La République nourrit ses enfants et les instruit. Tableau d'Honoré Daumier, 1848.
Larépublique est un mode d'organisation d'un pays dans lequel le pouvoir est exercé par des représentants de la population, généralementélus, et où lechef d'État n'est pas héréditaire et n'est pas le seul à détenir le pouvoir. Une république est le contraire d'unemonarchie héréditaire, mais n'est pas toujours synonyme dedémocratie[1],[2],[3],[4].
La république est, en 2021, la forme derégime politique la plus répandue dans le monde : sur 197pays, 152 sont officiellement des républiques[5].
Le mot « république » provient dulatinres publica qui signifie au sens propre « chose publique » et désigne l’intérêt général puis le gouvernement, la politique et enfin l’État.La République dePlaton, laPolitique d'Aristote etDe la république (De Republica : « de chose publique ») deCicéron traitent tous des formes degouvernement.Res, en langage juridique latin, désigne l’affaire à traiter en justice[6]. Historiquement il s'agit de la cause de laplèbe, plaidée par letribun — représentant des « tribus » — devant leSénat romain composé des patriarches des familles connues deRome.
En 1576,Jean Bodin la définit dansLes six livres de la République comme le« droit gouvernement de plusieurs ménages et de ce qui leur est commun, avec puissance souveraine ». Cet ouvrage décrit les principes symboliques et l'organisation juridique de lamonarchie française où le terme de république est, bien que complexe dans son emploi, synonyme de la souveraineté d'un prince dans l'ordre de la loi naturelle[7]. DansDu contrat social,Jean-Jacques Rousseau la définit comme« tout État régi par des lois, sous quelque forme d'administration que ce puisse être ; car alors seulement l'intérêt public gouverne et la chose publique est quelque chose. Tout gouvernement légitime est républicain. » Le terme est clairement synonyme de « gouvernement », de « bonnegouvernance ». Plusieurscourtisans duXVIIIe siècle écrivent despoèmes où ils louent la bonne gestion parLouis XIV de la république.
République prend alors le sens de communauté d'esprit ou d'idée, dans le sens d'une recherche du bien commun dans un domaine donné[8]. On trouve chezBlaise Pascal le concept de « République chrétienne » (Pensées, liv. XXIV, 15) que reprennentVoltaire[9] ou Rousseau dans leurs écrits[10]. On voit encore apparaître celui de « République des Lettres » comme chez Montesquieu (Lettres persanes, CXLII[11]).
Par la suite, enfrançais, le mot s'est confondu avec le motdémocratie par opposition audespotisme et à lamonarchie[12]. Une évolution de sens notable s'est opérée dans l'histoire récente, puisque jusqu'auXVIIIe siècle la tradition opposait, d'après laPolitique[13] d'Aristote, le régime issu de l'élection qui repose sur le choix de quelques-uns des citoyens selon leur mérite, leurs compétences ou leur richesse (l'oligarchie etl'aristocratie, qui devinrent par la suite la république), et un régime issu au moins partiellement dutirage au sort[14] qu'il appelle démocratie. Le sens et l'intérêt du régime démocratique s'expliquait alors pour Aristote par l'idée de liberté politique, selon laquelle un citoyen est libre dès lors qu'il a alternativement le pouvoir de gouverner et d'être gouverné[15]. Cette assimilation récente s’explique par l’histoire politique moderne des révolutions américaines et françaises, lors desquelles le problème de l'adoption de la démocratie a été débattu parmi les constituants qui la refusaient (notamment l'abbéSiéyès), lui préférant l'idée d'ungouvernement représentatif, autrement dit républicain[16],[17].
Lerégime de Vichy est fondé en opposition avec laRépublique qui avait, aux yeux des partisans dumaréchal Pétain, provoqué la décadence du pays. Le nom officiel du régime politique est alors « État français ».
Monarchies constitutionnelles dans lesquelles le monarque n'exerce que peu ou pas le pouvoir (le monarque a souvent une autorité constitutionnelle et morale élevée)
Monarchies semi-constitutionnelles dans lesquelles le monarque exerce la majorité des pouvoirs, souvent avec un parlement disposant de faibles pouvoirs
Unerépublique islamique est la forme de gouvernement prise par un État qui n'a pas de monarque et où la gouvernance s'aligne sur le dogme de l'islam, comme c'est le cas enIran, enAfghanistan ou auPakistan.
À Rome, laRépublique romaine (instaurée en-509) fait suite à lamonarchie des roisétrusques. C’est uneoligarchiepatricienne. La conduite de la République est aux mains desconsuls qui sont au nombre de deux et élus pour un an. Le principal organe constitutionnel est leSénat qui réunit les représentants des familles patriciennes.
Ce concept est inventé par les Romains (res publica, la chose du peuple), ainsi de Rome, nous avons gardé le culte de la loi (lex), l'autorité du Sénat, le symbole du faisceau des licteurs... et l'idée de la dictature, dont les institutions romaines autorisaient le recours quand les circonstances l'exigeaient. L'article 16 de la Constitution de 1958 s'en est inspirée[18].
Dans ladémocratie athénienne, c'est le tirage au sort qui désigne les représentants du peuple et non le vote comme pour ceux du peuple romain. Dans les deux cas, esclaves, femmes et non-citoyens sont exclus de tout rôle politique (cependant les femmes sont nécessaires pour transmettre la citoyenneté).
