Laprostitution (du latinprostitutio) est une forme d'échange économico-sexuel : offre d'un acte sexuel contre rémunération. Elle recouvre généralement un espace social hétérogène composé souvent d’individus issus de milieux modestes ou très modestes, parfois marginaux, qui trouvent dans cette activité un moyen d’existence et de subsistance. Elle est à 80 % exercée par desfemmes[1] même s'il existe uneprostitution masculine. Les études sur la prostitution montrent que« l'immense majorité des clients de la prostitution sont des hommes »[2],[3]. En France, selon les chiffres de la proposition de loi visant à sanctionner les clients de prostituées de 2013, 99 % des clients sont des hommes alors que 85 % des prostituées sont des femmes[4]. En 2012, de 40 à 42 millions de personnes se prostituent dans le monde, neuf sur dix d'entre elles dépendent d'unproxénète et les trois quarts d'entre elles ont entre 13 et 25 ans[1]. Le statut légal de la prostitution varie selon les pays et peut également être classé de l'illégalité aux activités légales professionnelles. En 2010, les revenus annuels de la prostitution sont estimés à plus de 187 milliards dedollars[5]. Un à deux millions de femmes dans le monde sont vendues chaque année comme des objets sexuels pour la prostitution par des réseaux internationaux, la majeure partie venant depays pauvres pour être exploitée notamment dans despays riches[6].
D'un point de vue législatif, on peut distinguer trois conceptions de la prostitution, produisant trois approches politiques des États sur son exercice : leréglementarisme, l'abolitionnisme (et sa variantenéoabolitionniste) et leprohibitionnisme. Qu’ils condamnent ou qu’ils administrent la prostitution, qu’ils fassent des personnes prostituées des coupables ou des victimes, ces régimes convergent néanmoins dans leurs enjeux et dans leurs effets quant à la définition de la prostitution comme un « problème public ».
La prostitution est régulièrement l'objet de vives controverses entre politiques et intellectuels qui sont en faveur d'une légalisation de l'activité et ceux qui sont partisans de son interdiction[7]. De telles controverses ont notamment lieu au sein des mouvementsféministes.
ÀRome, comme ailleurs dans le bassin méditerranéen, ceux qui possèdent des esclaves peuvent en user à leur guise puisque l'esclave est une propriété privée. La femme esclave est d’ailleurs exclue du champ d’application des lois sur l’adultère : son compagnon ne peut l’accuser, que son amant soit le maître ou un tiers. Par ailleurs, les lois condamnant les maîtres qui prostituent leurs esclaves sont si peu efficaces qu’elles vont être souvent reproclamées duIer au IVe siècle, de même que les lois assimilant à l’adultère les rapports sexuels entre la maîtresse et son esclave. Cependant, la prostitution reste florissante à Rome où elle se présente sous des formes multiples : les prostitués se trouvent en maison signalée par des bougies allumées pendant les heures d'ouverture[8], dans desauberges, dans des loges, ou dans la rue, devant lesarcades (appeléesfornix d'où le terme defornication) comme devant la porte de leurs domiciles. Dans les maisons closes, le client peut échanger un type de jeton, appeléspintria, contre une faveur sexuelle spécifique[9]. Très tôt, dès leIIe siècle av. J.-C., les prostitués sont inscrits sur unregistre spécial et doivent être munis d’une licence d’exercice. Civilement, ils sont frappés d’indignité. Leur condition varie, des plus miséreuses, esclaves, aux courtisans et courtisanes de luxe dont les services se monnaient très cher. Les réseaux sont alimentés par le trafic d’esclaves alimenté par lesguerres et lapiraterie : àDélos, 10 000 esclaves sont vendus chaque jour, et dans l’empire ce sont des dizaines de milliers d’enfants et d’adolescents qui approvisionnent chaque année ce marché de la prostitution.
Les sociétésjudéo-chrétiennes connaissent la condamnationprohibitionniste depuis les premiers temps dujudaïsme. Cette interdiction s'est imposée dans l'Empire romain en parallèle de l'adoption duchristianisme. Les mesures abolitionnistes, malgré leur inefficacité patente, sont maintenues jusqu'auXIIe siècle. À cette date, une relative période de tolérance commence, accompagnée d'une réglementation adaptée. AuXVIe siècle, à la suite des ravages de lasyphilis venue duNouveau Monde qui touche toutes les couches de la société, l’opprobre sur lasexualité hors des liens du mariage réapparaît fortement dans toute l'Europe. LeXIXe siècle voit l’émergence d’une certaine tolérance étatique et d’un encadrement juridique et sanitaire. À la fin duXIXe siècle, avec les combats deJosephine Butler, l'abolitionnisme moderne naît enGrande-Bretagnevictorienne.
