Article premier de la Déclaration universelle des droits de l'homme (voir le texte en français) : Ches honmes pi ches fanmes is vient't tertous au monne libe, aveuc ches minmes droèts pi l'minme dingnité. Leu raison pi leu conscienche is font qu'is ont l'dévoér dé s'conduire inter eus conme des frères.
Pour désigner cette langue, on utilisepicard dans la régionPicardie et le plus souvent les motsch’ti etch’timi dans les départements duNord et duPas-de-Calais (rouchi dans la région de Valenciennes). Cependant, la plupart des locuteurs concernés ont le sentiment d'user d'unpatois – terme péjoratif délibérément utilisé par les linguistes à l'époque où l'Instruction publique avait pour mission de répandre l'usage du français sur l'ensemble du territoire et notamment dans les campagnes. Les linguistes, quant à eux, emploient le termepicard. En effet, qu’on l’appellepicard ouch’ti, il s’agit de la même langue, les variétés parlées enPicardie, dans leNord-Pas-de-Calais ou enBelgique étant largement intercompréhensibles et partageant des caractéristiques morphosyntaxiques fondamentalement communes.
L'Éducation nationale a inscrit le 16 décembre 2021 le picard parmi les langues régionales pouvant être enseignées à l'école, au collège et au lycée des académies d'Amiens et de Lille[6].
On peut citer à ce sujet un extrait du rapport sur les langues de la France rédigé parBernard Cerquiglini, directeur de l'Institut national de la langue française (branche duCNRS), à l’intention du ministre de l’Éducation nationale, de la recherche et de la technologie et du ministre de la Culture et de la Communication ()[7] :
Le picard bénéficie néanmoins, comme toutes les autres langues de France, des actions menées par la Délégation générale à la langue française et aux langues de France du ministère de la Culture[8].
L'aire d'extension de la langue d'oïl, avec au nord le picard.
Le picard fait partie de l'ensemble linguistique de la langue d’oïl (comme lefrançais) et appartient à la famille deslangues gallo-romanes. C’est d’ailleurs à la langue d’oïl que l’on fait référence lorsque l’on parle d’ancien français. Certains linguistes classent le picard dans le sous-groupe septentrional de la langue d'oïl[9].
La langue picarde est un ensemble de variétés utilisées à l’écrit (scriptae) dans le Nord de la France dès avant l’an1000 et bien sûr marquées par des traits dialectaux picards ; cesscriptae voisinaient avec d’autres variétés écrites, comme lechampenois et l’anglo-normand (le sud de la France utilisait alors un ensemble de variétés, hétérogènes elles aussi, souvent désignées comme constituant la langue d’oc, ouoccitan).
À l'échelle locale, on a conscience de parler picard àLille dès leXIIIe siècle, dans leLivre Roisin; coutumier lillois rédigé vers 1283; un serment juridique à prononcer sur les reliques explicite :« Et s'il fust aucuns qui devant eschevins plaidast et ne seuist riens doulangage pikart, si doit-il y estre rechus à son sierment faire par le langage que il mius set. »
Il n'est pas possible de définir avec certitude les délimitations précises du picard à l'époque médiévale, mais on pense que la frontière sud du picard englobait autrefois au moins leLaonnois et laThiérache, Gossen note que leNouveau dénombrement du Royaume par généralités, élections, paroisses et jeux de Saugrain[10], publié en1720, situait encore enPicardie les élections deBeauvais,Compiègne,Senlis,Soissons,Laon,Noyon,Crépy-en-Valois,Clermont etGuise[11]. Mais le dialecte picard fut par la suite refoulé jusque sur les bords de l'Oise[11], et seules les anciennes élections de Clermont, Beauvais, Noyon et Guise figurent encore aujourd'hui en intégralité dans le domaine linguistique picard. Jules Corblet, dans son Glossaire étymologie et comparatif du patois picard, estime que l'idiome picard était compris dans l'ancienne Picardie duXIVe siècle, et qu'il comprenait par conséquent l'Amiénois, lePonthieu, leBoulonnais, leVimeu, leMarquenterre, leSanterre, leVermandois, laThiérache, lePays reconquis, leTournaisis, l'Artois, la Morinie, leLaonnois, leSenlisis, leSoissonnais, leValois et leCalaisis[12].
