Le terme de géologiepléistocène est formé de deuxétymons grecs πλεῖστος,pleîstos,« le plus nombreux, très nombreux » (superlatif de πολυς,polus « nombreux ») et de καινός,kainós, « nouveau, récent » (le premier en français donnepléisto et le secondcène), sans allusion à ce qui est le plus nombreux ni à ce qui est récent[2].
Pour comprendre la première épithètepléisto « le plus nombreux », il faut se reporter àPrincipes de géologie (1830-1833), un ouvrage du géologue anglaisCharles Lyell, dans lequel il introduit le terme depliocène, à partir d'un autre étymon πλείων,pleiôn « plus nombreux » et καινός,kainós, « nouveau, récent », donnant la graphie latine depléio.cène /plio.cène« plus nombreux . [affleurement] récent », pour désigner la dernière des trois divisions de l’ère tertiaire, correspondant aux terrains les plus récents et dont la faune présente le plus de ressemblance avec le monde vivant actuel. Là encore, il faut deviner ce qui est « le plus nombreux ».
Lyell indique dans son ouvrage :« Les strates tertiaires européennes peuvent être classées en quatre périodes successives, chacune caractérisée par une proportion très différente de coquilles fossiles d'espèces récentes. Ces quatre périodes seront appelées « Pliocène plus récent », « Pliocène plus ancien », « Miocène » et « Éocène ». Dans les groupes les plus anciens, nous trouvons un nombre extrêmement réduit de fossiles identifiables à des espèces vivant actuellement ; mais à mesure que nous nous approchons des ensembles supérieurs et plus récents, nous trouvons les restes de testacés récents en abondance. » (Principes de géologie[3]).
Puis Lyell remplaça le terme dePliocène plus récent parPleistocene (français : Pléistocène), période caractérisée par un nombre encore plus grand de« fossiles identifiables à des espèces vivant actuellement ». Sachant que l’ordre déterminant-déterminé est inverse en français, la paraphrase depléisto.cène (la forme francisée avec des accents) pourrait être« [affleurement] récent [ayant des fossiles de formes récentes] les plus nombreux ».
Lors de sa définition initiale le Pléistocène couvrait toutes lesglaciations récentes connues, mais on a identifié postérieurement plusieurs autres périodes glaciaires qui se situaient alors à la fin duPliocène. À la suite de discussions conduites à partir de 2006 par l'International Union for Quaternary Research[4], leGélasien a été transféré du Pliocène vers le Pléistocène le, faisant ainsi reculer la date de début de ce dernier (et duQuaternaire) vers 2,6 millions d'annéesavant le présent. Lestratotype correspondant à ce début (au commencement du Gélasien) est lacoupe stratigraphique deMonte San Nicola près deGela enSicile.
Les effets des glaciations sont globaux. Dans l'hémisphère sud, l'Antarctique est couvert par les glaces durant tout le Pléistocène ainsi que pendant lePliocène précédent. Le sud de lacordillère des Andes est couvert par le glacier dePatagonie ; il existe des glaciers enNouvelle-Zélande etTasmanie ; les glaciers dumont Kenya, duKilimandjaro et duRwenzori dont il ne reste plus rien ou seulement des traces étaient très étendus. Les montagneséthiopiennes et la chaîne de l'Atlas comportent aussi des glaciers.
Dans l'hémisphère nord de nombreux glaciers fusionnent pour former des glaciers continentaux. L'inlandsis scandinave s'étend jusqu'enGrande-Bretagne et enAllemagne. Deux inlandsis couvrent une partie de l'Amérique du Nord. Les glaciersalpins descendent jusqu'à l'emplacement actuel deLyon. Les avancées glaciaires produisent des glaciers continentaux d'une épaisseur de 1 500 à 3 000 mètres. Le volume de glace emprisonné est la cause de la chute du niveau de la mer de 100 m ou plus. Pendant lespériodes interglaciaires les côtes noyées par la remontée des eaux couvrent de grandes surfaces ; cette remontée des eaux est atténuée dans certaines régions par lerebond isostatique du plateau continental.
