Lapaléontologie peut être définie comme la science desfossiles[1]. Cettediscipline scientifique entretient des liens étroits avec lagéologie : la datation des restes d'organismes vivants repose souvent sur des informations issues de lastratigraphie et sur l'analyse des roches qui les contiennent[2]. Située au croisement de lagéologie et de labiologie, elle contribue à la connaissance de l'évolution du monde vivant, des relations entre espèces et avec leur environnement (paléoécologie, évolution de labiosphère), de leur répartition spatiale et leurs migrations (paléobiogéographie), de l'extinction des espèces et l'apparition de nouvelles, ainsi que desécosystèmes dans lesquels les espèces anciennes ont vécu. La paléontologie étudie aussi les processus de fossilisation (taphonomie) des êtres vivants disparus. Parmi ses objectifs figurent, outre la reconstruction d'espèces éteintes, l'étude de leur origine, de leurs changements dans le temps (évolution etphylogénie).
Le mot « paléontologie » se décompose en trois parties provenant dugrec ancien :
paleo-, deπαλαιός /palaiós, « ancien » ;
-ontos, deὄντος /óntos, participe présent augénitif du verbeεἰμί /eimí, « être » : « étant » ;
-logie, deλόγος /lógos, « l'étude, le discours ».
Il s'agit donc, littéralement, de la « science étudiant la vie ancienne » et, plus précisément, de la discipline qui étudie les organismes disparus ayant laissé dans les terrainssédimentaires des restes de leur corps ou des traces de leurs activités. Ces restes ou traces sont appelésfossiles.
Située au croisement de lagéologie et de labiologie[4], la paléontologie décrit les espèces fossiles[5] ainsi que les écosystèmes dans lesquels elles ont vécu[4].
La paléontologie peut être définie comme la science des fossiles[1]. Elle entretient des liens étroits avec la géologie : la datation des restes d'organismes vivants repose souvent sur des informations issues de lastratigraphie et sur l'analyse des roches fossilifères[2]. Lareconstitution des plaques tectoniques et despaléocontinents — à laquelle elle contribue en partie — lui permet de connaitre lalatitude d'une zone à un moment donné, ce qui donne une indication sur lepaléoclimat, et permet d'appréhender l'étendue du biotope disponible d'une espèce et l'existence de connexions terrestres ou maritimes entre zones. En retour, la paléontologie apporte une contribution importante à la compréhension de l'histoire de laTerre[6]. Ainsi, l'échelle des temps géologiques est divisée en unités dont les bornes sont souvent définies par des évènements paléontologiques :ères,périodes,époques,étages.
La paléontologie est une branche de la biologie. La première n'a accès au vivant qu'à travers les fossiles - archives biologiques -, tandis que l'objet de la biologie est le vivant dans son ensemble[7]. Un des principaux fondateurs de la paléontologie,Georges Cuvier, était un spécialiste de l'anatomie comparée, une branche de la biologie ; ce qui conduit certains historiens des sciences à dire que la paléontologie est née de la biologie (plutôt que de la géologie)[8]. AuXXIe siècle, laphylogénétique moléculaire compare l'ADN des espèces actuelles pour reconstruire l'arbre généalogique du vivant. Elle est également utilisée pour estimer les dates des divergences phylogénétiques, bien que cette approche soit discutée en raison de doutes sur la régularité de « l'horloge moléculaire »[9]. Les paléontologues utilisent souvent l'observation de caractères actuels pour comprendre les caractères du passé : c'est le principe de l'actualisme[10].
On distingue trois principales formes de paléontologie :
la « paléontologie systématique » dont l'objectif premier est l'étude desphylogénies sur la base de l'observation scientifique desfossiles ;
la « paléontologie générale » dite également « paléontologie fondamentale » dont l'objectif premier est la compréhension des problèmes généraux que ladémarche systématique permet de découvrir (relations entre les êtres vivants disparus ou actuels, leurs évolutions, et, à plus large échelle, l'évolution desêtres vivants, desmilieux et desclimats au cours destemps géologiques) ;
la « paléohistologie » qui est l'étude fine des tissus fossilisés, avec une vaste palette d'objectifs et d'applications, allant de la reconstitution approfondie (par exemple la coloration du plumage d'Archéopteryx) à la paléontologie du développement[11], notamment avec l'appui de laphylogénétique moléculaire et assimilés (exemple : comparaison du collagène deTyrannosaurus rex avec celui desoiseaux actuels[12]).
