Pour un article plus général, voirImmigration en France.
Lapolitique migratoire de la France est l’ensemble des mesures destinées à contrôler (ou éventuellement à favoriser) les mouvements migratoires entre la France et les pays étrangers. Elle regroupe le contrôle des frontières, l’admission et la sélection des immigrants, les conditions et procédures pour la régularisation des sans-papiers et les titres de séjour des étrangers, les programmes et mesures pour faciliter l'intégration des immigrés dans la société, les garanties des droits fondamentaux des immigrés ; les politiques et procédures pour l'accueil et la protection des demandeurs d'asile et des réfugiés, les retours et expulsions et les relations internationales
L’immigration vers la France est un processus historique remarquable dès la révolution industrielle auXIXe siècle et également lié à des recrutements de travail après laSeconde Guerre mondiale, depuis lescolonies françaises, pour la reconstruction du pays. Desmines de Lorraine et duNord aux industries parisiennes, jusqu’au couloir industriel lyonnais, les personnes immigrées ont constitué une force de travail majeure. Après les trois premières vagues d'immigration (Révolution industrielle,Entre-deux-guerres etTrente glorieuses) se sont succédé deux périodes : la mise en place une politique de maîtrise des flux migratoires (1974-2006) s'accompagnant notamment dune immigration massive (années 1980 et 1990), suivie à partir de 2006 du développement de la notion d'immigration choisie avec des régularisations au cas par cas, puis d'un durcissement de la législation à partir de 2020.
Le statut des personnes d’origine étrangère connaît des évolutions, en particulier en ce qui concerne l’acquisition de la nationalité.
Pendant l’Ancien Régime, la naissance sur un territoire détermine le lien d'allégeance d'une personne ausuzerain local. Ce lien est transféré au roi avec l'affirmation d'un pouvoir central. La personne née à l'étranger est soumise à un certain nombre d'incapacités civiles. Elle peut bénéficier delettres de naturalité délivrées par le roi. À cedroit du sol, prédominant, s'ajoute auXVIe siècle undroit du sang[1]. Dans les premières années de laRévolution, laConstitution de 1791 et laConstitution de 1793 effectuent un panachage entre droit du sol et droit du sang et donnent accès lanationalité française de façon automatique. Les constitutions de 1795 et 1799 privilégient le droit du sol. Lecode civil de 1804 est héritier des dispositions précédentes et consacre le droit du sang de naissance et le droit du sol acquis à la majorité avec faculté d’option[1].

LePremier Empire restreint le droit du sol et fait dépendre la nationalité de la personne et non du lieu de résidence. Toutefois le droit du sol est rétabli en plusieurs étapes : une loi de 1851 déclare Français l’enfant né en France d’un étranger lui-même né en France, tandis que la loi du assure la nationalité française à tous les étrangers nés en France et parvenus à leur majorité. Cette conception du droit du sol restera un fondement du droit de l’immigration en France jusqu’aux dernières années duXXe siècle (loi du).

En 1886, un peu plus d'un million d'immigrés sont recensés en France, notamment venus de Suisse, d'Italie et d’Allemagne. Plusieurs députés dénoncent une « invasion déguisée » et jugent que ces étrangers constituent un « contingent considérable de l’armée du crime »[2].
Au début duXXe siècle, la France, à la démographie languissante, fait appel à la main-d'œuvre étrangère, dès laPremière Guerre mondiale. Ainsi, leministère de l'Armement recrute desNord-Africains, desIndochinois et des Chinois. Unecarte de séjour est instituée en 1917, tandis que l'immigration se développe particulièrement pendant l'entre-deux-guerres (Polonais, Tchécoslovaques), une partie étant composée deréfugiés politiques (Russes, Arméniens, Allemands, Italiens, Espagnols)[3].
Cette installation sur le territoire français est cependant loin d'être toujours définitive. Ainsi, sur les quelque 3,5 millions d'Italiens qui étaient venus s'installer en France entre 1870 et 1940, près des deux tiers d'entre eux choisissent le retour au pays natal ou une nouvelle terre d'immigration[4].
L'État délègue en grande partie la gestion des populations migrantes aux organisations patronales, en particulier à laSociété générale d’immigration, constituée en 1924 par les organismes patronaux spécialisés[3] et hébergée par le « Comité des Houillères » sous la houlette d'Henri de Peyerimhoff de Fontenelle. Dans les années 1920, ce sont les patrons des usines qui organisent, par exemple, les trains faisant venir les Polonais en France par milliers. Ces habitudes ont perduré jusqu'à ce que le gouvernement décide de la fermeture des frontières et de la politique du regroupement familial au début des années 1970.
AuXXe siècle, la France a, en théorie, toujours refusé le principe des quotas de nationalité tels que pratiqués dans les pays anglo-saxons, comme leJohnson Quota Act de 1921 ou laLoi d'immigration Johnson-Reed de 1924. Des quotas d'étrangers étaient néanmoins pratiqués dans les entreprises industrielles (loi du qui accorde la priorité au travail des citoyens français dans l'entreprise[3]). De fait, l'administration opérait une sélection des nationalités entrantes sur le territoire, en installant par exemple les bureaux de l'Office national d'Immigration« plutôt àMilan qu'àIstanbul »[5].
Une réforme du code de la nationalité est adoptée en 1927. Des lois restreignant ledroit des étrangers sont prises, telles que laloi Armbruster de, adoptée sous legouvernement Daladier, qui limite l’exercice de la médecine au titulaire français d’un doctorat de médecine, ou une loi de, adoptée sous legouvernement Doumergue, qui interdit aux Français naturalisés l’inscription au barreau pendant une durée de 10 ans. Une aide au rapatriement des ouvriers volontaires est organisée en 1934, tandis qu'en 1935, des retours forcés, en particulier concernant les Polonais, sont mis en œuvre[3].
Le gouvernement duFront populaire (1936) conduit à une interprétation plus douce des lois existantes et à un intermède libéral dans la gestion des populations migrantes. À la chute du Front populaire, la politique de l'État français va mêler aspects répressifs et libéraux : les dérogations aux quotas d'emplois d'étrangers sont facilement accordées par l'inspection du travail, tandis que les naturalisations s'accélèrent[3].

En 1938,500 000républicains espagnols sont internés dans des camps comme leCamp de Gurs, leCamp du Vernet ou leCamp de concentration d'Argelès-sur-Mer[6].
En 1940, 1 500 000 étrangers de nationalité belge trouvent refuge et protection en France[6].
Lerégime de Vichy va immédiatement prendre des mesures contre les populations immigrées, qualifiées de « métèques ». UneCommission de révision des naturalisations opérées depuis la réforme de 1927 est mise en place dès, tandis qu'après laloi sur le statut des juifs, la loi du sur« les ressortissants étrangers de race juive » permet d’interner ceux-ci dans descamps spéciaux par« décision du préfet du département de leur résidence ». La loi du concernant les autres étrangers non juifs, règle le sort des« étrangers en surnombre dans l’économie nationale » : l’étranger est surveillé de près. Il n’a plus ledroit de libre circulation sur le territoire et ne bénéficie plus de la protection apportée par ledroit du travail[3].
Depuis le milieu duXXe siècle, la France a mis progressivement en place une politique spécifique à l’égard de l’immigration. Le premier instrument normatif important est l’ordonnance du[7] qui crée l’Office national d’immigration et instaure lescartes de séjour de un, cinq et dix ans.
L'ordonnance du sous-tend une politique d'immigration durable, notamment via le regroupement familial, et l'acquisition de nouveaux droits au fur et à mesure de l'allongement de la durée du séjour de l'étranger, supposée signifier son intégration. L'immigration est alors vue d'une façon ambiguë : durable, familiale et de travail dans le droit, ce qui n'empêchera pas l'administration d'interrompre l'installation des travailleurs étrangers en, puis de tenter entre 1978 et 1980, sans succès, le retour forcé des travailleurs nord-africains vers l'Algérie.