La philosophe américaineJudith Butler affirme que « toute féministe digne de ce nom devrait s'occuper de la syndicalisation des prostituées » et regrette que les positions abolitionnistes et prohibitionnistes privent « de la capacité de consentir »[11],[12]. À l'inverse, la juristeCatharine MacKinnon affirme que « Judith Butler et les autres sont seulement des voix pour une certaine forme de misogynie et de déni » et soutient un lien entre prostitution,pornographie etviolence faite aux femmes[13],[14]. EnFrance un débat similaire oppose notammentÉlisabeth Badinter àSylviane Agacinski[11].
Lois et politiques
Survol de l'état des lois
Certaines juridictions interdisent l'acte de prostitution (l'échange de services sexuels pour de l'argent) ; d'autres pays n'interdisent pas la prostitution, mais interdisent les activités typiquement associées avec la prostitution (la sollicitation dans un lieu public, l'exploitation d'un bordel, le fait de fournir des locaux pour la pratique de la prostitution, le proxénétisme, etc), ce qui rend difficile de se livrer à la prostitution sans enfreindre la loi ; tandis que dans un petit nombre de pays la prostitution est légale et réglementée.
Dans les pays qui permettent la prostitution, on peut distinguer deux situations différentes : les pays où la prostitution est tolérée seulement parce qu'il n'y a pas une loi spécifique qui interdit l'acte (en général ce sont des pays qui interdisent la prostitution organisée), et les pays où la prostitution est légaleet réglementée : ici il y a une loi spécifique qui autorise explicitement la pratique si certaines conditions sont respectées (par exemple si la prostituée est enregistrée auprès de l'organisme compétent, si elle subit des contrôles de santé réguliers, etc. ; en général ce sont des pays qui permettent les maisons closes). Les références associées à chaque pays pointent soit sur un article précisant l'existence de la prostitution dans le pays, soit sur des références légales.
En décembre 2014, le Canada a changé d'approche dans la réglementation de la prostitution, en passant d'une politique législative qui réprimait les actes de prostitution par les prostituées vers un régime juridique qui réprime surtout l'achat de services sexuels par les clients, tout en maintenant l'interdiction du proxénétisme et de tirer autrement profit de la prostitution[15].
France
En France, depuis la loi du 13 avril 2016[16],[17], l'exercice de la prostitution est toléré mais l'achat de services sexuels est interdit.
Leproxénétisme, y compris le « proxénétisme hôtelier » (mise à disposition de chambres) et le « proxénétisme de soutien » (notamment « l’aide, l’assistance, ou la protection de la prostitution d’autrui ; tirer profit de la prostitution d’autrui ») sont également interdits.La loi sur le proxénétisme est particulièrement sévère lorsque le proxénète agit sur des mineurs, des personnes vulnérables comme les femmes enceintes ou les handicapés.[réf. souhaitée]
Droit de l'Union européenne
Au niveau du droit européen, l'exercice de la prostitution en tant qu'activité indépendante tombe dans le cadre de la libre circulation des services, tel que prévu par l'article 56TFUE[18],[19].
Traitement politique
État de la législation dans le monde
Prostitution légale et encadrée par des lois
Prostitution dépénalisée (pas de poursuites pénales pour les personnes prostituées)
Prostitution tolérée, pas légalisée, et donc pas réglementée. Les activités organisées (maisons closes ou proxénétisme) sont illégales
Recours à la prostitution illégal (seuls les clients sont punis par la loi)
Prostitution illégale (les personnes prostituées et les clients sont punis par la loi)
Traditionnellement, on classe les positions politiques sur la prostitution en trois positions distinctes, proposant pour la prostitution des cadres juridiques différents. Si ces positions ont des vues différentes sur la nature même du fait prostitutionnel, elles ont en commun d'envisager la prostitution comme unproblème social, que ce soit pour des raisons sanitaires, morales ou sécuritaires.