Le picard est phonétiquement assez bien différencié des variantes centrales de la langue d'oïl (appelées anciennementfrancien), qui donneront naissance au français ; parmi les traits les plus remarquables, on peut noter une évolution moins marquée en picard des phénomènes depalatalisation, qui frappent dans les langues d’oïl /k/ ou /g/ devant /j/ (son initial deyacht), /i/ et /e/ toniques, ainsi que devant /a/ [y inclus /ɔ/ (o ouvert deporte] ← /aw/ [cf.joie ←gaudia, maiscorps ←corpus]) :
ancien picardkeval ~ ancien françaischeval (prononcétcheval), de* kaβál (latin vulgairecabállus) : maintien du /k/ originel en picard devant /a/ tonique ;
ancien picardgambe ~ ancien françaisjambe (prononcédjambe), de* gámbə (latin vulgairegámba) : absence de palatalisation de /g/ en picard devant /a/ et /ɔ/ ← /aw/ toniques ;
ancien picardkief (prononcékyéf) ~ ancien françaischief (prononcétchíef), de* káf (latincáput) : palatalisation moins importante du /k/ en picard ;
ancien picardcherf (prononcétchèrf) ~ ancien françaiscerf (prononcétsèrf), de* kyérf (latincérvus) : palatalisation simple en picard, palatalisation puisassibilation en ancien français.
On peut résumer ces effets de palatalisation ainsi :
/k/ + /y/, /i/ ou /e/ (toniques) : ancien picard /t͡ʃ/ (prononcétch et noté parch) ~ ancien français /ts/ (noté parc) ;
/k/ et /g/ + /a/ (y compris /ɔ/ ← /aw/) tonique : picard /k/ et /g/ ~ ancien français /t͡ʃ/ (notéch) et /d͡ʒ/ (prononcédj comme dansdjebel et noté parj).
Cestraitsconsonantiques caractéristiques sont appelésnormanno-picards par la linguistique traditionnelle et sont matérialisés par uneisoglosse appeléeligne Joret qui coupe la Normandie en deux du nord au sud, traverse l'Amiénois, la Thiérache, ainsi que le sud-ouest de la Belgique à l'ouest de Rebecq, Beaumont et Chimay.
Ainsi, l’on en arrive à des oppositions frappantes, telles que l'ancien picardcachier (prononcécatchyér) ~ ancien françaischacier (prononcétchatsiér, lequel deviendra plus tardchasser, forme du français moderne).
Le motrescapé illustre bien ce trait consonantique. Ce terme wallo-picard est passé en français avec lacatastrophe de Courrières[13] et il correspond au picard usuelrécapé et au français centralréchappé (participe passé du verberéchapper) qui ne s'emploie pas de manière substantivée. Le verbe réchapper est déjà lui-même un emprunt au picard datant du Moyen Âge, puisqu'il est attesté dès leXIIIe siècle sous la forme d'ancien picardrescaper chez Le Reclus de Moliens[14].
En outre, il montre que lefrançais standard n'a pas cessé d'emprunter au picard (ou au normand, car il est parfois difficile de déterminer l'origine géographique de l'emprunt). Ainsi de nombreux termes français révèlent leur caractère normanno-picard :cabaret, emprunt au picard, lui-même du moyen néerlandaiscaberet, cabret, déjà issu du picardcambrette « petite chambre » ;cauchemar (de l'ancien picardcauchier oucauquier « fouler, presser » etmare « cauchemar », emprunt au moyen néerlandaismare « fantôme qui provoque le cauchemar ») ;quai, emprunt à l'ancien picardkay « levée de terre faite le long d'une rivière » équivalent étymologique du françaischai ; etc. En revanchecaillou est un emprunt au normand occidental, comme le montre le suffixe-ou, le picard ayant-eu :cailleu, qui a supplanté l'ancien françaischail, chaillou.