À la fin de la dernière période glaciaire de grands lacs se forment enAmérique du Nord. Lelac Bonneville, qui disparait par évaporation et dont il ne reste de nos jours que des vestiges, se forme il y a 32 000 ans. Lelac Agassiz, de formation plus récente (13 000 ans), couvre plus de 400 000 km 2 et se vide périodiquement vers legolfe du Mexique ou labaie d'Hudson. Les apports en eau douce froide vers l'Atlantique Nord influencent le climat européen[7].
On peut étudier les dépôts sédimentaires continentaux de cette période dans les grottes et le fond des lacs ainsi que dans les grandes quantités de matériaux déplacés par les glaciers. Les dépôts marins tapissent de nombreux fonds océaniques. Dans quelques zones géologiques actives comme la côte sud de laCalifornie, ces dépôts marins peuvent se retrouver à une altitude de plusieurs centaines de mètres.
Variations de la concentration en CO2 pendant une partie du Pléistocène (données provenant de carottages dans l'Antarctique).
Au début duXXe siècle, quatre glaciations majeures avaient été identifiées, séparées par despériodes interglaciaires. Les périodes glaciaires étaient définies différemment selon les régions et continents ; elles dépendaient en effet de la latitude et de la configuration géologique de la région concernée. On retrouve néanmoins une certaine correspondance chronologique entre les glaciations des diverses régions, raison pour laquelle on parle d'évènements climatiques globaux et que les noms qui se rapportent à des régions spécifiques ont longtemps été utilisés pour dénommer l'événement global lui-même. Cette classification est toutefois abandonnée aujourd'hui au profit de lachronologie isotopique.
Les glaciations du Pléistocène présentent un caractère cyclique. L'hypothèse du forçage climatique par des variations de l'orbite terrestre est ancienne et soutenue par des données expérimentales cohérentes[8]. Lescycles de Milankovitch représentent le facteur principal des changements climatiques cycliques du Pléistocène, mais ils n'expliquent pas la tendance au refroidissement global à long terme.
Aujourd'hui, le nombre de glaciations au Pléistocène est plutôt défini par lesstades isotopiques de l'oxygène. Le rapport18O/16O desisotopes de l'oxygène, mesuré dans descalcites issues decarottes océaniques, varie en fonction de la température des océans. L'évolution de ce rapport au cours du temps montre un grand nombre de cycles climatiques depuis 2,6 millions d'années[9].
Au début du Pléistocène les faunes marines et continentales étaient proches des faunes actuelles[10].
Le genreHomo était probablement déjà présent à la fin duPliocène en Afrique (Ledi-Geraru,LD 350-1). Différentes espèces d'Homo s'y développent à partir duGélasien, qui vont coexister ou se succéder tout au long du Pléistocène. Nos très lointains ancêtres auraient frôlé l’extinction 900 000 ansavant le présent[11].Les dernières espèces humaines nonsapiens disparaissent au début duPaléolithique supérieur.
Le peuplement des régions septentrionales d'Europe et d'Asie durant le Pléistocène est tributaire descycles glaciaires. Les méthodes de taille simples utilisées au début de la période (Oldowayen) sont remplacées à partir de 1,76 million d'années par une méthode plus complexe (Acheuléen). Ladomestication du feu est attestée à partir d'environ 400 000 ans avant le présent dans plusieurs régions du monde, peuplées par des espèces humaines différentes.
La domestication du chien pour lachasse, il y a au moins 33 000 ans, facilite la recherche de nourriture parHomo sapiens[12].
Plusieurs espèces de grands mammifères (mégafaune), telles que lesmammouths, lesmastodontes et lestigres à dents de sabre, s'éteignent en Australie et en Amérique concomitamment à l'arrivée d'Homo sapiens sur ces continents, à la fin du Pléistocène. Les extinctions sont un peu moins nombreuses en Europe et en Asie à cette époque. Partout, ce sont d'abord les grands animaux qui disparaissent[13], et la surchasse par l'Homme est mise en cause dans de nombreux cas.
↑Alain Rey (direction), Marianne Tomi, Tristan Hordé, Chantal Tanet, Alain Rey,Dictionnaire historique de la langue française, Tomes I et II, Le Robert,.
↑(en)Clague, Johnet al. (2006) « Open Letter by INQUA Executive Committee »Quaternary Perspective, the INQUA Newsletter International Union for Quaternary Research 16(1):« Copie archivée »(version du surInternet Archive).