Leréglementarisme préconise l'encadrement de la prostitution, vue comme un mal nécessaire, par les autorités. Ainsi, pour Saint Augustin, « supprime les prostituées, et les passions bouleverseront le monde ; donne-leur le rang de femmes honnêtes, l'infamie et le déshonneur flétriront l'univers » . PourAlexandre Parent du Châtelet, père des égouts parisiens et du réglementarismehygiéniste, « les prostituées sont aussi inévitables dans une agglomération d’hommes que les égouts, les voiries et les dépôts d’immondices […] elles contribuent au maintien de l’ordre et à la tranquillité de la société » , mais « elles sont aussi une menace morale, sociale, sanitaire et politique » , il faut donc « réglementer leur mise à l’écart pour qu’elles ne risquent pas de transmettre leurs vices aux femmes honnêtes »[26]. Cet encadrement des prostituées peut se faire par la restriction des prostituées dans desmaisons closes, ou par des lois les soumettant à un fichage et à des examens médicaux réguliers obligatoires.
Au cours des dernières décennies, le paysage politique s'est recomposé avec l'émergence de deux nouvelles approches politiques de la prostitution.
Lenéoabolitionnisme, dans les pays qui ont obtenu l'abolition des réglementations réprimant la prostitution, réclame maintenant « l'abolition de la prostitution », c'est-à-dire une politique visant activement à mettre fin à l'existence de rapports prostitutionnels. S'il s'agit d'une recomposition du mouvement abolitionniste, qui continue parfois à en porter le nom, ce mouvement est parfois qualifié de « néoprohibitionniste » puisqu'il préconise la pénalisation des clients de la prostitution afin de décourager la demande d'achat d'actes sexuels. Ce modèle est adopté dans neuf pays : la Suède, l'Islande, la Norvège, la France, le Canada, l'Irlande, l'Irlande du Nord, Israël et l'État du Maine aux États-Unis et est recommandé par le Parlement européen[28]. La prostitution y est illégale, mais seuls les clients et les proxénètes sont punis par la loi. Des rapports mentionnent des bilans contrastés concernant les lois néoabolitionnistes norvégiennes, la précarisation des prostituées n'ayant pas diminué[29].
Lesyndicalisme, parfois appelé « anti-abolitionnisme » ou « dérèglementarisme », réclame la suppression de la spécificité de la prostitution dans la loi et son encadrement par le même droit du travail. Utilisant le terme de « travailleur du sexe » pour qualifier l'activité prostitutionnelle, les syndicalistes considèrent la prostitution comme une activité professionnelle à part entière. Inspirés par lemarxisme, les mouvements syndicalistes considèrent que les prostituées sont victimes d'exploitation, comme tout salarié ou travailleur indépendant fournisseur de service, mais préconisent en premier lieu l'auto-organisation des travailleurs et travailleuses du sexe pour lutter contre leur exploiteurs. Ce courant est souvent confondu avec le réglementarisme ou considéré comme une émanation de celui-ci, mais les syndicalistes récusent une telle filiation[30].
En France, une proposition de loi visant à pénaliser les clients de la prostitution déposée en 2011 fait fortement débat. Une nouvelle proposition de loi similaire est déposée le 10 octobre 2013 par le groupe socialiste à l'Assemblée nationale, suscitant également de vifs débats. Elle est adoptée à l'Assemblée nationale le 4 décembre 2013, et modifiée auSénat, qui supprime l'article relatif à la pénalisation des clients, soulignant les « effets délétères » qu'une telle mesure pourrait engendrer[31], et rétablit le délit de racolage. Le texte est adopté en lecture définitive en avril 2016, puis promulgué, dans la version de l'Assemblée nationale.
L'écrivaineFlorence Montreynaud soutient[32]« qu’il n’y a pas de prostituées heureuses, il n’y a pas de putaniers heureux ». Les personnes en situation de prostitution sont particulièrement sujettes à être victimes de violences, d'après l'Organisation mondiale de la santé[33]. Ces personnes peuvent être victimes de proxénètes qui les réduisent à l'esclavage pour s'approprier leurs revenus. Elles sont également très exposée auxmaladies sexuellement transmissibles. Certains usagers dedrogues, le plus souvent l'héroïne ou lecrack, obtiennent leurs drogues principalement grâce à la prostitution. L'addiction aux drogues est parfois forcée par les proxénètes, comme moyen d'avoir une emprise sur les personnes qu'elles prostituent.