Les étudiants du College of Wooster collectent des fossiles dans le cadre de leur cours de paléontologie sur les invertébrés. Le terrain est ici un affleurement decalcaires et deschistes de l'Ordovicien sur une route dans le sud-est de l'Indiana.
Le travail paléontologique comporte généralement quatre étapes :
la prospection et lesfouilles sur le terrain : c'est la partie la plus ardue, la plus physique, et administrativement compliquée : après obtention de tous les accords nécessaires, du matériel et des fonds, après le transport sur site, il s'agit de quadriller, mesurer, photographier, cartographier, extraire, préserver, emballer les fossiles, tamiser le sédiment, classer les trouvailles, les conditionner pour leur transport… ;
l'analyse et l'étude en laboratoire (voire dans un accélérateur de particules comme l'ESRF) des fossiles après déballage des colis ; le conditionnement des trouvailles, les moulages, l'attribution des fonctions (collection d'étude,muséologie, échanges…) ;
la description et publication scientifique des fossiles et des résultats d'étude, la reconstitution des êtres fossilisés et de leurs milieux d'origine ;
la diffusion pour le grand public des connaissances ainsi acquises (exposition au public, livres, autres publications, documentaires…).
Il arrive que paléontologues etarchéologues soient amenés à travailler ensemble[13]. C'est notamment le cas pour lespaléoanthropologues qui étudient les fossiles humains. En revanche, c'est très rares pour les paléontologues qui travaillent sur d'autres types de fossiles comme les animaux ou les plantes. Un des rares connu est celui du site de Serrote do Letreiro au Brésil où des empreintes de dinosaures jouxtent des gravures rupestres[14].
Pour« faire parler » les fossiles, la paléontologie, science largement pluridisciplinaire, emprunte souvent des techniques à d'autres sciences, dont lachimie, l'écologie, laphysique et lesmathématiques. Ainsi par exemple les signaturesgéochimiques des roches aident à dater l'apparition de la vie sur Terre[15], et les analyses desrapports isotopiques du carbone peuvent permettre d'identifier leschangements climatiques et d'expliquer des transitions majeures telles que l'extinction Permien-Trias[16]. Des techniques d'ingénierie sont utilisées pour analyser la manière dont les corps d'organismes anciens pouvaient fonctionner, par exemple la vitesse de course deTyrannosaurus et sa force de morsure[17],[18], ou la mécanique de vol deMicroraptor[19]. L'étude des détails internes des fossiles a recours à la technique de lamicrotomographie à rayon X[20],[21]. La paléontologie, la biologie, l'archéologie et la paléoneurobiologie sont associées à l'occasion de l'étude des moulages endocrâniens (endocastes) d'espèces liées à l'homme afin de clarifier l'évolution du cerveau humain[22].
La paléontologie contribue à l'astrobiologie, la recherche d'une vie possible sur d'autres planètes, en développant des modèles de la manière dont la vie a pu apparaître sur Terre et en fournissant des techniques permettant de détecter les preuves d'existence d'êtres vivants[23].
Paléoanthropologie : crânes de primates (Homo sapiens, chimpanzé, orang-outan, macaque).
La paléontologie comporte plusieurs sous-disciplines. La paléontologie desvertébrés étudie les fossiles des premiers poissons, jusqu'à ceux des ancêtres immédiats des mammifères modernes. Bien que l'Homme fasse partie des vertébrés, son étude est considérée comme un champ distinct, lapaléoanthropologie, qui couvre l'histoire évolutive de la lignée humaine. La paléontologie desinvertébrés traite de fossiles tels que ceux desmollusques, desarthropodes, desvers et leséchinodermes. Lamicropaléontologie se focalise sur lesmicrofossiles[24]. Les microfossiles qui ne sont pas minéralisés, mais organiques, tels que les grains de pollen, lesspores, font l'objet d'une sous-discipline séparée, lapalynologie (ou paléopalynologie). Lapaléobotanique, étudiant les plantes fossiles, est très proche de la palynologie, mais s'en distingue par les restes botaniques qu'elle prend pour objet - non pas des "poussières" végétales mais lebois pétrifié, lahouille (provenant de la carbonisation de végétaux), des impressions de feuilles dans la roche[25]. Lapaléoichnologie se consacre aux traces laissées par les animaux (pistes, terriers…), lapaléocoprologie à l'étude des excréments.
