Des membres de la police d'intervention (SWAT) et de la Police nationale philippine (PNP) prennent position dans l'une des entrées d'un centre commercial lors d'une prise d'otages dans la ville de San Juan
Unotage est une personne retenueprisonnière par un preneur d'otage, et dont la vie sauve et la libération dépendent d'une exigence à remplir par une tierce partie. Lesarmées en guerre ont souvent, par le passé, recouru à cette pratique en territoire ennemi pour assurer la sécurité de leurs troupes ou réprimer des actes hostiles. Ce fut notamment le cas durant les deuxGuerres mondiales.
Quand le motif est apolitique et ne vise qu'à l'obtention d'unerançon, on parle d'enlèvement, de kidnapping ou de rapt. Dans d'autres cas, il s'agit d'une forme deterrorisme visant à la libération de prisonniers, à la livraison d'armes, à l'impunité des ravisseurs.
Il y a débat autour de l'étymologie du mot "otage"[1].
« Certains font dériver « otage » du mot latinobses, qui veut dire « gage » ; d'autres, dehospes, caractérisant celui qui offre l'hospitalité ou la reçoit.Hospes a donné le français hôte et existe sous sa variantehostis, qui signifie aussi l'ennemi »[1].
Engermanique,ghil oughisil signifie « otage » ou « héritier ». Il a donné les prénoms Gilbert, Gilles, Gisèle, Ghislain (ou Guislain).
Une autre définition du terme " otage " est issu de la famille de hôte, hôtel... (h)ostage. L'otage (souvent un fils ou des vassaux) était forcé de loger dans la « demeure » du vainqueur et garantissait que le vaincu allait appliquer les conditions du traité de paix. Exemple : les fils deFrançoisIer, otages deCharles Quint.
Lesprises d'otages ont toujours existé dans l'histoire, en tant qu'arme de guerre mais ne recouvraient pas toujours une notion négative. Selon l'historienGilles Ferragu, la fonction des otages était également de« garantir une relation de confiance »[2].
Ainsi, la pratique des otages donnés voulait qu'un pays vaincu ou qui s'engageait à quelque chose fournisse des otages (souvent de haut rang) au vainqueur ou à celui envers qui il s'engageait (parfois un allié) comme garanties en attendant que toutes les obligations qu'il avait soient remplies[3]. Ce type d'otages s'apparente à des hôtes et ceux-ci sont bien traités, bénéficiant d'un cadre de vie semblable à celui qu'ils ont quitté[3].
Si les otages de guerre sont une pratique qui remonte à l'Antiquité, la prise d'otages civils est plus récente[4].
Dans l'Antiquité, les otages étaient parfois offerts à un autre État pour garantir un traité. Cette pratique était utilisée par plusieurs civilisations :
Dans l'Egypte Antique, pharaon s'assurait ainsi de la loyauté des vaincus ou d'une protection contre des pays potentiellement dangereux, en retenant des membres éminents de ceux-ci[4].
Chez les romains,Aetius fut otage romain chez les Wisigoths mais aussi dans l'autre sens,Arminius fut otage chérusque chez les Romains[5]. Les otages étaient des personnes de valeur, souvent des enfants, considérés comme les garants de la sécurité de leur "hôte". Ces personnes de valeur, commePhilippe de Macédoine, le père d'Alexandre le Grand, otage deThèbes, ou encoreVercingétorix, étaient traitées selon leur rang[1]. AuVe siècle av. J.-C., lesSpartiates faits prisonniers après labataille de Sphactérie sont utilisés par Athènes comme otages, mais dans un seul but : priver Sparte de sa supériorité militaire en les gardant prisonniers[3].
Le jeuneJules César fut capturé par des pirates enCilicie, contre une rançon dont il jugea vexante la modestie[6].
Au Moyen Âge, les otages sont majoritairement utilisés dans un but purement pécuniaire, la valeur marchande des otages étant déterminée par leur rang[7], comme chez les Vikings.
Guy de Lusignan,roi latin de Jérusalem, est fait prisonnier parSaladin, ce dernier le traitant selon son rang de souverain en attendant le versement d'unerançon[3]. C'est le cas également deJean le Bon otage d'Édouard III à Bordeaux puis à Londres.
La durée de la captivité peut varier. A titre d'exemple, Jean d’Orléans, livré à 12 ans au duc de Clarence en 1412 et libéré en 1445, a été captif pendant 33 ans[8].
Le 5 avril 1871, laCommune de Paris publie le « décret des otages » précisant« que toutes personnes prévenues de complicité avec le gouvernement de Versailles […] seront les otages du peuple de Paris ». Selon l’article 5,« Toute exécution d’un prisonnier de guerre ou d’un partisan du gouvernement régulier de la Commune de Paris sera, sur-le-champ, suivie de l’exécution d’un nombre triple des otages retenus […] et qui seront désignés par le sort »[11].