Inversement, du fait du voisinage entre l’aire du picard et de Paris, le français, c’est-à-dire principalement la langue de l'Île-de-France, influença beaucoup le picard. De cette proximité entre le picard et le français vient d’ailleurs la difficulté à le reconnaître comme une langue à part plutôt que comme « une déformation du français », comme on le pense souvent. On notera d'ailleurs l'ambivalence de cet article sur ce point (voir paragraphes précédents). Aujourd'hui des facteurs d'ordre politiques, socio-éducatifs et technologiques expliquent l'influence grandissante du français standard.Le picard se manifeste comme un ensemble de variétés,extrêmement proches cependant[réf. nécessaire]. Une énumération précise reste difficile en l’absence d’études spécifiques sur la variation dialectale, mais on peut probablement distinguerprovisoirement les principales variétés suivantes : Amiénois,Vimeu-Ponthieu,Vermandois,Thiérache,Beauvaisis, « ch'ti mi » (ex-bassin minier), variétés circum-lilloises[16] (Roubaix,Tourcoing,Mouscron,Comines), « rouchi »[15] (Valenciennes,Saint-Amand,Lille,Tournai,Cambrai,Douai) etBorain[20], Artésien rural[17], Saint-Polois[18], Audomarois[21] et formes spécifiques du littoral[22] (Gravelines,Grand-Fort-Philippe,Calais etBoulogne-sur-Mer). Ces variétés se définissent par des traits phonétiques, morphologiques ou lexicaux spécifiques, et parfois par une tradition littéraire particulière.
La prononciation varie aussi beaucoup suivant les parties de la région où la langue est parlée. De fait, pour un autochtone pratiquant le picard et entendant quelqu'un s'exprimer en patois, il lui est possible d'identifier rapidement l'origine géographique du locuteur.
On peut voir deux grands groupe de variétés de picard : le picard du nord (bassin minier, Saint-Omer, Nord, Hainaut) d’une part, et le picard du sud (Arras, Montreuil, Somme, Oise et Aisne)[23] d’autre part. On remarque surtout plusieurs différences régulières et nettes entre les deux types de parlers, ainsi :
La prononciation varie dans le domaine picard, car la langue n'est pas uniforme. Ainsi ne prononce-t-on pas cette langue de la même façon dans le Vimeu que dans le Hainaut, où il s'agit d'une autre variété de picard.
Voici quelques exemples en picard du Vimeu (mot picard et prononciation en API):
En picard, comme enwallon unifié, les graphiesvoyelle+nn,voyelle+nm etvoyelle+mm marquent la nasalité (il ne faut donc pas lire ces groupes de lettres comme en français).
Picard
Prononciation
API
Français
unne
<<un'n>>
[ɛ̃n]
une
tranner
<<tran-né>>
[trãnɛ]
trembler
grainne
<<grin-n'>>
[grɛ̃n]
graine [grɛn]
minme
<<min-m'>>
[mɛ̃m]
même
ganme
<<gan-m'>>, <<gan-b'>>
/ɡanb/
[gãm]
jambe
Pour rappeler cette nasalisation, on utilise parfois une graphie picarde avec unpoint disjonctif :
D'autre part, la graphie des verbes conjugués va dépendre de la prononciation qui change dans le domaine picard ; on va donc écrire en picard du sudil étoait ouil étoét et en picard du nordil étot. De même, on aura (i sro / i sra), (in o / in a),... Ceci est noté comme des variantes dans la suite.
On trouvera la conjugaison des verbes picards dans des grammaires ou des méthodes de langue[24].
Le ch’ti est un sobriquet utilisé pour désigner les différentes formes du picard encore parlées dans une grande partie de la régionNord-Pas-de-Calais. Dans la région Picardie, on parle de « picard », alors qu’on emploie plutôt les sobriquets ch’ti,ch’timi dans le Nord-Pas-de-Calais ou encorerouchi dans la région deValenciennes même si les gens du Nord parlent entre eux simplement depatois, une dénomination dépréciative.
Les linguistes emploient uniquement la désignation de picard. En effet, qu’on l’appelle patois, picard ou ch’ti, il s’agit de la même langue, et les variétés qui sont parlées enPicardie, dans le Nord-Pas-de-Calais ou enBelgique sont assez largement inter-compréhensibles.
De nombreux mots des formes de picard sont très proches du français mais un grand nombre de mots lui sont totalement spécifiques, principalement des mots du jargon minier. LorsqueZola vint dans la région se documenter pourGerminal, un interprète lui fut nécessaire pour dialoguer avec les mineurs.
