Lepacifisme possède deux acceptions possibles incluant l'action despartisans de lapaix, ou une doctrine de lanon-violence. Bien que reliés, les deux concepts se distinguent du point de vue de la théorie et de la pratique. Le pacifisme est la doctrine et l'action des partisans de la paix ou durétablissement de la paix. Lessocialistes d'avant1914 (Jean Jaurès), lesZimmerwaldiens durant laPremière Guerre mondiale, les opposants auxguerres coloniales ou les partisans de la paix professent un pacifisme qui n'est pas toujours assimilable à la non-violence. La vision du pacifisme associé à une personne refusant le recours à toutes formes de violence est par contre beaucoup plus répandue.
La doctrine de la non-violence voit de nombreux courantsphilosophiques bannir le recours à toute forme deviolence en vertu d'un pacifisme radical. Vision portée par de nombreux mouvements et courants de pensée à vocation générale (courants de penséehumaniste, plusieurs tendances inspirées de l'hindouisme, courantschrétiens, etc.).
Le courant pacifiste des milieux d'affaires :« il faut 50 ans de paix pour se guérir de quelques années de victoire. »[réf. nécessaire]
Le courant pacifiste chrétien des églisesprotestantes anglo-saxonnes ou allemandes.
Le courant pacifiste socialiste avec deux tendances enFrance : l'une antimilitariste et antipatriotique (Gustave Hervé), l'autre antimilitariste mais patriote (Jean Jaurès) qui évoluera vers l'opposition militante au déclenchement de la guerre à venir.
Jean Jaurès se montrait confiant dans la volonté de laclasse ouvrière et de ses représentants dans les principaux pays d'utiliser les manifestations et jusqu'à lagrève générale pour éviter le conflit.
Malgré la faillite du mouvement socialiste européen à empêcher la Première Guerre mondiale, laconférence de Zimmerwald en 1915 se donne comme but de rassembler les socialistes fidèles à l'internationalisme afin de lutter contre la guerre, de même les femmes socialistes européennes, àBerne en 1915, s'opposent à la guerre par la tenue d'une conférence et la publication d'un manifeste[2]. Cet appel est diffusé en France parLouise Saumoneau.Clara Zetkin est emprisonnée à son retour en Allemagne pour la tenue de cette conférence. En 1916, laconférence de Kiental appelle à une paix immédiate et sansindemnités de guerre, appelées aussi réparations.
Une grande partie des socialistes français et allemands se rallie au soutien à la guerre, jusqu'en 1917, où la lassitude vis-à-vis du conflit redonne une certaine audience aux idées pacifistes de la Gauche.
Joseph Caillaux propose une paix sansannexions ni indemnité. Il est arrêté en janvier 1918 sous l'inculpation « d'intelligence avec l'ennemi » et de « complot contre la sûreté de l'État ».
Selon l'historienRené Rémond[3], il perdure au sein de la gauche socialiste l'idée duXIXe siècle selon laquelle la guerre est une conséquence ducapitalisme qui profite du nationalisme pour produire une division des travailleurs et travailleuses[4] ; à ces idéesinternationalistes assimilant capitalisme etbellicisme, se greffe une thèse deLénine, qui développe le concept d'impérialisme, export de la guerre comme seule solution d'expansion du capitalisme. Pour sa part,Léon Trotsky, dans son programme de transition pour une4ème Internationale, indique que « Le pacifisme est la couverture de l'impérialisme »[5]. Lemarxisme-léninisme forge les notions de « bonne guerre » ou « mauvaise guerre », à la façon desthéologiens distinguant guerre juste ou injuste. Les bonnes guerres sont alors celles faites par le peuple, les guerres patriotiques, de libération, ou visant à renverser le capitalisme qui lui est à l'origine des « mauvaises guerres ». À partir de 1936, la même distinction apparaît à droite,« un peu par sympathie pour lesrégimes autoritaires, beaucoup par crainte d'être précipité dans une guerre par la gauche, pour des motifs idéologiques ». Toujours selon Rémond, les attributs des bonnes ou mauvaises guerres sont inversées : pour une partie de la gauche, seraient bonnes les guerres menées au nom d'idées telles que liberté, affranchissement ou lutte contre les guerres d'intérêt menées par les capitalistes ; tandis que pour une partie de la droite, ces guerres idéologiques, menées au nom d'abstractions telles que solidarité avec lesjuifs, ou défense de la démocratie contre le totalitarisme sont à rejeter, les bonnes guerres ne devant viser qu'à la défense du territoire, ou à« des réalisations charnelles et substantielles »[réf. nécessaire].
