| Philippe de Longvilliers Seigneur de Poincy | ||||||||
| Biographie | ||||||||
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| Naissance | vers 1584 | |||||||
| Décès | Saint-Christophe | |||||||
| Ordre religieux | Ordre de Saint-Jean de Jérusalem | |||||||
| Reçu dans l'ordre | 1604 | |||||||
| Langue | Langue de France | |||||||
| Bailli gouverneur général de Saint-Christophe | ||||||||
| 24 mai 1651 –11 avril 1660 | ||||||||
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| Commandeur de Coulours | ||||||||
| 1640 –1651 | ||||||||
| Commandeur d'Oisemont | ||||||||
| 21 mai 1624 ou 1625 –1640 | ||||||||
| Commandeur du membre de la Madeleine Saint-Thomas | ||||||||
| 3 janvier 1619 –1624 | ||||||||
| Chevalier de l'Ordre | ||||||||
| Autres fonctions | ||||||||
| Fonction laïque | ||||||||
| Capitaine de Vaisseau en 1622 Chef d'escadre de Bretagne de 1637 à 1638 Lieutenant général dans les Îles d'Amérique en 1639 | ||||||||
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Philippe de Longvilliers, seigneur de Poincydit le « Commandeur de Poincy », né vers1584, et mort le àSaint-Christophe, est unfrère hospitalier,officier de marine royale,administrateur colonial et richissimeplanteur esclavagistefrançais duXVIIe siècle.
À la foiscommandeur de l'ordre de Saint-Jean de Jérusalem (ordre de Malte) etchef d'escadre de Bretagne dans la Marine royale, il est nommé en 1639 à la tête de laCompagnie des îles d'Amérique, qui gère l'ensemble des possessions françaises dans les Antilles. En tant quegouverneur général des îles d'Amérique, siégeant àSaint-Christophe, colonie française alors la plus peuplée, il supervise la colonisation de laMartinique et de laGuadeloupe, et devient le plus important propriétaire d'esclaves et de plantations, toutes nations confondues, au milieu du siècle.
Philippe de Longvilliers descend des Longvilliers (ou Lonvilliers) de Poincy, famille d'ancienne chevalerie. Lefief de Lonvilliers, celui de ses ancêtres, était au comté dePonthieu (Picardie), et le fief dePoincy, celui de ses parents, dans laBrie champenoise (Seine-et-Marne)[1].
Il est le deuxième enfant, et le premier fils de Jean IV de Longvilliers de Poincy (1529-avant 1595), capitaine de la compagnie de François de Choiseul, au service du frère du Roi, et de Sophie de Choiseul de Montereul (v. 1545-1608).
Plusieurs de ses frères[Lesquels ?] suivront son exemple en entrant dans laMarine royale, l'ordre de Saint-Jean de Jérusalem, ou en devenant administrateurs coloniaux, en particulier enNouvelle-France.
À 20 ans, il est reçuchevalier de Malte, en 1604[2]. Il prononce alors les quatrevœux desHospitaliers :vœu de pauvreté,vœu d'obéissance,vœu de chasteté, etvœu d'hospitalité.
Selon les institutions de l'ordre de Saint-Jean de Jérusalem, il part ensuite pour cinq années de présence effective àMalte, pendant lesquelles il effectue ses quatre « caravanes », de six mois chacune, c'est-à-dire des expéditions militaires, essentiellement maritimes, contre lesInfidèles[1].
Il est ensuite nommécommandeur en prenant en charge la Magdelaine Saint-Thomas[2]. Puis, membre dépendant de lacommanderie de Launay, près deJoigny (Yonne), le, il obtient plus tard la commanderie d'Oisemont (Somme)[2], le, puis celle deCoulours (Yonne). Ses trois commanderies lui apportent une rente annuelle de 20 000 à 30 000 livres tournois, qui lui serviront notamment à payer ses nombreuses dépenses aux Antilles[3].
En 1612, il passe dans laMarine royale avec le grade decapitaine des vaisseaux du Roi. Il parvient, pendant laguerre de Trente Ans, au rang dechef d'escadre de Bretagne en 1637[2]. Cependant, il perd son poste à la suite d'un conflit avecMgr de Sourdis, l'archevêque de Bordeaux. Pour le dédommager, lecardinal de Richelieu le nommegouverneur général des Isles d'Amérique (colonies françaises aux Antilles).