La prostitution est généralement aux mains de lacriminalité organisée, selon Sabine Dusch, la prostitution engendrerait un chiffre d'affaires mondial de 60 milliards d'euros[34]. En 1998, l'Organisation des Nations unies estimait que, chaque année, quatre millions de personnes se prostitueraient, ce qui générerait entre 5 et 7 milliards de dollars US de profits aux groupes criminels[35]. Avec l'explosion de la pornographie sur internet, la prostitution s'est répandue sur le web : sur les applications de rencontre, les réseaux sociaux comme Instagram et TikTok, les plateformes pornographiques, les plateformes de caming commeOnlyfans etMym ou les "sex shows" par webcams, pouvant concerner des viols sur mineurs et des viols incestueux[36],[37]. Les réseaux sociaux jouent un rôle central dans le proxénétisme et la prostitution des mineurs. À titre d'exemple, en France le nombre d'affaires judiciaires concernant la prostitution de mineurs sur internet a été multiplié par 9 entre 2015 et 2022[38]. Ces plateformes sont devenues des espaces de rabattage pour lesproxénètes[39],[38]. Laprostitution forcée et l'esclavage sexuel peuvent constituer uncrime de guerre et uncrime contre l'humanité[40].
Selon une enquête internationale réalisée pour l'ONU à travers six pays d'Asie mineure[41], avoir recours à la prostitution est un des facteurs à risque d'importance significative dans la prévalence des violences masculines envers les femmes, aussi bien des violences physiques et psychologiques que sexuelles, dans la sphère intime ou plus largement dans la société.
Pour les riverains, la prostitution de rue est souvent très mal vécue car, en termes d'image,elle aurait pour conséquence indirecte de dévaloriser les propriétés du quartier.[réf. souhaitée] Les riverains se plaignent parfois de nuisances causées par les prostituées et se montrent favorables à l'option du cantonnement de la prostitution dans des maisons closes ou des zones urbaines spécifiques, mais cette option relève de la logique NIMBY (Not in my back yard - « pas dans ma cour ») et a pour seul but, tout comme la répression du racolage, de chasser la prostitution de l'espace public pour la reléguer dans des lieux clandestins ou des zones isolées bien que les prostituées pourraient y être encore plus vulnérables[42].
Certaines femmes sont amenées, par letrafic d'êtres humains, à se prostituer. Dans le cadre spécifique de laprostitution forcée, des réseaux criminels peuvent utiliser des techniques de contrainte comme la confiscation de papiers d'identité, le chantage familial, la surveillance par des souteneurs. Il arrive que les prostituées soient l'objet de trafic et soient vendues. Elles peuvent également être droguées de force afin d'être plus faciles à prostituer. Les destinations les plus communes pour les victimes de la traite des êtres humains sont laThaïlande, leJapon,Israël, laBelgique, lesPays-Bas, l'Allemagne, l'Italie, laTurquie et lesÉtats-Unis, selon un rapport de l'Office des Nations unies contre la drogue et le crime[43] de 2007. Beaucoup de femmes, dans le cadre de cette activité, émigrent vers des pays parfois très éloignés[44]. Les principales sources de traite de personnes comprennent laThaïlande, laChine, leNigeria, l'Albanie, laBulgarie, laBiélorussie, laMoldavie et l'Ukraine[43].
Laprostitution des enfants est un problème grave dans de nombreux pays. Les enfants sont contraints à la prostitution par les structures sociales et les agents individuels. La pauvreté, les problèmes sociaux, la corruption et la criminalité contribuent à la prolifération de la prostitution des enfants.
Les adolescent.es n’ont aucune difficulté à ouvrir un compte de caming à l'aide d’une fausse identité et à s’improviseracteurs ou actrices porno. Certain.es camgirls ou camboys sont des enfants prépubères manifestement exploités[46]. Les plateformes de caming commeOnlyFans,Mym ouChaturbate participent à« la banalisation de la sexualité marchande » et jouent un rôle central dans leproxénétisme des mineur·es qui a explosé ces dernières années, dont les affaires judiciaires sont passées de 21 en 2015 à 192 affaires en 2022[47]. Les proxénètes utilisent les réseaux sociaux pour repérer un·e enfant dès 12-14 ans, le séduire en jouant les amoureux, en lui promettant du succès et l'amènent vers la prostitution en ligne ou dans la vraie vie[47],[48]. Ces plateformes sont devenus des espaces de recrutement, aussi bien pour les producteurs defilms pornographiques que pour les proxénètes. Les même techniques de rabattage en proxénétisme sont utilisées dans lapornographie : mise en confiance par lamanipulation «love boy», promesses de fortune, emprise etviol d'abattage visant à casser les capacités de réaction et de résistance (choc traumatique qui sature le fonctionnement du cerveau et entraîne une décorporalisation extrême)[49], pour ensuite livrer la victime aux producteurs/proxénètes qui commettront des violences sexuelles, physiques, émotionnelles et psychiques filmées. Les abus de faiblesse peuvent devenir constants[47]. Ces sites de streaming live sont parfois utilisés pour commander desviols par webcam, des violspédocriminels et des violsincestueux[50],[51].
