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Passion du Christ

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Représentation d'épisodes de la Passion du Christ :arrestation sur le mont des Oliviers,flagellation,port de la croix,crucifixion (fin duXVe - début du XVIe siècle).

LaPassion du Christ est l’ensemble des événements qui ont précédé et accompagné la mort deJésus-Christ. Le récit et les annonces de la Passion se trouvent dans lesÉvangiles synoptiques et l’Évangile selon Jean, ainsi que dans divers textesapocryphes.

Il s'agit detextes à caractère religieux qui expriment lafoi de leurs rédacteurs. L'exégèse s'attache à distinguer entre leurs éléments historiques, leur significationthéologique et leur intentionapologétique.

Annonces de la Passion

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Panneau duChemin de croix d’Albrecht Altdorfer (vers 1509-1516).

Textes du Nouveau Testament

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Dans lesÉvangiles synoptiques, leChrist annonce sa mort et saRésurrection à plusieurs reprises[1] :

  • aux disciples, après sa reconnaissance parl'apôtre Simon-Pierre commeMessie, dans la région deCésarée enIsraël (Mt 16:2 ; Mc 8:31-33 ; Lc 9:22) ;
  • aux disciples, réunis enGalilée (Mt 17:22-23 ; Mc 9:30-32 ; Lc 9:44-45) ;
  • auxDouze Apôtres sur la route deJérusalem (Mt 20:17 ; Mc 10:32-34 ; Lc 18:31-33) ;
  • après laTransfiguration, àPierre,Jacques etJean (Mt 17:9) ;
  • en réponse à des scribes et à desPharisiens qui voulaient le voir faire un miracle, Jésus répond qu’il« sera trois jours et trois nuits dans le sein de la terre » (Mt 12:39-40) ;
  • en réponse auxJuifs demandant un signe, disant, parlant du sanctuaire qu'était son corps : « Détruisez ce sanctuaire et je le reconstruirai en trois jours » (Jean 2: 19-22).

Ces annonces prédisent :

  • que Jésus va être livré auxgrands-prêtres et aux scribes, qui le condamneront à mort ;
  • qu’il souffrira beaucoup de la part des anciens, des grands prêtres et des scribes ;
  • qu’il sera livré auxpaïens (ce mot désigne lesRomains) ;
  • qu’il sera bafoué,flagellé,mis en croix et mourra ;
  • qu'ilressuscitera le troisième jour.

Datation des annonces

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Selon l'historiennePaula Fredriksen, les détails incitent le lecteur à penser que ces annonces« sont postérieures à l'évènement, qu'elles ont été replacées dans le ministère de Jésus par lesévangélistes, qui ne réussissent cependant pas à les intégrer dans leur histoire. Une fois à Jérusalem en effet, les disciples sont accablés par les évènements auxquels les prédictions de la Passion auraient dû les préparer »[2].

Contrairement aux récits antiques de morts nobles ou héroïques, ceux des évangélistes concernant la Passion de Jésus se singularisent en incluant les femmes, dont la fidélité est manifeste, alors que les apôtres choisis par le Seigneur l'abandonnent à l'exception deJean[3].

Récits de la Passion

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Arrestation de Jésus

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Article détaillé :Arrestation de Jésus.

Dans lesÉvangiles synoptiques, deux jours avant laPâque juive (Pessah), Jésus se rend au jardin deGethsémani, avec lesapôtresPierre,Jacques le Majeur etJean où il veut s'isoler pour prier sonPère, tandis que les autresapôtres se reposent (Mt 26:36 ; Mc 14:43 ; Lc 22:47)[4].

Carte deJérusalem à l’époque duNouveau Testament (vers 1885)

L'apôtre Judas arrive alors, menant une bandearmée romaine envoyée par lesgrands-prêtres juifs et les anciens. Judas désigne Jésus en lui donnant unbaiser.

Les gardes se saisissent de Jésus et l’emmènent devant les autorités juives pour qu’il soit jugé. Un disciple de Jésus (anonyme dans trois des évangiles ;Pierre, selon Jean) sort songlaive et coupe l’oreille duserviteur du Grand Prêtre (Mt 26:51 ; Mc 14:47 ; Lc 22:50 ; Jn 18:10). Jésus guérit le serviteur (dans l'évangileselon Luc, pas dans celle selon Jean) et dit à Pierre (Mt 26:52) :« Rengaine ton glaive ; car tous ceux qui prennent le glaive périront par le glaive ».