Dès leur installation dans la région lilloise le 13 octobre 1914, les Allemands commettent des exactions multiples, paralysant la vie économique de la région. Des otages ont également été capturés, "toutes classes confondues, exilés au camp de Gustrow ou à la forteresse de Rastad"[12]. Les Allemands quitteront la région le 17 octobre 1918
En décembre 1920, larévolution russe est confrontée à une forte résistance, la guerre civile est partout. Le gouvernement des soviets annonce dans laPravda et lesIzvestia qu'il considère ses prisonniers de laGarde blanche et des groupes Savinkov et Wrangel comme des otages : en cas d'attaque contre les chefs des soviets, ils seront « exterminés sans merci ». Lisant cela,Pierre Kropotkine, l'anarchiste, s'adresse aussitôt àLénine : « Respecté Vladimir Iltich, n'y a-t-il personne autour de vous pour rappeler à vos camarades que de telles mesures sont un retour aux pires périodes du Moyen Âge ? Quiconque se soucie de l'avenir du communisme ne peut y recourir. Personne n'a-t-il expliqué ce qu'est réellement un otage ? Un otage est détenu non pas en punition de quelque crime mais pour exercer un chantage sur l'ennemi avec sa mort. Vos camarades ne comprennent-ils pas que pour les otages et leurs familles, cela équivaut à une restauration de la torture ? N'y verra-t-on pas le signe que vous considérez votre expérience communiste comme un échec et que ce n'est plus tant ce système qui vous est si cher que vous essayez de sauver mais votre propre peau ? »
La guerre civile russe est d'une violence extrême. Dans une analyse sur les violences commises pendant cette période,Nicolas Werth analyse les raisons de cette violence, basée sur un clivage amis/ennemis du peuple: "Bien plus que la simple canalisation d’une violence sociale, la « terreur de masse » se déploie et se développe comme une politique volontariste, théorisée et revendiquée, sans la moindre inhibition, comme un acte de régénération du corps social. Elle s’affirme comme l’instrument d’une politique d’hygiène sociale visant à éliminer de la nouvelle société en construction des groupes définis comme « ennemis »."[13]
La prise d'otages devient un instrument de terreur du pouvoir pendant la période dite de la "Terreur Rouge", initiée par lesbolcheviks.
En septembre 1918, en représailles à un double attentat contre Ouritskiii, chef de laTcheka de Petrograd et contre Lénine, "environ 1300 « otages de la bourgeoisie », détenus dans les prisons de Petrograd et de Kronstadt, sont massacrés par des détachements de la Tcheka."[13]
D'autres exécutions massives « d’otages de la bourgeoisie » se dérouleront dans plusieurs villes du pays entre septembre et octobre 1918. Le nombre estimé de ces victimes se situe entre 10 000 à 15 000 victimes[13].
Annonce allemande de l'exécution de 100 otages polonais en représailles de la mort de deux soldats allemands àVarsovie, enPologne occupée, pendant laSeconde Guerre mondiale (février 1944).
Depuis le 19 juin 1940, la répression allemande dans la France occupée se traduit par des prises d'otages à la journée, sans les fusiller. Cette répression se radicalise après le 21 août 1941 qui voit le communistePierre Georges, futur colonel Fabien, aidé deGilbert Brustlein abattre un officier allemand, l'aspirant Moser au métro Barbès, à Paris. Dès le lendemain, les Allemands font de tous leurs prisonniers des otages afin de tenter d'enrayer la nouvelle extension de ces actions de résistance[14].
Le 16 septembre 1941, Hitler fait donner le « décretKeitel » qui préconise la peine de mort pour tous les délits à l'encontre de la puissance d'occupation allemande et fixe à 50 ou 100 le nombre d'otages à exécuter pour la mort d'un soldat allemand. Publié le 28 septembre par leMBH, un « code des otages » précise les règles du « choix » des victimes potentielles, leministre de l'Intérieur de Vichy,Pierre Pucheu, suggérant aux Allemands les noms de ces otages[15].
David Dodge, vice-président de l'Université américaine de Beyrouth (AUB) (19 juillet 1982 – libéré le 20 juillet 1983)
Frank Reiger, professeur à l'AUB (11 février 1984 – libéré le 16 avril 1984).
Jeremy Levin, journaliste, chef du bureau deCNN (7 mars 1984 – a réussi à s'évader le 18 février 1985).
William Buckley, chef du bureau de laCIA au Liban (16 mars 1984 – mort probablement en 1985, sous la torture). Ses restes ont été retrouvés le 27 décembre 1991 dans la banlieue sud de Beyrouth.