EnInde, la police fédérale a annoncé qu'environ 1,2 million d'enfants sont soupçonnés d'être impliqués dans la prostitution[52].
EnThaïlande, le nombre exact d'enfants en situation de prostitution n'est pas connu, mais leThailand's Health System Research Institute soutient que les enfants représenteraient 40 % des prostitués thaïlandais[53].
AuxPhilippines, il y a 60 000 à 100 000 enfants prostitués, selon l'UNICEF et des organisations non gouvernementales[54].
EnColombie, on estime qu'il y a entre 35 000 enfants situation de prostitution, dont 5 000 à 10 000 d'entre eux dans les rues deBogota[55],[56].
EnSuisse, la prostitution était légale pour les mineurs de 16 à 18 ans jusqu'en 2013[57].
Une prostituée urbaine s'adressant à un client potentiel àTurin, enItalie, 2005.
Autour de la prostitution s'est créé un vocabulaire argotique pour décrire l'activité ou la personne l'exerçant. Le plus souvent, ces expressions ont pris un caractère péjoratif. On qualifie par exemple une prostituée - mais aussi une femmelibertine - de « femme de mauvaise vie ». Les prostituées peuvent également être appelées « filles de joie », dans un registre plus enjoué et moins péjoratif.
Faire le trottoir :métonymie décrivant la façon dont la prostituée attend un client. Le terme « péripatéticienne » est également utilisé pour désigner les prostituées « faisant le trottoir », renvoyant au terme grecperipatein (se promener)[58]. En créole d'Afrique de l'Ouest, une prostituée est une « trottoire » ou une « cul-boutique », d’où l'expressionfaire boutique mon cul[59].
La prostitution est parfois appelée« le plus vieux métier du monde » (expression employée pour la première fois parRudyard Kipling en 1888 dans sa nouvelleSur le mur de la ville en pleineère victorienne puis reprise par les professionnels de la santé au début duXXe siècle[60]), ce qu'interroge l'historienneMichelle Perrot. Dans l'Ancien Testament, voirTamar (Bible) etRahab. Dans le Nouveau, voirMarie-Madeleine.
Pour des anthropologues ce serait plutôt lechamanisme, avec les guérisseurs, qui aurait droit à cette dénomination[61] tandis que pour d'autres ce serait le métier desage-femme. D'ailleurs le termemétier eut un sens varié au cours du temps historique.
Seule entre toutes les cités,Sparte est réputée en Grèce pour n'abriter aucunepornê. Plutarque[62] l'explique par l'absence de métaux précieux et de véritable monnaie — Sparte utilise une monnaie de fer qui n'est reconnue nulle part ailleurs : aucun proxénète ne trouverait d'intérêt à s'y installer. De fait, on ne trouve pas de trace de prostitution commune à Sparte à l'époque archaïque ou classique.
Camionnettes dans lesquelles exercent des prostituées, àLyon, France.
L’abattage consiste à se prostituer un grand nombre de fois par jour avec des prix très bas. Les maisons d'abattage furent le plus souvent fréquentées par les clients peu fortunés : militaires (voirfemmes de réconfort), marins et migrants.Depuis[Quand ?][réf. nécessaire] quelques années cette pratique fait un retour en force par le biais des « tours » : des escortes des pays de l'est s'installent pour une courte période dans un hôtel d'une grosse ville européenne et reçoivent un grand nombre de clients par jour (souvent plus de 10)[63].
Unecall girl ouescort se prostitue sur un appel téléphonique. La prostituée peut recevoir le client à domicile ou se déplacer. Les numéros sont diffusés par petites annonces dans des journaux ou de plus en plus parInternet. La dame peut être indépendante ou exercer par le biais d'une agence. Certaines escort-girls dites « de luxe » peuvent, moyennant finance prendre l'avion et ainsi avoir une activité et une renommée planétaire. On retrouve aussi des hommes dans cette activité, et, parfois, des actrices du cinéma pornographique.
Unetapineuse en pleine négociation.
La prostitution de rue, letapin, consiste à racoler les clients en marchant sur la voie publique, en prétendant faire de l'auto-stop, ou assise (chaise personnelle, escaliers d'entrée d'immeuble, etc.). La forme la plus voyante est limitée par la police à certaines rues et certains horaires, dits du quartier chaud mais certaines prostituées à l'allure discrète opèrent dans les quartiers passants. Dans certains pays cette prostitution a lieu le long des routes passantes et sur les aires d'autoroute.