Avec la mobilité des populations et l'enseignement obligatoire du français à l'école, les différentes variétés du picard tendent à s’uniformiser. Dans sa pratique quotidienne, le picard tend à perdre de sa spécificité en se confondant avec un français régional. D’ailleurs, de nos jours, si la plupart des locaux peuvent comprendre le picard, de moins en moins sont capables de le parler et ceux pour qui le picard est lalangue maternelle sont de plus en plus rares. Cependant, le picard, parlé dans les campagnes comme dans les villes, est loin d’être une langue disparue, et constitue un élément encore important et vivant de la vie quotidienne et dufolklore de cette région.
En1958, alors qu’unAtlas linguistique du Picard était en cours (lancé par Robert Loriot, dont la thèse de Doctorat a porté sur l’étude phonétique des parlers populaires de l’Oise) de même qu’unInventaire général du Picard (compilé par Raymond Dubois (Sus-Saint-Léger) et Robert Loriot) était fondé à Arras aux Archives du Pas-de-Calais uneSociété de Dialectologie Picarde (présidée par Mario Roques). Cette société s'était donnée mission de susciter, encourager et publier tous travaux relatifs à la dialectologie picarde « offrant les garanties scientifiques qui s’imposent »[25]. La langue picarde fait de nos jours l’objet d’études et de recherches dans les Universités de Lettres deLille et d’Amiens ainsi que dans des universités étrangères comme à Indiana University aux États-Unis[26].
Depuis 2016, l'Agence régionale pour la langue picarde se donne pour mission de « promouvoir la langue picarde dans tout les secteurs de la société »[29] dans l'ensemble desHauts-de-France. Ils organisent les festivalsChés Wépes[30], rédigent des publications sur la langue[31], et mettent en valeur la langue auprès des communes avec la charteMa commune aime le picard, un engagement par la commune signataire a effectuer des actions pour la langue picarde[32], souvent matérialisée par la double signalisation français-picard. Cette charte a été signée par Amiens[33] et 20 autres communes[Note 2] dans laSomme, lePas-de-Calais[Note 3] et leNord[Note 4].
Le picard est surtout une langue parlée, mais il est véhiculé par écrit à travers des textes littéraires comme ceux de Jules Mousseron, par exempleLes Fougères noires, un recueil de « poésiespatoises » (selon les termes utilisés sur la couverture de l'ouvrage dans son édition de 1931) de Jules Mousseron[34]. Plus récemment, la bande dessinée a connu des éditions en picard, avec par exemple des albums des aventures deTintin (Les pinderleots de l'Castafiore,El' sécrét d’la Licorne etEl’ trésor du rouche Rackham), ou encore d'Astérix (Astérix, i rinte à l'école,Ch’village copé in IIetAstérix pi Obélix is ont leus ages - ch'live in dor)[35].
Le premier album d'Astérix en picard s’est vendu à 101 000 exemplaires ce qui représente la plus grosse vente de toutes les traductions en langue régionale, selon l’éditeur Albert René[36].
À l’origine, la période médiévale puis celle correspondant aumoyen français sont riches de textes littéraires en picard : par exemple, laSéquence de sainte Eulalie (880 ou 881), premier texte littéraire écrit en langue d’oïl, ou les œuvres d’Adam de la Halle. Le picard, cependant, n’a pas réussi à s’imposer face à la langue littéraire interrégionale qu’était devenu le français, et a été peu à peu réduit au statut de « langue régionale ». On n'oubliera cependant pas que les célèbres romans octosyllabiques, priés des surréalistes,La Manekine etJehan et Blonde, du poètePhilippe de Remy, sont émaillés de termes picards[37].
On trouve une littérature picarde moderne lors des deux derniers siècles, lesquels ont vu naître partout en France les affirmations identitaires régionales en réponse au modèle républicain centralisé issu de laRévolution. Aussi le picard écrit moderne est-il une retranscription du picard oral. Pour cette raison, on trouve souvent plusieursorthographes aux mêmes mots, de la même manière que pour le français avant que celui-ci ne soit normalisé. L’une des orthographes s’inspire directement des mots français. Elle est sans doute la plus simple à comprendre mais elle est aussi certainement à l’origine de l’idée selon laquelle le picard n’est qu’une déformation du français. Diverses réflexions orthographiques ont été menées depuis les années 1960 pour remédier à cet inconvénient, et donner au picard une identité visuelle distincte du français. Il existe actuellement un certain consensus, au moins parmi les universitaires, autour de la graphie diteFeller-Carton. Ce système, qui donne aux prononciations spécifiques au picard des graphies en rapport, mais reste lisible pour qui ne maîtrise pas entièrement la langue, est l’œuvre du professeurFernand Carton, qui a adapté au picard l’orthographe duwallon mise au point parJules Feller. Une autre méthode existante est celle deMichel Lefèvre (où [kajεl] « chaise » est notéeun' kayel, contreeune cayelle dans le système Feller-Carton). Soulignons les efforts significatifs duchanoine Haigneré (1824-1893), du professeur Henri Roussel et du docteurJean-Pierre Dickès pour décrire et conserver cette langue par écrit.
