Otto Preminger naît àWiznitz en 1905 dans une famillejuive de laGalicieaustro-hongroise[2],[c]. En 1915, le père d'Otto Preminger installe sa famille àVienne, pour plus de sécurité. Dès l'adolescence, le jeune Otto se passionne pour le théâtre.
Il travaille d'abord dans la troupe deMax Reinhardt. Il en prend la direction en 1933, et y monte une cinquantaine de pièces. Il enseigne aussi auSéminaire Max Reinhardt.
Il réalise son premier film,Die grosse Liebe (Le Grand Amour) en 1931 en Autriche[3].
En 1934,Joseph Schenck, président de la20th Century Fox, venu chercher de nouveaux talents en Europe, l'invite à Hollywood. Preminger accepte l'invitation et débarque à New York le[3].
Il fait ses débuts àHollywood comme réalisateur avecLa Folle héritière (Under Your Spell) en 1936 etCharmante famille (Danger - Love at work) en 1937, deux films qui ont laissé peu de traces. Il se voit confier la réalisation duProscrit (Kidnapped), adaptation du roman d'aventures deRobert-Louis Stevenson. Mais à la suite d'une mésentente avec le studio, il abandonne le projet ; ce qui lui vaut d'être tenu à l'écart des milieux du cinéma. En contrepartie, Preminger mène une importante activité demetteur en scène àBroadway de 1935 à 1940. Ainsi, il dirige notamment les piècesOutward Bound deSutton Vane etMargin for Error deClare Boothe Luce, dans laquelle il interprète aussi le rôle d'un officier nazi.
Il revient au cinéma comme acteur en 1942 avecThe Pied Piper d'Irving Pichel pour la 20th Century Fox avant de réaliser l'adaptation au cinéma deMargin for Error, dans laquelle il reprend le rôle qu'il avait défendu sur scène. Lorsqu'il joue, son accent autrichien le cantonne souvent dans des rôles d'espions ou d'officiers nazis.
En1945, Preminger connaît le succès comme réalisateur avecLaura (1944),film noir mâtiné de psychologie adaptant un roman deVera Caspary et mettant en vedetteGene Tierney dans le rôle-titre, ainsi queDana Andrews etVincent Price dans un rôle secondaire. C'est le sixième film de Preminger, mais c'est le premier sur lequel il considère qu'il a exercé un contrôle artistique total. Initialement, Preminger devait se contenter de produire le film dont la réalisation avait été confiée àRouben Mamoulian. Le travail de Mamoulian ne donnant pas satisfaction, Preminger, avec l'accord deDarryl Zanuck, le remplace comme metteur-en-scène. Le résultat est un classique dufilm noir[4].
Le succès deLaura permet à Preminger d'asseoir sa position au sein de la Fox. Il remplaceErnst Lubitsch sur le tournage deScandale à la cour, que Lubitsch doit abandonner pour des raisons de santé. Il se voit aussi confier la réalisation d'Ambre, un ambitieux mélodrame historique adapté d'un roman à succès deKathleen Winsor. Le film, tout comme le livre qu'il adapte, est assez audacieux compte tenu des critères moraux alors en vigueur. Aussi, pour satisfaire la Ligue catholique de décence, Preminger doit-il couper certaines scènes de son film, qui, malgré des critiques tièdes, n'en connaît pas moins un grand succès à sa sortie.
Mais las du système hollywoodien et des concessions artistiques faites àDarryl Zanuck, patron de la Fox, il décide de produire seul ses films, grâce auxArtistes associés, ce qui est un pari audacieux au début desannées 1950, hostiles à la notion d'auteur-réalisateur telle qu'elle est définie enEurope. Son premier film indépendant estLa Lune était bleue (The Moon Is Blue, 1953), adaptation d'une pièce à succès que Preminger avait montée surBroadway. Une nouvelle fois, Preminger se retrouve dans la mire de la Ligue de décence et des tenants duCode Hays. Ceux-ci veulent en interdire certaines répliques, s'en prenant plus spécifiquement à l'utilisation des termes "virgin" et "seduce". Preminger refuse : c'est un triomphe. C'est aussi au cours de cette période que Preminger incarne un officier nazi dans le filmStalag 17 de son compatrioteBilly Wilder.