Jésus s'adresse alors aux gardes :« Comme pour un bandit, vous êtes partis avec des épées et des bâtons pour vous saisir de moi ! » (Lc 22:52 ; Mt 26:55 ; Mc 14:48).

Jésus n'a peut-être pas été arrêté seul. Du moins, l'exégèse s'interroge sur le sort du groupe de disciples qui l'entouraient.Rudolf Bultmann écrit[5] :« Pourquoi Jésus est-il le seul à avoir été arrêté ? N'avaient-ils pas l'intention [les Romains] d'arrêter ses disciples ? »Alfred Loisy remarque[6] :« On se demande naturellement pourquoi les disciples n'ont pas continué à se battre et pourquoi les membres du Sanhédrin n'ont pas pris leur revanche sur celui qui avait dégainé [dans le groupe de Jésus] en se jetant sur lui ». Quoi qu'il en soit de ces inquiétudes d'exégètes, les Évangiles considérés comme les plus anciens indiquent que tous les disciples de Jésus qui refusait de se défendre l'abandonnèrent et s'enfuirent (Matthieu 26, 56 ; Marc 14, 50), même si Pierre suivit Jésus de loin (Luc 22, 54)[7].

Jésus devant le Sanhédrin

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Article détaillé :Procès de Jésus.
Comparution de Jésus devant le Sanhédrin,collégiale Saint-Salvi d'Albi (1490).

LesÉvangiles synoptiques rapportent queJésus est emmené devant le grand prêtreCaïphe, où se réunissent lesscribes et les anciens[8]. À l’issue de son interrogatoire, Jésus proclame publiquement être leMessie. Jésus aurait alors été condamné à mort pourblasphème.

Pour certains historiens, commeMarie-Françoise Baslez, ce procès juif est une impossibilité[9] car, d'une part, les Évangiles présentent une séance de nuit duSanhédrin, ce qui serait irréaliste, d'autre part le Sanhédrin n'avait pas à cette époque le pouvoir d'appliquer lapeine capitale. Plus précisément, une réunion formelle du Sanhédrin érigé en tribunal est incompatible avec les procédures judiciaires consignées dans laMishna, celle-ci stipulant que les délibérations et les condamnations ne doivent avoir lieu que le jour et non la veille d'un jour de fête ou d'un sabbat. En outre, rien ne dit que la réglementation de la mishna était en vigueur à l'époque de Jésus. Tout penche pour un interrogatoire informel dans la nuit en présence d'Anne, suivi d'une condamnation formelle au matin chez le grand prêtre Caïphe, laquelle était non applicable car les autorités juives s'étaient vu retirer le bras séculier par les Romains[10].

Jésus devant le préfet romain

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Le Christ devant Pilate, Suiveur deJérôme Bosch (vers 1520).

La possibilité d'appliquer la peine de mort ayant été retirée aux juifs vers 29-30, la condamnation attendue par les autorités du Temple dont les raisons étaient d'ordre religieux, ne pouvait être prononcée que par les Romains, d'où la nécessité d'un nouveau procès et d'un motif de condamnation relevant du droit romain que seul peut présider le procurateur du lieu : Pilate. Comme le chef d'accusation de blasphème avec lequel Jésus est transféré devant Pilate par les princes des prêtres présente un danger pour l'ordre public romain, les autorités du Temple mirent en avant le grief que Jésus pervertissait le peuple, refusait le tribut de César et se faisait appeler messie et roi[11].

Le lendemain matin, Jésus est donc emmené et jugé devant lepréfetPonce Pilate[12]. Selon Luc, Pilate, apprenant que Jésus était unGaliléen et donc sous la juridiction d'Hérode Antipas, roifantoche deGalilée, l'envoya à Antipas, qui était aussi àJérusalem. Initialement, Antipas était heureux de voir Jésus, dans l'espoir de le voir faire un miracle. Lorsque Jésus est resté silencieux face à ses questions, Antipas se moqua de lui et le renvoya à Pilate. L'envoi devant Antipas peut s'entendre comme un simple complément d'enquête et comme un rebondissement dans une situation où Pilate et le haut clergé du Temple cherchent à fuir leurs responsabilités. Pierre présentera plus tard Pilate et Hérode dans sa catéchèse (Actes 4, 27), comme entrant dans la logique d'accomplissement de la prophétie selon laquelle "les rois de la terre se sont rassemblés contre le Seigneur et son Christ" (Psaume 2, 2)[13].