La prostitution peut avoir lieu dans tout endroit fréquenté par de potentiel(le)s client(e)s. Cela peut être une discothèque comme unerave party. Leflirty-fishing est une forme de « prostitution missionnaire » mise au point dans lasecte des Enfants de Dieu et pratiquée entre1975 et1987 : de jeunes fidèles étaient utilisées pour fournir de nouveaux adeptes à leur gourou, David Berg (dit Moïse-David)[réf. souhaitée]. La secte a été dissoute en 1978[64].
Dans les grandes villes françaises, certains salons de massage proposent implicitement des actes de prostitution puisqu'il y a monnayage de service à caractère sexuel[65]. Il peut être difficile de différencier les salons proposant des prestations de massage classique de ceux proposant des prestations à caractère sexuel. Certains de ces salons ont une façade avec boutique sur rue. D'autres sont plus discrets et doivent être recherchés par le biais de petites annonces ou sur Internet.
Laprostitution étudiante existe aussi. EnFrance, lapauvreté des étudiants (225 000 en situation financière difficile) conduit des jeunes femmes et, à moins grande échelle, des jeunes gens à financer leurs études en se prostituant[66]. Les moyens de rencontre utilisés pour des relations sans rémunération comme lesagences matrimoniales et les forums de rencontres peuvent aussi être détournés ; la véritable nature de la relation est alors sous-entendue discrètement (par des adjectifs tels que « vénal » ou « généreux »[67]).
Le 17 février 2022, Marie Maurisse, journaliste et autrice de Planète Porn[68], raconte à une commission parlementaire : « J'ai assisté à des scènes surréalistes. Des femmes très précaires, en grande difficulté économique et sociale, étaient présentes sans savoir ce qu'elles faisaient là, sans savoir comment elles avaient atterri là, parce qu'elles avaient besoin d'argent. Elles faisaient ça pour quelques dizaines d'euros. Elles sont abusées, bien qu'elles aient techniquement donné leur accord. C'est un cercle infernal. Les scènes sont extrêmement violentes. »[69].
EnFrance, laCour de cassation a estimé que tant qu’il n’y a aucun contact entre la camgirl ou le camboy et une tierce personne, leur activité ne peut pas être assimilées à des actes de prostitution[70]. En revanche, lacommissaire divisionnaire de l’Office central pour la répression de la traite des êtres humains estime que dans certains cas, les trois critères de lajurisprudence de 1996[71] sont remplis puisque l’activité satisfait le besoin sexuel d’autrui, implique une rémunération ainsi qu’un contact physique. C’est le cas lorsqu’il y a effectivement contact sexuel physique entre au moins deux personnes filmées contre rémunération[70].
Guerre et prostitution organisée
La fille à soldat est une prostituée qui opère dans les armées en campagne et des casernements, avec l'assentiment de la hiérarchie militaire. On parlait en France debordel militaire de campagne (BMC).
Les maisons closes
La prostitution de vitrine est typique des pays froids où la prostituée s'expose en tenue légère dans une vitrine. La négociation se fait par gestes à travers la vitre ou à travers une fenêtre prévue à cet effet. C'est une forme de prostitution particulièrement répandue aux Pays-Bas et en Belgique. Lamaison close, aussi appeléeclub,boudoir,studio,cabaret ousauna, permet aux filles de recevoir leurs clients. Ces maisons vont du bouge à l'établissement grand standing avec sabot de paiement par carte. Le client qui y rentre peut demander à voir les filles pour en choisir une après une revue de détail.
La prostitution sacrée est la pratique, aujourd'hui révolue, de relations sexuelles dans le cadre d'unculte, d'unrituel ou d'une traditionreligieuse. Elle a notamment été pratiquée dans les cultures pré-juives etindiennes.
Demi-mondaines, hommes/femmes entretenus
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En Côte d'Ivoire, un tontongrotto est un homme d'un certain âge, financièrement aisé et en général marié qui entretient des relations sexuelles avec une jeune fille[72]de facto en situation de prostitution. Unegnangni est l'équivalent pour une femme avec un jeune homme[73]. En 2003, une très grande majorité des étudiantes de l'université d'Abidjan-Cocody serait dans cette situation[72].
Des fresques dePompéi dépeignent des scènes de séduction, préliminaires, combats érotiques et toute une palette de jeux amoureux entre un homme et une femme[74].
L'artiste de la RenaissanceUrs Graf réalise des gravures et bustes de prostituées. Dans la toileLaïs de Corinthe (1526) attribuée àHolbein, le peintre réalise une allégorie de l'amour vénal. Ce tableau est peint àBâle à une époque où la municipalité décide et finance l'ouverture de deux bordels en périphérie du centre-ville[75].
