Esclaves travaillant dans une « habitation » sucrière.
À la veille de laRévolution française, la colonie deSaint-Domingue est d'une prospérité et d'une richesse sans égale dans les Antilles, et la plus rentable des colonies des puissances européennes[5]. En 1789, elle est le premier producteur mondial desucre et decafé — la colonie représente en effet lamoitié de l'offre mondiale de café. Son commerce extérieur représente plus du tiers de celui de la France métropolitaine et un Français sur huit en vit directement ou indirectement[6].
La société des colons est très inégalitaire : aux richesplanteurs, ou « grandsblancs » issus de lanoblesse ou de la bourgeoisie du grand négoce, répond la foule des petits fonctionnaires, employés et ouvriers, appelés « petits blancs »[7].
Surtout, l'esclavage est particulièrement cruel. LeCode noir de 1685, pourtant édicté pour l'« humaniser », punit ainsi de mort l'esclave qui aurait frappé son maître (art. 33), voire aurait commis un vol (art. 35). L'esclave a le statut juridique d'unbien meuble (art. 44). Lesabolitionnistes, telsBenjamin-Sigismond Frossard, affirment que le Code noir n'est même pas respecté[8] : l'obligation d'évangélisation est négligée[9]. À lapeine capitale prévue, les décisions de justice ajoutent souvent dessupplices pour leur caractère exemplaire, particulièrement en cas demarronnage[10].
Enfin, alors que le Code noir ne connaît que deux catégories d'individus — les libres et les esclaves — lesgens de couleur libres (lesmulâtres libres et les Noirsaffranchis) se voient progressivement refuser l'égalité avec les Blancs[12] ; à partir de 1720, des restrictions apparaissent : ils ne peuvent hériter de titres de noblesse, certains emplois leur sont interdits, ils doivent déférence aux Blancs, etc.[12].
Portrait de Madame Ailhaud, vers 1760. À gauche l'esclave, au centre la propriétaire, et à droite la « mulâtresse ».
Dans ses études sur leConsulat et surNapoléon Ier, contemporain de la révolution haïtienne, l'historienThierry Lentz dresse le portrait des colonies françaises à cette époque. LesAntilles françaises en sont le fleuron. En 1788 elles comprennent 600 000 esclaves déportés d'Afrique, 30 000 libres de couleur, et 55 000 Blancs. La France en encourage la colonisation. Par le système de l'exclusif colonial, elle peut espérer continuer à faire prospérer cette rente aux dépens de tout ce qui ne vient pas de la France métropolitaine. Mais ces intérêts ne rencontrent pas toujours ceux des colons. Ayant très mal pris de ne pas avoir été conviés auxÉtats généraux, ces derniers réclament une plus grande autonomie, tandis que, inspirés des idées de libération, les noirs prennent espoir. L'opinion générale est convaincue de la supériorité des Blancs mais ces derniers s'inquiétaient de l'activité de laSociété des amis des Noirs et, l'Ancien Régime ayant accepté la création d'assemblées locales de blancs en Guadeloupe et en Martinique, les colons de Saint-Domingue veulent en créer une aussi[13].
Si on ajoute à ce tableau les rivalités régionales entre leNord, plus opulent, leSud, et l'Ouest séparés par des chaînes montagneuses, l'opposition entre les fonctionnairesmétropolitains et les blancscréoles (nés sur place) ainsi qu'entre les planteurs et les commerçants, le rôle déstabilisateur de l'Espagne, possédant la partie est de l'île, ou de l'Angleterre, on comprend la complexité du déroulement de la révolution deSaint-Domingue.
De leur côté, les révolutionnaires français sont écartelés entre le principe d'égalité et le réalisme économique, le premier étant défendu par les proches de laSociété des amis des Noirs, le second par, entre autres, leClub de l'Hôtel de Massiac, qui forme un lobby colonial[12].
Revendications opposées des blancs et des libres de couleur
Les colons deSaint-Domingue considèrent la convocation auxétats généraux de 1789 comme une opportunité pour se défaire duprincipe de l'Exclusif (selon ce principe, tout ce que la colonie produit doit être exporté vers la métropole et tout ce que la colonie importe doit venir de la métropole ou être transporté par des bateaux français). Malgré le refus préalable du roiLouis XVI, ils réussissent à faire accepter six députés à l'Assemblée constituante[14]. Sur place, ils poussent, en le menaçant, l'intendantFrançois Barbé-Marbois à regagner la métropole. Puis, fin1789, ils élisent desmunicipalités.
Durant l'été 1789 est créé à Paris leClub de l'hôtel de Massiac, constitué principalement de planteurs deSaint-Domingue[15]. Un de leurs meilleurs avocats est le députéAntoine Barnave[15]. Le, celui-ci réussit à faire voter un décret qui écarte les colonies du droit métropolitain, et des évolutions révolutionnaires en cours[15], et crée des assemblées coloniales ouvertes aux propriétaires. Sans l'exprimer, la Constituante confirme ainsi l'esclavage.Condorcet, après le vote du décret du, écrit dans ses notes :« Ajoutons un mot à l'article premier de la Déclaration des droits : "Tous les hommes « blancs » naissent libres et égaux en droits" ! Donner une méthode pour déterminer le degré de blancheur »[16].
Les Blancs deSaint-Domingue vont cependant encore plus loin : ils élisent, sans les libres de couleur, une assemblée qui se déclare supérieure augouverneur général, entend remplacer les régiments royaux par unegarde nationale locale et vote même, le, uneconstitution. En juillet, elle décrète la liberté du commerce. Devant cette sédition, les autorités réagissent en s'alliant les libres. L'assemblée de planteurs est vite renversée. Mais la réaction des blancs est sanglante : quelques mois plus tard, lecolonel de Mauduit, qui a dispersé l'assemblée, est lynché puis assassiné par la foule.
Le mulâtre libreVincent Ogé accueilli parChavannes à son arrivée à Saint-Domingue en 1790.
Les libres commencent alors à réclamer l'égalité avec véhémence. Plusieurs sont massacrés par la population blanche. Notamment, le mulâtreVincent Ogé, pourtant notable aisé, est condamné au supplice de laroue en pour avoir organisé une rébellion armée avec trois cents partisans et pillé quelqueshabitations. Un autre mulâtre,Julien Raimond, mène le combat à Paris et se lie en 1789 et 1790 à laSociété des amis des Noirs puis en 1791 auclub des Jacobins[17].
À partir de l'été 1791, les libres se soulèvent dans plusieurs endroits de l'Ouest et du Sud et remportent des victoires. Dirigés parLouis-Jacques Beauvais etAndré Rigaud, les mulâtres prennent même la capitale,Port-au-Prince, qui est en grande partie incendiée, en.