Pilate cherchant momentanément à éviter une exécution à Jésus qu'il juge innocent propose à la foule de libérer un prisonnier, car les Romains accordaient parfois des amnisties générales à l'occasion de fêtes locales, coutume attestée alors, en particulier parTite-Live, dans plusieurs autres cultures de la Méditerranée et du Proche-Orient. Pilate proposa de libérer soit Jésus, soitBarabbas. Certains manuscrits l'appellentJésus Barabbas, ce qui semble avoir été son nom complet. Barabbas est un patronyme dérivé debar-Abba signifiant fils du Père. Par son nom de "Jésus fils du père" Barabbas, dont l'Evangile précise qu'il était un brigand, entre en concurrence avec Jésus-Christ le juste sans péché, Fils du Père. Il apparaît donc comme le double inversé de Jésus. La foule demande à grands cris la condamnation de Jésus et la libération de Barabbas, ce qu'elle obtient dans les deux cas[14]. À l'instant crucial où Pilate va trancher en faveur de la libération de Barabbas et la condamnation subséquente de Jésus, Pilate se lave les mains selon Matthieu (27, 24), le seul à le préciser. Par cette mise en scène, Pilate veut placer la responsabilité de la mort de Jésus sur ceux qui la réclamaient. Sous la menace de lalex majestate, Pilate préfère sacrifier un innocent que risquer un trouble qui le ferait accuser à Rome de négligence[15].

Matthieu est aussi le seul Évangéliste à parler de l'épouse de Pilate qui intervint auprès de lui en faveur de Jésus en se réclamant d'un songe qu'elle avait eu pendant la nuit (Matthieu 27, 19). Même si certains exégètes considèrent cette intervention comme un enrichissement narratif, il n'en reste pas moins que l'intervention d'une femme connue des historiens (Claudia Procula) tranche dans le contexte du procès exclusivement masculin. Bien plus, alors que la plupart des hommes sont, tout au long de la Passion, du côté de l'humanité pécheresse par peur ou par haine, presque toutes les femmes à l'exception des servantes sont fidèles d'une manière ou d'une autre à Jésus dans ses épreuves[16].

Pilate, gouverneur romain de Jérusalem et de la Judée, y disposait d'un pouvoir discrétionnaire absolu. Il ne pouvait pas se conduire de façon trop arbitraire sans s'aliéner l'aristocratie locale qui était son principal relais auprès de ses administrés, et il semble avoir obtenu durant ses dix années de gouvernement, un maximum de résultats avec un minimum de moyens (une cohorte de légionnaires pour la Judée). Jean semble faire de Pilate quelqu'un préoccupé de vérité qui tente de relâcher Jésus, avant de se laisser vaincre par lâcheté sous la pression populaire. Finalement, les quatre Évangiles sont unanimes à préciser que Pilate condamne Jésus à la crucifixion[17].

Flagellation et couronne d'épines

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Flagellation du Christ parRubens (1617).
Article détaillé :Flagellation de Jésus.

Une fois condamné à mort par Pilate, il est d’abordflagellé, c’est-à-dire lié à une colonne où il est frappé avec unfouet aux lanières lestées d’os ou de métal (Brownet al., 628) ou d'un long clou.

Cette flagellation est attestée par Marc, Matthieu et Jean. Son absence chez Luc s'explique peut-être par l'horreur extrême de ce supplice romain. En effet, la flagellation était le plus atrocechâtiment corporel qui suscitait l'horreur (Cicéron,Horace) ; le nombre de coups de fouet n'était pas limité par le règlement, en sorte que même des victimes non condamnées à mort pouvaient parfois en mourir ou demeurer handicapées à vie. Paradoxalement, cette violence inouïe pouvait abréger la peine des condamnés à la croix, l'hémorragie provoquée par la flagellation limitant la durée de survie et partant lestortures de la crucifixion[18].

Le Couronnement d'épines parle Titien (vers 1570).

LesÉvangiles canoniques, à l’exception de l’Évangile selon Luc, rapportent que Jésus est emmené auprétoire (Prætorium), supposé être soit le palais du roi deGaliléeHérode Antipas, soit le Fort Antonia (Brownet al., 628).Matthieu etMarc relatent tous deux qu’une compagnie entière de soldats, qui étaient probablement pour la plupart des recrues dePalestine ou deSyrie (Brownet al., 628), punit Jésus. Jean n'indique pas combien de soldats étaient présents. Ils le revêtent d’unetunique pourpre, et lui placent unecouronne d'épines sur la tête, et l’acclament commeroi des Juifs[19]. Ils feignent de lui rendre hommage, en lui cognant la tête avec un bâton qui, d’après l’Évangile selon Matthieu, avait été fait pour le soutenir. Les Évangiles essaient de montrer que les soldats accomplissent involontairement les desseins de Dieu (Miller, 50).