Au lieu de se concentrer sur les organismes individuels, la paléoécologie examine les interactions entre différents organismes anciens, tels que leurschaînes alimentaires, et les interactions avec leur environnement[26].
La paléoclimatologie, bien que parfois considérée comme une sous-discipline de la paléoécologie, se concentre davantage sur l'histoire du climat de la Terre et sur les mécanismes qui l'ont modifié[27]. Ces modifications peuvent être liées à des développements évolutifs, comme l'expansion rapide des plantes terrestres durant leDévonien qui a éliminé une plus grande quantité de dioxyde de carbone de l'atmosphère, réduisant l'effet de serre et contribuant ainsi à provoquer unâge glaciaire durant leCarbonifère[28].
Labiostratigraphie, utilisant les fossiles pour déterminer l'ordre chronologique dans lequel les roches se sont formées, est utile aux paléontologues et aux géologues[29].
La paléobiogéographie étudie la distribution spatiale des organismes ; elle est également liée à la géologie. La répartition géographique des fossiles renvoie en effet à des mouvements de migration et permet de montrer des connexions entre des îles ou des continents[30].
Lataphonomie est une branche de la paléontologie qui s'intéresse aux processus de fossilisation, qui font intervenir notamment labiodégradation et, après l'enfouissement de l'organisme, les effets de ladiagenèse[31].
Lesfossiles des organismes anciens constituent généralement le type de preuve le plus décisif en paléontologie. Lesfossiles les plus communs sont les os, les coquillages, le bois[32]. Ils ont généralement un caractère fragmentaire : ce sont par exemple des éléments isolés de squelettes, et parfois de simplestraces (empreintes, terriers). La fossilisation étant un phénomène rare, et la plupart des organismes fossilisés ayant été détruits au cours du temps par érosion, ou parmétamorphisme, les archives fossiles sont par conséquent très incomplètes. Le paléontologue doit prendre en considération les biais dans les archives fossiles : certains environnements différents sont plus favorables que d'autres à la fossilisation ; et les organismes avec un squelette minéralisé ayant plus de chances d'être conservés, sont donc surreprésentés par rapport aux organismes à corps mou[33]. Ainsi, bien qu'il existe plus de 30phylums d'animaux vivants, les deux tiers n'ont jamais été trouvés sous forme de fossiles[34].
Parfois, des environnements inhabituels, lesLagerstätten, préservent les tissus mous. Cependant, même les Lagerstätten présentent une image incomplète de la vie au cours des temps géologiques, et la majorité des organismes vivants anciens n'y sont probablement pas représentés, parce que les Lagerstätten sont limités à un type particulier d'environnements, ceux où les organismes à corps mou peuvent être préservés très rapidement par des événements exceptionnels comme desglissements de terrain, qui entraînent un enterrement immédiat[35].
Nommer les groupes d'organismes d'une manière claire est important ; les malentendus sur les noms peuvent conduire à des divergences considérables dans les interprétations scientifiques[36]. Lataxonomie linnéenne, couramment utilisée pour classer les organismes vivants, se heurte à des difficultés lorsqu'il s'agit de la classification d'organismes anciens significativement différents des organismes connus. Ainsi, il est parfois difficile de savoir à quel niveau placer un groupe nouvellement découvert, et de dire si ce groupe constitue un genre, unefamille ou un ordre ; dans ce mode declassification classique, lorsqu'un groupe est déplacé vers un niveau différent, il doit être renommé[37].