L'Assemblée de Paris reste indécise quant au statut des libres de couleur. Après avoir confirmé l'esclavage en lui donnant le statut constitutionnel le sur demande deBertrand Barère, elle accorde, le, sur celle deJean-François Rewbell l'égalité aux libres de couleur nés de père et mère libres, soit moins de 5 % des intéressés. Mais cette évaluation historiographique très répandue est désormais contestée de par le fait que dans les débats parlementaires, ou écrits approbateurs du décret, seuls les Noirs affranchis très minoritaires sont discriminés par l'amendement Rewbell[18]. Seul au côté gauche de l'assemblée constituante,Maximilien de Robespierre, condamne le décret du et l'amendement Reubell du. Hors l'Assemblée, à la société des amis des Noirs chez Brissot et Clavière, on entend également de telles protestations. Mais les choses traînent. Le décret ne part pas pour les îles. Cela suscite de fortes inquiétudes au club des jacobins. Le, Brissot y prononce un discours contre les risques de révocation ; à son tour, l'abbé Grégoire en présente un le 16. Le décret du est finalement révoqué le sur demande d'Antoine Barnave, d'Alexandre de Lameth, deCharles-Malo de Lameth, son frère, deGoupil de Prefeln, et d'Adrien Duport (ce dernier pourtant favorable en à la cause des hommes libres de couleur)[19]. Tous les cinq sont en réaction radiés le lendemain (le 25) duclub des Jacobins sur requête d'Étienne Polverel. L'antiesclavagisme y fait aussi son chemin. Ainsi, peu avant au sein du club, le même Étienne Polverel participe à un jury, au côté d'Étienne Clavière, deCondorcet, de François Lanthenas, de l'abbéHenri Grégoire (tous quatre membres de laSociété des Amis des Noirs), deJean Dusaulx chargé de sélectionner le meilleur texte, défenseur de la constitution. Les six jurés choisissent, parmi 42 écrits proposés,L'almanach du Père Gérard parJean-Marie Collot d'Herbois, œuvre dans laquelle figure une condamnation générale sans équivoque des discriminations raciales et de l'esclavage colonial[20]. Également en,Olympe de Gouges donne un avis dans le postambule de sadéclaration des droits de la femme et de la citoyenne.
« Les Colons prétendent régner en despotes sur des hommes dont ils sont les pères et les frères ; et méconnoissant les droits de la nature, ils en poursuivent la source jusque dans la plus petite teinte de leur sang. »
Le, dansl'Ami du Peuple,Jean-Paul Marat écrit :« Les hommes de couleur ne sont point des lâches comme les Parisiens. Ils ne se laisseront pas faire [...] »[21],[22].
En 1791, l'esclavage colonial n'est évoqué de front à l'assemblée constituante qu'une seule fois, le 11 mai, par « un obscur député duVermandois » qui n'était pas membre de la Société des Amis des Noirs,Jean Louis de Viefville des Essarts. Il y présente un projet détaillé d'abolition de l'asservissement des Noirs qui n'est pas discuté[23]. On décide de limiter pour les jours suivants (12-15 mai) les débats aux droits des hommes de couleur libres.
Lemarronnage, favorisé par le relief montagneux deSaint-Domingue qui offre refuge aux esclaves en fuite, s'instaure dès le début de latraite. Les Noirs réussirent à vivre en groupes dans les forêts. Ils y développent levaudou, une religion originaire d'Afrique de l'Ouest, qui se décline en un courant local, levaudou haïtien (qui emprunte par syncrétisme à d'autres religions africaines et au catholicisme). Le marronnage perdure malgré la traque et la répression féroce. Ces marrons inquiètent les Blancs qu'ils empoisonnent parfois et dont ils brûlent les champs.
Le, àBois-Caïman, dans laPlaine-du-Nord, de nombreux esclaves décident de se révolter, sous l'autorité deDutty Boukman, assisté deJean-François etGeorges Biassou. Ce premier acte de la révolution des esclaves aurait pris la forme d'une cérémonie vaudoue, où en présence de lamamboCécile Fatiman, un pacte de sang est signé dans le sacrifice d'un cochon noir créole. En quelques jours, toutes lesplantations du Nord sont en flammes, et un millier de blancs massacrés[25],[26]. Malgré la répression où Boukman est tué, des bandes d'esclaves armés persistent dans les campagnes et les montagnes. Dans d'autres parties du pays, des révoltes plus spontanées s'ensuivent. Dès le début de la révolution, les participants au grand soulèvement des esclaves, qui commence en 1791 à Saint-Domingue, proclament leur loyauté au roi et à la religion[27]. La nuit du 22 au 23 août, les esclaves prennent les armes[28]. Les insurgés gagnent du terrain, mais la révolution se prolonge. Les insurgés comptent de valeureux guerriers mais qui n'ont aucune expérience de l'exercice du pouvoir.
Le rôle personnel deMaximilien de Robespierre sur ces questions est encore sujet à débat[35]. En mai 1792, dansLe Défenseur de la Constitution, il salue le combat des Girondins en faveur de la liberté dans les colonies, précisant qu'il s'agit à ses yeux de l'unique aspect positif de leur bilan législatif et qu'à ce titre il regrette de ne pas les avoir vus manifester « le même zèle » pour « le peuple français » que pour « le peuple de Saint-Domingue ». Ce peuple, il le limite aux 26 000 colons métis et noirs affranchis de la colonie insurgée, mais admet implicitement « au nom de l'humanité » le bien-fondé de leur insurrection armée[36],[37]. Il entend sans doute aussi prendre ses distances avec ce qu'il appelle « l'injustice » et « l'ingratitude » deCamille Desmoulins (sans le nommer autrement que par un « ceux qui leur ont cherché des torts ») qui reprochait trois mois plus tôt à Brissot, avec des arguments proches de ceux du club Massiac, d'avoir divisé le mouvement patriote et encouragé le peuple de Saint-Domingue à l'insurrection. En 1794, il paraît en parfaite osmose avec les trois députés de Saint-Domingue, Dufay, Mills et Belley. En janvier, son agent à Lorient,Marc-Antoine Jullien de Paris, fils du député montagnard Jullien de la Drôme, lui écrit personnellement pour lui annoncer leur arrivée sous protection. Le 23 avril, ces trois députés, nouveaux représentants du peuple, inquiets des réticences qu'ils sentent à la Convention et dans ses comités dans la mise en application du décret d'abolition de l'esclavage, lui écrivent personnellement en le qualifiant d'« ami du peuple de Saint-Domingue »,« du seul peuple de Saint-Domingue à savoir les jaunes et les Noirs »[38].
Olympe de Gouges, qui réussit enfin à faire éditer en une de ses pièces de théâtre antiesclavagistes,Zamor et Mirza, grâce à l'élection en à la mairie de Paris deJérôme Pétion de Villeneuve, est la seule parmi les défenseurs des droits des noirs qui condamne les insurrections des « deux peuples » de Saint-Domingue au nom de la non-violence : « C’est à vous, actuellement, esclaves, hommes de couleur, à qui je vais parler ; j’ai peut-être des droits incontestables pour blâmer votre férocité : cruels, en imitant les tyrans, vous les justifiez (...) Quelle cruauté, quelle inhumanité ! La plupart de vos maîtres étaient humains et bienfaisants et dans votre aveugle rage vous ne distinguez pas les victimes innocentes de vos persécuteurs. Les hommes n’étaient pas nés pour les fers et vous prouvez qu’ils sont nécessaires. Je ne me rétracte point, j’abhorre vos tyrans, vos cruautés me font horreur »[39],[40]. De tels propos lui valent le persiflage par lettre en d'un brissotin, le procureur syndic de la Commune adjoint du maire Pétion,Pierre Louis Manuel : «...Mme de Gouges a voulu aussi concourir à la rédemption des Noirs ; elle pourra trouver des esclaves qui ne veulent pas de leur liberté »[40].
Une autre femme,Rosalie Jullien, femme de Jullien de la Drôme et mère de Jullien de Paris, également amie et admiratrice de Robespierre jusqu'en Thermidor an II, se félicite au contraire le 16 avril 1793 de la décapitation à Paris la veille, après jugement par leTribunal révolutionnaire, de l'ancien gouverneur de Saint-Domingue, Philippe Blanchelande. Il avait été expulsé quelques mois plus tôt parSonthonax etPolverel de la colonie, de par son hostilité aux droits des noirs. Rosalie écrit dans une de ses lettres :« il a fait couler à flots le sang des Noirs et des patriotes »[41]. Accompagnée par un jeune noir, Rosalie Jullien invite à déjeuner à deux reprises au moins en juin 1793 Robespierre et Barère, son ami d'enfance« au nom d'une douce fraternité qui unit les vrais républicains »[41].