Après lesaccords de Genève mettant fin à laguerre d'Indochine (1954), près de 5 000 Français d'Indochine (couples mixtes ou veuves de Français fuyant la guerre) sont rapatriés et « accueillis » dans desCentres d'accueil des Français d'Indochine (CAFI)[8], en particulier àNoyant, dans l’Allier, et àSainte-Livrade, enLot-et-Garonne[9].
C'est ensuite le tour de nombre dejuifs marocains, souvent en transit pourIsraël, puis deHarkis après lesaccords d'Évian (1962), qui sont aussi logés dans des centres de transit ou d'« accueil ». Leur liberté de mouvement est entravée, les contacts avec la population locale difficiles et les conditions de travail précaires.https://shs.cairn.info/revue-plein-droit-2002-2-page-3?lang=fr
Ces conditions sont partagées par l'immigration économique desannées 1970, en provenance duMaghreb. Les migrants sont logés dans des foyers ouvriers. LaSociété nationale de construction de logements pour les travailleurs algériens et leurs familles (SONACOTRA) est créée en 1956 pour régler le problème de l'habitat insalubre des migrants originaires d'Algérie (bidonvilles, en particulier autour deParis, tel celui deNanterre, cafés-hôtels) dû à la pénurie de logements. Elle construit son premier foyer, en 1959, àArgenteuil. À la fin des années 1970, unegrève des loyers démarre contre la SONACOTRA. Invoquant des « troubles à l'ordre public », l'État expulse alors dix-huit migrants.
En 1972, 16 000 boat people viennent en France[6].
Après une période au cours de laquelle les pouvoirs publics favorisent l’immigration afin de satisfaire aux besoins de main d'œuvre de l’économie française dans les années 1960, la crise économique des années 1970 et la fin du plein emploi les pousse à limiter les flux migratoires. Ainsi les circulairesMarcellin -Fontanet, en 1972, lient l’attribution d’une carte de séjour à la possession d’un titre de travail et d'un logement décent, et décide de mettre fin aux procédures de régularisation. La même année, quatreénarques qui ont toujours voulu rester anonymes[10], créent leGroupe d'information et de soutien des immigrés (GISTI), qui tient sa première permanence à laCimade, et dont le but sera de faire échec à toutes les mesures gouvernementales tendant à réduire l'immigration[N 1].
Sous le septennat de Valéry Giscard d'Estaing, la France met en place une politique de maîtrise des flux migratoires. L'immigration de travail est suspendue en 1974, et une aide au retour volontaire est offerte aux immigrés souhaitant retourner dans leur pays d'origine. En 1975, la loi permet aux immigrés d'être élus comme représentants des salariés dans l'entreprise.
Valéry Giscard d'Estaing, nouveau président de la République, décide d'interrompre brusquement l'immigration pour des motifs économiques de circonstances, le. Cette décision est un tournant dans la politique française traitant de l'immigration. À l'origine provisoire pour trois ans, elle demeurera permanente. Elle est issue d'un arbitrage perdu par le tout nouveau secrétaire d'étatAndré Postel-Vinay, et rendu après un revirement de dernière heure du Premier ministre, Jacques Chirac. André Postel-Vinay démissionne aussitôt[11]. Il est remplacé parPaul Dijoud qui mettra en œuvre cette rupture, assouplie en 1976, par leregroupement familial.
De surcroît, il essaie de favoriser leretour vers le pays d'origine en offrant une prime importante (en 1978, le « millionStoléru », soit 10 000 francs) ; dans le même temps, ledroit au regroupement familial est instauré, qui permet aux immigrés de faire venir leur famille. Paris prend ainsi acte de ce que l'immigration professionnelle ne peut être considérée simplement comme une immigration « provisoire ». En 1976, un décret prévoit de ne pas renouveler les cartes de séjour des étrangers sans ressources ou qui ont quitté le territoire depuis plus de six mois. Le, un arrêt de principe duConseil d'État, sur saisine duGisti, annule les dispositions du décret qui subordonne le regroupement familial à l'engagement de ne pas travailler.
Le 10 janvier 1980 est promulguée la loi relative à la prévention de l'immigration clandestine modifiant l’ordonnance du 2 novembre 1945 relative aux conditions d’entrée et de séjour en France des étrangers (dite LoiBonnet ) en rendant plus strictes les conditions d’entrée sur le territoire, en faisant de l’entrée ou du séjour irréguliers un motif d’expulsion au même titre que la menace pour l’ordre public et en permettant d’éloigner du territoire les "clandestins" ou ceux dont le titre de séjour n’a pas été renouvelé. Elle prévoit enfin la reconduite de l’étranger expulsé à la frontière et sa détention dans un établissement pénitentiaire pendant un délai pouvant aller jusqu’à sept jours s’il n’est pas en mesure de quitter immédiatement le territoire[12].
Le, à Lyon, un mouvement de protestation où un pasteur, un prêtre et un immigré algérien font une grève de la faim, entraîne la suspension de ces mesures. Tandis que le chômage se développe chez les immigrés, le, une marche est organisée par leParti socialiste, lePSU, laCFDT, et laLigue des droits de l'homme contre le projet deLionel Stoléru, alors secrétaire d'État auprès du Ministre du travail, tendant à arrêter l'immigration, à ne pas renouveler les permis de travail des étrangers au chômage, et à favoriser leur retour au pays. Le, une nouvelle manifestation est organisée dans plusieurs villes à l'appel des mêmes associations auxquelles s'est jointe laFédération de l'Éducation nationale, pour former une Fédération des associations de solidarité avec les travailleurs immigrés (FASTI).
En 1981, plusieurs membres fondateurs duGisti sont appelés dans les cabinets ministériels. Le nouveau gouvernementsocialiste procède à une régularisation massive d'environ 130 000étrangers en situation irrégulière, assouplit les conditions de séjour des immigrés en annulant la loi Bonnet et supprime la prime d’aide au retour. Trois ans plus tard, la loi 84-622 instaure un titre unique de séjour de dix ans, dissocié du titre de travail. Dans le même temps, le gouvernement propose à nouveau une aide à la réinsertion des travailleurs étrangers dans leur pays d’origine.
Lors du changement de pouvoir en 1986, le ministre de l’Intérieur,Charles Pasqua (RPR), fait adopter par le Parlement laloino 86-1025 du 9 septembre 1986, relative aux conditions d’entrée et de séjour des étrangers en France, qui restreint l’accès à la carte de résident et facilite les expulsions d’étrangers en situation illégale. Le, l’expulsion de 101 Maliens déclenche une vague de protestations. En 1988, l’Office national d’immigration devient l’Office des migrations internationales. En 2005, ses attributions sont reprises par l’Agence nationale d’accueil des étrangers et des migrations (ANAEM).
En 1989, laloi Pasqua est en partie adoucie. Le premier ministre,Michel Rocard (PS), déclare cependant l’année suivante :« […] je pense que nous ne pouvons pas héberger toute la misère du monde, que la France doit rester ce qu’elle est, une terre d’asile politique […], mais pas plus »[13]. La même année,François Mitterrand affirme que «le seuil de tolérance [du nombre d’immigrés présents en France] a été atteint dès les années 1970»[14]. Le gouvernement crée leHaut Conseil à l'intégration, organisme consultatif.
En, après la phrase deJacques Chirac sur « le bruit et l'odeur », le gouvernement d'Édith Cresson envisage la mise en place decharters collectifs. Unegrève de la faim est organisée par des déboutés dudroit d'asile dans l'église Saint-Joseph, à Paris[15].
Pendant l’été 1996, des manifestations en faveur de la régularisation des immigrés clandestins (que leurs défenseurs appellent« sans-papiers ») aboutissent à l’occupation de plusieurs bâtiments publics. En août, la police expulse par la force des Africains quioccupent l'Église Saint-Bernard , à Paris. En avril 1997, laloi Debré est abrogée après un mouvement soutenu notamment par des réalisateurs de cinéma.
Peu après, le nouveaugouvernement de Lionel Jospin lance un nouveau processus de régularisation d’étrangers en situation irrégulière.