Certaines cités échappent au pouvoir féodal et conservent leur autonomie politique. Dans leSaint-Empire romain germanique on parle deville libre d'Empire, dans leroyaume de France deville franche. Rétrospectivement les historiens baptiseront de « république » cette forme nouvelle de gouvernement urbain oligarchique[19] qui émerge alors. (Par exemple : La ville de Metz en Moselle est la première république oligarchique d’Europe après la chute de l’empire romain. Elle se fera appeller la « république messine »).
Républiques deGênes et deVenise : la plus célèbre, la plus riche, la plus puissante de ces villes indépendantes est alors larépublique de Venise, terme moderne pour désigner ce que les Vénitiens d’alors appelaient « duché » (ducato) avec, à sa tête, ledoge (proprement : « le duc »). Plusieurs cités italiennes, dontGênes, connaissent des régimes politiques que les modernes nomment républiques mais qui sont des aristocraties.
Quasi-républiques territoriales : sur le massif alpin, un certain nombre de territoires ont des fonctionnements politiques originaux plus que centenaires parfois même des quasi-fédérations républicaines ; des fonctionnements politiques inhabituels. Dans la pratique les droits seigneuriaux sont rachetés par les communautés. Des conventions de rentes-impôts fixes versées volontairement sans contrôle fiscal étatique et des contre-parties complexes de collaboration-défense sont signées. En fonction des poussées d'expansion territoriale, les communautés font reconnaître et confirmer leurs particularismes politiques. Leurs statuts ressemblent aux « francs-bourgeois » car il n'y a pas de service féodal. Lestutelles sont parfois remplacées, marchandées secrètement à l'initiative des communautés. Elles sont nommées alors « déditions ».
exemple : en1383, les habitants deSaint-Paul-sur-Ubaye demandent au comte de SavoieAmédée VII d'annexer leur commune. Il le fit et prolonge les privilèges anciens. Cinq années plus tard en1388, le reste de la vallée fait cette même démarche.
La république desProvinces-Unies : à la suite de l'acte de La Haye en 1581, les Sept Provinces deviennent officiellement un des premiers pays du monde moderne à devenir une république.
La définitionhumaniste d’un État libre, d’un État sans roi, se trouve chezBartolus de Saxoferrato (De regimine civitatis, vers1350),Coluccio Salutati (De tyranno, Florence,1400) etLeonardo Bruni (Laudatio fiorentinæ urbis, 1403-04). Ils utilisent alors le terme latin decivitas (« citoyenneté, ensemble des citoyens ») qui donne « cité » en français.
Fondée à la Renaissance, larépublique des Deux Nations remplace la monarchie polonaise par le gouvernement de l’aristocratie polono-lituanienne dans la droite ligne des oligarchies antiques.
En1581, quand les Pays-Bas s’affranchissent de la tutelle espagnole et fondent la première république européenne digne de ce nom ils adoptent le nom deProvinces-Unies. Quand les Anglais secouent le joug de la royauté en1649, ils fondent leCommonwealth, mot anglais qui reprend l'idée deres publica[20].
Larépublique du Bouregreg ou république de Salé est fondée en 1627, elle est de ce fait l'une des premières républiques à avoir été fondée dans le monde.
Auparavant, la cité est gouvernée par un évêque. Les plus riches artisans sont représentés par dessyndics qui obtiennent en 1387 la participation au gouvernement.
À partir de laréforme protestante, l'évêque est chassé, et les syndics prennent le pouvoir dans une oligarchie ploutocratique, dénommée "république".
La République est renversée par larévolution française en 1792, puis est restaurée de 1814 à 1847 sous le nom deCanton de Genève. Aujourd'hui encore, le nom officiel est "République et Canton de Genève".
Dans les années qui suivent la proclamation de laRépublique française, le modèle politique est largement exporté : laRépublique batave naît en 1795, c’est la première et la plus durablerépublique sœur de la France. La République ne s'oppose pas nécessairement à l'Empire. En effet toujours dans l'exemple de la République française, en 1804 le gouvernement français remet à l'Empereur la conduite de la République ; celle-ci ne disparaît pas avec le nouveau régime, le premier article de la constitution du Premier Empire proclame : « Le Gouvernement de la République est confié à un Empereur qui prend le titre d'Empereur des Français. »
↑Émile Littré,Dictionnaire de la langue française, éd. 1873 « république », sens 1 à 5.v.aussi Giovanni Bianco, Repubblica, in Digesto IV, disc.pubbl., Utet, Torino, 1997, XIII.
↑Voltaire,Histoire de la Guerre de 1741, éd. Garnier Frères, 1971,p. lx.
↑Jean-Jacques Rousseau,Texte de J.J. Rousseau : Principes du droit de la guerre ; Écrits sur la paix perpétuelle, Paris : Vrin, 2008,p. 318.
↑Émile Littré,Dictionnaire de la langue française, éd. 1873 « république », Syn. dans le sens où « démocratie est l'opposé de l'aristocratie ou république aristocratique. »
↑Dimitri Casali, Jean-François Chemain,Petit manuel des valeurs et repères de la France, Monts 37260, éditions du Rocher,, 158 p.(ISBN978-2-268-09662-9),p. 49
↑Jean-PaulStraetmans, « Des villes en révolte. Les « Républiques urbaines » aux Pays-Bas et en France pendant la deuxième moitié du XVIe siècle,éd. Monique Weis »,Cahiers de recherches médiévales et humanistes. Journal of medieval and humanistic studies,(ISSN2115-6360,lire en ligne, consulté le)
↑FrançoisQuastana et PierreSerna, « Le républicanisme anglais dans la France des Lumières et de la Révolution : mesure d’une présence »,La Révolution française. Cahiers de l’Institut d’histoire de la Révolution française,no 5,(ISSN2105-2557,lire en ligne, consulté le)