Nègres de St. Domingue se battant au bâton, vers 1797. Durant leur temps de repos, la nuit ou le dimanche, les esclaves s'adonnent à des danses de combat (calinda), héritées de traditions ouest-africaines. Cette pratique leur sera utile lors des affrontements armés de la révolution[42].
Pour faire appliquer laloi du 4 avril 1792, de nouveaux commissaires civils,Léger-Félicité Sonthonax etÉtienne Polverel, sont envoyés àSaint-Domingue, appuyés de quatre mille volontaires de lagarde nationale. Après l'arrivée de la nouvelle du,Georges Biassou se nomme « vice-roi » en attendant la libération du roi de France[27]. Les nouveaux commissaires civils débarquent auCap le, quelques jours avant la proclamation de laRépublique française. Afin de ne pas effrayer les colons, Sonthonax annonce le lendemain qu'il entend préserver l'esclavage. Mais c'est lui qui a écrit un an plus tôt : « Les terres deSaint-Domingue doivent appartenir aux noirs. Ils les ont acquises à la sueur de leur front » et il ne reçoit que défiance de la part des colons. Brissot l'a choisi au printemps 1792 « en raison de ses articles énergiques au journal de Prudhomme » (Les Révolutions de Paris) sur « les hommes de couleur »[43],[44], c'est-à-dire ceux relatifs aux mulâtres. Pour autant, informé de l'affiche du dansle Patriote français du, Brissot regrette ce qu'il considère comme « une erreur ». Selon lui, même graduellement, l'esclavage doit un jour être aboli[45]. Les commissaires s'allient aux mulâtres pour s'imposer. Ils rencontrent un certain succès, notamment àPort-au-Prince. Mais le auCap-Français, le nouveau gouverneurFrançois Thomas Galbaud-Dufort s'allie aux colons pour renverser les commissaires. Acculés, ceux-ci promettent la liberté à tout esclave qui se battrait pour la République. Des insurgés envahissent la ville, la pillent et l'incendient. Dix mille colons s’expatrient. De leur côté, l'Angleterre et l'Espagne, qui ont déclaré la guerre à la France, attaquentCap-Français par la mer et par les terres depuis la partie orientale de l'île, possession espagnole. Les Espagnols ont avec eux des colons royalistes ainsi que des bandes d’esclaves révoltés, comme celle de Jean-François et de Biassou, à qui ils ont promis la liberté. À l'été 1793, de nombreux ports et la plus grande partie du pays sont occupés.
Jean-Baptiste Belley, premier député noir élu à la Convention.L’abolition de l’esclavage par la Convention, le 16 pluviôse an II (4 février 1794), parNicolas-André Monsiau.
Deux journaux,le Républicain de Charles Duval et leCréole Patriote de Claude Milscent, relatent de manière détaillée la soirée du 16Pluviôsean II au club des Jacobins[46]. Les trois députés de Saint-Domingue sont accueillis à la Société, présidée parJacques Reverchon qui leur donne l'accolade, et oùNicolas Maure,Philibert Simond,Antoine-François Momoro, Charles Duval débattent des conditions d'inscription. Le lendemain 17 Pluviôse à la Convention, Delacroix, Levasseur, Dufay, Grégoire, Rewbell,Thuriot etCharlier discutent de la rédaction du décret tandis queJacques-Michel Coupé de l'Oise propose un plan de redistribution des terres dans la colonie et queRoger Ducos fait préciser que les Français propriétaires d'esclaves dans les colonies non-françaises doivent également mettre à exécution le décret[47].
Le 23 germinal an II-, lecomité de salut public nomme une commission dans un décret signé par Barère, Collot d'Herbois,Carnot,Billaud-Varenne. LaConvention montagnarde ne s'en tient pas là. Elle engage également une répression contre les lobbies esclavagistes. Ainsi, le 17 ventôse an II- sur demande de Dufay, Belley et Mills et par un décret signéCollot d'Herbois etSaint-Just, le Comité de Salut Public fait arrêter deux colons blancs de Saint-Domingue, Page etBrulley, qui intriguent contre eux[48]. Le 19 ventôse an II-, tous les autres colons de Saint-Domingue sont appréhendés par la Convention après intervention en ce sens de Jean-François Delacroix,Jean-François Rewbell,Moyse Bayle,Didier Thirion[46]. Mais Page et Brulley gardent à la Convention un autre allié en la personne du député métis de laMartinique,Janvier Littée, qui fait distribuer un pamphlet contre la députation de Saint-Domingue. ÀBrest, deux membres du CSP en mission,Prieur de la Marne etJeanbon Saint-André mettent au printemps 1794 en arrestation de nombreux colons esclavagistes de Saint-Domingue expulsés de la colonie par Sonthonax et Polverel. Influencés par la lettre envoyée le 4 Floréal an II-23 avril 1794 que les trois députés de Saint-Domingue ont écrite à Robespierre, ce dernier, ainsi queCouthon, Saint-Just, Barère etAndré Jeanbon Saint-André, mettent sous surveillance, en messidor an II-juin et,Janvier Littée par l'intermédiaire de l'agent Claude Guérin.
Maintien de l'abolition pendant la réaction thermidorienne
LaConvention Montagnarde n'a pas accédé à la demande deBourdon de l'Oise d'abroger son décret de mise en accusation de Sonthonax et de Polverel voté le ce jour-là après intervention deBillaud-Varenne. C'estJean-Jacques Bréard qui les fait réhabiliter le par laConvention Thermidorienne[49]. Ledécret du 16 pluviôse an II est sans doute la seule mesure votée par la Convention montagnarde, qu'après les Thermidoriens, puis le Directoire, ne mettent pas en cause. Parmi les tombeurs montagnards de Robespierre[50] nombre d'entre eux étaient des antiesclavagistes déclarés par leurs positions publiques ou leurs signatures d'arrêtés : Dubois-Crancé, Merlin de Thionville, Collot d'Herbois, Brival, Bourdon de l'Oise, Cambon, Maribon de Montaut, Thuriot, Charlier, Charles Duval, Rewbell, Carnot, Barère, Billaud-Varenne, Bayle, Thirion, Prieur de la Côte d'Or ; et même parmi les plus dangereux ennemis de Robespierre, les représentants en missionJean-Lambert Tallien etJoseph Fouché qu'il a fait rappeler de Bordeaux et de Lyon pour leurs crimes et rapines[51]. Par ailleurs Grégoire qui ne participe pas au coup d'État, se félicite auprès de ses administrés, le 13 thermidor an II/ de la mort de Maximilien Robespierre (comme de ses quatre proches)[52], le renie après coup dans ses multiples rapports sur le vandalisme mais ne modifie pas d'un iota ses positions sur l'esclavage. Le décret est même inscrit en 1795 dans la constitution de l'an III : les colonies deviennent des départements.
