsyndrome de Silverman, dans le cadre d'unemaltraitance sur mineur.

Le rachitisme des prématurés et néonatal (dès la naissance) se distinguent souvent par une hypocalcémie précoce. Ils sont prévenus par l'administration de vitamine D aux femmes enceintes (dernier trimestre de grossesse) et au nouveau-né.

Le rachitisme carentiel peut se manifester chez le grand enfant et l'adolescent, à mode de vie particulier (vie recluse, longs vêtements), avec carence alimentaire en calcium. Il se caractérise alors par son caractère douloureux (douleurs osseuses) et une fatigabilité à la marche, parfois avec crises detétanie.

Autres rachitismes

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Les rachitismes dit vitamino-résistants (non améliorés par vitaminé D) sont rares, le plus souvent d'origine génétique.

Ce sont lerachitisme hypophosphatémique, lié auchromosome X (transmission dominante liée à l'X), et les rachitismes pseudo-carentiels detransmission autosomique récessive : type 1 par déficit en α-hydroxylase (rachitisme, douleurs osseuses etmyasthénie) et type 2 par résistance périphérique aucalcitriol (rachitisme etalopécie)[23].

Des maladies digestives, hépatiques, rénales, prises médicamenteuses peuvent interférer avec le métabolisme de la vitamine D et favoriser le risque de rachitisme.

Traitement

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Préventif

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Publicité pour l'huile de foie de morue, 1914.

Sa prévention est simple, elle consiste en l'administration régulière devitamine D aux femmes enceintes au cours du dernier trimestre de grossesse ; puis au nouveau-né de la naissance jusqu'à l'âge de 18 mois ; au-delà de 18 mois, selon les cas et les situations à risques, cette prévention peut être répétée au cours des hivers jusqu'à la fin de la croissance.

Cette supplémentation, autrefois effectuée par de l'huile de foie de morue, est actuellement administrée via des préparations pharmaceutiques decholécalciférol.

Les besoins varient d'un enfant à un autre en fonction du poids à la naissance et d'une éventuelleprématurité, de l'ensoleillement (lieu de vie, saison) et de l'âge (les besoins sont maximaux jusqu'à 18 mois).

En France, chez l'enfant jusqu'à l'âge de 2 à 3 ans, un apport systématique de 1000 à 1200 UI/j est préconisé, ou réduit à 600-800 UI/j en cas d'utilisation de lait enrichi. Toujours en France, l'enrichissement en vitamine D du lait, des produits laitiers et des huiles est autorisé. C'est particulièrement le cas depuis 1992 des laits pour nourrissons et des préparations pour nourrissons[23].

L'allaitement maternel exclusif représente un risque de carence, car le lait maternel contient très peu de vitamine D (moins de 60 UI par litre, représentant moins de 3 % du taux sanguin maternel)[14].

Curatif

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Les doses de vitamine D sont plus importantes. L'administration se fait par voie orale, soit de façon quotidienne 5 000 UI/j pendant un mois, soit en une seule dose de charge de 100 000 à 200 000 UI, renouvelée un mois plus tard.

Un traitement d'entretien (à visée préventive) prend ensuite le relais du traitement curatif[13].

En cas d'hypocalcémie, un apport de calcium est nécessaire selon le régime alimentaire du nourrisson et de l'enfant.

Vierge à l'enfant (1509) deHans Burgkmair. L'enfant a été diagnostiqué comme rachitique en 1980.

Cas historiques et artistiques

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Une étude depaléopathologie a montré qu'un enfant de lafamille des Médicis, un fils deFrançois Ier de Médicis, identifié comme étant Filippo (1577-1582), était atteint de rachitisme sévère. Les auteurs de l'étude attribuent ce rachitisme à un allaitement prolongé (à l'époque, il pouvait dépasser les deux ans), suivi d'un régime alimentaire inapproprié, les enfants fragiles restant confinés à l'intérieur des habitations[10].

Des peintres ont apparemment remarqué le rachitisme avant les médecins (Whistler 1645 et Glisson 1650). C'est le cas deHans Burgkmair avec saVierge à l'enfant (1509) et duCaravage avec sonAmour endormi (1608)[10].

En littérature, un personnage deCharles Dickens, l'enfant Tiny Tim, dansA Christmas Carol, a été analysé comme étant atteint detuberculose et de rachitisme[17],[24].

Références

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  1. abcd ete(en) Artur C. Aufderheide,The Cambridge Encyclopedia of Human Paleopathology, Cambridge,Cambridge University Press,, 478 p.(ISBN 0-521-55203-6),p. 305-310.
  2. ab etcMirko D. Grmek,Les maladies à l'aube de la civilisation occidentale, Paris,Payot,coll. « Médecine et Sociétés »,, 527 p.(ISBN 2-228-55030-2),p. 118-120.
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