Alors que depuis la loi du un enfant étranger né en France devait« manifester sa volonté » pour être naturalisé à sa majorité, une nouvelle loi rétablit le l’acquisition automatique de la nationalité et renforce ledroit du sol. La loi du, relative à la maîtrise de l’immigration, au séjour des étrangers en France et à la nationalité modifie à nouveau le statut des étrangers en subordonnant la délivrance de la carte de résident à un critère d’intégration. Elle renforce également la lutte contre l’immigration clandestine et restreint l’application du système dit de la « double peine ». Pour de nombreuses associations, ce durcissement de la législation se fait au détriment des droits fondamentaux des étrangers (mauvais traitements, décès, état déplorable des centres de rétention et des zones d’attente…), qui pour elles sont traités comme des criminels par l’administration, alors qu’ils sont dans de nombreux cas mis en situation irrégulière par un refus de cette même administration de régulariser leur situation ou de renouveler leurs titres de séjour.
Au cours des années 2000, l’immigration est de plus en plus traitée au niveau de l’Union européenne, qui adopte ainsi en 2003 une directive sur le regroupement familial et tente d’harmoniser lespolitiques d’immigration des pays membres. La directive 2003/9/CE du Conseil du[16] fixe des normes minimales pour l’accueil des demandeurs d’asile dans les États membres, tout en leur laissant une grande marge de manœuvre.Laloi relative à l'immigration et à l'intégration de, à l’initiative du ministre de l’IntérieurNicolas Sarkozy, porte de 12 à 19 mois le délai au terme duquel un étranger en séjour régulier en France peut solliciter unregroupement familial pour les membres de sa famille proche. Cette loi autorise aussi le recours à de la main d’œuvre étrangère, suspendu depuis 1974, sans avoir à justifier qu’il n’y a pas de nuisance à des demandeurs d’emploi en France. Cette mesure est limitée à quelques professions telles que l’hôtellerie-restauration, la construction et les travaux publics, les travaux saisonniers, les professions commerciales. Le terme d’« immigration choisie », utilisé lors de la présentation du projet de loi, a toutefois été critiqué par de nombreuses associations.
Dès son discours de juin 2005[17],Nicolas Sarkozy souhaite que la France soit « désormais systématiquement la première en Europe pour proposer et bâtir une stratégie migratoire adaptée aux enjeux du monde contemporain ». Il entend ainsi mettre en place une politique visant à attirer des travailleurs qualifiés et des talents étrangers spécifiques pour répondre aux besoins du marché du travail et de l'économie française. L'idée est de sélectionner des immigrants en fonction de leurs compétences, de leurs qualifications et de leur capacité à s'intégrer rapidement et efficacement dans la société et l'économie françaises, ce qui peut être trduit par une « immigration choisie », à l'opposé d'une « immigration subie »[18],[19]. Laloi du 24 juillet 2006 durcit les conditions duregroupement familial, principale source d’une immigration considérée comme « subie », ainsi que le contrôle des mariages mixtes et conditionne l’obtention d’une carte de séjour salarié à l’existence d’un contrat de travail et à l’obtention préalable d’un visa long séjour. Pour aller vers l’immigration choisie, une forme de sélection de la main d’œuvre est prévue : deslistes de métiers en tension où les employeurs pourront faire appel à des étrangers doivent être établies. De plus est instituée une carte « compétence et talents » valable trois ans et renouvelable, pour faciliter l’accueil des étrangers dont « le talent constitue un atout pour le développement et le rayonnement de la France ». Le principe de la régularisation systématique après 10 ans de présence sur le territoire est supprimé. Elle pose également des exigences renforcées en matière d’acquisition de la nationalité française et une solennité accrue dans la procédure d’accueil dans la citoyenneté française[20],[21].
Dans cette lignée, laloi du 20 novembre 2007 vise à restreindre l'immigration.Elle est accompagnée d'unamendement concernant la maîtrise de lalangue française, que le journalLe Monde considère susceptible de créer des difficultés aux migrants et aux couples mixtes[22]. Le projet de loi sur l'immigration, porté successivement par les ministresÉric Besson,Brice Hortefeux etClaude Guéant, a été voté en seconde lecture par l'Assemblée nationale le et auSénat en, et définitivement adoptée par leParlement le. Saisi par un recours de députésPS, leConseil constitutionnel a validé le l'essentiel de cette loi sur l'immigration, censurant partiellement un seul de ses 111 articles, relatif à la rétention administrative des étrangers. Il a précisément jugé contraire à la Constitution la possibilité de rallonger jusqu'à 18 mois la durée de rétention des étrangers condamnés pour des activités à caractère terroriste et ayant purgé leur peine. Dans les pays de l'Union européenne, unedirective communautaire a fixé la durée maximale de la rétention à six mois[23].
La « jungle de Calais » est le nom couramment utilisé pour désigner les différents espacespas-de-calaisiens habités depuis lesannées 1990 par lesmigrants tentant de se rendre enAngleterre. Le terme fait référence aux installations précaires,bidonvilles etcamps de migrants et de réfugiés sur l’ensemble de l'agglomération calaisienne, àCalais,Coquelles etSangatte,Marck, aux abords de l'entrée française dutunnel sous la Manche et de lazone portuaire de Calais. Détruits et démantelés régulièrement par lesforces de l'ordre sans jamais complètement parvenir à les résorber, ces camps de fortune voient leur population varier depuis 30 ans à la suite de décisions politiques comme la fermeture ducentre de Sangatte en 2002, en fonction du contexte international comme les conflits régionaux et internationaux, des changements des politiques migratoires européennes (règlements Dublin II etIII) ou encore la sécurisation des infrastructures de transport à Calais, du terminal portuaire et du tunnel sous la Manche.
Ces lieux de vie précaires, et la présence des personnes bloquées à la frontière sur le territoire calaisien, font périodiquement l'objet d'importantes politiques publiques. D'abord gestionnaires, avec la création de lieux d'accueil officiels comme en 1999 à Sangatte[24] ou en 2015 à Calais[25], Mais aussi sécuritaires, les destructions de ces mêmes lieux[26], celles quasi quotidienne de ceux plus informels[27]. L'investissement est aussi militant tant la question est clivante localement, entre les mobilisations des personnes concernées pour la reconnaissances de leurs droits ou la dénonciation de leurs conditions[28], celles des personnes solidaires[29], ou en réaction, d'opposants[30].
Laloi du 16 juin 2011 relative à l'immigration, à l'intégration et à la nationalité rend plus rigoureuses les conditions de maintien sur le territoire et d’obtention de la nationalité française. Le Conseil constitutionnel valide toutes les dispositions de la loi sauf une : celle qui permet de prolonger de douze mois supplémentaires, au-delà des six premiers mois, la rétention des étrangers condamnés à uneInterdiction du territoire français (ITF) ou expulsés pour un comportement lié à des activités à caractère terroriste. La loi porte de 32 à 45 jours la durée maximale de rétention de l’étranger, avec intervention du juge administratif avant le juge judiciaire[31]. Cette loi assure également la transposition dans le droit français des trois directives européennes suivantes[32] :
Laloi relative à la réforme de l’asile du 29 juillet 2015 institue une nouvelle procédure accélérée, qui remplace l’ancienne procédure prioritaire, mise en œuvre par ou sous le contrôle de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA). Elle prévoit aussi une nouvelle procédure contentieuse, avec la création d’une procédure de recours suspensif accélérée devant un juge unique de laCour nationale du droit d'asile (CNDA) en cinq semaines, à l’égard des demandeurs d’asile ayant fait l’objet d’une mesure d’éloignement.
Laloi du 7 mars 2016, portée parBernard Cazeneuve, relative aux droits des étrangers module les délais de recours et de jugement selon les motifs de la mesure d’éloignement, en transposition de la « directive retour ». Elle vise trois objectifs : mieux accueillir et intégrer, multiplier les titres de séjour plutôt que généralisation des titres pluriannuels et lutter contre l’immigration irrégulière[33]. Cette loi transpose également la Directive 2014/66/UE établissant les conditions d'entrée et de séjour des ressortissants de pays tiers dans le cadre d'un transfert temporaire intra-groupe dans le droit interne. De nouveaux titres de séjour au profit des trois catégories de personnes visées par la Directive ont été créés et des mesures relatives à la mobilité intra-communautaire des salariés transférés ont été mises en place[34].