Dans un rapport sur les coloniesFrançois-Antoine de Boissy d'Anglas salue l'unique mesure positive à ses yeux prise par « la tyrannie ». Et en 1799 Garran-Coulon rend un hommage similaire au rôle de Danton, que pourtant les thermidoriens se sont refusés en 1795 à réhabiliter comme victime de Robespierre. Dans cette optique en 1796 est créée par des survivants de la société des Amis des Noirs tels que Lanthenas, Grégoire,Benjamin-Sigismond Frossard,Joseph Servan, ainsi que par d'autres antiesclavagistes d'horizons politiques divers comme Garran-Coulon,Jean-Baptiste Say, Charles Duval,Jacques Duplantier, Étienne Laveaux, une deuxième société, la Société des Amis des Noirs et des Colonies. Elle a pour but la consolidation du décret philanthropique et de la départementalisation de Saint-Domingue[53]. Mais dans un souci de concorde à l'instar deJulien Raimond et de Leborgne, les colons esclavagistes de Saint-Domingue sont libérés après Thermidor.
La seule vraie rupture qu'impose Thermidor est la fin de la lecture à la Convention des lettres de félicitations pour le vote du décret et annonces de fêtes qui affluent entre le et le[49]. Et à ce jour, dans le milieu thermidorien on ne trouve queJean Pierre André Amar etRobert Lindet qui ont manifesté une hostilité assez active au décret du 16 pluviôse an II, en étroite relation avec Page et Brulley qu'ils ont continué à fréquenter jusqu'à leur arrestation en. Encore ne doit-on pas oublier dans l'enthousiasme abolitionniste le rôle des Dantonistes invoqué auXIXe siècle par l'historienJules Michelet, dont il perçoit le mouvement comme étant à la gauche des Robespierristes auxquels ils paraissent« surtout vouloir ôter le monopole de la bienfaisance ». On peut alors comprendre que« dans une voie d'attendrissement qui étonnait, alarmait » [...] L'affranchissement des Noirs, et les scènes d’ivresse et d’enthousiasme qui en résultèrent, attendrissaient encore les cœurs[54] ».
L'affranchiToussaint Bréda — du nom de laplantation au Haut-du-Cap où il est né en 1743 —, futur Toussaint Louverture, exerce, malgré sa petite taille, un ascendant, tant par ses originesafricaines qu'on dit royales d'Allada que par ses qualités de lettré, de cavalier et de médecin par les plantes. Il devient le conseiller et l'aide de camp deGeorges Biassou[56], l'un des successeurs de Boukman, qui se rallie auxEspagnols de l'Est de l'île en1793, afin de combattre les colons et les Anglais. Parmi ses victoires, celle qui ouvre un passage dans la colonie et lui vaut le surnom de « L'Ouverture ».
Toussaint Louverture préfère ensuite éloigner les représentants de l'autorité métropolitaine, y compris Lavaux en et Sonthonax en, pourtant revenu comme commissaire civil, préférant les faire élire députés deSaint-Domingue à Paris, où il a besoin d'appuis et où a été fondé en une deuxièmeSociété des Amis des Noirs, la Société des Amis des Noirs et des Colonies, parGarran-Coulon,Lanthenas et surtout l'abbé Grégoire.
Grâce aux renforts arrivés de métropole en, il intensifie la lutte contre les Anglais qui tiennent de nombreux ports. Lassés d'un combat sans espoir, ceux-ci finissent par négocier directement avec lui lors de l'armistice du 30 mars 1798 et abandonnent Saint-Domingue le.
Interventions espagnoles et britanniques (1793-1798)
Mais la position anglaise évolue après laseconde guerre des nègres marrons de Jamaïque, en 1795-1796, dont la répression à l'aide de chiens est massivement critiquée en Angleterre[58], obligeant à en déporter 568 l'année suivante en Nouvelle-Écosse, au Canada[59] et à prendre en compte la difficulté à maintenir l'esclavage. Le gouverneur de la JamaïqueEdward Trelawny a déjà trouvé une solution en 1739-1740 en reconnaissant en pleinPays Cockpit une « république noire » avec la contrepartie qu'elle n'aide plus à fuir d'autres esclaves, et les Anglais infléchissent leur politique vers 1796-1797 en envisageant de négocier avec les noirs libres à Saint-Domingue.
Après leTraité de Whitehall d'avril 1793 signé par les grands propriétaires de Saint-Domingue avec les Britanniques, ils débarquent en deux points de Saint-Domingue le 19 septembre 1793. Le gros de leurs troupes vise avant tout le Nord de la colonie, plus riche, mais il y a aussi500 hommes de la garnison de la Jamaïque, qui débarquent àJérémie dans laPéninsule de Tiburon, qui s’étend au sud-ouest, avec les villes deJacmel,Les Cayes etLéogâne[60].
Le 13 juillet 1795, un rapport duComité de salut public salue les chefs militaires qui, « privés des secours de la métropole, et même des nouvelles de ce qui s'y passait, sont restés fidèles à leur patrie et ont combattu pour elle. ». Un décret de la Convention du même mois nomme Laveaux général de division et gouverneur provisoire. Les colonels Villate, Rigaud et Beauvais, ainsi que Toussaint-Louverture sont nommés généraux de brigade. Rigaud reprend à nouveauTiburon le 9 décembre 1795, à l'issue de la saison de lafièvre jaune, enlevant aux Anglais tout espoir de pénétrer dansLes Cayes. Il participe plus tard à la conquête de Port-au-Prince mais sans remonter vers le nord à la capitale de l'époque, leCap-Français[60].
Les anglais ayant eu recours à un grand nombre de soldats des« légions africaines au service de la Grande-Bretagne », en particulier celle connue sous le nom de « chasseurs de Dessources », qui s'était emparée fin 1795 du village des Verrettes, au nord de Port-au-Prince, Sonthonax scinde ensuite l'armée, pour créer des« compagnies franches, composées de nègres et de mulâtres libres », la Légion de l'Égalité, la Légion de l'Ouest, et la Légion du Sud[61].
Le printemps et l'été 1796 voient poindre les premières racines de la « guerre des couteaux ».Le 20 mars 1796, Rigaud, qui accuse Laveaux de favoriser les noirs est arrêté dans la capitale, leCap-Français, parJean-Louis Villatte, un noir nommégénéral de brigade depuis le. Louverture se joint à lui pour libérer le général Laveaux puis équipe 16 000 hommes avec les armes arrivées de France en mai, tandis que le 21 juillet 1796, les commissaires civils menés par Sonthonax arrêtent le général Rochambeau qui refuse d’occuper Santo Domingo. Le 6 août 1796, Sonthonax publie au Cap une constitution réclamant convocation d'une assemblée électorale unique et le 24 septembre 1796. Six députés pour toute la colonie sont élus parmi lesquels Sonthonax et Laveaux[61]. Au même moment, de « malheureux événements » surviennent en septembre 1796 dansLes Cayes et à Saint-Louis, où les victimes sont évaluées à plus de 200[61], fief de Rigaud, qui font l'objet d'un rapport défavorable envoyé au directoire par Sonthonax[61].
Le 15 janvier 1797, Rigaud, inculpé dans cette affaire, déclare qu'il n'abandonnera pas son poste[61]. Il charge alors, sans succès le commandant militaire de Miragoane de proposer à Toussaint Louverture une révolte contre Sonthonax[61]. Toussaint Louverture pousse cependant Sonthonax à rentrer en France dès l'été 1797. Entre-temps, en février 1797, s'inspirant d'un rapport deLouis-Pierre Dufay, un abolitionniste marié dans une famille sucrière du Nord de Saint-Domingue[63], qui est représentant de la colonie depuis septembre 1793 et acquéreur de plantations dans les années qui suivent, leConseil des Cinq-Cents subdivise la colonie en 5 départements, tandis qu'en mars le général britanniqueJohn Graves Simcoe débarque àPort Républicain, avec pour mission de favoriser les diverses revendication d'autonomie, afin d'enlever Saint-Domingue à la France. Mais en avril, Rigaud échoue toujours à reprendre le fort tenu par les Britanniques dans le port deLes Irois et le 3 mai, Louverture, confirmé comme gouverneur de la colonie, est même promu général de division par Sonthonax[61], ce qui irrite Rigaud[61].