Le couronnement de Jésus avec imposition de lachlamyde, de la couronne d'épines et du roseau s'inscrit dans les procédés romains d'exécution des condamnés, car lesRomains introduisaient souvent un élémentparodique dans les peines infligées aux condamnés qui mimait le crime dont ils étaient jugés coupables ; en particulier à ceux qui s'étaient révoltés contre l'autorité impériale. Or, la parodie est bien visible lors duprocès de Jésus accusé par les princes des prêtres de vouloir être « roi des Juifs » : chlamyde écarlate en guise de manteau royal enpourpre, couronne d'épines pour la couronne delaurier en or, et un roseau pour lesceptre en or. Il faut ajouter que Jésus a reçu, selon les premiers chrétiens (Justin,Origène,Jérôme,Ephrem le Syrien) un authentique couronnement confirmant sa réponse àPilate qui l'interrogeait pour savoir s'il était roi —  couronnement que ses ennemis ont voulu rendre dérisoire, sans y parvenir —[20].

Ecce homo,Elías García Martínez (vers 1890).

Après cet épisode, Marc et Matthieu notent que les soldats rendent à Jésus ses vêtements et, d’après l’Évangile selon Jean, lui laissent la robe pourpre et la couronne. C'est alors quePonce Pilate présente Jésus aux outrages à la foule (Ecce homo) et demande au publichébreu présent dans la petite cour duTemple de Jérusalem de choisir qui de Jésus ou deBarabbas (un brigand) échappera à l'exécution. Or, cette foule s'exclame, selon les textes,« LibérezBarabbas », laissant du même coup exécuter Jésus.

Crucifixion

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Article détaillé :Crucifixion.
Crucifixion de Jésus de Nazareth parGustave Doré (1866).

Juste avant quePilate ne prononce la condamnation de Jésus, l'Évangile selon Jean précise que c'est la« sixième heure », c'est-à-dire midi, alors que dans lesÉvangiles synoptiques à la« sixième heure » Jésus est déjà crucifié et c'est le moment où l'obscurité se fait surJérusalem[12]. Cette différence de comptage des heures est due au fait que les Juifs et les Romains utilisaient deuxsystèmes horaires différents : les Évangiles synoptiques se réfèrent au système juif, tandis que Jean décompte les heures d'après le modèle romain.

Dans l’Évangile, Jésus est obligé, comme d’autres condamnés aucrucifiement, deporter sa propre croix jusqu’au mont duGolgotha, lieu de l’exécution[21]. D’après les synoptiques, sur la route du Golgotha, les soldats obligent un passant,Simon de Cyrène, à porter la croix de Jésus. La raison n’en est pas donnée dans les Évangiles. Marc trouve opportun de citer les enfants de Simon,Alexandre de Cyrène et Rufus, comme s’ils avaient été des personnages connus des lecteurs (Brownet al., 628).Paul cite aussi un Rufus dans sonÉpître aux Romains. Luc ajoute que les femmes disciples suivaient Jésus et pleuraient sur son destin ; il répond par une citation biblique duLivre d'Osée, chapitre 10 verset 8.

Quand ils arrivent au Golgotha, il lui est proposé du« vin parfumé de myrrhe » ou« du vin mêlé de fiel » qu'il refuse de boire, après en avoir goûté selon l’Évangile selon Matthieu.

Jésus est alors crucifié, d’après les synoptiques, à la « troisième heure » du jour (9 h).

Les synoptiques ajoutent que la croix comportait, sur un écriteau « le roi des Juifs », avec des variantes mineures[22]. Dans l'Évangile selon Jean, l’inscription est « Jésus lenazaréen, roi des Juifs » en trois langues (INRI). Il est précisé que c'est Pilate qui a rédigé cette inscription sur untitulus (écriteau), enhébreu, enlatin et engrec ancien. L'indication « leNazaréen », montre que l'appellation polémique est acceptée au moment de la rédaction de l'Évangile selon Jean.