La France a signé plusieurs conventions internationales sur l'immigration et l'asile pour renforcer la coopération et la gestion des flux migratoires. La France est notamment partie de :
Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) : Ce code regroupe l'ensemble des dispositions législatives et réglementaires relatives à l'immigration et à l'asile. Il définit les conditions d'octroi des visas, de résidence, de travail, ainsi que les droits et obligations des étrangers en France.
Plus de 118 textes majeurs sur l'immigration ont été adoptés entre 1945 et 2024 (57 lois et ordonnances, 27 décrets, 31 arrêtés et circulaires et deux conventions internationales)[40]. Depuis 2006, les lois votées sont les suivantes :
Créée en 2013[52], ladirection générale des Étrangers en France (DGEF) est l'une des sept directions générales duministère de l'Intérieur français et traite de l'ensemble des questions relatives audroit des étrangers en France : entrée sur le territoire, séjour, travail, lutte contre l’immigration irrégulière, asile,intégration, naturalisation. La DGEF est constituée en 2019 de plus de 600 agents répartis entre Paris et Nantes[53]. Elle agit en concertation avec les autres ministères (justice, Europe et affaires étrangères, solidarités et santé, travail, cohésion des territoires) et structures interministérielles (Délégation interministérielle à l'accueil et à l'intégration des réfugiés (DIAIR) etDélégation interministérielle à l'hébergement et à l'accès au logement (DIHAL)). La DGEF s’appuie sur deuxopérateurs publics, dont elle assure latutelle[53] :
Elle s’appuie en France sur le réseau des préfectures et à l’étranger sur le réseau consulaire[53].
Lescollectivités territoriales participent également à l'intégration des étrangers par l'exercice de leurs compétences. Ainsi, lescommunes et les intercommunalités participent à la bonne installation des étrangers primo-arrivants dans leur environnement quotidien, à travers plusieurs démarches de proximité (l’inscription des enfants à l’école maternelle et primaire, une demande d’un logement social, des demandes d’aides financières dans les centres communaux ou intercommunaux d’action sociale, etc.). Lesconseils départementaux ont aussi des compétences dans le champ de l’action sociale, avec l’organisation de permanences, la prise en charge des personnes en situation de handicap et l’aide à domicile pour les personnes âgées, par exemple. Enfin, lesconseils régionaux participent au financement de laformation professionnelle[54].
Le secteur associatif relais de proximité avec les populations, joue ainsi un rôle important dans l’intégration des personnes étrangères primo-arrivantes. Il est également un des acteurs de la mise en œuvre de la politique d’intégration, favorisant l’accès aux droits et à l’autonomie, par les actions qu’il met en œuvre dans le domaine de la formation linguistique, de l’insertion professionnelle, du suivi social ou encore de l’accès à la citoyenneté. Ce sont ainsi près de 1 500 associations qui contribuent sur les territoires à la mise en œuvre de la politique d’accueil et d’intégration des étrangers primo-arrivants[55].
La France fait partie de l’espace Schengen, créé en 1995, un espace unique en matière de voyages internationaux et de contrôles frontaliers, où le franchissement desfrontières intérieures s'effectue librement, sanspasseport, sans contrôle[56],[57]. Depuis 2015, huit pays ont réintroduit des contrôles d’identité à leurs frontières (laSlovénie, l’Italie, l’Allemagne, l’Autriche, la France, laNorvège, leDanemark, laSuède). En France ces mesures ont été introduites au cours de l'année 2016 dans le cadre de l’état d’urgence décrété à la suite desattentats de novembre 2015, de l'organisation d'évènements sportifs de grande ampleur comme leTour de France et l'Euro 2016, et du nouvelattentat du 14 juillet 2016 à Nice. La loi du a prolongé l’état d’urgence jusqu’au et le gouvernement français a de nouveau rétabli les contrôles aux frontières intérieures jusqu’à la même date[34]. Mais dans un arrêt du, laCour de justice de l'Union européenne considère que ces contrôles contreviennent aux dispositions du code frontières Schengen et décide que la prolongation de tels contrôles au-delà d’une durée de six mois serait contraire au droit de l’Union, sauf en cas d’une nouvelle menace grave pour l’ordre public et la sécurité intérieure. Les États membres concernés, dont la France, doivent cesser ces contrôles[58]. Pour régulariser la situation, l'Union européenne adopte, le, une réforme du code Schengen qui autorise désormais des contrôles temporaires aux frontières intérieures de l’espace Schengen en cas de menace grave pour l'ordre public ou la sécurité intérieure[59]. C’est ainsi que huit pays décident de nouveaux contrôles aux frontières : d'abord l'Allemagne le, puis la France, l’Autriche, leDanemark, l’Italie, laNorvège laSlovénie et laSuède à partir du, invoquant des risques sécuritaires, notamment leterrorisme, l’immigration irrégulière et la violence liée aux migrants[60]. Pour la France, ces contrôles qui étaient prévus jusqu'au[61] sont prolongés jusqu'au[N 2],[62]. Contestée par des associations qui estiment que ces contrôles vont à l’encontre du principe de libre circulation, cette mesure est validée par le Conseil d’État, qui, en mars 2025, la juge conforme au nouveau règlement Schengen et proportionnée aux menaces pesant sur la France[63].
Les contrôles aux frontières sont effectués par les forces de l'ordre et les agents de la douane aux points d'entrée tels que les aéroports, les gares ferroviaires, les ports maritimes et lespostes-frontières terrestres. Les autorités impliquées incluent la Police Nationale, la Gendarmerie Nationale, et la Douane française. Ils consistent à vérifier les passeports et visas, ainsi qu'à détecter toute activité suspecte liée à l'immigration irrégulière, au terrorisme ou à la contrebande. Lors de ces contrôles les autorités peuvent être amenés à prendre des mesures de non-admission et le cas échéant des placements en zone d’attente[64],[65]. Lorsqu'un étranger en situation irrégulière est appréhendé, il fait l'objet d'une remise immédiate aux garde-frontières de l'État Schengen de dernière provenance. Cette procédure repose sur des accords bilatéraux qui en fixent les modalités de mise en oeuvre entre les services de garde-frontières ou de police[66].
En accompagnement du retour des contrôles aux frontières, le ministre de l'Intérieur,Bruno Retailleau, adresse le aux différentes forces concernées une circulaire donnant des consignes sur les périmètres et modalités d’intervention pour ces contrôles et annonce la création d’une structure interministérielle, l’état-major opérationnel des frontières (EMOF), adossé à ladirection nationale de la Police aux frontières, qui coordonne, à un niveau national, le pilotage opérationnel des frontières extérieures et intérieures[67],[68].
En 2021, La France compte 119 points de passage frontaliers (122 en été)[69],[70] : 75aérodromes ouaéroports (78 en été), 33ports maritimes et 11gares ferroviaires.
Les contrôles aux frontières extérieures sont renforcés par le développement de la coopération judiciaire et policière avec la création duSystème d'information Schengen (SIS), opérationnel depuis 1995, suivi du SIS II mis en œuvre à partir d’avril 2013. Cette base de données informatique commune aux États participant aux accords Schengen fournit le signalement des personnes disparues ou recherchées, des véhicules volés, armes dérobées, faux billets en circulation… Une version modernisée du SIS, incluant de nouvelles catégories de signalement et données est devenue opérationnelle en mars 2023[71]. En matière de conditions d’entrée et de visa, lesystème européen d'identification des visas (VIS) permet depuis 2011 une procédure facilitée de délivrance des visas de court séjour et assure un meilleur contrôle des personnes qui les utilisent pour entrer dans l'espace Schengen[71]. Par ailleurs un système d'entrée/de sortie (EES), adopté en 2017, devait être lancé le 10 novembre 2024 mais a été retardé à 2025. Il s'agit d'une base commune permettant de collecter et d'enregistrer les données personnelles relatives aux entrées, aux sorties et aux refus d'entrée des ressortissants d’États tiers lors des courts séjours (séjours jusqu'à 90 jours dans une période de 180 jours)[71]. Il remplacera le marquage manuel des passeports par des contrôles biométriques, nécessitant des empreintes digitales et une reconnaissance faciale[72].