Dès juillet dans l'Arrondissement de Vallières, près de l'ex-frontière espagnole, le colonelHenri Christophe, proche de Louverture, neutralise les anciennes troupes pro espagnoles de Jean François, « les vendéens de Saint-Domingue », soutenus par les Britanniques.John Graves Simcoe est alors remplacé dès août, par le général John Whyte[64].
En août1798, le général de division Toussaint Louverture négocie la reddition des Britanniques occupant encore l’Ouest de l’île. L’accord signé entre les deux parties prévoit notamment l’ouverture des ports de Saint-Domingue aux navires de commerce britanniques, alors même que la France est encore en guerre avec la Grande-Bretagne[65]. Legénéral Hédouville, supérieur hiérarchique de Toussaint en poste depuis, furieux d’une telle insubordination, s’émeut plus encore du contenu de l’accord. La dégradation de leur relation est telle que Toussaint organise en une révolte populaire forçant Hédouville à quitter l’île. La veille de son départ forcé, Hédouville décharge le généralAndré Rigaud contrôlant le Sud de l’île, de toute sujétion à l’égard de Toussaint Louverture.
La « guerre des couteaux » ou « guerre du Sud » est parfois présentée comme un conflit entre la « caste » desNoirs, représentés parToussaint Louverture, et celle desMulâtres, censés être représentés parAndré Rigaud car il a fait partie avant laRévolution française desgens de couleur libres. Cependant, selon l'historienFrédéric Régent, ce conflit n’est pas une question de couleur, mais une lutte pour le contrôle du territoire[66],[67]. Pour le professeur Paul Delmotte, on« peut aussi y voir la main des puissances étrangères »[60].
André Rigaud contrôle un Sud plus accidenté et moins riche, plus axé sur le café avec des implantations degens de couleur libres, séparé par des montagnes des plaines du Nord plus riches, où l'esclavage sucrier est plus ancien et plus riche. Conscient comme Louverture de l'opposition du lobby colonial et moins abolitionniste, il préfère se concentrer sur l’égalité entre mulâtres et blancs et constitue son armée avec l’aide de planteurs français, qui espèrent que laconvention commerciale tripartite de 1799, préparée depuis avril et signée en juin, cinq jours avant le début de la « guerre du Sud », peut faire changer la Métropole sur la question de l'esclavage. Prévisible dès 1798, elle cristallise pendant4 ans« la division entre Nord noir et un Sud mulâtre »[60].
Le terme de « guerre des couteaux » est cependant aussi utilisé pour les événements survenus dans le Nord de la colonie deux ans plus tard, en octobre-novembre 1801, et qui impliquent aussiLamour Desrances,« parce que seulement poignards et couteaux avaient été utilisés pour tuer »[68].
Le 27, ledirectoire envoie le généralGabriel de Hédouville, qui dès son arrivée en avril propose sans succès à Louverture de rentrer en France car il désapprouve l'armistice du 30 mars 1798 avec les Anglais. Son administration civile exige des réformes en déplorant un« esprit de vagabondage »[61], surtout favorisé par l'état de guerre permanent[61] depuis4 ans et demi, , selon la biographie deToussaint Louverture, écrite en 1877 par le bordelaisThomas-Prosper Gragnon-Lacoste grâce aux manuscrits personnels et archives confiés par Isaac, fils deToussaint Louverture[74]. Recoupés par les archives et témoignages des pères de l'histoire d'Haïti, Madiou et Ardouin[74], ces« précieux papiers de la collection Gragnon-Lacoste »[74] ont servi pour une autre biographie deToussaint Louverture, écrite en 1889 parVictor Schœlcher[74]. Ces demandes entrainent des règlements de culture ayant pour objet de rendre le travail obligatoire[61], édictés parLouis-Jacques Beauvais à Jacmel etAndré Rigaud ailleurs dans le Sud, mais des« moyens vexatoires » ne sont« employés que par Dessalines dans quelques arrondissements »[61]. Au cours de cette période, mi-1798, le secrétaire d'État américainTimothy Pickering confirme que les États-Unisacceptent la reprise des relations commerciales en cas de victoire de Toussaint Louverture mais le 22 août, André Rigaud récupère la ville deJérémie.
En août 1798[75]Gabriel de Hédouville est contesté puis chassé en, par une révolte populaire. La veille de son départ, il décharge le généralAndré Rigaud de toute sujétion à l’égard de Toussaint Louverture[61]. Dans la foulée, en janvier 1799André Rigaud décide ainsi de refuser de reconnaitre l’autorité de Louverture, car ce dernier est accusé de trahison par Hédouville.Port-au-Prince devient le nouveau siège de l'Agence du gouvernement français[61], où le nouveau commissaire de la RépubliquePhilippe-Rose Roume de Saint-Laurent[76], ex-commissaire-ordonnateur de l'île de Tobago, soutient Louverture contre Hédouville et écrit le 17 janvier 1799 à Rigaud, en lui proposant de concerter avec Louverture puis une autre le 22 janvier, où il laisse« percer ses appréhensions », car Rigaud, qui étend les frontières de son emprise sur le sud, n'obéit déjà plus[61]. Même s'il renonce à ses prétentions sur le Grand et le Petit-Goâve, il ne veut pas abandonner Miragoâne et, dès le 25 février 1799, Roume réinstalle l'Agence auCap-Français[61]. C'est l'époque où le projet de Roume d'invasion de la Jamaïque, s'appuyant sur les armes accumulées pour écraser Rigaud, est mis à bas par Toussaint Louverture, qui a dans ses propres plans l'amitié de l'Angleterre[74].
En avril 1799, Louverture reproche à Rigaud son insubordination et le soupçonne d'être manipulé par les exilés français. Roume écrit à Rigaud le 27 avril 1799, deux jours après la signature d'un premier accord d'approvisionnement avec les États-Unis, une lettre dans laquelle il salue cette décision de Louverture[61], prélude à la signature 13 juin de laconvention commerciale tripartite de 1799 avec l'Angleterre et les États-Unis. Quatre jours après, le 17Jean-Pierre Delva, issu d'une ancienne famille d'affranchis hostiles à Louverture », livre le fort duPetit-Goâve à deux lieutenants de Rigaud, Faubert etRenaud-Desruisseaux. Rigaud y envoie Faubert s’installer pour en faire une partie intégrante du département du Sud. Il livre la place au pillage, massacre tous les blancs puis obtient dans la foulée la chute du Grand-Goâve. C'est le début de la « guerre du Sud ».
Au cours de ce conflit de huit de mois,Lamour Desrances, qui a constitué un groupe rebelle dans laplaine de l'Arcahaie entrePort-au-Prince etSaint-Marc, après son évasion d'une plantation, est l'un des rares officiersnoirs à rejoindreAndré Rigaud, et il étend la guerre vers le nord-est. Le 30 septembre 1799, il organise « l'escarmouche de Soissons » du nom de la sucrerie de la famille bordelaise des Cellier-Soissons, une embuscade dans la Montagne aux abords de la sucrerie de la famille bordelaise des Cellier-Soissons dans les hauteurs de laPlaine du Cul-de-Sac, à l'est dugolfe de la Gonâve dans laquelle tombe une douzaine de blancs d'origine gasconne de la garde nationale dePort-au-Prince, menés par le capitaine Jacques-Joseph Lespinasse[77]. L'officier supérieurMagloire Ambroise sauve lui une centaine de familles, lors du siège deJacmel, qui est le moment fort de ce conflit militaire, ce qui lui vaut d'être nommé commandant de Jacmel en1802 parJean-Jacques Dessalines. Lors de ce siège deJacmel, qui dure trois mois, Rigaud reste cantonné dans Aquin[61] mais reçoit le soutien d'Alexandre Pétion, autres métis expérimenté qui a lui aussi vécu en France, où il a reçu une formation militaire en 1778[78].