Les Évangiles déclarent alors que les vêtements de Jésus lui furent retirés par les soldats, pour être répartis entre eux en plusieurs lots[23]. L’Évangile selon Jean affirme que ceci accomplit une prophétie du Psaume 22 (partage des vêtements)[24]. D’après Luc, les deux brigands crucifiés aux côtés de Jésus lui parlent. Luc déclare que l’un railla Jésus, et que l’autre le respecta. Jésus déclara que le voleur respectueux, Dismas (lebon larron), gagnerait promptement son entrée auparadis ; traditionnellement l’autre, Gesmas ou Gestas (lemauvais larron), est considéré comme voué à l’enfer. Dismas est considéré comme sauvé par Jésus, par sa seule déclaration de foi :« Aujourd'hui tu seras avec moi dans le paradis »[25].

Dans les quatre Évangiles, alors que Jésus est sur la croix, un soldat lui propose de boire duvinaigre, imbibé dans une éponge selon trois d'entre eux[26]. L'Évangile selon Jean précise que cela a lieu pour que l'Écriture soit parfaitement accomplie. Jésus refuse de le boire.

Les évangélistes ne donnent que peu de détails concernant le supplice de Jésus et les souffrances qu'il a subies. Or lecrucifiement constituait la punition romaine la plus atroce, entraînant des souffrances longues et insupportables, marquant les condamnés du sceau de l'infamie. Quoique très répandue, elle était d'une telle horreur que les auteurs gréco-romains demeuraient discrets quand ils y faisaient référence[27].

Mort de Jésus

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Le Christ en croix,Jacques-Louis David, 1782.

Le Christ en croix prononcesept dernières paroles. Parmi elles, il y a son adresse à son Père « Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m'as-tu abandonné » qui est le début du Psaume 22 (Matthieu 27, 46 et Marc 15, 34)[28]. Il y a aussi, juste avant de mourir : « Père entre tes mains je remets mon esprit » (Luc 23, 46). Il y a enfin : « tout est accompli » (Jean 19, 30)[29].

Jean est le seul à préciser qu'un soldat romain transperça le côté de Jésus de sa lance et qu'il en sortit aussitôt du sang et de l'eau (19, 34-35). Jean attache à cet épisode apparemment insignifiant une grande importance. En effet parlant de lui il écrit : « celui qui a vu rend témoignage (...) il sait que ce qu'il dit est vrai afin que vous aussi vous croyiez ».

En outre, d'après les quatre Évangiles, Jésus est mort un jour de préparation de laPâque. Or, leShabbat tout proche obligeait à décrocher le corps de Jésus et ceux des deux larrons (Deutéronome 21, 23) pour éviter de profaner leshabbat par l'exposition de crucifiés souillant laterre d'Israël. C'est pourquoi, les jambes de ces deux derniers sont brisées afin d'accélérer leurs morts, mais non celles de Jésus qui était déjà mort. Si « on ne lui brisa pas un os » (Jean 19, 36), Jean relie cela à la prescription rituelle de ne pas briser les os de l'agneau pascal (Exode 12, 46), ce que Jean met implicitement en relation avec le « voici l'agneau de Dieu qui enlève le péché du monde » du début de son Évangile (Jean 1, 29)[30].

La mort de Jésus relatée par les Évangiles, accompagnée de ricanements, d'insultes, de moqueries, de crachats, est aux antipodes des récits de morthéroïque dans l'Antiquité. Pour la culture antique, la mort de Jésus n'est en rien édifiante. Jamais dans l'histoire de la littérature ancienne, il n'y a tant de minutie à rendre compte de l'ignominie et de l'abjection de la mort d'un héros. C'est ainsi que le philosophe gréco-romainCelse considérait vers 180 comme un signe suprême de décadence le fait d'honorer un dieu chez un personnage mort d'une manière aussi vile. Ces récits évangéliques sont éloignés d'un souci d'édification morale du monde antique[31].

Mise au tombeau

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Mise au tombeau, mosaïque créée sur un mur de l'Église du Saint-Sépulcre, àJérusalem.

La relation de la sépulture de Jésus clôt le soir de sa mort le récit de sa passion commencée par la dernière Cène (Matthieu 26, 17-19). À la mise au tombeau, ses amis reçoivent son corps une fois le sacrifice achevé et accomplissent les paroles de Jésus à la Cène : « prenez mon corps ». De manière inattendue pour un supplicié des Romains, au lieu d'être jeté dans une fosse commune, Jésus reçoit une sépulture décente quoique hâtive dans un tombeau non encore usagé deJoseph d'Arimathie. En effet l'enterrement de tout mort, un devoir essentiel dans le monde juif, devait avoir lieu avant le crépuscule, y compris pour les condamnés (Deutéronome 21, 23)[32].