Le nombre de premiers titres de séjour[N 3] délivrés à des ressortissants non européens et non britanniques est passé de 199 414 en 2011 à 326 954 en 2023 (données provisoires), soit une augmentation de 64 % en13 ans[73].

Le principal motif de délivrance des titres de séjour en 2023 est le motif étudiant avec 108 375 premiers titres délivrés en 2023, soit un tiers de l'ensemble. Ils connaissent en outre, une hausse marquée (+ 6,1 %) Pour la deuxième année consécutive, les titres économiques se situent devant les titres humanitaires (respectivement 54 572 et 46 425). Seuls les titres délivrés pour motifs familiaux enregistrent une baisse[74].
| 2016 | 2017 | 2018 | 2019 | 2020 | 2021 | 2022 | 2023 | |
|---|---|---|---|---|---|---|---|---|
| Économique | 22 690 | 27 217 | 33 336 | 39 043 | 26 705 | 36 685 | 52 045 | 54 572 |
| Familial | 94 341 | 94 243 | 97 663 | 98 206 | 80 660 | 93 172 | 95 939 | 91 078 |
| Étudiants | 73 864 | 80 566 | 83 974 | 90 671 | 73 394 | 88 617 | 102 134 | 108 375 |
| Humanitaire | 30 369 | 37 102 | 35 710 | 38 861 | 33 801 | 41 966 | 41 455 | 46 425 |
| Divers | 15 946 | 15 500 | 16 738 | 20 722 | 14 828 | 22 332 | 27 353 | 26 504 |
| Total (hors Britanniques) | 237 210 | 254 628 | 267 421 | 287 503 | 229 388 | 282 772 | 318 926 | 326 954 |
LeRetrait du Royaume-Uni de l'Union européenne, souvent désigné sous le nom de « Brexit »[75], a lieu le. Il fait suite auréférendum britannique du, par lequel 51,89 % des électeurs se sont prononcés pour un retrait de leur pays de l'Union européenne et de laCommunauté européenne de l'énergie atomique. Une des conséquences est, pour les ressortissants britanniques résidant sur le territoire français, l’obligation de détenir un titre de séjour à compter du[76].
| 2016 | 2017 | 2018 | 2019 | 2020 | 2021 | 2022 | 2023 |
|---|---|---|---|---|---|---|---|
| 1 356 | 2 538 | 11 196 | 22 461 | 7 711 | 99 954 | 11 166 | 9 261 |
L'admission exceptionnelle au séjour (AES) d'étrangers présents en France en situation irrégulière, prévue à l'article L.435-1 duCESEDA[77], se fait au cas par cas, au regard de la situation individuelle de l'étranger et à la discrétion du préfet. Elle peut prendre la forme de la délivrance d'une carte de séjour vie privée et familiale, d'une carte de séjour salarié ou travailleur temporaire[74]. Le ministre de l'Intérieur,Bruno Retailleau, diffuse le à l’ensemble des préfets une circulaire[78], qui abroge lacirculaire Valls en vigueur depuis 2012, et durcit les conditions de régularisation des étrangers en situation irrégulière tout en privilégiant les régularisations des travailleurs dans lesmétiers en tension. Une durée de présence de7 ans est désormais exigée pour apprécier l'intégration du ressortissant étranger demandant un titre de séjour excepté pour les régularisations justifiées par le travail pour lesquelles les conditions fixées par la loi sur l'immigration de janvier 2024 s'appliquent, à savoir trois ans de présence en France et douze mois d’ancienneté dans l’exercice d’un métier fixé par décret[79],[80].
| 2019 | 2020 | 2021 | 2022 | 2023 provisoire | |
|---|---|---|---|---|---|
| Économique | 7 383 | 6 999 | 8 719 | 10 874 | 11 525 |
| Familial | 22 570 | 19 697 | 21 928 | 22 420 | 22 167 |
| Étudiant | 666 | 720 | 906 | 1 008 | 1 032 |
| TOTAL | 30 619 | 27 416 | 31 553 | 34 302 | 34 724 |
LaLoi du 7 mars 2016 relative au droit des étrangers en France introduit les changements fondamentaux suivants dans le cadre législatif français[81] : à l'issue d'un séjour régulier d'un an en France, les ressortissants de pays tiers ont désormais accès à un titre de séjour pluriannuel d'une durée de deux à quatre ans ; un nouveau titre de séjour, le « passeport talent», dont la durée peut aller jusqu'à quatre ans est créé, le permis de séjour accordé aux travailleurs saisonniers devient explicitement pluriannuel, d'une durée maximale de trois ans. Cette loi transpose également la Directive 2014/66/UE établissant les conditions d'entrée et de séjour des ressortissants de pays tiers[34].
Le regroupement familial en France concerne les étrangers non européens. Pour faire venir sa famille en France, le demandeur doit résider en France de manière régulière depuis 18 mois au moins[N 4] et avoir un titre de séjour d’un an au moins (hors mentions passeport talent, retraité, saisonnier…)[N 5]. Il faut que l'époux(se) ait plus de 18 ans et les enfants soient mineurs[82].
En 2021, les autorités mettent en oeuvre la directive révisée sur les travailleurs détachés, qui réduit à 12 mois la période pendant laquelle un travailleur détaché peut rester soumis à certaines dispositions ducode du travail de son pays d’origine. Au-delà de cette période, toutes les dispositions du Code du travail doivent être respectées[83].
Un demandeur d'asile est une personne demandant la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire, qui bénéficie du droit de se maintenir provisoirement sur le territoire dans l’attente d’une décision en première instance de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra) ou en appel de laCour nationale du droit d’asile (CNDA ) sur sa demande de protection[84].
Le statut deréfugié est accordé aux personnes qui sont persécutées dans leur pays d'origine en raison de leur race, religion, nationalité, appartenance à un certain groupe social, ou opinions politiques[N 6],[85]. Celui de laprotection subsidiaire est accordé aux personnes qui ne remplissent pas les critères pour le statut de réfugié mais qui sont exposées à des risques graves comme la peine de mort, la torture, ou des traitements inhumains et dégradants. La carte de séjour pluriannuelle bénéficiaire de la protection subsidiaire qui est délivrée a une durée de validité maximale de4 ans[86]. La protection temporaire est quant à elle accordée dans des situations exceptionnelles, comme l'afflux massif de personnes déplacées, par exemple, lesUkrainiens fuyant laguerre en Ukraine[N 7],[87]. Enfin le statut d'apatride est accordé aux personnes qui ne possèdent pas de nationalité et ne peuvent pas être renvoyées dans leur pays d'origine. La qualité d'apatride est reconnue à toute personne qui répond à la définition de l'article 1er de laConvention de New York sur l'apatridie du[N 8],[88].
Les débuts de l’Ofpra, et notamment la période 1952-1960, sont marqués par un nombre de reconnaissances annuelles très important (avec notamment 21 500 admissions en 1958), les principales populations concernées étant lesEspagnols, lesYougoslaves, lesHongrois et lesPolonais dans un contexte marqué notamment par les dictatures dans lespays de l'Est ou lesévénements de Budapest[89].
Dès 1960, le nombre de protections accordées baisse avec le nombre de demandes, mais ce mouvement s’inverse à partir de 1974 sous le double impact de la ratification par la France duprotocole de Bellagio (1971), qui lève les limites géographiques et temporelles de la définition du réfugié, et de deux crises majeures : lecoup d’État de Pinochet au Chili et lachute de Saïgon, suivie du changement de régime au Laos puis lachute de Phnom Penh et le régime desKhmers Rouges. Le taux d’accord très élevé qui prévaut pour ces populations - de l'ordre de 90 % - a un impact considérable sur le nombre d’admissions global, avec moins de 2 000 personnes protégées en 1974 contre près de 15 000 deux ans plus tard[89].