Exemple de cladogramme Le « sang chaud » est un caractère apparu à un moment de la transition synapsides–mammifères. ? Le « sang chaud » a dû également apparaître à un de ces moments de l'évolution – un exemple deconvergence évolutive[38].
Les paléontologues utilisent des approches fondées sur lacladistique, une méthode permettant d'élaborer « l'arbre généalogique » évolutif d'un ensemble d'organismes[36]. Selon la théorie cladistique, si les groupes B et C sont plus proches parents entre eux qu'ils ne le sont du groupe A, alors B et C font partie d'un clade auquel A n'appartient pas. Les caractères qui sont comparés peuvent êtreanatomiques (comme la présence d'unechorde), oumoléculaires (en se fondant notamment sur la confrontation de séquences d'ADN ou deprotéines). Le résultat de l'analyse est une hiérarchie declades — des groupes qui partagent un ancêtre commun. La technique cladistique est faillible, car certaines caractéristiques, telles que lesailes, ont évolué plus d'une fois ; l'analyse doit prendre en compte la possibilité d'apparitions multiples de certains caractères de manière indépendante dans différentes lignées, phénomène appeléconvergence évolutive ouhomoplasie[38].
L'un des objectifs de la paléontologie est de reconstituer l'histoire de l'évolution. Cependant, les formes qui semblent intermédiaires entre deux groupes sont seulement appelées parGuillaume Lecointre des intermédiaires structuraux comme lesArchaeopteryx et lesoiseaux de l'ère secondaire, ou les poissons à poumons. La probabilité de trouver« les ancêtres réels » des différentes espèces est infime en paléontologie. Les intermédiaires structuraux sont donc positionnés au bout d'une branche indépendante comme toutes les autres espèces.
La paléontologie cherche à retracer l'évolution des êtres vivants, ce qui suppose de les situer chronologiquement. Les paléontologues peuvent prendre appui, pour dater les fossiles, sur lastratigraphie, science du déchiffrement de la succession des couches sédimentaires[39]. Les roches forment habituellement des couches horizontales, chaque couche étant plus récente que celle qu'elle recouvre. Si un fossile apparaît entre deux couches dont les âges sont connus, l'âge du fossile doit se situer entre ces deux âges connus[40]. Cependant, les séquences de roches ne sont pas continues, et peuvent être interrompues par desfailles ou des périodes d'érosion. Des fossiles d'espèces ayant vécu pendant un intervalle relativement court peuvent alors être utilisés pour corréler des roches isolées : cette technique est appeléebiostratigraphie. Par exemple, leconodonteEoplacognathus pseudoplanus a vécu dans la période de l'Ordovicien moyen[41]. Si des roches d'âge inconnu présentent des restes d'E. Pseudoplanus, on en déduit qu'elles doivent dater de l'Ordovicien moyen. Un bonfossile stratigraphique doit, pour être utile, être réparti dans plusieurs régions du monde et appartenir à une espèce ayant vécu durant une courte période. La stratigraphie et la biostratigraphie ne peuvent fournir qu'unedatation relative (A avant B), ce qui est souvent suffisant pour étudier l'évolution.
Les lits qui conservent des fossiles manquent généralement des éléments radioactifs nécessaires à ladatation radiométrique. Cette technique est le seul moyen de déterminer l'âge absolu des roches vieilles de plus de 50 millions d'années ; elle peut être précise à 0,5% ou même davantage[42]. Le principe de la datation radiométrique est simple : les vitesses de désintégration de divers élémentsradioactifs sont connus, et ainsi le rapport de l'élément radioactif à l'élément dans lequel il se désintègre montre depuis combien de temps l'élément radioactif a été incorporé dans la roche. Les éléments radioactifs ne sont communs que dans lesroches d'origine volcanique ; les seules roches renfermant des fossiles qui peuvent être datées parradiométrie sont donc les couches de cendres volcaniques[42].
Les relations dans l'arbre généalogique peuvent également aider à déterminer la date d'apparition des lignées. Il est possible d'estimer depuis combien de temps deuxclades vivants ont divergé - c'est-à-dire approximativement depuis combien de temps leurdernier ancêtre commun a dû vivre - en supposant que les mutations d'ADN s'accumulent à un rythme constant. Ces « horloges moléculaires » sont cependant faillibles et ne fournissent qu'une estimation discutée[43].