Benjamin Weir, pasteur protestant (8 mai 1984 – libéré le 19 septembre 1985).
Peter Kilburn, bibliothécaire à l'AUB (3 décembre 1984 - assassiné le 18 avril 1986).
Lawrence Martin Jenco, prêtre catholique, directeur du Catholic Relief Services (9 janvier 1985 – libéré le 24 juillet 1986).
Terry Anderson, journaliste, chef du bureau Moyen-Orient de l'Associated Press (16 mars 1985 – libéré le 4 décembre 1991).
David Jacobsen, directeur de l'Hôpital Américain de Beyrouth (28 mai 1985 - libéré le 2 novembre 1986)
Thomas Sutherland, doyen de la Faculté d'agronomie de l'AUB (9 juin 1985 – libéré le 18 novembre 1991)
Frank Reed, directeur de la Lebanese International School (9 septembre 1986] – libéré le)
Joseph Cicippio, comptable à l'AUB, enlevé sur le campus (12 septembre 1986 – libéré le 2 décembre 1991)
Edward Tracy, écrivain (21 octobre 1986 - libéré le 11 août 1991).
Alann Steen, professeur au Beirut University College (24 janvier 1987 – libéré le 3 décembre 1991).
Robert Polhill, professeur au Beirut University College (24 janvier 1987 – libéré le 22 avril 1990).
Jesse Turner, professeur au Beirut University College (24 janvier 1987 – libéré le 21 octobre 1991).
William Higgins, lieutenant-colonel de la marine américaine, commandant en chef adjoint de l'ONUST, l'Organisation des Nations unies pour la supervision de la trêve (17 février 1988 – sa mort, probablement sous la torture, a été annoncée le 6 juillet 1990). Son corps a été retrouvé le 24 décembre 1991.
James Richard Cross, diplomate britannique, enlevé par le FLQ (5 octobre 1970 - libéré le 3 décembre 1970).
Geoffrey Nash, chercheur (14 mars 1985 – libéré le 28 mars 1985).
Brian Levick (15 mars 1985 – libéré le 30 mars 1985).
Alec Collett, journaliste et fonctionnaire à l'UNRWA (25 mars 1985 – son corps a été retrouvé le 18 avril 1986).
Brian Keenan, anglo-irlandais, professeur à l'AUB, enlevé sur le campus de l'université (11 avril 1986 – libéré le 24 août 1990)
John McCarthy, journaliste (17 avril 1986 – libéré le 8 août 1991).
Terry Waite, envoyé spécial de l'archevêque de Canterbury, chef de l'Église anglicane, pour négocier la libération de John McCarthy. En dépit des interventions de son Église auprès des autorités iraniennes, il sera l'un des derniers otages à être libérés par le Hezbollah (20 janvier 1987 – 18 novembre 1991).
Jackie Mann, 77 ans, britannique (12 mai 1989 – libéré le 23 septembre 1991).
Saddam Hussein prit en otage des familles de ressortissants étrangers et les plaça sur des sites stratégiques pour prévenir des bombardements. Il utilisa aussi ces otages pour les médiatiser en se montrant à la télévision avec un enfant. En Irak, et sous l'occupation américaine, un très grand nombre d'otages sont pris par diverses factions politiques en guérilla ou plus souvent encore à des fins crapuleuses. Quelques-uns ont malheureusement été exécutés.
Le, deux journalistes françaisChristian Chesnot,Georges Malbrunot et leur chauffeur irakien, sont enlevés par l'Armée islamique en Irak, au sud deBagdad. Une campagne internationale se développe en faveur de la libération des otages : Les représentants des musulmans de France, l'association des oulémas musulmans d'Irak(en),Yasser Arafat ou encoreAbbassi Madani demandent la libération des deux journalistes français. Une manifestation de soutien a eu lieu le à Paris. Le, des dizaines de personnes ont manifesté dans les rues de la capitale irakienne pour exiger la libération des deux journalistes français pris en otages. Les ravisseurs réclament l’abrogation de laloi sur les signes religieux dans les écoles publiques françaises qualifiée d'« injustice et une agression contre l'islam et la liberté personnelle dans le pays de la liberté présumée ». Ils sont finalement libérés le.Florence Aubenas et son guideHussein Hanoun, enlevés le et libérés le.Bernard Planche, qui travaille pour l'ONG AACCESS dans le secteur économique et social a été enlevé le par des inconnus armés dans le quartier résidentiel de Mansour, à l'ouest de Bagdad, alors qu'il sortait de chez lui pour aller travailler et libéré le.
Plusieurs otages américains ont été recensés dans ce pays.Nick Berg, homme d'affaires, a été enlevé en, le une vidéo d'Al-Qaida en Irak montre sadécapitation. Le sergent Keith Maupin, enlevé le, présumé mort (exécuté) en, considéré comme disparu par l'armée.Tom Fox, pacifiste, enlevé le et retrouvé mort le.