En 1638, deux ans après le décès dePierre Belain d'Esnambuc, il lui succède, à l'âge de 54 ans, commelieutenant-général des îles d'Amériques (gouverneur général). DepuisDieppe, il quitte la France à bord deLa Petite Europe le[Note 1] pour lacolonie de Saint-Christophe. Avec lui, il emmène une escorte de 24 gardes, de nombreux soldats et ouvriers, et plusieurs gentilshommes, parents et voisins de laBrie, les futurs "Seigneurs de Saint-Christophe", son neveu Robert de Lonvilliers et la famille de sa sœur, les des Vergers de Sannois (dont une descendante sera l'impératrice Joséphine)[1].
Le, laCompagnie des îles d'Amérique le confirmera dans le grade de Gouverneur de Saint-Christophe et Lieutenant Général des Iles de l'Amérique pour trois ans, à commencer de.
Il s’établira ensuite aussi àSaint-Barthélemy, dans une partie deSaint-Martin et àSainte-Croix (1639-1660).
En 1639, dès son arrivée dans l'île de Saint-Christophe, il achète troishabitations (plantations). Une première pour110 000 livres depétun sur le site "La Grande Montagne", ancienne Habitation d'Esnambuc, bâtie sur unmorne à une lieue et demie du bourg deBasse-Terre. Une seconde à Cayonne (aujourd'huiCayon) pour4 000 livres de tabac. Et une troisième à la ravie de Sable, également pour4 000 livres de tabac[3].
Il s'empresse aussitôt de lotir l'habitation de La Grande Montagne et, entre 1639 et 1640, vend une vingtaine de parcelles, ce qui lui rapporte130 000 livres de pétun, remboursant ainsi tous ses achats initiaux. Sur chaque lot vendu, il impose une rente seigneuriale allant de un à dix cochons et un à cinq chapons par an[3].
Confronté à la surproduction de tabac et à l’effondrement des prix de vente, l'une de ses premières décisions, le, est de signer avec lecapitaine Thomas Warner, gouverneur de la partie anglaise de l'île Saint-Christophe, un décret ordonnant la destruction de tous les plants de tabac, et interdisant d'en planter de nouveaux pendant 18 mois. À la demande de la Compagnie des îles d'Amérique, il va ainsi réorienter l'économie de plantation des colonies françaises, de la production de tabac, vers celle du sucre, beaucoup plus rémunératrice[4].
Pendant cette période de transition dans les cultures, Poincy profite pour ses revenus, du privilège du gouverneur de récupérer les deux-tiers des prises d'esclaves faites sur des navires étrangers, et perçoit un droit decapitation de 100 livres de pétun par an sur chaque habitant de la colonie qui comptait alors 4000 assujettis. Par ailleurs, quand l'interdiction des récoltes de tabac sur dix-huit mois entraîne une absence de rentrée de ces droits, il détourne les marchandises apportées par les marchands hollandais, les seuls à ravitailler Saint-Christophe et les Français, dans ses magasins personnels, et prélève 4 % en nature ou en valeur, taxant le reste[3]. En 1642, après avoir maté une sédition, il perd l'affection d'une grande partie des colons antillais par ses taxes et prohibitions concernant le commerce avec les Hollandais.
Afin d'aider à réorienter les cultures dans les colonies françaises des Antilles, le sieur Raye, frère d'Adam Raye, deRouen, propose ses services à Poincy en 1639. Il connaît la culture de lacanne à sucre, ayant résidé longtemps avec les Hollandais àPernambouc, au Brésil. Raye s'engage alors à acheminer d'Amsterdam, ou de Rouen, un moulin à canne avec tous les outils et équipements nécessaires. Quant aux cannes, apportées par les Espagnols, elles poussaient déjà à l'état sauvage sur l'île[3].
Au bout de quelques années, la nouvelle culture est bien installée. En 1646, l'habitation de la Grande Montagne dispose déjà de plus de 100 esclaves et 200 « domestiques » (engagés blancs). Vers 1650, la main d'œuvre a augmenté d'un tiers, mais a surtout une nouvelle répartition : 300 esclaves et 100 domestiques, qui approvisionnent 3 moulins à canne à sucre. La plantation continue aussi de produire un peu de tabac et de l'indigo[3].