Le motch'ti, ouchti, ch'timi ouchtimi, a été inventé durant laPremière Guerre mondiale par desPoilus qui n’étaient pas de la région pour désigner leurs camarades originaires du Nord Pas-de-Calais et de Picardie. C'est un motonomatopéique créé à cause de la récurrence du phonème /ʃ/ (ch-) et de la séquence phonétique /ʃti/ (chti) en picard : « chti » signifiecelui et s'entend dans des phrases comme « ch'est chti qui a fait cha » ou « ch'est chti qui féjot toudis à s'mote », etc., et qu'on retrouve aussi dans le dialogue de type « Ch’est ti? — Ch’est mi » (C’est toi? — C’est moi).
Contrairement à ce qui est parfois dit, "chti/chtimi" ne signifie ni « petit » ni « chétif » (puisquepetit se traduit parp'tit, tiot outchiot), donc rien à voir avec l'ancien françaisch(e)ti(f) < lat.captivu(m).
Dans le folklore du Nord de la France et de Belgique, legéant est une figure gigantesque qui représente un être fictif ou réel dont les noms sont souvent en picard :
Florimond Long Minton naquit de l'imagination et sous la plume du directeur du journal localLe Petit Doullennais et auteur picardisant, Charles Dessaint, qui publia des textes, régulièrement de 1925 à 1935. C'est un géant deDoullens (Somme).
Tiot Mitt, géant deMaing (Nord), Pô-louche et Marie Robinet àFruges (Pas-de-Calais), Tchout Jaques àHam (Somme),...
Le sobriquet « rouches boyaus » (boyaux rouges) est très ancien, il remonte auXVIe siècle et désigne les habitants du sud de l'Artois dans le Pas-de-Calais. Ce sobriquet est indépendant de la définition des « ch'ti » voisins.
L'origine de ce sobriquet se perd dans le temps. Les trois explications les plus courantes sont en rapport avec les histoires suivantes :
LesArtésiens auraient eu le tempérament bouillant ;
L'Artois n'est revenue à la couronne de France qu'en 1659. Avant cette date, sous domination espagnole, elle a conservé ses privilèges et a ainsi échappé à l'impôt impopulaire de la gabelle, l'impôt sur le sel. Le sel n'étant donc pas cher en Artois, sa consommation y était plus abondante que chez les voisins picards qui, jaloux de ce privilège, disaient :« I minjtte tèlmint d'sé qu'is nin ont leus boïaus rouches conme unne crète ed codin » (Ils mangent tellement de sel qu'ils en ont les boyaux rouges comme une crête de dindon).
Ch'Lanchron (éch jornal picard) est un journal trimestriel en picard publié depuis 1980 - siège social :Abbeville.
Dans les années 1980 - 1990 au moins, le journal régional "la voix du nord" publiait un édito en chti, qui était signé d'une Julie. Le journal se fait aussi le relais de toutes les publications[38] en chti digne d'un intérêt.
Jean de La Fontaine La moitié de ses fables ont été écrites en picard. Il s'agit du picard académique mais avec l'utilisation des phonèmes français. Au Moyen Âge, le "s" en picard, se prononce comme en hongrois :une chuintante remplace une sifflante (le pronom possessif "son" doit s'écrire "sen" et non "chen", de même que le "ch" se prononce comme en italien (gutturale sourde): cheval se prononce "queval" et s'écrit désormais de même. La Fontaine écrit: "Biau chire leu, n'écoutez mie, mère tenchent chen fieu qui crie" parce qu'il francise l'orthographe pour complaire à son roi, mais il aurait dû écrire: "Biau sire leu, n'écoutez mie, mère tensent sen fieu qui crie". Il en est de même qu'en Corse, où le pouvoir central parisien a imposé auXXe siècle une orthographe artificielle pour le différencier des dialectes italiens, notamment ceux de l'ancien royaume des deux Siciles.