En même temps, apparaît un pacifisme « vitaliste » pour qui la valeur de lavie humaine dépasse toute autre valeur. Ses bases morales et philosophiques sont cependant remises en cause a posteriori, après laSeconde Guerre mondiale, le slogan« plutôtHitler que la guerre » impliquant l'acceptation de labarbarie et dugénocide[6]. L'historienSimon Epstein considère pour sa part le pacifisme des années1930, classé à gauche de l'échiquier politique, comme« vecteur principal decollaboration », expliquant le revirement de nombreuses personnalités militantes et politiques vers la collaboration pour éviter la confrontation avec l'occupant allemand[7].
Les mouvements pacifistes se sont fortement développés en Europe de l'Ouest (Royaume-Uni,Allemagne de l'Ouest) vers le milieu des années 1970 et surtout au début des années 1980. L'un des événements fondateurs est la mise au point de labombe à neutrons (1976), qui contribua à ressusciter les« défilés dePâques »[8], vivaces en Allemagne à la fin des années 1950. De 1979 à 1986, lesmanifestations pacifistes tournèrent en Allemagne aux manifestations de masse[9]. Dans leuropposition à l'installation des nouveaux missiles américains de portée intermédiairePershing II et auxmissiles de croisière (dans le cadre desaccords SALT II de l'OTAN portant sur l'équilibre avec les missilesSS-20soviétiques), les pacifistes déployèrent des manifestations spectaculaires accompagnés d'actes dedésobéissance civile tels leblocus de bases militaires et desites de lancement, des campagnes de protestation, etc. EnGrande-Bretagne, un mouvement d'originegalloise,Women for Life on Earth («Les Femmes pour la Vie surTerre»),occupe ainsi la base militaire de Greenham Common (Berkshire) pour protester contre l'installation de missiles de croisière. La base militaire avait été établie au mois de : les premiers barrages protestataires commencent en avec l'intervention de 250 militantes, dont 34 seront arrêtées[10].
Le pacifisme rassembla très largement, des mouvements chrétiens auxanarcho-syndicalistes. Vers la fin des années 1980, avec la détente qui accompagnait laPerestroïka, le mouvement pacifiste parut s’essouffler[9], mais en Allemagne il reprit des couleurs dès le début des années 1990 en réaction à l'élargissement des prérogatives de laBundeswehr et l'embrigadement du pays dans laGuerre du Golfe (1991), laGuerre du Kosovo (1999) puis, après lesattentats du, l'appel du Président américainGeorge W. Bush à laGuerre contre le terrorisme et surtout laTroisième guerre du Golfe menée en 2003 par les États-Unis, la Grande-Bretagne et leurs alliés contre l'Irak. Pour la seule journée du, plus de 10 millions de personnes se sont mobilisées en un seul jour dans les grandes métropoles mondiales contre la guerre imminente[réf. nécessaire].
L'hiver 2004-05 a été l'un des temps forts pour le mouvement pacifiste en Europe de l'Ouest, opposé à la constitution de l'Union européenne et ses articles portant sur la politique de défense mutuelle : on y critiquait notamment la ratification d'intervention des forces armées européenne dans le monde, l'extension des missions de l'armée européenne et le devoir pour chaque état membre de moderniser son armement (article I-41 de la constitution européenne :« Les États-membres s'engagent à améliorer progressivement leur armement »). Si ce projet de constitution a trouvé très peu d'écho en République Fédérale d'Allemagne, dans les pays voisins de la RFA, surtout auBenelux et en France, il a déchaîné une controverse. Lesréférendums nationaux en France () et aux Pays-Bas (), où les mouvements pacifistes se rangeaient aux côtés des opposants au projet de constitution, ont dégagé un large vote « non »[réf. nécessaire].
