Lors de la victoire d'Alexandre le Grand (-336/-323) sur les Persesachéménides et de sa libération, la ville principale appelée Urhai est occupée par une populationaraméenne. En-303, lesMacédoniens reconstruisent la ville et la rebaptisentÉdesse, en souvenir d'unecité de leur pays (selon l'historien et le géographe grecAppien etÉtienne de Byzance). La ville devient alors la capitale de la province d'Osroène et est peuplée, ainsi que plusieurs autres villes, de vétérans de l'armée.
Vers-132 (ou-136), un roitelet local, Aryu ou Ariou, (-132/-127 ou-136/-127), s'affranchit desSéleucides qui gouvernent la ville et fonde unemonarchie indépendante avec Édesse pour capitale. À part quelques souverains d'originearménienne ouparthe, la plupart sontnabatéens. Ce royaume, quelquefois appelé « principauté desAbgars » (onze souverains portent ce nom), joue sur la rivalité entre lesRomains et leurs voisinsPerses pour conserver son autonomie pendant près de quatre siècles, malgré les diverses armées qui traversent son histoire.
SelonPline l'Ancien, à l’époque romaine, les habitants de l'Osroène et de laCommagène sont desArabes et leurs souverains auraient porté le titre dephylarque (chef d’une phylé) outoparque (magistrat)[5]. Abgar II est décrit comme un« phylarque arabe » parPlutarque[6] etAbgar V est décrit comme« roi des Arabes » parTacite[7].
En85 av. J.-C.,Tigrane II rejette la vassalité de l'Arménie envers lesParthes, il récupère des territoires qu'il avait dû leur céder[8], pille le pays parthe[9], et impose sa suzeraineté sur plusieurs territoires parthes, dont l'Osroène, l'Adiabène, laGordyène et l'Atropatène, l'Arzanène (pays d'Ardzène, vers le haut duTigre) et laMygdonie (ou pays deNisibe)[10]. « Les dynastes ou rois de ces provinces conservent leur couronne, mais comme vassaux du nouveau “Grand Roi”[10] ». Tigrane prend en effet le titre de « roi des rois », réservé aux souverains parthes[11].
À l'époque dupremier triumvirat, Édesse est l'alliée desRomains. En 53, le proconsulCrassus, à la tête d'une armée de 42 000 hommes, franchit l'Euphrate[12] sur les conseils d'un faux allié, le roi d'Osroène, appelé Augarus ou Acbarus[N 1],[12],[13] et attaque laMésopotamie dans le but de prendreSéleucie du Tigre. Mais il est trahi par ce même Abgar qui change de camp pour se ranger du côté desParthes au cours même de labataille de Carrhes après avoir conduit les troupes romaines dans un piège. Labataille de Carrhes eut lieu le 9 juin 53 av. J-C. Crassus fut battu ; son fils trouva la mort au cours du combat et le consul lui-même périt pendant la retraite[14],[15],[16]. Cette sévère défaite desRomains oblige le roi d'ArménieArtavazde II à entrer dans l'alliance Parthe. L'Osroène et l'Adiabène repassent sous la vassalité desParthes. De plus, les Romains conservent depuis cette bataille une crainte respectueuse des capacités militaires des Parthes.
AuIer siècle, sousMonobazeIer d'Adiabène (v. 20 - v. 30), plusieurs territoires qui appartiennent à l'Osroène à l'époque de labataille de Carrhes (-53) sont passés sous le contrôle du royaume voisin d'Adiabène. C'est le cas deSingara, mais aussi de la région de la rivièreKhabour qui dépendent de l'Osroène à l'époque deTigrane II d'Arménie, tout comme la région de la ville deCarrhes[17]. Ce mouvement est encore renforcé lorsque dans les années 30,Artaban III donne le territoire deNisibe au roi d'AdiabèneIzatès II pour le remercier de son aide décisive qui lui a permis de remonter sur le trôneparthe[18]. À ce moment-là, le royaume d'Osroène semble se limiter au territoire autour d'Édesse. C'est d'ailleurs à ce moment que l'appellation « roi d'Édesse » commence à être préférée à l'appellation « roi d'Osroène » pour lesAbgar. Toutefois,Zeugma est toujours sous leur contrôle et avec elle le passage de l'Euphrate, stratégique tant sur le plan militaire que commercial.
Culturellement, le christianisme commence à essaimer hors de Palestine sur le Proche-Orient, l'Osroène et Edesse sont dans les premières régions touchées après Antioche[19].
Plus tard,Abgar VII Bar Ezad est détrôné en 114 lors de l'offensive contre lesParthes dirigée par l'empereur romainTrajan[20], qui conserve la ville sous sa tutelle deux ans avant de la laisser à deux princes étrangers,Yalur etParthamaspatès. En123,Ma'Nu VII Bar Ezad, frère d'Abgar VII, réussit à reprendre le trône[21]. À partir de cette époque, comme beaucoup de régions sous tutelle romaine, les monnaies sont frappées avec l'effigie du souverain régnant d'un côté et celle de l'empereur romain de son époque au dos.
En163 lors d'un nouveau conflit entre Romains et Parthes,Wa'Il Bar Sahru prend lesParthes comme alliés dans sa lutte contre les Romains. Le général romainAvidius Cassius réoccupe l'Osroène en 164 et poursuit sa contre-offensive jusqu'en Mésopotamie. À la fin de cette guerre en 166, Rome maintient des garnisons stratégiques en Osroène[20].
La province romaine d'Osroène dans le diocèse d'Orient.
L'Osroène est annexé commeprovince romaine parCaracalla en216[22]. L'Osroène passe peut-être en 244 sous la mouvance persesassanide par le traité de paix désavantageux signé parPhillipe, empereur fraîchement proclamé et pressé de regagner Rome[23].Valérien y est battu et capturé par le sassanideChapourIer à labataille d'Édesse en 260. La région passe sous le contrôle dePalmyre à la suite des victoires d'Odénat sur les Perses en 262. Après les succès deCarus puis deGalère contre les Perses à la fin duIIIe siècle, la province d'Osroène est intégrée dans lediocèse romain d'Orient.
La liste des souverains d'Osroène est en général reconstituée comme ci-dessous (les noms et les dates jusqu'àAbgar V doivent être regardés avec précaution)[24].