Également, des otages italiens ont été recensés dans ce pays.Fabrizio Quattrocchi, abattu d'une balle dans la tête le. Premier otageoccidental assassiné. Ses trois autres compagnons (Umberto Cupertino, Maurizio Agliana et Salvatore Stefio) sont libérés le.Enzo Baldoni, journaliste, exécuté par l'Armée islamique en Irak le.Simona Pari et Simona Torretta(it), âgées toutes deux de 29 ans, ont été enlevées le àBagdad dans les bureaux de leur ONG, un pont pour Bagdad. Elles ont été libérées le. Salvatore Santoro, homme d'affaires exécuté le par le Mouvement islamique des moudjahidine irakiens (futur membre fondateur duFront pour le djihad et la réforme(en)[18]).Giuliana Sgrena, journaliste àIl Manifesto, enlevée le àBagdad, à la sortie d'une mosquée où elle était allée interviewer des habitants deFalloujah. Le, la journaliste demande en larmes le retrait des troupes italiennes dans une vidéo. Elle est libérée le alors queNicola Calipari(en), membre duSISMI, est tué par des balles américaines à l'approche de l'aéroport de Bagdad à hauteur d'un barrage américain.
Des journalistes irakiens ont aussi été victimes d'enlèvement : Rim Zeid (23 ans) et Marouane Khazaal (25 ans), enlevés le et portés disparus depuis[19],[20].
Susanne Osthoff(en), 43 ans,archéologueallemande et son chauffeur ont été enlevés le dans la région deNinive, dans le nord-ouest du pays. Dans leur message vidéo, les ravisseurs demandent à l'Allemagne de cesser toute collaboration avec legouvernement irakien et menacent de tuer leurs deux otages. Ils ont été libérés par les ravisseurs le.
Hervé Ghesquière etStéphane Taponier, journalistes français, sont enlevés le 29 décembre 2009 et libérés le 29 juin 2011, après 547 jours de captivité.
Alan Johnston, journaliste de la BBC à Gaza, fut enlevé par un groupe de terroristes palestiniens le 12 mars 2007 et fut libéré le 4 juillet.Guilad Shalit, soldat israélien, de nationalité franco-israélienne, a été capturé en territoire israélien le 25 juin 2006 à l'âge de 19 ans au sud de Gaza, par les Brigades Ezzedine Al-Qassam (branche armée du Hamas) et par le Comité de résistance populaire et « l'Armée de l'islam », un groupe créé à la fin de 2005 se réclamant du courant d'al-Qaida. Il fut libéré le 18 octobre 2011 en échange de 1 027 prisonniers palestiniens, après plus de cinq années de captivité retenu dans une cave à Gaza.
Environ 3 000 otages sont recensés enColombie, classés en deux groupes :« les otages « financiers » – aux mains de divers groupes et libérables contre rançon –, en majorité écrasante et les otages « politiques » – aux mains des FARC et libérables contre un échange de prisonniers. »[21]
La façade du Club de la Presse deStrasbourg-Europe arborant uncalicot « Libérez les otages », le 26 octobre 2013.
EnSyrie, les journalistes sont devenus en 2012 la cible d’assassinats, de rapts et d’exactions de la part des djihadistes.
Le, Yara Saleh, jeune femme reporter d’Al-Ikhbariya, est enlevée avec son équipe par un groupe salafiste de l'Armée syrienne libre (ASL) alors qu'ils couvrent laBataille d'Al-tel. L'assistant cameraman est rapidement exécuté. L'armée syrienne parvient à les localiser et à les libérer sains et saufs le[22].
Afin de garantir le « retour au pays » destravailleuses immigrées, le gouvernement des pays d'accueil impose parfois la présence d'enfant laissés au pays de départ[23].
Au cours d'un conflit armé, les otages sont considérés comme desboucliers humains quand ils sont placés en avant des combattants de façon à mettre ceux-ci à l’abri, ou mis dans des convois militaires, trains, navires etc. et dans des lieux jugés stratégiques afin d'éviter leur attaque ou leurbombardement[24].
Une population est « prise en otage » quand des combattants sont dissimulés dans des zones civiles ; il s’agit là aussi deboucliers humains.
↑abc etdIrène Herrmann et Daniel Palmieri, « Une figure obsédante: l’otage à travers les siècles »,Revue internationale de la Croix-Rouge,vol. 87,,p. 77-87(lire en ligne)
↑Erwan Le Fur, « La renaissance d’un apostolat : l’Ordre de la Trinité et la rédemption des captifs dans les années 1630 »,Cahiers de la Méditerranée,no 66,,p. 201-214(lire en ligne)