Il est difficile de ne pas voir dans le pacifisme, une forme d'antimilitarisme, transposée à la vie de tous les jours. Un certain nombre d'organismes citoyens s'inspirent de l'antimilitarisme et des perspectives pacifistes pour questionner le recours systématique à la force militaire dans les conflits, s'opposer au recrutement militaire et exiger la consolidation des formes deservice civil.
Un très important courant de recherche émerge présentement dans de nombreux domaines dessciences sociales etpolitiques au niveau de la gestion saine des conflits et de la prévention des conflits violents inspirés de la pensée pacifiste.[réf. nécessaire]
Dans les milieux universitaires, plusieurs philosophes modernes tels queRobert L. Holmes se sont efforcés de démontrer que diverses formes théoriques de pacifisme peuvent être appliquées avec succès pour résoudre les conflits internationaux au sein du monde moderne. Holmes soutient qu'en utilisant les quatre principes de la « personnalité morale », il est possible à la fois de résoudre et de prévenir plusieurs formes modernes de conflits internationaux, y compris laguerre nucléaire et leterrorisme d'une manière éthique[11],[12],[13],[14],[15]. Il soutient également que faire la guerre à l'ère moderne est moralement injustifié par nature pour plusieurs raisons et qu'il est possible d'être un « pacifiste pragmatique » simplement en reconnaissant que la violence organisée et systématique est àprima facie moralement répréhensible[16].
Au cours des âges, le pacifisme a souvent été motivé par des motifs religieux. Le pacifisme se manifeste chez lespremiers chrétiens. Cette pensée est également particulièrement présente dans leséglises protestantes : l'exemple des communautésmennonites etquakers constituent des expressions particulièrement engagées de cette préoccupation. Aujourd'hui, l'Église catholique proclame à la suite du PapePaul VI que« le développement est le nouveau nom de la paix »[17]. À l'inverse, la religion peut également être le motif de conflits pouvant entraînerpersécutions etguerres.
Nombreuses sont les personnes connues et reconnues ayant pris des positions pacifistes fermes au cours de l'histoire. Les écrits de ces personnes peuvent inspirer :
Stefan Zweig, écrivain autrichien militant, avec le concours d'autres auteurs européens, pour la paix avant, durant et après laPremière Guerre mondiale.
Adrienne Thomas, écrivaine germanophone, auteur deDie Katrin Wird Soldat (Catherine soldat)
Alain (philosophe), philosophe français. Son pacifisme le pousse cependant à considérer la collaboration pétainiste comme un moindre mal[18].
Roger Martin du Gard, suivant le mouvement pacifisme de l'entre-deux-guerres, écrit à son ami Marcel Lallemand le 9« Tout, plutôt que la guerre ! Tout, tout ! Même lefascisme enEspagne ! Oui… et même le fascisme en France ! Tout : Hitler plutôt que la guerre ! »[19].
Jean Giono, écrivain plus ou moins anarchiste mais « pacifiste intégral », fonde un mouvement pacifiste, « lesRencontres du Contadour », du nom d'un village de laMontagne de Lure (Basses-Alpes), mais son manque de charisme, son individualisme et son refus de prendre des décisions importantes feront capoter ces illusions. Son pacifisme le pousse également à jouer un rôle très controversé pendant laSeconde Guerre mondiale[20].
John Lennon incarne l'engagement profond et marquant du mouvement pacifiste « Peace and Love » («Paix et Amour») des années 1970 : un rassemblement à sa mémoire continue d'avoir lieu àNew York chaque.
Noam Chomsky, qui dans son activité de penseur-activiste, n'a de cesse d’appeler à chercher toutes les solutions pacifistes possibles avant d'engager une guerre contre un pays ou un peuple, restant toujours une tragédie humaine effroyable.
LepasteurAndré Trocmé, organisateur de la protection des juifs dans laHaute-Loire pendant l'Holocauste, fondateur duCollège Cévenol duChambon-sur-Lignon et dirigeant du mouvement pacifisteMIR, a résumé ses idées dans un ouvrage intituléJésus-Christ et la révolution non violente, paru chezLabor et Fides en 1961.