Si le nombre d’accords commence à baisser à partir de 1984, il amorce une remontée au début desannées 1990 (plus de 15 000 personnes protégées en 1991), notamment du fait de laguerre en ex-Yougoslavie. Quant à l’augmentation du nombre d’accords qui s’observe au milieu desannées 2000, elle s’explique en grande partie par l’inclusion de demandes d’asile plus sociétales et l’instauration de la protection subsidiaire en 2004[89].

En 2023, 167 056 demandes (mineurs compris) ont été formulées en Guichets uniques pour demandeurs d'asile (GUDA), en hausse de 7,2 % par rapport à 2022. L'Afghanistan (16 550), laGuinée (10 512) et laTurquie (9 806) sont les premiers pays de provenance des premières demandes d’asile. Parallèlement, 142 649 demandes d'asile ont été enregistrées à l'Ofpra en 2023, soit une hausse de + 8,7 % par rapport à 2022. Les décisions d'accord enregistrent une hausse de + 14,6 % à 44 560 attributions de l'asile, contre 38 885 en 2022. Elles sont nettement plus nombreuses qu'en 2019 (+38,6 %). Ce surcroît de dynamisme des accords d'asile par rapport à l'ensemble des décisions augmente mécaniquement le taux d'accord Ofpra, lequel s'approche d'une décision favorable sur trois en 2023[90].
| 2016[91] | 2017[92] | 2018[93] | 2019[94] | 2020[95] | 2021[96] | 2022[97] | 2023[98] | ||
|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|
| OFPRA | Demandes[N 9] | 85 726 | 81 327 | 123 625 | 132 826 | 94 624 | 103 164 | 131 254 | 142 649 |
| Accords | 19 982 | 23 958 | 24 613 | 22 295 | 20 866 | 35 919 | 38 885 | 44 560 | |
| Réfugiés (CR) | 12 321 | 13 044 | 14 041 | 14 084 | 12 722 | 22 550 | 31 136 | 33 697 | |
| Protection subsidiaire (PS) | 7 661 | 10 914 | 10 572 | 8 211 | 8 144 | 13 369 | 7 749 | 10 863 | |
| CNDA (Appel) | Accords en appel | 6 446 | 7 776 | 8 603 | 7 413 | 12 338 | 18 465 | 17 391 | 16 335 |
| Annulations rejets CR | 4 460 | 5 246 | 5 951 | 5 227 | 7 478 | 12 204 | 12 381 | 11 062 | |
| Annulations rejets PS | 1 986 | 2 530 | 2 652 | 2 186 | 4 860 | 6 261 | 5 010 | 5 273 | |
| OFPRA+CNDA | Total admissions | 26 428 | 31 734 | 33 216 | 29 708 | 33 204 | 54 384 | 56 276 | 60 895 |
| CR | 16 781 | 18 290 | 19 992 | 19 311 | 20 200 | 34 754 | 43 517 | 44 759 | |
| PS | 9 647 | 13 444 | 13 224 | 10 397 | 13 004 | 19 630 | 12 759 | 16 136 |
Il existe cinq perspectives différentes pour les étrangers en situation irrégulière présents sur le territoire français :
Lescentres de rétention administrative (CRA), crées par la loi du[100], sont des lieux d’enfermement dans lesquels l’administration place des personnes étrangères pour l'exécution de la décision d'éloignement dont ils font l'objet[101]. Depuis la loi du, un étranger mineur de dix-huit ans ne peut faire l'objet d'une décision de placement en rétention. Le Gouvernement, met ainsi la France en conformité avec les recommandations duComité des droits de l'enfant desNations unies et de l'UNICEF, considérant qu'enfermer un enfant au motif du statut migratoire de ses parents constitue une violation des droits de l'enfant et s'avère contraire au principe de l'intérêt supérieur de l'enfant. Dans une circulaire du, Gérald Darmanin précise que cette règle n’entre en vigueur àMayotte qu’au, « compte tenu des circonstances migratoires particulières auxquelles est confronté ce territoire »[102]. Les parents seuls avec un enfant devront néanmoins faire l’objet de « mesures d’éloignement », via le placement en « dispositif de préparation au retour » ou la procédure de « départ aidé »[103].

Les gouvernements français ont régulièrement allongé le temps pendant lequel un étranger peut être retenu le temps d'organiser son éloignement : dix jours selon laloi Pasqua, en 1993, douze jours avec laloi Chevènement en 1998, trente-deux avec laloi Sarkozy de 2003[104], quarante-cinq avec laloi Besson en 2011[105], et quatre-vingt-dix avec laloi Collomb de 2018[46],[106]. En 2024,Bruno Retailleau envisage de porter cette durée à deux cent dix jours[107]. Il s'agit invariablement d'éviter que les personnes sans papiers n'aient purgé la durée maximale de rétention avant d'avoir pu être reconduites à la frontière, mais la durée de rétention n'a en fait que peu d'impact sur le taux d'éloignement, l'immense majorité d'entre eux ayant lieu dans les45 premiers jours de la rétention[108],[109].
En 2023, le parc de locaux de rétention est de25 CRA, dont 4 en Outre-mer. Le nombre de places disponibles est de 1948. Le nombre de personnes retenues pour des séjours plus ou moins longs (d'une durée inférieure à90 jours) a été de 16 969 en France métropolitaine et de 29 986 Outre-mer[110]. L’OQTF demeure la décision d’éloignement qui fonde le placement en rétention dans la grande majorité des cas (74,6 %). Les autres motifs d'éloignement sont l'ITF (12,2 %), le transfert Dublin (6,1 %), l'AME/APE (2,6 %), PRA Dublin (1,8 %), Réadmission Schengen (1 %), ICTF (0,4 %), IRTF (0,2 %), IAT[N 10] (0,1 %) et SIS (0,1 %)[111].
Cette même année 2023, sur la totalité des personnes retenues en CRA, 60 % ont été libérées (52 % par un juge administratif ou judiciaire, 4 % par la préfecture), 2 % des personnes ont été assignées et seulement 36 % ont été éloignées (23 % vers un pays hors de l'UE et 13 % vers un pays membre de l’UE ou espace Schengen)[112].CComptes 2020 - page 148
La décision et le maintien de placement en rétention sont définis par les articles L741-1 à L741-5 duCode de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Des dispositions qualifiées d'« absurdes » et qui « facilitent la remise en liberté des clandestins » par Morgane Daury-fauveau, professeur de droit privé, secrétaire générale de l'UNI et présidente du Centre d'études et de recherches universitaires (Ceru)[113].
Après le placement de quatre jours[114] (ce délai de rétention initiale était de 48 heures avant la « loi Darmanin » de 2024[115]), une première autorisation dujuge des libertés et de la détention (JLD) est nécessaire pour les quatre prolongations possibles, de respectivement 26 jours[116], 30 jours[117], 15 jours (exceptionnelle)[118] et 15 jours (très exceptionnelle)[46].
Dans l'affaire dumeurtre de Philippine Le Noir de Carlan, par exemple, les trois premières prolongations ont été délivrées respectivement le 23 juin, le 20 juillet et le 19 août et le suspect a été libéré le 3 septembre 2024, avant la quatrième prolongation et donc 15 jours avant la fin légale du délai de 90 jours, faute de laissez-passer consulaire et le JLD ayant considéré que l'individu ne constituait pas une menace pour l'ordre public[119].
Ce cas est toutefois exceptionnel puisque sur la période 2018-2022, la durée moyenne de rétention est de l'ordre de 5 jours en métropole et de 18 à 27 jours Outre-mer[120].