Toussaint Louverture sort vainqueur de laguerre des couteaux[79], mais affaibli. Il a plus d'ennemis que jamais. En, après la prise de Jacmel par Toussaint Louverture, André Rigaud négocie son évacuation et s'embarque pour plusieurs destinations, avec pour objectif la France, en compagnie de deux chefs militaires expérimentés, les métisAlexandre Pétion etJean-Pierre Boyer[78]. Ils reviendront deux ans plus tard via l'expédition de Saint-Domingue, qui en fait à nouveau des officiers supérieurs.
Le frère d'André Rigaud, François Rigaud, autre chef militaire, et plusieurs de ses compagnons, partent eux pour la Guadeloupe, où ils sont bien accueillis mais plus tard fusillés par les troupes de Napoléon au printemps 1802[77].
Le combat contreAndré Rigaud, démarré cinq mois avant l'arrivée de Napoléon au pouvoir par la force en décembre 1799 s'est continué contre la volonté de ce dernier, qui envisage alors d'utiliser les armées haïtiennes pour conquérir la Jamaïque, où la production sucrière s'est envolée[80].
Toussaint Louverture privilégie dès les mois qui suivent la fin de cette guerre la remise en marche de l'économie en invitant les colons à revenir, y compris ceux qui ont choisi le parti contre-révolutionnaire. Il publie, le, un règlement de culture qui institue letravail forcé puis renforce sa position face à la Métropole, par le déploiement des troupes en janvier1801 dans lapartie espagnole de l'île d'Hispaniola, ce qui n'est finalement pas apprécié par Napoléon[80], d'autant plus qu'il étend à ce territoire l'abolition de l'esclavage[81].
Si le 18 février 1801, Bonaparte nomme Toussaint général de la partie française, il fait rayer secrètement le chef noir des cadres de l'armée dès le 29 mars suivant[80]. Trois mois plus tard, le, Toussaint Louverture promulgue laConstitution de Saint-Domingue de 1801 afin d'afficher une stabilité politique, objectif qui vire à la répression sanglante des troubles d'octobre-novembre 1801.
Assez peu documentée, une révolte de cultivateurs du Nord démarre dès« les derniers jours d’octobre 1801 » au cours de laquelle ils sont accusés de massacrer des blancs.Moyse Louverture, neveu et fils adoptif de Toussaint, apparaît« comme le porte-drapeau de la révolte »[82]. Il est alors l'un des deux généraux de division de la colonie[80], avecJean-Jacques Dessalines, après avoir joué un rôle important dans la conquête de la partie orientale de l'île avant 1795.
Commandant des soldats du Nord, avec sous ses ordres le colonelHenri Christophe, commandant du Cap-Haïtien, il est aussi « inspecteur général de culture » et affirme que les noirs n'ont pas conquis leur liberté pour rester assujettis à des propriétaires blancs via le travail obligatoire[83]. Il demande alors que l'État transfère la propriété de la terre aux officiers, soldats et cultivateurs, alors que la politique agraire deToussaint Louverture, à la recherche d'alliés internationaux, vise une prospérité plus immédiate, selon l'analyse de Paul Moral[84].
SelonCéligny Ardouin, lors de cette révolte,Toussaint Louverture etJean-Jacques Dessalines ont marché sur les secteurs tenus par les partisans deLamour Desrances, les obligeant à se disperser dans les forêts[85],[86]. Dans ses écrits, Toussaint Louverture accuse plus tardLamour Desrances, en déplorant que Leclerc l'ait fait général de brigade, d'être responsable du fait que les habitants de la Plaine du Cul-de-Sac aient été assassinés car il a poussé les cultivateurs à la révolte et pillé toute cette partie de l'île[87].
Selon d'autres sources, ces événements portent sur« les contradictions d’intérêts spécifiques entre les trois groupes sur la question de la propriété de la terre » les révoltés protestant contre le choix qui vient d'être fait de reconstituer la grande propriété. Le 24 novembre 1801,Moyse Louverture et treize des siens« sont exécutés au Grand-Fort, non loin du Port-de-Paix, après qu'une commission martiale ait rendu un jugement de mort, sur l'ordre » deToussaint Louverture. Ses aides de camp et secrétaires sont ainsi tous fusillés sans aucune forme de procès, selon lePetit précis historique des annales de la colonie française de Saint-Domingue, conservé aux Archives de la Vienne, recoupé avec le texte publié en 1820 par le généralFrançois Joseph Pamphile de Lacroix[88], qui pourrait par ailleurs être l'auteur du précis car sa publication de 1820« en livre la quintessensce ».François Joseph Pamphile de Lacroix, chef d'état-major de l'expédition de Saint-Domingue réussit les négociations et démarches conciliatrices permettant le ralliement d'une large partie de l'armée de Toussaint Louverture au printemps 1802 après celle des milices espagnoles, en reprenant les forts d'Ouanaminthe et de Laxavon, et les abords de la rivière du Massacre.
Toussaint Louverture« a-t-il manœuvré son neveu, qui ne s'est jamais comporté en coupable » ? C'est l'hypothèse développée par plusieurs universitaires et notamment étayée par l'historienPierre Pluchon dans la revue d'histoireOutre-Mers en 1992[80]. Toussaint Louverture aurait ainsi fait coup double en éliminant un important rival éventuel, tout en essayant« d'apaiser le courroux de Bonaparte en lui offrant la tête d'un rebelle à la République »[80].
Pierre Pluchon souligne le contenu de la proclamation du 25 novembre 1801, effectuée au lendemain de cette exécution deMoyse Louverture, dans laquelleToussaint Louverture se présente en« restaurateur de la paix, de l'ordre social traditionnel, en protecteur de la liberté, de la sûreté des gens et des propriétés, en artisan laborieux du redressement et de la prospérité économiques », une véritable« entreprise de séduction de l'autorité métropolitaine », qui sévèrement« flétrit la mémoire deMoyse Louverture », afin d'assurer la mort à ceux qui seraient tentés de suivre son exemple[80].
Au même moment, autre« geste de bonne volonté à l'égard de Paris », il décide plusieurs mesures de police pour« la sauvegarde des personnes et des biens »[80].
C'est le moment aussi oùToussaint Louverture« rappelle aux commandants militaires » que son arrêté relatif aux cultures du 12 octobre 1800 doit être « exécuté dans sa forme et teneur ». Toutefois, si l'économie de plantation fait l'objet de tant de soins,« rien n'est dit sur la propriété légitime des habitations, sur la restitution des plantations aux maîtres blancs en règle avec la loi »[80].
Le 20 décembre 1801, dans une seconde proclamation[89], Louverture corrige le tir dans l'autre sens, en flattant les réformes de la révolution haïtienne, notamment la promotion massive des noirs dans l'armée, car il a maintenant acquis« la certitude que Bonaparte, décidé à utiliser le rapprochement franco-anglais », confirmé par les préliminaires signés le1er octobre 1801,« hâte le départ d'une puissante expédition militaire »[80].
