Lepan de bois désigne une technique constructive et le type de bâtiment qui en résulte, faisant partie de la famille desconstructions à ossature, composés desablières hautes et basses pour lacharpente, ainsi que depoteaux de décharges et detournisses pour lesmurs. Le pan de bois en façade peut être apparent ou bien caché par unbardage, unclayonnage… tandis que l’ossature du toit est évidemment toujours protégée desintempéries et donc masquée par unecouverture.
Les pans de bois intégraient des colombages, colombes et colombelles, d’où la désignation aujourd’hui plus courante demaison à colombages. L’exactitude lexicale et, surtout, historique, amène à préciser que l’appellation actuelle « maison à colombages » se disait bien autrefois « maison à pan de bois ».
Ce moyen avait l'avantage de permettre des superpositions d'étages enencorbellement, afin de laisser un passage assez large sur la voie publique et de gagner de la place dans les étages supérieurs. SelonEugène Viollet-le-Duc, le pan de bois était « économique et sain, car, à épaisseur égale, un pan de bois garantit mieux les habitants d'une maison des variations de la température extérieure qu'un mur de brique ou de pierre[1]. »
En France, laNormandie est l'une des régions qui compte le plus demaisons à pans de bois. Le territoire manquait en effet de matériaux solides, les hommes se sont donc procurés des matériaux disponibles et peu coûteux : la terre et le bois. La ville deRouen en conserve près de 2 000, certaines datant même duXIVe siècle, dont un millier ont déjà été restaurées, faisant de cette ville le plus riche témoignage de l’architecture à pans de bois en France. L'Alsace, laBretagne et lepays basque conservent également de nombreuses bâtisses. Ainsi, les centres-villes deStrasbourg,Colmar,Rennes,Dinan, ouBayonne, entre autres, ont de nombreuses maisons à colombages.
De nombreuses maisons à colombage subsistent un peu partout en Europe et des plans de restauration sont mis en œuvre afin de conserver ce type d’habitat considéré comme un patrimoine architectural.
A :sablière - Pièces couchées horizontalement à chaque étage, et haut et bas d'un pan de bois, dans lesquelles sont assemblés les poteaux, décharges ettournisses - On donne le nom de sablière haute à celle du haut de chaque étage, et sablière basse à celle qui porte sur les parpaings[5].
B :Poteau ou pied cornier - Poteau qui forme le côté d'un pan de bois ou l'encoignure de deux pans de bois, dans lequel sont assemblées les sablières de chaque étage[5].
C : Poteau d'huisserie - Poteaux qui avec le linteau assemblés, forment la baie d'une porte[5].
D :Linteau - Pièce de bois posée sur les jambages d'une porte ou d'une fenêtre pour en former la fermeture, ou assemblée dans deux poteaux pour le même usage[5].
E : Potelets - Petit poteau dans les pans de bois et cloisons, avec lesquels on garnit le dessous des appuis de croisée et le dessus des linteaux de porte[5].
F : Décharge - Pièce de bois posée obliquement dans un pan de bois ou dans une cloison[5].
G :Tournisse - Petits poteaux de remplissage coupés obliquement d'un bout, et qui, dans un pan de bois ou une cloison, sont posés au-dessous et au-dessus des décharges[5].
Le pan de bois repose ordinairement sur un mur en maçonnerie qui a pour but de séparer la construction du sol et de la préserver des effets destructeurs de l'humidité. Sur le mur repose une pièce de bois placée horizontalement qui se nommesablière et qui forme la base de la construction. C'est dans cette pièce que toutes les autres pièces de la charpente viennent s'assembler. Les pièces d'angle nomméespoteaux corniers s'assemblent à tenon et mortaise dans la sablière. Ces pièces doivent avoir toute la hauteur du bâtiment. La séparation du rez-de-chaussée et du premier étage se fait au moyen d'une pièce horizontale nommée également sablière et qui s'assemble dans les poteaux corniers à tenon et mortaise avec embrèvement[6].