Le décompte des éloignements d'étrangers en situation irrégulière fait l'objet d'une ventilation selon trois types reflétant des modalités différentes de prise en charge de l'immigration irrégulière :
| Mouvements | Origine des étrangers | Destination | 2014 | 2015 | 2016 | 2017 | 2018 | 2019 | 2020 | 2021 | 2022 | 2023 |
|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|
| Éloignements forcés (A) | Pays tiers | Pays tiers | 5 675 | 6 311 | 6 166 | 6 596 | 7 105 | 8 858 | 3 329 | 3 511 | 5 056 | 5 729 |
| Union Européenne (Réadmissions Schengen, transferts Dublin) | 6 154 | 5 742 | 3 711 | 4 896 | 5 615 | 7 092 | 3 879 | 4 638 | 4 419 | 4 061 | ||
| Union Européenne | 3 332 | 3 432 | 3 084 | 2 772 | 2 957 | 2 956 | 1 903 | 1 942 | 1 935 | 1 932 | ||
| Total éloignements forcés (A) | 15 161 | 15 485 | 12 961 | 14 270 | 15 677 | 18 906 | 9 111 | 10 091 | 11 410 | 11 722 | ||
| Éloignements aidés (B) | Total éloignements aidés (B) | 1 547 | 1 118 | 841 | 1 078 | 2 070 | 2 752 | 1 658 | 1 570 | 2 102 | 2 832 | |
| Éloignements spontanés (C) | Pays tiers | 4 060 | 2 791 | 2 150 | 1 861 | 1 878 | 1 750 | 1 259 | 1 537 | 1 674 | 2 316 | |
| Union Européenne | 721 | 597 | 537 | 358 | 332 | 338 | 356 | 205 | 214 | 178 | ||
| Total éloignements spontanés* (C) | 4 781 | 3 388 | 2 687 | 2 219 | 2 210 | 2 088 | 1 615 | 1 742 | 1 888 | 2 494 | ||
| Total éloignements (A)+(B)+(C) | 21 489 | 19 991 | 16 489 | 17 567 | 19 957 | 23 746 | 12 384 | 13 403 | 15 400 | 17 048 | ||
| Départs volontaires aides (D) | 2 930 | 3 093 | 2 627 | 3 778 | 4 775 | 2 515 | 930 | 1 415 | 1 263 | 1 635 | ||
| Départs spontanés (E) | 3 187 | 6 512 | 5 591 | 5 438 | 5 544 | 5 143 | 2 635 | 2 001 | 2 766 | 4 021 | ||
| Total sorties du territoire (A) + (B) + (C) + (D) + (E) | 27 606 | 29 596 | 24 707 | 26 783 | 30 276 | 31 404 | 15 949 | 16 819 | 19 429 | 22 704 | ||

La politique de lutte contre la traite et l'exploitation des êtres humains est directement liée à la politique migratoire, car plus de la moitié des victimes dans les États membres de l'Union européenne sont des ressortissants de pays tiers[121]. En France, seules 36 % des victimes de traite ou d’exploitation des êtres humains étaient françaises en 2016, tandis qu’en 2020, elles représententla moitié des victimes. Concernant les infractions de traite uniquement, les victimes de nationalité nigériane représentent en moyenne un quart des victimes. Les réseaux de traite nigérians sont connus des autorités et de la société civile qui observent des changementsdans leur structuration (notamment organisés autour de confraternités et ayant de plus en plus recours à l’exploitation sexuelle dite logée)[122].
Une étude réalisée par le Point de contact français du Réseau européen des migrations (REM) Le rapport national qui couvre la période 2015‐2020 montre l'enjeu et la difficulté de la détection et l’identification des victimes (potentielles) de la traite des êtres humains. Celle-ci concerne différentes catégories de ressortissants de pays tiers détectés, identifiés et protégés en tant que victimes (présumées) de la traite des êtres humains, à savoir[123] : les demandeurs d’asile, les ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier et les ressortissants de pays tiers en possession d’une autorisation de séjour valide sur le territoire français (un titre de séjour ou un visa de court séjour).
Ce rapport présente également les différents types d’assistance, de soutien et de protection dont les victimes peuvent bénéficier en France[124].
La France collabore avec d'autres pays et organisations internationales pour gérer les flux migratoires et protéger les droits des migrants. Cela inclut des accords bilatéraux, des contributions à des programmes de développement international et des participations à des conférences et forums internationaux.
La France a conclu des accords avec les pays d'émigration afin de mener dans le cadre d'un partenariat, une gestion cohérente des flux migratoires adaptée aux besoins de deux pays signataires et au profil migratoire du pays partenaire[39].
Ces accords destinés à mieux gérer les flux migratoires sont fondés sur trois volets, distincts et complémentaires : l'organisation de la migration légale, la lutte contre l'immigration clandestine et le développement solidaire. Ils concernent les pays suivants : leSénégal (2006, avenant en 2008, entré en vigueur le)[125], leGabon (signé le et entré en vigueur le)[126], laRépublique du Congo (signé le et entré en vigueur le)[127], leBénin (signé le et entré en vigueur le) ;laTunisie (signé le et entré en vigueur le) ;leCap Vert (signé le et entré en vigueur le) ;leBurkina Faso le.
Les associations de défense des étrangers s'opposent à ce type d'accords, qu'elles jugent non seulement« déséquilibrés », mais« portant en eux des risques importants de violation des droits des migrants »[128]. Le lien entre gestion des flux migratoires et codéveloppement a ainsi été dénoncé par laCimade, qui affirmait, en 2008, dans son analyse du rapport de la CommissionMazeaud sur le cadre constitutionnel de la nouvelle politique d'immigration, rapport qui vise à généraliser ce lien, que :« Le développement est un droit reconnu par les Nations unies et ne saurait faire l'objet de conditionnalité quelle qu'elle soit. Conditionner l'aide publique au développement au contrôle des flux migratoires constitue un chantage d'autant plus inacceptable que certaines politiques économiques et commerciales européennes sont loin d'être neutres sur les phénomènes migratoires. ». Néanmoins,« la Cimade se félicite de la position exprimée par la commission de refus des quotas d’immigration et de la création d’une juridiction unique [pour le droit des étrangers] »[129].
Le dispositif « jeunes professionnels » vise à permettre à des jeunes diplômés ou déjà engagés dans la vie active d’acquérir par une expérience de travail dans une entreprise implantée en France, des gains de compétences qui vont permettre d’améliorer leur perspective de carrière lors de leur retour dans leur pays d’origine.Les pays concernés par un tel accord sont[39] : laNouvelle-Zélande le 10 août 1983 (entré en vigueur le 20 août 1983)l’Argentine le 26 septembre 1995 (entré en vigueur le 8 octobre 1996) ;leMaroc (le 24 mai 2001, entré en vigueur le 24 mai 2001) ;leSénégal (le 20 juin 2001, entré en vigueur le 20 juin 2001) ;laTunisie (le 4 décembre 2003, entré en vigueur le 10 mai 2004) ;leMonténégro (le 1er décembre 2009, entré en vigueur le 1er juin 2013) ;laSerbie (le 2 décembre 2009, entré en vigueur le 1er juin 2013) ;leGabon (le 24 février 2010 et entré en vigueur le 24 février 2010) ;leCanada (le 14 mars 2013 et entré en vigueur le 1er janvier 2015) ;laBosnie-Herzégovine (le 3 juillet 2014 et entré en vigueur le 1er février 2019) ;lesÉtats-Unis (convention entrée en vigueur le 17 mars 2017).
De laGrande Dépression (1873-1896) auxtrente glorieuses les principaux partis de gauche affichent un discours uni sur l’immigration. Celui-ci comprend une critique théorique décrivant la main-d’œuvre étrangère comme un outil pour maximiser les profits du patronat mais insiste sur la nécessité de la fraternisation entre travailleurs français et immigrés contre ce même patronat. Ainsi, dans le programme duParti ouvrier de 1883,Jules Guesde etPaul Lafargue définissent la ligne théorique et pratique qui sera longtemps observée par la gauche française : « Les ouvriers étrangers chassés de leurs pays par la misère, dominés et souvent exploités par des chefs de bande, ne connaissent ni la langue, ni les prix, ni les habitudes du pays, sont condamnés à passer par les conditions du patron ». Tout en déplorant « les dangers nationaux et les misères ouvrières qu’entraîne la présence des ouvriers étrangers », ils ajoutent que « Pour déjouer les plans cyniques et antipatriotiques des patrons, les ouvriers doivent soustraire les étrangers au despotisme de la police (…) et les défendre contre la rapacité des patrons en “interdisant légalement” à ces derniers d’employer des ouvriers étrangers à un salaire inférieur à celui des ouvriers français »[130].