Cabu, dessinateur de presse, auteur de nombreux dessins antimilitaristes, assassiné dans la tuerie du journalCharlie Hebdo
Robert L. Holmes, lephilosophe américain a publié de nombreux ouvrages et articles scientifiques démontrant la justification morale du pacifisme à l'ère moderne[21],[15].
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LeGlobal Peace Index[22] mesure sur la base d'une vingtaine de critères (notamment l'engagement dans des conflits, la vente d'armes, les dépenses militaires, latransparence du gouvernement, le taux de criminalité…) les pays les plus pacifiques. Un plus petit score signifie un pays plus pacifique.
Léon Trotski : « Exploitant l'attachement naturel des masses pour la paix et le dévoyant, les pacifistes petits-bourgeois se transforment ainsi, en définitive, en soutiens inconscients de l'impérialisme »[23].
Jules Guesde considère que les pacifistes bourgeois feignent d'ignorer que la guerre est inhérente au capitalisme[24].
PourJulien Benda , l'opposition systématique à la guerre par des pacifistes est critiquable ; dans la préface à l'édition de 1946 deLa Trahison des Clercs,Julien Benda prend position contre un pacifisme systématique, qui exclut la guerre dans tous les cas. Parlant des « clercs » qui défendent cette théorie, il écrit[25] :
« Nous estimons que le clerc est parfaitement dans son rôle en admettant l’emploi de la force, voire en l’appelant, dès qu’elle n’agit qu’au service de la justice, à condition qu’il n’oublie pas qu’elle n’est qu’une nécessité temporaire et jamais une valeur en soi. »
Dans sesReflections on Gandhi,George Orwell défendait également une position proche en reprochant aux pacifistes d'« éluder les questions gênantes » et d'adopter« la thèse stérile et malhonnête selon laquelle dans chaque guerre les deux camps représentent la même chose, ce pourquoi il est sans importance de savoir qui gagne. » S'adressant àGandhi, il écrivait également :
« Et les Juifs ? Acceptez-vous qu'on les extermine tous ? Et sinon, que proposez-vous pour l'éviter, si vous excluez l'option de la guerre ? »
Enfin, selon l'auteur péruvienMario Vargas Llosa, cette attitude revient à laisser le pouvoir aux dictateurs. Il écrit ainsi dansLes Enjeux de la liberté que[26] :
« Le pacifisme semble être un sentiment altruiste, inspiré par une œcuménique abjuration de la violence et le rêve d'un monde de bon sens, où tous les conflits entre les nations se résoudraient autour d'une table de négociations et où les armes auraient disparu. C'est une belle affabulation, mais celui qui croit que la meilleure façon de la rendre réalité consiste à s'opposer à toutes les guerres pareillement œuvre en vérité pour que le monde soit une jungle dominée par des hyènes et des chacals, et où les brebis seraient exterminées. »
↑CécileDenis,Continuités et divergences dans la presse clandestine de résistants allemands et autrichiens en France pendant la Seconde Guerre mondiale : KPD, KPÖ, Revolutionäre Kommunisten et trotskystes, (thèse de doctorat réalisée sous la direction d’Hélène Camarade, soutenue publiquement le 10 décembre 2018 à l’université Bordeaux-Montaigne)(lire en ligne)
↑Dans sonJournal intime du 23 juillet 1940, il écrit :« J'espère que l'Allemagne vaincra ; car il ne faut pas que legénéral de Gaulle l'emporte chez nous. Il est remarquable que la guerre revient à une guerre juive, c’est-à-dire à une guerre qui aura des milliards et aussi des Judas Macchabées » cité dansLaurent Wetzel, « Les normaliens durant l'Occupation »,La Nouvelle Revue d'histoire,no 74 de septembre-octobre 2014,p. 58-62.
↑Jeannine Verdès-Leroux,Refus et violences : politique et littérature à l'extrême droite, des années trente aux retombées de la Libération, Paris, Gallimard,(lire en ligne),p. 39