Entre les deux sablières s'élèvent des pièces verticales parallèles aux poteaux corniers et que l'on nomme poteaux d'huisserie. Ces pièces peuvent s'élever de toute la hauteur du bâtiment, mais le plus souvent elles s'arrêtent à l'étage et s'assemblent à tenon et mortaise dans les deux sablières. Les poteaux d'huisserie forment l'ouverture des portes et des fenêtres : on les réunit par des linteaux qui servent à former l'encadrement des portes ou des fenêtres. Les poteaux corniers, les sablières et les poteaux d'huisserie forment comme sur le dessin ci-joint des quadrilatères. Ces derniers sont divisés diagonalement par une pièce oblique nommée décharge, et qui décompose la figure en deux triangles. De cette manière, un effort latéral ne peut déformer l'ensemble de l'ouvrage. La réunion de ces pièces constitue la charpente d'un pan de bois. Les poutres délimitent des compartiments appelés carreaux. Les vides sont remplis au moyen deterre glaise ou demortier dans lequel on ajoute souvent de la paille hachée[6].
Le tout est maintenu par des lattes clouées sur les pièces de la charpente. Mais comme ces pièces sont ordinairement trop éloignées pour la longueur des lattes, il convient de diminuer la distance au moyen de pièces d'une moindre dimension nomméestournisses. Les tournisses sont assemblées à tenon et mortaise dans les sablières et sont simplement embrevées dans les décharges. Quelquefois, on place deux décharges en croix l'une sur l'autre, et l'on forme descroix de saint André, ce qui ajoute de la solidité à l'ensemble. Quelquefois aussi, on ajoute au-dessus de la sablière qui supporte les gîtes d'un étage, une seconde sablière connue sous le nom desablière de chambrée[6].
Lorsqu'on fait correspondre un plein sur un vide comme dans l'établissement d'une vitrine de boutique, lelinteau prend le nom depoitrail. S'il arrive que ce poitrail ait une forte charge à supporter, il convient de pratiquer pour diminuer la poussée vers le centre, les décharges K et un renfort L. on en fait autant aux sablières des étages supérieurs afin de repousser la charge autant que possible vers les points d'appui de la poutre. Les pièces qui remplissent les vides entre les linteaux et la sablière sont de petites pièces analogues auxtournisses et que l'on nommepotelets.
Les sections des diverses pièces d'un pan de bois élevé de quatre à cinq étages sont dans les parties inférieures de 21 à 32 centimètres pour les poteaux corniers, de 19 à 32 centimètres pour les sablières, de 18 à 21 centimètres pour les décharges, les croix de Saint André et les poteaux d'huisserie, enfin de 16 à 18 centimètres pour lestournisses et les potelets.
Les types d'assemblages peuvent varier selon les régions et les époques, et diverses influences se croiser dans un même bâtiment. Par exemple, une toiture à croupe droite, très commune en Angleterre à la fin du Moyen Âge, est rare en France, même si quelques cas peuvent s'observer en Normandie[7].
Les assemblages des pans de bois se font généralement à tenon et mortaise, la traverse qui passe en diagonale est aussi assemblée à tenon et mortaise, les montants croisant la poutre en diagonale peuvent être assemblés à tenon etembrèvement ou à embrèvement simple.
Construction entièrement de charpente, et les mitoyennetés sont des pans de bois composés de sablières, de poteaux, de décharges et de tournisses. Les deux étages de pans de bois de face sont posés enencorbellement l'un sur l'autre, ainsi que l'indique le profil A. Les poteaux d'angle et d'axe de la façade B ont 22 et 24 centimètres d'équarrissage; tous les autres, ainsi que les sablières et solives, n'ont que 17 à 19 centimètres. Les solives C des planchers posant sur les sablières hautes assemblées sur la tête des poteaux, sont soulagées par des goussets et liens D à l'intérieur et à l'extérieur, et peuvent ainsi recevoir à leur extrémité la sablière basse de l'étage au-dessus. Ces solives étant espacées de près d'un mètre, elles reçoivent de plus faiblessolives, ou plutôt deslambourdes, sur lesquelles sont posés lesbardeaux avec entrevous,aire etcarrelage. Le roulement du pan de bois est maintenu par des décharges E assez fortes, et descroix de Saint-André sous lesappuis des fenêtres.