Les attitudes envers le racisme, l’antisémitisme et la xénophobie en France font l'objet d'un suivi par laCommission nationale consultative des droits de l'homme. Son rapport de 2022 estime que« la présence des immigrés ne semble pas susciter en tant que telle une opposition très marquée. Si près d’un Français sur deux (49 %) a le sentiment que les immigrés sont trop nombreux aujourd’hui en France, ils considèrent en majorité (72 %) que la présence d’immigrés est une source d’enrichissement culturel et que les travailleurs immigrés doivent être considérés comme chez eux en France car ils contribuent à l’économie française (81 %)" et que le sentiment d'une présence trop importante des immigrés en France est surtout le fait "des sympathisants LR (82 %) et RN (94 %)[131] ».
Un sondage BVA publié par laFondation Jean Jaurès indique que l'immigration reste un marqueur du clivage gauche-droite : l'idée selon laquelle « il y a trop d'immigrés aujourd'hui en France » serait partagée par 69 % des personnes interrogées, contre 63 % en 2018, dont 51 % des sympathisants LFI, 50 % d'EELV, 43 % du PS, 59 % de Renaissance, 83 % des Républicains, 95 % du RN. Pour ce qui concerne la question desréfugiés qui demandent l'asile s'ils sont persécutés dans leur pays, les sympathisants de gauche interrogés jugent pour 84 % d'entre eux que la France doit les accueillir. La proportion est de 80 % parmi les sympathisants Renaissance, mais de seulement 47 % chez les Républicains et 26 % au RN[132]. De même, 54 % des sympathisants de La France insoumise, 69 % des socialistes et 70 % des écologistes approuvent la réduction des moyens de contester uneObligation de quitter le territoire français (OQTF)[133].
En 2007, leParti socialiste (PS) souligne l'augmentation récente du nombre de« sans papiers » en France, et la« dégradation de la réalité sociale et sanitaire » dans laquelle ils sont placés. Il estime que l'immigration choisie est« une conception arrogante et unilatérale du codéveloppement. » Le PS juge« indispensable » le rétablissement de la règle des dix ans pour une régularisation de plein droit des étrangers en situation irrégulière[134].
Les dissensions internes rendent difficiles l'émergence d'une opinion unique sur l'immigration.Lionel Jospin affirme par exemple en 2006 qu'une« politique de régularisation au cas par cas devra être mise en place. Elle devra être conduite avec intelligence pour permettre la régularisation du plus grand nombre sans créer un appel d’air »[135]. En 2009, le PS estime que legouvernement Fillon mène une« politique du chiffre qui donne lieu à de nombreux drames humains, comme les défenestrations de personnes sans papiers arrêtées par la police »[136].
La position duParti communiste français (PCF) a évolué dans le temps. Au début des années 1980,Georges Marchais dénonce l'« immigration massive » profitant aux patrons et au gouvernement français « pour se procurer une main-d’œuvre d’esclaves modernes, surexploitée et sous-payée ». Il dénonce la pression sur les salaires et les risques de chômage que représente pour les ouvriers l'immigration[137]. Dans une déclaration commune, les maires communistes de banlieue regrettent que « les pouvoirs publics orientent systématiquement les nouveaux immigrés » vers leurs villes et exigent « une meilleure répartition des travailleurs immigrés dans les communes de la région parisienne », tout en précisant que leurs municipalités continueraient d’« assumer leurs responsabilités »[130].
Depuis la deuxième moitié des années 1990, les positions du PCF deviennent favorables à l'immigration : en 2006, le Parti estime que« l’immigration est une chance fantastique pour le pays d’accueil. C’est la preuve qu’il fait encore rêver, qu’il peut séduire »[138]. Il souligne que l'immigration est devenue essentiellement familiale, et que les flux sont moins importants que par le passé[139]. Le PCF milite pour le renforcement des centres d'accueil« afin de répondre aux revendications immédiates et urgentes des migrants »[140]. Il revendique l'émergence« d'une nouvelle image de l’immigration dans l’opinion publique, la mise en place des moyens et des conditions équitables de vie au sein de notre pays, l’engagement des dispositifs permettant de construire et de réussir cet accueil, la valorisation de l’apport des migrants, de leur citoyenneté »[141].
En 2007, Le PCF demande la régularisation inconditionnelle de tous lesimmigrés clandestins et souhaite accorder le droit de vote et l'éligibilité aux étrangers pour les élections locales[142].
En 2005, l'Union pour un mouvement populaire (UMP) estime que la réunion duG5« a permis de poser les bases d’unepolitique d’immigration européenne à travers la mutualisation des moyens des cinq grands pays d’Europe (France, Allemagne, Royaume-Uni, Espagne et Italie) afin d'assurer le contrôle des frontières et lutter contre l’immigration clandestine »[143].
En 2007, lors de la campagne pour les électionsprésidentielles etlégislatives, l'UMP veut« renforcer la lutte contre l’immigration illégale »,« mettre fin au détournement des procédures d’immigration légale »,« encourager une immigration professionnelle et étudiante de qualité » et« mettre en place les conditions d’une intégration réussie »[144]. Elle prône l'« immigration choisie », qu'elle définit comme« une politique équilibrée qui reconnaît les apports de l’immigration à notre pays, mais dans un cadre maîtrisé, compatible avec nos capacités d’accueil et l’intérêt des pays d’origine, et qui permet l’intégration »[145].
À la suite de sa victoire aux élections législatives de 2007, l'UMP propose une loi et des amendements concernant les modalités d'immigration, que le journalLe Monde considère susceptible de créer des difficultés aux migrants et aux couples mixtes[22]. Elle souhaite également fixer des quotas d'admission d'étrangers sur le territoire national[146], après avoir fixé un quota de 25 000 expulsions de clandestins en métropole[147].
Le, à la suite de l'affaire Leonarda, le président de l'UMP,Jean-François Copé, annonce que son parti compte réexaminer ledroit du sol en France, en présentant, avant la fin de l'année 2013, une proposition de loi prévoyant la fin de l'acquisition automatique de la nationalité pour les enfants nés en France de parents étrangers[148].
Durant sa campagne présidentielle de 2017,François Fillon promet de durcir les règles du regroupement familial, de conditionner les aides sociales à deux ans de présence sur le territoire, de supprimer l’aide médicale de l’État ou encore de faire voter par le Parlement des quotas annuels d’immigrés par origines nationales (une rupture avec les principes en vigueur depuis l’ordonnance du, selon laquelle la faculté d’assimilation des étrangers dépendait non pas de leur origine, mais de leurs caractéristiques individuelles)[130].
Rapport 2023, 53 p.(lire en ligne),Rapport 2022, 53 p.(lire en ligne),Rapport 2021, 51 p.(lire en ligne),Rapport 2020, 87 p.(lire en ligne),Rapport 2019, 105 p.(lire en ligne),Rapport 2018, 77 p.(lire en ligne),Rapport 2017, 104 p.(lire en ligne),Rapport 2016, 114 p.(lire en ligne),Rapport 2015, 88 p.(lire en ligne),Rapport 2014-1, 45 p.(lire en ligne),Rapport 2014-2, 61 p.(lire en ligne),Rapport 2013, 72 p.(lire en ligne),Rapport 2012, 38 p.(lire en ligne),Rapport 2011, 71 p.(lire en ligne),Rapport 2010, 61 p.(lire en ligne),Rapport 2009, 62 p.(lire en ligne)