Place des femmes lors de la Passion

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Le récit de la mort de Jésus inclut des femmes. Matthieu évoque de « nombreuses femmes qui regardaient à distance, celles-là même qui avaient suivi Jésus depuis la Galilée et le servaient, entre autres Marie de Magdala, Marie mère de Jacques et Joseph et la mère des fils de Zébédée » (27, 55-56). Marc note de son côté : Marie de Magdala, Marie mère de Jacques et José et Salomé (15, 40). Luc se limite à signaler la présence des femmes qui l'accompagnaient depuis la Galilée (23, 49) dont il avait donné les noms plus haut à savoir : Marie de Magdala, Jeanne femme de Choulza et Suzanne (8, 2-3). Jean évoque la mère de Jésus, sa sœur Marie de Clopas et Marie de Magdala (19, 25-27). La fidélité de ces femmes à Jésus lors de sa Passion est à souligner car elle est en contraste avec l'attitude des apôtres qui l'abandonnèrent, à l'exception du disciple bien-aimé (en outre, la femme de Pilate,Claudia Procula, intervient en faveur de Jésus (Matthieu 27, 19) évoquée plus haut). La mention de ces femmes pourrait indiquer le vestige de leurs récits de la mort de Jésus, aux tous premiers temps de la tradition orale. Des récits de l'AT[Quoi ?] présentent des femmes lors de la "mort d'un juste"[33].

Commentaires historiques et théologiques

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Signification salvifique de la Passion

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Allégorie de la sainte Eucharistie,Miguel Cabrera, 1750.
Articles détaillés :Sang du Christ etMalédiction du sang.

Quelques heures avant la Passion, lors de laCène, Jésus a proposé à ses disciples de boire sonsang, le « sang de l'alliance qui va être répandu pour une multitude pour le pardon des péchés » (Matthieu 26, 28), ce qui est une citation presque littérale du sacrifice ayant scellé l'Alliance avec Israël sur lemont Sinaï. Si dans ce dernier cas, l'offrande liée au sang versé n'est pasexpiatoire, celle-ci est présente dans le passage d'Isaïe auquel le verset de Matthieu fait allusion : « Comme l'agneau conduit à l'abattoir, il n'ouvrait pas la bouche (…) S'il offre sa vie en sacrifice d'expiation, il verra une postérité (…) alors qu'il portait les péchés d'une multitude » (Isaïe 53, 7; 10; 12)[34].

Pour le théologien Michel Roberge,Jean[35] démontre que la remontée au ciel du Fils de l’Homme lors de la crucifixion sera salvifique. L’auteur fonde cette élévation sur un « signe ou symbole de salut », puisé dans leLivre de la Sagesse[36] : leserpent d’airain élevé parMoïse sur un étendard[37]. Dépassant les spéculations juives, Jean fait porter la comparaison« non point sur le serpent mosaïque et le Christ, mais sur l’élévation de l’un et de l’autre et sur le fait du salut accordé à ceux qui dépassent les apparences du signe[38]. » Jean se sert de l’épisode pour interpréter la mort de Jésus comme une exaltation glorieuse et un événement salvifique[39]. Jésus dans l'obéissance filiale à sonPère qui le mène à la Passion et à laCroix accomplit devant Dieu un acte de valeur infinie qui efface le poids de toutes les fautes passées, présentes et à venir, de ses frères humains. Il offre un unique sacrifice, une fois pour toutes, pour les péchés du peuple (Épître aux Hébreux 7:27). Par la vertu de son sang, il obtient une fois pour toutes la libération définitive (Hébreux 9:12). Par l'offrande de son corps, Jésussanctifie volontairement les fidèles une fois pour toutes (Hébreux 10:10).

Datation des événements

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Crucifixion parAlbrecht Altdorfer.
Article détaillé :Date de la mort de Jésus.

Dans lesÉvangiles synoptiques, Jésus aurait été crucifié le jour de la Pâque juive (Pessah), un vendredi 14nissan, la veille de lafête du premier jour despains sans levain (azyme), qui est aussi unShabbat[40]. En revanche, dans l'Évangile attribué à Jean, Jésus est crucifié la veille de la Pâque, unvendredi 13nissan.

Les Évangiles synoptiques situent la mort de Jésus (Jn 19:42) le jour de la préparation de laPâque juive, le 14nissan. À partir des éléments duNouveau Testament associés à la connaissance d’évènements historiques etastronomiques, les historiens datent généralement l’évènement supposé de la Passion du Christ entre28 et33, finmars ou débutavril.