La paléontologie retrace l'histoire évolutive du vivant, qui date de 3,4 milliards d'années, peut-être de 3,7 milliards d'années, voire davantage selon certains scientifiques — la Terre, elle, ayant été formée il y a 4,5 milliards d'années. Lesfossiles les plus anciens sont souvent controversés, et leur origine biologique mise en cause, mais les milieux scientifiques admettent assez généralement que desstromatolithes australiens, datant de 3,4 milliards d'années, résultant de l'activitémétabolique de colonies debactéries, sont la preuve de vie la plus ancienne. Selon la théorie de lapanspermie, la vie sur Terre aurait été "ensemencée" par desmétéorites[44], mais la plupart des chercheurs actuels pensent que la vie a surgi sur Terre et non par un transfert d'organismes vivants à travers l'espace[45].
Pendant environ deux milliards d'années, destapis microbiens, colonies multicouches de différentesbactéries, ont constitué la forme dominante de la vie sur Terre[46]. L'évolution de laphotosynthèse oxygénée leur a permis de jouer un rôle majeur dans l'oxygénation de l'atmosphère[47] depuis environ 2,4 milliards d'années. Ce changement d'atmosphère a augmenté leur efficacité en tant que pépinières de l'évolution[48]. Si leseucaryotes, cellules avec des structures internes complexes, peuvent avoir été présents plus tôt, leur évolution s'est accélérée quand ils ont acquis la capacité de transformer l'oxygène et d'en faire une source puissante d'énergie métabolique. Cette innovation peut provenir d'eucaryotes primitifs capturant des bactéries alimentées par l'oxygène et les transformant enorganites appeléesmitochondries[49]. La première preuve de l'existence d'eucaryotes complexes avec desorganites (comme les mitochondries) date d'il y a 1,85 milliard d'années[50],[51].
Lespremiers fossiles d'organismesmulticellulaires (composés de cellules eucaryotes), sont lesGabonionta, datant de 2,1 milliards d'années. La spécialisation des cellules dans l'accomplissement de différentes fonctions apparaît pour la première fois il y a 1,43 milliard d'années avec un possible champignon, et il y a 1,2 milliard d'années, avec probablement une algue rouge.
Les premiers animaux connus sont descnidaires d'il y a environ 580 millions d'années, mais selon les scientifiques, ils doivent descendre d'animaux antérieurs[52]. Lespremiers fossiles d'animaux sont rares parce qu'ils n'avaient pas développé de parties dures minéralisées et facilement fossilisées jusqu'à il y a environ 548 millions d'années[53]. Les premiers animauxbilatériens d'apparence moderne apparaissent auCambrien inférieur. Il y a un débat de longue date pour savoir si l'explosion cambrienne était vraiment une période très rapide d'expérimentation évolutionnaire ; selon d'autres hypothèses les animaux d'apparence moderne auraient commencé à évoluer plus tôt mais les fossiles de leurs précurseurs n'ont pas encore été découverts[54]. Les vertébrés sont restés un groupe mineur jusqu'à l'Ordovicien supérieur[55],[56].
Généralement, les fossiles ne donnent pas d'indication descouleurs, et celles-ci ne peuvent être qu'imaginées à l'exemple des êtres vivants actuels occupant des milieux homologues et ayant uneéthologie comparable. Il en est de même pour les sons : si, exceptionnellement, certains crânes d'hadrosaures dans les crêtes desquels on a insufflé de l'air, ont pu produire une gamme desonorités, le rythme et l'harmonie en resteront à jamais inconnus : là encore, on les imagine d'après les sons produits par les animaux actuels apparentés (on devrait d'ailleurs représenter les dinosaures plutôt sifflant comme des oiseaux, que rugissant comme des lions ou meuglant comme des bovins). Les reconstitutions (ou « reconstructions ») paléontologiques sont donc par définition, et l'on doit en avertir les publics, en partieconjecturelles, puisque même dans les cas rares de conservation dans l'ambre ou laglace, l'organisme est dégradé notamment au niveauchromatique ; il s'agit par la force des faits, de vues d'artiste, mais des vues qui, pour rester dans les limites de ce qui est admis par les chercheurs au moment où elles sont réalisées, doivent obligatoirement s'inspirer d'autres images déjà scientifiquement validées dans les publications spécialisées. Si l'on ne comprend pas ce processus de « conjecture restitutive », on ne peut que considérer comme « inexactes » ou « violant quelquecopyright » la totalité des vues d'artiste, d'images de synthèse, de reconstitutions en volume existantes[58], et l'on amputera la paléontologie de toute son iconographie « grand public » y compris les œuvres de maîtres commeMauricio Antón, Alain Bénéteau, Dimitri Bogdanov,Zdeněk Burian,Heinrich Harder,Charles R. Knight ouÉdouard Riou, seules échappant à ce « grand ménage » les illustrations strictement scientifiques des articles spécialisés.