Le 20 décembre 1801, Toussaint Louverture écrit au président de l'Assemblée centrale de la colonie, une première lettre, lui demandant de consulter chacun des membres sur le projet de porter les 13 demi-brigades de l'armée de Saint-Domingue, au complet de 1 500 hommes chacune. Le lendemain, une seconde lettre, datée du 21 décembre, demande au même président de cette assemblée des mesures de recrutement car l'effectif, en incluant les gardes d'honneur, guides, canonniers et gendarmerie à cheval, se limite à 25 000 hommes. Louverture souligne alors sa volonté d'opposer à la force par la force, au besoin, pour préserver la Constitution du 3 juillet 1801, pourtant jugée séparatiste par Bonaparte[80].
Confirmant qu'il a envoyé chercher ses enfants, il évoque notamment« les malveillants font courir le bruit que la France viendra avec des milliers d'hommes » et« les nouvelles de la paix entre la France et l'Angleterre, laquelle ne peut être comme certaine, tant que le gouvernement ne me l'annoncera pas officiellement », pour fustiger ceux« qui n'ont pas honte de dire devant des officiers et des soldats, qui depuis le commencement de la révolution, ont répandu leur sang pour le triomphe de la liberté et la prospérité de cette isle, que la France viendra les réduire, replonger les soldats dans l'esclavage et détruire les officiers »[80].« Pensent-ils que la France veuille, sans motifs, détruire ses enfants de Saint-Domingue, qui, vainqueurs de tous ses ennemis, intérieurs comme extérieurs, lui ont conservé cette colonie, et l'arrachant des mains de l'anarchie, l'ont rendue florissante? »[80].
Louverture se lie alors avec le général Dessalines par de« nouveaux serments », pour« terrifier ce qui restait de Blancs » et« se procurer le plus grand nombre d'armes possible et de hâter les nouvelles levées »[80]. C'est seulement dès lors qu'il oblige tous les habitants à retirer une« carte de sûreté » dans les municipalités, fait incorporer les jeunes gens blancs dans l'armée et réunir les autres dans certains ports, inspecte les fortifications de l'île. Il fait arrêter Brouet, ex-juge du tribunal civil, propriétaire de magasins àKingston, en Jamaïque, et auCap-Français et de la plantation du Grand-Fond qu'il avait « abandonnée à la garde de Dieu et des infidèles », pour désigner la présence des hommes de l'Lamour Desrances[80].
Début janvier 1802, en inspection à Santo-Domingo, informé de l'arrivée imminente de Leclerc, Louverture écrit un nouveau manifeste à l'Assemblée centrale, daté du 22 janvier 1802, soulignant sa volonté de défendre la Constitution deSaint-Domingue[80].
Mais sa stratégie, sur fond d'arrivée surprise de l'expédition de Saint-Domingue,« trois mois plus tôt qu'on lui avait fait espérer », n'est pas de résister par des sièges ou batailles rangées à des Français mieux armés et équipés, mais de les« harceler » par une« guérilla générale » et imprévisible elle aussi[80].
En représailles,Napoléon Bonaparte, qui signe avec l'Angleterre les préliminaires de lapaix d'Amiens le, charge une expédition militaire de reprendre le contrôle de l'île. Composée de plusieurs escadres, réunissant des dizaines de milliers de soldats à bord de vaisseaux (le nombre de vaisseaux et de soldats embarqués varie selon les auteurs[90],[91]) , elle est menée par le généralLeclerc, beau-frère deNapoléon, mari dePauline Bonaparte[90].
Prise duCap-Français par le corps expéditionnaire en févier 1802.
Toussaint arrête une stratégie de défense issue dumarronnage : les villes abandonnées à la troupe expéditionnaire française sont incendiées et les troupes locales se retirent sur les hauteurs pour pratiquer une guerre d'usure. Lorsque le général Leclerc arrive au port du Cap en février1802, il donne un ultimatum de vingt-quatre heures au général Henri Christophe pour lui rendre la ville. Christophe lui répond alors ainsi :« Je ne vous livrerai la ville que lorsqu'elle sera en cendre et sur ces mêmes cendres je combattrai encore »[92],[93]. Les Français investissent le plus souvent des villes en ruines, comme auCap. Les Noirs résistent, mais reculent devant la puissance de l'armée de Leclerc. À la fin avril, au prix de cinq mille morts et autant de malades ou blessés, les Français tiennent toute la côte.
Les généraux de Toussaint Louverture, dontHenri Christophe (en avril) etJean-Jacques Dessalines, lors dusiège de la Crête à Pierrot, après trois semaines de combat inégal et sanglant en — se rendent aux Français après d'âpres combats, si bien que Toussaint Louverture lui-même accepte sa reddition en. Il est autorisé à se retirer sur l'une de ses plantations, à proximité du bourg d'Ennery, dans l'ouest de l'île, non loin de la côte. Plus tard, en partant pour laFrance, Toussaint prononce ces paroles :« En me renversant on n'a abattu àSaint-Domingue que le tronc de l'arbre de la liberté des noirs qui repoussera par ses racines car elles sont profondes et nombreuses. »
Le, Toussaint Louverture est arrêté malgré sa reddition etJean-Jacques Dessalines, défait par les Français à la Crête-à-Pierrot, participe à cette arrestation[94]. Louverture est déporté en France, il est interné aufort de Joux, dans leDoubs, où il meurt des rigueurs du climat et de malnutrition le, après avoir prophétisé la victoire des noirs.
Toussaint Louverture neutralisé,Leclerc reçoit l'ordre derétablir l'esclavage[95] et décide pour cela le désarmement de la population et le met en œuvre à grand renfort d'exécutions sommaires, asphyxie au souffre, noyades,molosses,déportations[96]. Les chefs de couleur se détachent alors peu à peu de l'expédition de Saint-Domingue et rejoignent les insurgés, prenant conscience que l'expédition de Saint-Domingue a essentiellement pour but de rétablir l'esclavage à Saint-Domingue.
C'est en apprenant lerétablissement de l'esclavage à la Guadeloupe qu'Alexandre Pétion donne le signal de la révolte, le. À la tête de cinq cent cinquante hommes, il marche contre le principal poste français du Haut-du-Cap, le cerne, le fait désarmer et sauve quatorze canonniers que les siens veulent égorger : l'armée des « indépendants » est alors formée. Les généraux Geffrard, Clervaux et Christophe viennent se joindre à Pétion, qui accepte de céder au dernier le commandement de l'insurrection.
Dessalines rejoint alors de nouveau les révoltés, dirigés parPétion, en octobre1802. Au congrès de l'Arcahaie (15-), Dessalines réalise à son profit l'unité de commandement. C'est lors de ce congrès que naît le premier drapeau haïtien, bicolore bleu et rouge, inspiré du drapeau français dont la partie blanche — considérée comme symbole de la race blanche et non pas de la royauté — est déchirée. Le, à la tête de l'armée des indigènes, avec à ses côtés Henri Christophe, il impose àRochambeau — le successeur de Leclerc, mort de la fièvre jaune en novembre 1802 — la capitulation du Cap après la défaite des 2 000 rescapés du corps expéditionnaire français décimé par la fièvre jaune face à plus de 20 000 insurgés à labataille de Vertières. Rochambeau capitule et négocie l'évacuation de l'île sous10 jours.
Selon Jean-Maire Théodat, le bilan humain de la Révolution haïtienne, du soulèvement des esclaves en 1791 aux massacres de 1804, s'élève à 10 000 colons et 46 000 soldats français tués, et à plus de 120 000 morts parmi les noirs etanciens libres[98].