Revenu dans le giron de la Fox, il signe un nouveau succès en réalisant une œuvre de commande, lewesternRivière sans retour avec deux des plus grandes stars d'Hollywood d'alors,Robert Mitchum etMarilyn Monroe. Il s'agit de son unique incursion dans le genre. Le film est tourné dans les décors naturels des parcs nationaux deBanff et deJasper auCanada.Rivière sans retour est l'un des premiers longs métrages tournés enCinemaScope, avec un format de2,55:1.
Preminger aborde ensuite le drame musical avecCarmen Jones, une adaptation d'un spectacle deOscar Hammerstein II déplaçant la célèbre nouvelleCarmen deProsper Mérimée dans un contexte noir américain.Carmen Jones est ainsi un des rares films de l'époque produit par un grand studio et dont la distribution est entièrement noire.Carmen Jones est aussi le premier film dont le générique est conçu parSaul Bass, qui sera l'auteur de plusieurs génériques pour Preminger et travaillera aussi régulièrement avecAlfred Hitchcock.
Viennent ensuiteExodus, adapté du roman deLeon Uris et traitant de la naissance de l'État d'Israël,Tempête à Washington, qui décrit les jeux de la politique américaine, etLe Cardinal, sur les rouages de l'Église catholique romaine. Le tournage duCardinal se déroule en partie à Vienne, ce qui permet à Preminger de revenir dans la ville qui l'a vu grandir.
Au milieu des années 1960, Preminger dirigeBunny Lake a disparu, une énigme policière qui, par son ton et son style, rappelle ses films noirs des années 1950. Ce sera son dernier long-métrage jugé vraiment significatif. Il réalise ensuiteQue vienne la nuit, un mélodrame se déroulant dans le sud ségrégationniste des années 1940. Le film, dans lequel on retrouveMichael Caine,Jane Fonda etFaye Dunaway, suscite une réaction mitigée. Son film suivant,Skidoo, une comédie portant sur les hippies et mettant en vedetteJackie Gleason etGroucho Marx, est particulièrement mal reçu. Parallèlement, Preminger continue occasionnellement à travailler comme acteur, notamment en interprétant le personnage deMister Freeze dans la série téléviséeBatman. C'est aussi au cours des années 1960 qu'il lance une action judiciaire visant à empêcher que la diffusion de ses films à la télévision soit interrompue par des publicités.
Les films qu'il réalise durant les années 1970, comme la comédieDes amis comme les miens ou le drame d'espionnageRosebud, ont peu d'impact. Preminger termine sa carrière avecThe Human Factor, une adaptation d'un roman deGraham Greene scénarisée par le dramaturgeTom Stoppard. Le tournage, qui a lieu enAngleterre et auKenya, passe proche d'être interrompu pour des raisons financières et la sortie du film passe pratiquement inaperçue. C'est autour de cette période que Preminger publie son autobiographie.
Niche d'Otto Preminger au cimetière de Woodlawn, à New York.
Otto Preminger est connu pour son caractère intraitable, autoritaire et colérique et ses conflits avec certains acteurs, dontLinda Darnell,Tom Tryon ouJean Seberg, sont notoires[5].
Les cinéphiles, notamment depuis les articles deFrançois Truffaut ou deJacques Rivette, lui portent une grande admiration[4] fondée d'abord sur la beauté, la précision et la finesse de sa mise en scène (grâce à son expérience théâtrale et à sa pratique élégante des mouvements de caméra). Otto Preminger était également très apprécié des cinéphiles dumouvement MacMahonien.
La liaison d'Otto Preminger en 1954 avec la jeune actriceDorothy Dandridge, héroïne de son filmCarmen Jones, est présentée dans le filmDéchéance (1999), deMartha Coolidge[7].
↑Voir"Otto Preminger or 'Otto the "Ogre?'",in IMDb, 10 juillet 2019 (updated 14 décembre 2020): "Otto Preminger was regarded as a fine artist amongst his fellow directors but to his actors, he was looked upon in a less favourable light. Accusations of bullying and intimidation on many a film set, became rife both during and after Preminger's career. He was given the nickname of "Otto the Ogre" as a result. He is a director primarily known for his American films but his European approach to them is undeniable.".
↑ThomasSotinel, « Otto Preminger : une œuvre inégale et inclassable »,Le Monde,(lire en ligne).
PatrickSaffar,Otto Preminger, de films noirs en fresques spectaculaires : l'œuvre multiforme du créateur de Laura, Gremese,, 144 p.(ISBN978-88-7301-670-0)