L'Entremetteuse deJohannes Vermeer en 1656 est la premièrescène de genre connue du peintre. Elle s'inscrit dans la tradition, alors vive dans la peinture néerlandaise, des « bordeeltje » (« scènes de prostitution »). Cette tradition a pu prendre comme prétexte laparabole duFils prodigue de l'Évangile selon Luc, et plus particulièrement le moment où le fils prodigue « dissipe son bien en vivant dans la débauche »[76]. L'occasion était donnée, sous couvert de message moralisateur condamnant le vice, l'alcool et la débauche, de satisfaire les désirs d'une clientèle en proie à une morale religieuse de plus en plus rigoriste[77].
Jusqu'auXIXe siècle, les modèles desnus académiques sont presque[78] toujours masculins. Les peintresréalistes prennent alors pour modèles de nus des femmes de classes sociales inférieures, leurs maîtresses ou des prostituées, ce qui explique qu'ils multiplient lesscènes de genre avec ces dernières pour dénoncer l'hypocrisie de la société qui veut masquer l'omniprésence de ce phénomène social (Les Demoiselles des bords de la Seine deGustave Courbet, l'Olympia deManet) ou la décadence de la nouvelle bourgeoisie triomphante (voirLes Romains de la décadence deThomas Couture en 1847), pour briser des tabous ou pour inventer des formes nouvelles de représentation[79].
En 1967, le cinéasteLuis Buñuel utilise le sujet de la prostitution dans son filmBelle de jour. Le film raconte l'histoire d'une femme bourgeoise qui ne parvient pas à avoir du plaisir avec son mari et décide de se prostituer. C'est pour elle le seul moyen d'éprouver du plaisir.
Paying for it, du collectif La Brute, prix Maeterlinck 2020 du meilleur auteur/de la meilleure autrice[80], est le « fruit d’un travail d’investigation de terrain et d’écriture de plateau mené avec sept lauréats de l’ESACT, le spectacle aborde différentes réalités de la prostitution (ou plutôt deS prostitutionS). Après de multiples rencontres auprès de travailleur.se.s du sexe, de policiers de la brigade des mœurs, de clients, d’associations de défense des travailleur.se.s du sexe et d’une de leur porte-parole (...) qui accompagne le projet depuis ses débuts, les actrices et acteurs de ce spectacle incarnent la parole de ces femmes que la société veut rarement entendre. »[81]
Créé à Venise en 1853,La traviata deGiuseppe Verdi est l'un des premiers opéras qui évoque la figure de la prostituée de luxe, notamment à travers son titre qui peut signifier « femme perdue » en italien[82]. Inspiré de la pièce de théâtreLa Dame aux camélias d'Alexandre Dumas fils, l'opéra raconte l'histoire tragique de Violetta, une courtisane atteinte de latuberculose[83],[84].
En 1928, dans le célèbreOpéra de quat'sous deBertolt Brecht etKurt Weill, laTango ballade (ballade du souteneur) oppose le point de vue du souteneur à celui de la prostituée qui l'entretient tout en subissant la violence de ce dernier[85].
La même année, est créé un autre tango écrit par Julius Brammer et Leonello Casucci, dont le titreSchöner Gigolo[86] fait référence à la figure de « l'escort » masculin plus communément appelégigolo. Ce morceau a ensuite fait l'objet d'une adaptation française :C'est mon gigolo parAndré Mauprey etJean Lenoir, puis américaine :Just a Gigolo avec des paroles d’Irving Caesar[87].
La chansonLove for Sale(en), écrite en 1930 parCole Porter pour la comédie musicaleThe New Yorkers(en), provoque un scandale et fait même l'objet d'une interdiction à la radio à cause de ses paroles qui mentionnent clairement des rapports sexuels tarifés[88].
En 1934,Damia, que l'on surnomme la « tragédienne de la chanson » enregistreEn maison (de Maurice Aubret et Jean Delettre) qui conte l'histoire d'une fille de joie qui travaille dans une maison close puis est tirée de sa condition par un bourgeois qui l'épouse[89],[90].
Un an plus tard, la chanteuse françaiseBarbara fait paraître le disqueMadame d'après une pièce de théâtre musical en sept tableaux deRemo Forlani dans laquelle elle joue le rôle d'une tenancière d'un bordel d'Afrique nomméLe Sphynx d'Or. L'album comprend plusieurs titres dont les paroles tournent autour de la prostitution, par exempleDe jolies putes[97] ouLe quatre novembre[98].