Longvilliers de Poincy se voit reprocher de collaborer avecFrançois Levasseur, présent à Saint-Christophe avec plusieurs dizaines d'autreshuguenots originaires deDieppe. Il doit s'en expliquer aux directeurs de la Compagnie. En réponse, il envoie en 1640 François Levasseur et ses coreligionnaires prendre possession de l'île de la Tortue[5]. Sur place, ce dernier sera rejoint par des planteurs de tabac ayant quitté laBarbade anglaise dès 1639, au moment de la crise de surproduction touchant cette culture. C'est le début desboucaniers et de la colonisation deSaint-Domingue.
Pour prouver son intransigeance religieuse face aux critiques, Poincy chasse aussi de la Guadeloupe un autrehuguenot, Tifiany, de Dieppe, qui s'était« montré insolent »[5].
Installé àSaint-Christophe, il y deviendra le champion de la cause desJésuites installés à laMartinique, plutôt que les Capucins, désignés pour s'occuper de son île et qui lui demandent des assurances sur l'hérédité de l'esclavage.

Bien qu'en tant quefrère hospitalier il ait fait levœu de pauvreté[1], sa fortune lui permet de vivre dans le luxe, comme un grand seigneur de l'époque. Grâce aux 18 esclaves que lui a laissé son prédécesseurLa Grange-Fromenteau, et à quelques artisans qualifiés amenés avec lui de métropole, il se fait construire sur son habitation principale, entre 1639 et 1640, une luxueuse demeure surnommée le « Château de la Montagne ». Ce petitchâteau destyle Renaissance est bâti en briques et pierres sur trois étages, et se termine par uneterrasse à l'italienne. L'édifice, qui se veut à l'image desauberges hospitalières, s'élève au milieu de plusieurs terrasses. Celle au pied du château est relevée et fortifiée de murailles de briques qui dominent des cours plus basses ceintes d'un rempart et de fossés de tous côtés. Il y a deux jardins à parterre de broderies avec des grottes, des bassins et des réservoirs d'eaux alimentant une fontaine dont la source est une demi lieue plus haut dans la montagne située à l'Ouest. Lecorps de logis comporte huit chambres et salles, toutes meublées et décorées de plusieurs tableaux (sujets religieux, cartes marines , vue d'Amsterdam, portraits), une chapelle et des dépendances diverses dont un arsenal, une prison, des sucreries, des vinaigreries, des raffineries, deux moulins, une basse-cour, un pigeonnier et les boutiques du chirurgien, du maréchal ferrant, du menuisier, de l'armurier et du chaudronnier.
Autour de l'habitation s'étendent les champs decanne à sucre, d'indigo, depétun et degingembre, que cultivent lesesclaves africains. Ces derniers vivent au pied de l'enceinte du château, dans un village decases surnommé « la ville d'Angole »[6].
La maison de M. de Poincy compte trois cents personnes, esclaves compris, et est défendue par trois corps de garde, l'un dans le logis, le second à la porte de la prison et le dernier à la porte de la cour. À la table du général de Poincy est servi de la tortue, dulamantin ou du cochon froid que l'on mange à l'orange, quelquefois du bœuf, rarement du mouton. Les jours maigres, il est servi du poisson à l'orange sans huile ni beurre. Seul le lieutenant-général de Poincy mange du pain de France, les autres convives mangent descassaves[7].
Au début des années 1650, Philippe de Longvilliers de Poincy est selon les historiens« le premier capitaliste sucrier des Antilles », avec près de 600 esclaves à son service[8] et une fortune évaluée en 1654 à plus d'un million de livres. Il précède et dépasse ses deux rivaux de l'époque, l'AnglaisJames Drax, qui posséde 200 esclaves à laBarbade en 1654, et le françaisJacques Dyel du Parquet, gouverneur de la Martinique, qui avait à la même époque 150 esclaves[3].
Par une décision du de la Compagnie des îles d'Amérique, Poincy doit être remplacé à son poste de gouverneur parNoël Patrocle de Thoisy. Toutefois, 8 mois après, il s'oppose au débarquement de son successeur parvenu à Saint-Christophe le, après avoir séjourné à la Martinique et la Guadeloupe, île où se replieNoël Patrocle de Thoisy, ce qui suscite l'appréhension du gouverneurCharles Houël, qui trame une révolte locale contre l'arrivage.
De son côté Poincy continue à refuser de reconnaîtreNoël Patrocle de Thoisy, que lui a pourtant donné comme successeur la Reine, régente depuis la mort deLouis XIII en 1643, et il en résulte de graves troubles politiques dans les Antilles.