Henri Carion(pcd) publiait, sous le nom deJérôme Pleum'coq, des lettres dans un journal de Cambrai. Un recueil,Épistoles kaimberlottes, paru en 1839.
Maurice Tonneau(pcd) (1923-1994) né àCroix (Nord), est un écrivain picard[39]. Il fut le vice-président de l'association « Les Veillées Patoisantes de Tourcoing »
Roland Dussaussoy a publié de 2004 à 2011, en trois parties : "L'héritache èd' min père", qui raconte tout en picard la vie des cultivateurs dans les années 1950-1960.
Plus de soixante-dix théâtres de cabotans se fixent en deux siècles à Amiens. Beaucoup de théâtres disparurent avec la Première Guerre mondiale et l'invention du cinématographe.Lafleur connut une renaissance et un vif succès populaire local, de 1930 à 1960, grâce au Théâtre des Amis de Lafleur en 1930 et au Théâtre de Chés Cabotans d'Amiens en 1933. C'est avec Maurice Domon, fondateur de Chés Cabotans d'Amiens que le répertoire devient une réelle critique sociale.
Édouard David a écrit des pièces avec Lafleur pourchés cabotans d'Amiens.
L'humoristeDany Boon a fait un spectacle en picard ch'ti au titre évocateur « À s'baraque et en ch'ti ». Dans ce spectacle, il dépeint la vieparisienne qu'il mène en la comparant avec ses habitudes du Nord. Il y explique que les Parisiens sont beaucoup plus fermés que les Nordistes, lesquels sont caractérisés par l'accueil toujours chaleureux qu'ils réservent à leurs hôtes. Il a également réaliséBienvenue chez les Ch'tis, toujours sur le thème des Nordistes accueillants et chaleureux. Il faut toutefois noter que le site du tournage, la ville deBergues appartient au domaine duflamand occidental[42] que l'on rattache aunéerlandais. Cedialecte, qui comporte de nombreux emprunts de langue d'oïl, a décliné depuis 1945 et se trouve peu à peu concurrencé par le picard, ce qui peut contribuer à une certaine authenticité du film.
Alexandre Desrousseaux, poète et chansonnier bilingue picard-français auteur en1853 deL'Canchon Dormoire (La Berceuse) communément appeléeLe P'tit Quinquin (Quinquin signifieenfant en picard), célèbre chanson française en picard et hymne officieux de la ville deLille – Lille (1820-1892).
Le picard a aussi su s'intégrer dans la modernité par le domaine de la chanson-rock ou blues et ce dès le début des années 1980 avec des groupes commeDejouk (amiénois), ou encoreKiller Ethyl. Mais c'est le chanteur, poète et revuisteChristian Edziré Déquesnes qui pousse l'expérience le plus loin après sa rencontre avecIvar Ch'Vavar vers le milieu des années 1990 en créant le groupeChés Déssaquaches, devenu ensuiteChés Éclichures,(2) Brokes et aujourd'huiChés Noértes glènnes. Dernièrement le slameurSerial crieuR(pcd) a également créé un(pcd) [vidéo] « Clip tout en picard », surYouTube.Kamini utilise quelques phrases picardes dans la chansonMarly-Gomont.
↑Alain Jouret,1914-1918 dans la région de Mons-Borinage. En patois et en images, Saint-Ghislain, 2018, 512 p. (Publication extraordinaire du Cercle d'histoire et d'archéologie de Saint-Ghislain et de la région, 17).
↑a etbTextes saint-polois. Quatre légendes du pays de Saint-Pol, recueillies et mises en vers (?), patois par Ed. Edmont, avec une traduction littérale et des notes historiques et philologiques (1902)(lire en ligne).
François Beauvy,Dictionnaire picard des parlers et traditions du Beauvaisis, Éklitra, LXIII, 1990, 400 p.
Jean-Marie Braillon,Dictionnaire général français-picard, Lemé, Université picarde libre de Thiérache, 3 vol., 2001-2003.
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Jacqueline Picoche,S'sint Evanjil s'lon Sin Matiu, Amiens, Centre d'études picardes de l'Université de Picardie,, 153 p.(lire en ligne).