Le groupeThe Police obtient un succès mondial en 1978 avec sa chansonRoxane, nom de la prostituée dont un client tombe amoureux, et qui lui enjoint de ne plus allumer lalanterne rouge afin de signaler aux autres hommes qu'elle n'est plus « disponible »[100].
En 1985, le chanteurJean Guidoni enregistre l'album-conceptPutains… exclusivement consacré à la prostitution sous toutes ses formes, et dont les paroles très explicites sont signées par le journaliste et cinéastePierre Philippe[101].
L'année suivante, la chanteuseMylène Farmer connaît un grand succès avec la chansonLibertine dont l'héroïne clame qu'elle est une« catin ». La chanson a aussi fait l'objet d'unclip très osé pour l'époque[102].
En 1997, le groupeIndochine aborde le thème de la prostitution masculine dans son morceauJe n'embrasse pas qui s'inspire entre autres du long-métrageJ'embrasse pas d'André Téchiné[103].
Les Misérables, roman deVictor Hugo (1862), mentionne la prostitution uniquement dans le Tome I. Fantine – Livre Cinquième : la descente – Du chapitre 10 au chapitre 12.
Dans l'Ancien Testament, la prostitution est l'un des crimes les plus graves et récurrents. Quiconque se livre à un tel acte sera condamné à mort et brûlé au feu, ou voué à l'extermination conformément à la loi deMoïse. Néanmoins,Tamar etRahab, deux prostituées, échappent à cette sentence. Ces deux personnes étaient ancêtres duMessie Jésus.
Dans leNouveau Testament, la prostitution est mentionnée dans plusieurs passages mais, avec l'arrivée de Jésus, tout péché dont la prostitution sera pardonné pour quiconque croit en lui.
↑abcdefghij etk site du gouvernement français : fiche par pays, le statut de la prostitution tant masculine que féminine se trouve dans la sectioncompléments :diplomatie
↑Alexandre Parent-Duchatelet, cité par Véronique Guienne, « La prostitution, une catégorie sociale construite », Action publique et prostitution, Presses universitaires de Rennes, 2006,p. 19-33
↑Anne Attané, « Quand la circulation de l'argent façonne les relations conjugales - L'exemple de milieux urbains au Burkina Faso »,Article,, Note de bas de page 16(lire en ligne[html])
↑Fabienne Casta-Rosaz,Histoire de la sexualité en Occident, Martinière,,p. 62
↑Georg Schmidt,Le Musée de Bâle de Holbein à Picasso, Art et Style,,p. 24
↑Norbert Schneider,Vermeer 1632-1675 : ou les sentiments dissimulés,Taschen,,p. 23
↑En France, les femmes sont admises comme modèles à l'académie royale de peinture et de sculpture dès 1759, mais elles doivent être habillées et l'étude se limite à la tête. Quelques femmes posant nues existent dans les ateliers privés dès leXVIe siècle.
↑Martial Guédron,De chair et de marbre, Honoré Champion,,p. 26
Abraham Flexner,La Prostitution en Europe, H. Minod (éd. et préface), Paris, Payot, 1919
Corinne Gauthier-Hamon et Roger Teboul,Entre père et fils, la prostitution homosexuelle des garçons, Paris, PUF, 1988
Marie-Elisabeth Handman etJanine Mossuz-Lavau (dir.),La Prostitution à Paris, Paris, La Martinière, 2005
Gabrielle Houbre (éd.),Le Livre des courtisanes : Archives secrètes de la police des mœurs (1861-1876), Paris, Tallandier, 2006
Shirley Lacasse,Le travail des danseuses nues : au-delà du stigmate, une relation de service marchand, 2004,Lire en ligne présentation(www.iforum.umontreal.ca)
Philippe Mangeot, « La femme au masque »,Sept images d'amour, Les Prairies ordinaires, 2006
Le Livre noir de la prostitution (collectif), préface deJean-Marie Rouart, Paris, Albin Michel, 2000
Rapports officiels
[1]« Prostitution : fragilité accrue au nom de la loi » (Rapport de Médecins du Monde)
[2]« De nouvelles zones de non-droit : les prostituées face à l'arbitraire policier » (Rapport de la Ligue des droits de l'homme, du Syndicat de la magistrature et du Syndicat des avocats de France)
Webdocumentaire
Les filles de Gerland, webdocumentaire d'actualité de Natacha Boutkevitch, Laurent Burlet et Jean-Louis Rioual