Tant qu'illustrateurs, artisans ou réalisateurs de films se conforment aux indications des paléontologues, la reconstitution paléontologique est une simple représentation documentaire, cadrée par ladémarche scientifique et qui ne vise qu'à une représentation la plus réaliste possible et limite la créativité personnelle. Mais cette représentation peut sortir du cadre documentaire et entrer alors dans le domaine de l'art, le plus souvent dans lascience-fiction (tels le livre et le filmJurassic Park) ou dans l'« heroic fantasy » (tels le livre et la sérieDinotopia).
Dans leurs conférences et interviews,Guillaume Lecointre et Pascal Tassy soulignent que beaucoup demythes anciens ont pu apparaître à la suite d'observations paléontologiques ou autres, mais sans analyse scientifique[59] :
desfossiles marins en montagne ont pu donner lieu aux récits dedéluges ;
desammonitesCeratitida à enroulement incomplet ont été comprises comme des cornes debéliers géants (d'où leur nom) ;
des ossements de grande dimension ont accrédité l’existence dedragons, detrolls, detitans... ;
des tentacules flottants d’Architeuthis (décrit scientifiquement en1857 parJapetus Steenstrup), pouvaient être interprétés comme des serpents de mer géants ou des restes dekraken ;
des tourbillons associés à des céphalopodes géants ont pu donner le mythe deCharybde avalant l'eau et la recrachant sur les navires et deScylla aux nombreux bras qui saisissent les marins[63] ;
les éclairs et lafoudre ont pu être interprétés comme des colères divines.
En ce sens l’étude de lamythologie en relation avec la paléontologie, peut parfois mener les chercheurs à de nouvelles découvertes de fossiles, parfois même déjà en collection dans un établissement scientifique, comme dans le cas deLéonard Ginsburg qui retrouve en 1984, dans des collections anciennes, une caisse contenant des fossiles de grande dimension, qu'un forain duXVIIIe siècle avait présenté à travers la France comme étant « les ossemens du géantTheutobocus, roy desTeutons, tué parMarius à labataille d'Aix enProvence » : il en identifie une dent comme étant celle d'unDinothère, un éléphant disparu. Le mythe du géantTheutobocus, diffusé auXVIe siècle par Mazuyer, chirurgien à Beaurepaire, et par David Bertrand ou Chenevier, notaire, avait déjà été dénoncé auXVIIe siècle par un autre chirurgien,Jean Riolan, et auXIXe siècle parl'anatomiste Blainville[64].
Plus récemment, les paléontologues ont souvent été popularisés comme « chasseurs de fossiles » : une pratique d'amateurs qui est parfois pratiquée illégalement, éventuellement au détriment des archives fossiles et données scientifiques (déterrage sauvage, dégradation du contexte fossilisé, non-déclaration des « trouvailles », vol sur sites de fouille, trafic, etc), et qui doit beaucoup à la médiatisation desexpéditions de Cope et Marsh auxÉtats-Unis. L'œuvre cinématographiqueJurassic Park a aussi contribué à populariser l'existence de la paléohistologie dans lesfictions modernes, concurrençant l'autre principale source de fantasmes à « fossiles vivants » que sont les « mondes perdus » et la « résurrection » d'espèces éteintes.