L'indépendance d'Haïti installe au pouvoir l'élite de l'armée haïtienne, surtout constituée d'anciens affranchis. Cette élite se divise bientôt en deux factions : les défenseurs d'Alexandre Pétion, principalementmulâtres, et ceux d'Henri Christophe, largement noirs. Ces deux factions, constituant une classe citadine occidentalisée, se disputent le pouvoir tout au long du siècle, la ruralité étant reléguée dans ce que le sociologue Gérard Barthélemy appelle « le pays en dehors ».
La révolution haïtienne suscite des espoirs, lorsqueAlexandre Pétion en fait une base de repli pour les mouvements révolutionnaires d'Amérique latine. LorsqueSimón Bolívar revient en Haïti en, après avoir été battu en juillet à Ocumare et avoir perdu son armée, le gouverneur Escudero installé àSantiago de Cuba est le premier à informer le général espagnolPablo Morillo, chef de l'expédition pacificatrice à destination duVenezuela et de laNouvelle-Grenade du risque couru[101].
Le 28 février 1806, lesÉtats-Unis renversent la politique amicale lancée en 1798 et décrètent unblocus contre Haïti[102]. De riches planteurs américains avaient auparavant contribué à financer l’expédition française pour réprimer ce qu'ils percevaient comme une révolte d'esclaves[103].
Avec l'ancienne puissance coloniale : indemnisation des colons en échange de la reconnaissance de l'indépendance d'Haïti
Le 11 juillet 1825, sous la menace d'une escadre de 14 vaisseaux pourvue de 500 canons, le roi de France contraint leprésident Boyer au règlement de frais d'indemnités d'un montant de 150 millions defrancs-or. Condition à laquelle Charles X « concède », en souverain, l'indépendance de l'île[104],[105]. Dès 1826, les impôts qui ont été levés pour financer la dette sont la cause de révoltes paysannes. Sous lamonarchie de Juillet, en 1838, cette dette est réduite à 90 millions de francs-or parLouis-Philippe. En 1883, cette dette d'indépendance est entièrement honorée, cependant, le versement desagios de l'emprunt généré par cette dette s'étale jusque dans les années 1950, sous laQuatrième République.
La révolution haïtienne a pris appui sur une culture enracinée dans le culte des morts, vu comme un relèvement de la mort sociale que subissent les esclaves, culte à partir duquel ils ont construit un système de reconnaissance mutuelle. Cette capacité à se reconstruire est l'apport original de cette révolution. Le philosopheGeorg Wilhelm Friedrich Hegel, en étudiant la révolution haïtienne, en retire la leçon suivante :« Et c’est seulement par la mise en jeu de la vie qu’est ainsi éprouvée et avérée la liberté. L’individu qui n’a pas mis sa vie en jeu peut, certes, être reconnu comme personne ; mais il n’est pas parvenu à la vérité de cette reconnaissance, comme étant celle d’une conscience de soi autonome », écrit-il. Ce ne sont plus les philosophes qui enseignent aux peuples, mais ce sont les peuples qui enseignent aux philosophes[108].
La révolution haïtienne est « trop longtemps occultée », aussi bien par les politiques que par les historiens, selon Jean-Michel Caroit, journaliste auMonde, en particulier en France, alors qu'elle a « produit une conscience collective, une nouvelle façon de penser la question raciale et de concevoir l'identité nationale », selon l'universitaireMichael Dash[109]. Selon l’historien Jean-Pierre Le Glaunec, c'est clairement« la plus spectaculaire duXVIIIe siècle », qui a eu comme rôle « d’une certaine manière, de poursuivre et achever l’œuvre des révolutions française et américaine »[110].
L'Unesco lui consacre en août 2009 àPort-au-Prince un colloque international l'associant à« l'universal » en estimant que ce fut« un moment-clé de l'histoire de l'humanité »[109].
En Europe, mais aussi parfois aux États-Unis, « la presse a construit l'image d'une insurrection sanguinaire et sauvage ne méritant pas le nom de révolution » tandis que des historiens, de Michelet à Renan, « ont nié ou minimisé son impact », certains affirmant un peu rapidement que « le corps expéditionnaire de Napoléon, envoyé pour rétablir l'esclavage (...) n'a pas été défait par les combattants haïtiens, mais par les épidémies » subies par l'expédition de Saint-Domingue[109].
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↑FranckLaraque, « L’incessante lutte des masses haïtiennes pour la liberté et leur existence »,Tambour, revue trilingue haïtienne d’études politiques et littéraires,(lire en ligne).
↑Cahiers d'Haïti-25 avril 1944: 165° Anniversaire du départ du corps des chasseurs volontaires haïtiens qui s'en allèrent aux États-Unis d'Amérique dans leur lutte pour l'indépendance.« Ici se sont réunis les chasseurs volontaires de ce pays en instance de départ sous les ordres du comte d'Estaing pour la campagne de Géorgie. Plaque offerte par le comité du rapprochement haïtiano-américain »
↑Michel PlacideJustin,Histoire politique et statistique de l'île d'Hayti, Saint-Domingue, Paris, Brière,, p.232 :« Le maréchal de camp de Fontanges, commandant le cordon de l'Ouest, se hâta de reconnaître l'ancien pacte fédératif de Saint-Marc et de La Croix-des-Bouquets, et épargna par cette démarche le petit nombre de colons qui avaient échappé aux premiers massacres. Les chefs militaires de la colonie et toutes les paroisses de l'Ouest, à l'exception de Port-au-Prince, suivirent l'exemple de ce chef »
↑Général Pamphile de Lacroix,La Révolution de Haïti, Paris , 1995, réédition annotée par Pierre Pluchon, (index biographique. Page 475)
↑Paul Moral,Le Paysan Haïtien. Étude sur la vie rurale en Haïti, aux éditions Fardin en 1978, cité parLaraque 2005
↑Solon Ménos, Dantès Bellegarde etGeorges Sylvain,« Comment se concerta la lutte pour l'indépendance », dansAuteurs haïtiens: Morceaux choisis, Impr. de Mme F. Smith,(lire en ligne),p. 30
↑BernardGainot, « « Sur fond de cruelle inhumanité » ; les politiques du massacre dans la Révolution de Haïti. »,La Révolution française. Cahiers de l’Institut d’histoire de la Révolution française,(ISSN2105-2557,DOI10.4000/lrf.239,lire en ligne, consulté le)
↑AlainYacou,Essor des plantations et subversion antiesclavagiste à Cuba, 1791-1845, Paris/Pointe-à-Pitre, KARTHALA Editions,, 396 p.(ISBN978-2-8111-0401-6,lire en ligne)
↑CatherinePorter, ConstantMéheut, MattApuzzo et SelamGebrekidan, « À la racine des malheurs d’Haïti : des réparations aux esclavagistes »,The New York Times,(ISSN0362-4331,lire en ligne, consulté le).
↑Laënnec Hurbon, « La révolution haïtienne : une avancée postcoloniale »,Rue Descartes,(lire en ligne)
↑abcd eteJean-Michel Caroit, « La révolution haïtienne, trop longtemps occultée »,Le Monde,(lire en ligne).
↑« La révolution haïtienne, le saut impensable d’anciens esclaves dans la citoyenneté », le 11 mars 2020 surRadio Canada[6]
↑Cahier d'un retour au pays natal, par Aimé Césaire.
Philippe R.Girard,Ces esclaves qui ont vaincu Napoléon : Toussaint Louverture et la guerre d'indépendance haïtienne, Atlantide,, 478 p.(ISBN2371250457)