Le remplissage est généralement fait detorchis (mortier fait d'argile, de chaux grasse, de paille ou de foin coupé), matière isolante et imperméable. Labrique crue (tuileau) a aussi été utilisée, de même que des petitsmoellons moins coûteux, noyés dans du ciment. On passe ensuite unbadigeon de chaux blanche ou uncrépi. Pour protéger le torchis de la pluie, le mur le plus exposé est parfois couvert par desessentes de bois. Il est possible, au vu des nombreuses traces retrouvées au cours des chantiers et des rares textes existants, d'affirmer que la grande majorité des maisons de la fin du Moyen Âge et de la Renaissance sont peintes en rouge sombre (badigeon teinté d'un ocre brun-rouge, moins fréquemment d'un ocre beige, jaune voire de noir en Alsace). Ces maisons sont fréquemment ravivées à l'approche des fêtes de village. Les propriétaires les plus riches ajoutent parfois de lapolychromie, du décor au niveau des panneaux et de la sculpture. L'examen des bois montre l'utilisation générale d'une teinte rouge, de l'ocre rouge jusqu'au lie de vin[9].
FinXVIIIe siècle, on appellehourdis ouhourdage, « la maçonnerie qui se fait avec plâtras et plâtre ou mortier en remplissage des poteaux de pan de bois, decloisons, et entre lessolives desplanchers, ainsi que celle qui se fait avec despetits garnis (des petits moellons) ou avec duplâtre pur entre les ais ou tringles descloisons à claire-voie». Leterrasseur est l'ouvrier qui hourde les cloisons, les pans de bois et les planchers en terre, dans les pays où la pierre et la chaux sont rares. Par " remplissage ", on entend les entrevous que l'on maçonne entre les poteaux d'un pan de bois, les solives d'un plancher, ce qui se fait avec des plâtras hourdés en plâtre. Unbadigeon, c'est-à-dire de la chaux éteinte, issue ducalcaire régional, qui va former une peinture. À cette dernière peuvent être rajoutées des recoupes de pierres argileuses et ferreuses écrasées passées au tamis et délayées dans de l'eau permettant de donner la couleur des oxydes ferreux contenus dans la pierre aux enduits de plâtre à l'extérieur des maisons[5]. À cette même époque, deux tendances se dégagent : l'affirmation de la structure avec des bois peints en gris et des plâtres blancs ou au contraire la négation de cette structure pour imiter une maison de pierre en dissimulant le bois et le remplissage par une peinture beige uni[10].
À l'intérieur, les faces du pan de bois que l'on nomme aussi cloison, sont lattées pour recevoir du plâtre[5].
↑J.-M. Pesez, "Le bois dans les constructions de la ville médiévale : les questions", dans J.L. Biget, J. Boissière, J.C. Hervé, Le bois et la ville du Moyen Age au XXe siècle (colloque à Saint-Cloud, 1988), Fontenay-Saint-Cloud, 1991, p.200
↑RenéGinouvès, RolandMartin, FilippoCoarelli et John JamesCoulton, « Dictionnaire méthodique de l'architecture grecque et romaine. Tome I. Matériaux, techniques de construction, techniques et formes du décor »,Publications de l'École Française de Rome,vol. 84,no 1,(lire en ligne, consulté le)
↑Denis Steinmetz,La coloration des façades en Alsace, Presses universitaires de Strasbourg,,p. 75.
↑André Parinaud,La Couleur et la nature dans la ville, Éditions du Moniteur,,p. 133.
↑Fiche d'inventaire du"Remplissage en pan de bois" au patrimoine culturel immatériel français, surculturecommunication.gouv.fr (consultée le 23 avril 2015)
Bibliothèque industrielle,De la charpente, comprenant les assemblages, les poutres armées..., Stapleaux, 1852.Consulter en ligne
France Poulain et P.-F. Therain, « L'entretien des bois »,Le dire de l'architecte des bâtiments de France, les essentiels,no 62,(lire en ligne, consulté le).