Histoire et exégèse

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Selon l'historienÉtienne Trocmé, les quatreÉvangiles canoniques relatent des événements relatifs à la Passion, dont ils ne constituent pas des sources absolument fiables : ces récits étaient intégrés à un rituel ou unculte rendu à Jésus-Christ et ne visaient pas la fidélité au réel :« La quadruple narration de ces dramatiques journées que nous donnent les Évangiles du Nouveau Testament remontent à un archétype composé àJérusalem peu d'années après l'événement. Mais ce texte, destiné à être lu lors des célébrations solennelles avec les pèlerins gagnés à la foi chrétienne, est plus liturgique qu'historique et ne nous donne qu'une image très imparfaite et très biaisée de ce qui s'est passé durant ces tragiques journées »[41].

Simon Claude Mimouni rappelle que« les sources concernant la mort de Jésus sont essentiellement chrétiennes » : il s'agit desÉvangiles canoniques etapocryphes. Or« ces textes ne sont pas d'abord des écrits pour servir de documentation. Ils ont été rédigés plutôt pour laliturgie des premiers disciples ». Ainsi,« pour l'historien, la reconstruction de ces évènements est périlleuse »[42]. Si certains (Justin etTertullien) ont pu alléguer l'existence d'une source non chrétienne,« les affirmations de Justin (Apologie, I, 35, 9 et 48, 3) et de Tertullien (Apologétique, 5, 2 et 21, 20) selon lesquelles un document envoyé par Pilate à Tibère est conservé dans les archives impériales ne doivent pas être prises pour autre chose que des suppositions », écrit encore Mimouni[42].

L'exégèteJean-Pierre Lémonon a tenté de dégager certains aspects propres aux Évangiles dans leur présentation de la Passion :Marc, en faisant appel auxPsaumes 22 et 69 (Mc 15:33-41), invite à contempler dans le juste en croix abandonné par les siens leMessie et leFils de Dieu (Marc 14, 53-64).Matthieu montre dans les événements liés à la Passion la réalisation d'annonces provenant de l'Ancien Testament tirées deZacharie et deJérémie.Luc perçoit la Passion de Jésus comme une voie dans laquelle les disciples s'engagent à la suite de leur maître (Luc 23, 26-32 et 23, 39), et présente Jésus comme leServiteur souffrant d'Isaïe. Enfin,Jean contemple dans celui qui est traité comme un esclave, un souverain ayant tout pouvoir (Jean 18, 6), et dans la victime qu'est Jésus, l'Agneau pascal (Jean 19, 36)« qui enlève le péché du monde » (Jean 1, 29)[43].

Historiographie chrétienne

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L’épisode de l’agonie du Christ, qui commence aumont des Oliviers, a hanté de nombreuses générations chrétiennes. AuXVIIe siècle en particulier, le cardinalPierre de Bérulle, invite à contempler la richesse spirituelle de ce « mystère » de la vie de Jésus. Son successeur,Charles de Condren, fait deGethsémani le sommet des souffrances du Christ qui ne peut retenir des paroles d’angoisse[Note 1] et une sueur de sang :« [La Croix est] chose grande, mais de voir sa bénite âme en cet état d’extrême affliction, au milieu de tant et de si puissantes angoisses, toujours soucieuse de vous, plus pressée du souvenir de vos fautes […], c’est un chef-d’œuvre de sa charité[44]. » Le dominicainLouis Chardon compose en 1650 desMéditations sur la Passion de Notre Seigneur Jésus-Christ ; il pense que, sans les terribles souffrances intérieures de l’agonie, toutes les autres souffrances de la Passion« n’eussent de rien servi pour la fin de notre rédemption[45]. » EnfinBlaise Pascal en 1655 compose unAbrégé de la vie de Jésus-Christ et entre la fin de 1656 et 1662, rédige lesPensées, œuvres dans lesquelles il se livre à une fervente contemplation du Christ à Gethsémani ; dans le poème en prose qu’on a appeléLe Mystère de Jésus, Pascal écrit :« Jésus sera en agonie jusqu’à la fin du monde. Il ne faut pas dormir pendant ce temps-là.[…] Jésus a prié les hommes, et n’en a pas été exaucé.[…] Jésus s’arrache d’avec ses disciples pour entrer dans l’agonie. Il faut s’arracher de ses plus proches et des plus intimes pour l’imiter[46]. »

Interprétations artistiques

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Arts visuels

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Des milliers de peintures et de sculpturesreprésentent la Passion.