Pour l'obliger à s'effacer devant Thoisy, une expédition commune contre Saint-Christophe est organisée depuis la Guadeloupe. Les opérations sont menées parDu Parquet à partir du. Gouverneur de la Martinique depuis dix ans, Du Parquet enlève les deux neveux de Poincy, envoyés à la Martinique, puis est défait : réfugié auprès du Commandant de la partie anglaise de l'île, il est trahi par ce dernier qui le livre à Poincy.
Poincy aurait ensuite fomenté des soulèvements contre la Compagnie à la Martinique, par un certain Boutain, puis un certain Beaufort[réf. nécessaire].
Marie Bonnard, épouse de Du Parquet, réussit avec l'aide de Le Fort à amener le commandant en second de la Martinique, La Pierrière, à mettre fin à la sédition en assassinant Beaufort[réf. nécessaire], et en proposant l'échange de Du Parquet contre les neveux du commandeur de Poincy, toujours détenus à la Martinique[réf. nécessaire].
Finalement, Du Parquet est échangé contre Patrocle de Thoisy lui-même, à la suite d'un complot auquel participent plusieurs lieutenants de Poincy, dont La Vernade, Le Fort et La Pierrière[réf. nécessaire]. En vertu de cet échange, Poincy expédie son prisonnier en France où il arrive le. Du Parquet avait de son côté quitté Saint-Christophe le, après une année entière de captivité.
En 1646, il fait nommer son neveuRobert de Longvilliers de Poincy gouverneur général des îles[1].
Poincy, commandeur de l'ordre de Saint-Jean de Jérusalem, jouit de l'appui des puissants chevaliers de l'Ordre auprès de la Cour. Il doit néanmoins payer90 000 livres pour dédommagerPatrocle de Thoisy, somme qu'il refuse de payer et qui est prise en charge par l'Ordre de Malte.
En 1651, fortement endettée, laCompagnie des îles d'Amérique est dissoute, et Poincy réussit à convaincreJean-Paul de Lascaris-Castellar,grand maître de l'ordre de Saint-Jean de Jérusalem, d'acheter les colonies deSaint-Christophe,Saint-Barthélemy,Saint-Martin etSainte-Croix pour 120 000écus[1]. Cette acquisition permet à Poincy de rester sur l'île de Saint-Christophe et d'y être confirmé comme gouverneur avec le titre debailli.
L'année suivante, en 1652, l'Ordre envoieCharles Jacques Huault de Montmagny pour le remplacer. Cependant, selonJean-Baptiste Du Tertre, étant donné le sort réservé au précédent remplaçant par Poincy, Montmagny décide de se faire discret et de s'établir àCayonne (maintenantCayon), un hameau de Saint-Christophe, en attendant la mort de celui qu'il devait remplacer. Montmagny décéda finalement le premier.
En mars 1653,Louis XIV ratifie la vente en accordant la concession des îles Saint-Christophe et Sainte-Croix à l'ordre de St-Jean de Jérusalem, car il« s'est montré si utile à l'église pour ses services et sa continuelle résistance aux entreprises des Mahométans ennemis de la foi, dont les victoires fréquentes qu'il a remportées sur eux en temps de combat sont des marques certaines, esquels grand nombre de chevaliers ont épanché leur sang et prodigué leur vie pour le salut commun, et les hôpitaux ont été si dignement et charitablement administrés par iceluy depuis son institution, qu'ils serait utile qu'il eut son siège non seulement en l'île de Malte mais aussi en d'autres et plusieurs endroits, afin que ce fussent autant de station, forteresse et remparts pour la chrétienté et d'asile aux fidèles ». En outre,« le sieur bailly de Poincy, grand croix dudit ordre, ayant employé pour cet effet le revenu de plusieurs années de deux des plus belles commanderies dudit ordre desquelles il jouissait en France, lesquels domaines par droit de pécul appartiennent à son ordre »[1].
Âgé de 76 ans, Philippe de Longvillers de Poincy décède le, à l'anse Louvet, dans la colonie deSaint-Christophe. Il est sans descendance, ayant faitvœu de chasteté[1]. Également, selon la règle, 80% de ses biens reviennent à l'ordre de Malte[1]. Leur inventaire permet d'évaluer la fortune de l'ancien gouverneur. En plus de son château et du mobilier, il laisse plusieursplantations avec encore 377 esclaves[3].
Pour lui succéder comme gouverneur deSaint-Christophe, l'ordre de Saint-Jean de Jérusalem nomme lefrèreCharles de Sales.
Philippe de Longvilliers de Poincy,gouverneur général des Antilles | |||||||
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