Musique sacrée

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De très nombreuses œuvres ont pour thème la Passion, parmi lesquelles :

Théâtre

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Au théâtre, unePassion est unmystère, forme théâtrale qui s’est développée au cours desXIVe siècle etXVe siècle, dont le sujet est la Passion du Christ.

Notes et références

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Notes

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  1. « Père, s’il est possible, que ce calice passe loin de moi… Mon âme est triste jusqu’à la mort. »

Références

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  1. Harrington 2010,p. 117.
  2. Paula Fredriksen,De Jésus aux Christs, éd. du Cerf, 1992,p. 169.
  3. École biblique de Jérusalem 2021,p. 999.
  4. Harrington 2010,p. 23.
  5. The History of Synoptic Tradition, p. 269.
  6. Les Évangiles synoptiques, vol. 2,p. 585.
  7. École biblique de Jérusalem 2021,p. 95.
  8. Harrington 2010,p. 140.
  9. Marie-Françoise Baslez,Bible et histoire,p. 211.
  10. École biblique de Jérusalem 2021,p. 872.
  11. École biblique de Jérusalem 2021,p. 876-877.
  12. a etbHarrington 2010,p. 163.
  13. École biblique de Jérusalem 2021,p. 442.
  14. École biblique de Jérusalem 2021,p. 113-114.
  15. École biblique de Jérusalem 2021,p. 555-556.
  16. École biblique de Jérusalem 2021,p. 185-187.
  17. École biblique de Jérusalem 2021,p. 847-849.
  18. École biblique de Jérusalem 2021,p. 387-388.
  19. Harrington 2010,p. 41.
  20. École biblique de Jérusalem 2021,p. 212-214.
  21. Harrington 2010,p. 32, 41.
  22. Harrington 2010,p. 161.
  23. Joel B. Green, Scot McKnight, I. Howard Marshall,Dictionary of Jesus and the Gospels: A Compendium of Contemporary Biblical Scholarship, InterVarsity Press, USA, 1992, p. 149
  24. Ps. 22:18-19
  25. Harrington 2010,p. 116.
  26. Joel B. Green, Scot McKnight, I. Howard Marshall,Dictionary of Jesus and the Gospels: A Compendium of Contemporary Biblical Scholarship, InterVarsity Press, USA, 1992, p. 864
  27. École biblique de Jérusalem 2021,p. 224-227.
  28. École biblique de Jérusalem 2021,p. 447.
  29. École biblique de Jérusalem 2021,p. 716.
  30. École biblique de Jérusalem 2021,p. 23.
  31. École biblique de Jérusalem 2021,p. 716-718.
  32. École biblique de Jérusalem 2021,p. 687-689.
  33. École biblique de Jérusalem 2021,p. 999-101.
  34. École biblique de Jérusalem 2021,p. 24.
  35. Jn, 3, 14-15.
  36. Sg, 16, 6.
  37. Livre des Nombres, 21, 4-9.
  38. F.-M. Braun,Jean le Théologien,t. III, Paris, J. Gabalda et Cie,,p. 173-174.
  39. Michel Roberge, « Jean 1,51 et l’annonce de la glorification du Fils de l’homme »,Laval théologique et philosophique,no 2,‎,p. 205-206.
  40. Harrington 2010,p. 37.
  41. Étienne Trocmé,L'Enfance du christianisme, Noésis, 1997,p. 34. Pour la démonstration de cette assertion, E. Trocmé renvoie à son ouvrageThe Passion as liturgy, 1983.
  42. a etbSimon Claude Mimouni et Pierre Maraval,Le Christianisme des origines à Constantin, PUF, 2006,p. 113.
  43. Jean-Pierre Lémonon, « La mort du prophète abandonné des siens »,Le Monde de la Bible. Hors série : Que sait-on de Jésus ?,‎,p. 38-39.
  44. Charles de Condren,Discours et Lettres, Paris, Sébastien Huré,,p. 460-463.
  45. Méditation 59.
  46. Philippe Sellier, « Pascal et l’agonie du Christ à Gethsémani »,Courrier du Centre International Blaise-Pascal,no 37,‎,p. 3-5(lire en ligne)

Voir aussi

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Bibliographie complémentaire

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Articles connexes

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Laflagellation et le début duChemin de croix parThéophane le Crétois,icônebyzantine dumont Athos.

Et toutes les représentations artistiques de lapeinture chrétienne sur ce thème.

Liens externes

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