L’Organisation européenne pour la recherche nucléaire, aussi appeléelaboratoire européen pour la physique des particules et couramment désignée sous l'acronymeCERN[a] (du nom duConseil européen pour la recherche nucléaire, organe provisoire institué en 1952[1]), est le plus grandcentre de recherche enphysique des particules du monde.
Au lendemain de laSeconde Guerre mondiale, la rechercheeuropéenne enphysique est quasi inexistante, alors qu'elle était au sommet de sa gloire quelques années auparavant. C'est dans ce contexte que le physicien françaisLouis de Broglie lance l'idée, lors de la conférence européenne de la culture tenue àLausanne en 1949, de créer un laboratoire scientifique européen.
En 1952, avec le soutien de l'UNESCO, qui favorise la création de laboratoires scientifiques régionaux (et notamment l'appui du physicienPierre Auger, qui dirige alors à l'UNESCO le département des sciences exactes et naturelles), onze gouvernements européens décident de créer un Conseil européen pour la recherche nucléaire (CERN). C'est lors d'une réunion àAmsterdam que le site d'implantation des installations de l'organisme est choisi : la commune deMeyrin, enSuisse, située près de lafrontière franco-suisse, près deGenève.
Les premiers travaux pour la construction dulaboratoire et de sonaccélérateur de particules commencent au mois de. Le, la convention du CERN est ratifiée par douze États européens et le CERN est officiellement créé[2] ; il se nomme maintenant Organisation européenne pour la recherche nucléaire.
En 1957, le premier accélérateur, unsynchro-cyclotron (SC) àprotons, est mis en service. Un second accélérateur, plus puissant, est de typesynchrotron à protons (PS) et est inauguré le par le physicien danoisNiels Bohr.
Les physiciens des accélérateurs plaident pour la construction d’uncollisionneur, qui sera appelé « anneaux de stockage à intersections » (Intersecting Storage Rings, ISR), et obtiennent gain de cause lors de la session du conseil de. Ainsi, en 1965, le Gouvernement français accorde le droit au CERN d'agrandir son domaine sur le sol français. Les travaux débutent l’année suivante, sous la responsabilité du physicien norvégienKjell Johnsen(no), pour une mise en service prévue en 1971[3].
Le collisionneur ISR, unique au monde, déploie des « anneaux de stockage », appelés aussi « anneaux de collision »[4]. Les deux structures de150 mètres de diamètre sont « entrelacées »[5] et construites pour330 millions de francs suisses et dans les délais voulus[4]. L'ISR se révèle un« excellent instrument pour la physique des particules », débouchant sur de nombreux résultats importants, qui font auXXIe siècle toujours partie des connaissances de base en physique des particules[3]. Ce premier collisionneur proton-proton au monde[6],[7] recourt à un détecteur dans un grosaimant à champ fractionné (Split Field Magnet, SFM), un« grand spectromètre polyvalent conçu parJack Steinberger, au point d'intersection de l'ISR »[7],[8].
Avec cet ISR, il n'y a plus un faisceau de particules, mais deux, se percutant l'un l'autre au lieu de frapper une cible fixe[6], ce qui procure une énergie décuplée[6]. L'objectif est de détecter la quantité et le type de particules qui sont produites lorsque les protons se bombardent, pour découvrir lequark[4], dont l'existence a été proposée en 1964 parMurray Gell-Mann.
Des millions de photographies pour calculer les trajectoires
L'histoire de l’informatique au CERN débute par unIBM 709 en 1961, remplacé par un 7090 utilisant destransistors, puis unminiordinateur,« généralement directement connecté aux équipements des halls des expériences », est chargé« d'enregistrer les données sur des bandes envoyées au centre de calcul pour analyse »[9], en particulier au moment du déploiement des anneaux de stockage à intersections.
Le CERN prévoit alors d'avoir avant fin 1972 trois très grands détecteurs, deux chambres à bulles — BEBC et Gargamelle — et une chambre à étincelles, Oméga,avec[pas clair] une variante,« des chambres à fils, où les plaques métalliques sont remplacées par une multitude de fils parallèles »[4], l'ensemble autorisant pour chaque chambre plusieurs millions de photographies des traces laissées par le passage des particules, sur lesquelles« un appareil automatique effectue des mesures » identifiant le lieu où s'est produite l'interaction, transmises à un ordinateur qui calcule la vitesse des particules et la direction de leur trajectoire, ce qui requiert plusieurs très grosses calculatrices scientifiques, quelques machines moyennes et une quinzaine de petites[4]. Le budget du CERN passe ainsi de90 millions de francs suisses en 1957 à140 millions en 1964 puis300 millions en 1968 et350 millions en 1970[4]. Le développement de détecteurs de traces est concentré sur la chambre proportionnelle multifils mise au point parGeorges Charpak[10]. Les données sont centralisées sur la dizaine deDEC PDP-11, dont la capacité de calcul est augmentée en recourant rapidement à celle d'unCII 10070, ordinateur moyen « spécifiquement destiné à une analyse des données en temps réel »[11], avec des terminaux, via une liaison interne appeléeréseau Omnet[11], projet mis en place 1969 ou avant, dont les demandes ont changé en 1971, et qui a relié en tout une cinquantaine d'ordinateurs du CERN[12].
Bob Russell y invente le langage informatiquePL-11 pour relier les ordinateurs CII et DEC[13]. À la fin des années 1960, plus de50 miniordinateurs sont disséminés au CERN, qui développe ainsi différents systèmes de communications informatiques (FOCUS, OMNET, CERNET), lesquels grandissent ensuite, lui permettant dans les années 1990, de devenir« le plus grand point d’échange internet d’Europe, voyant transiter 80 % de la capacité européenne d’Internet »[9].
En 1967, un accord est passé entre la France et l'Allemagne cette fois pour la construction d'unechambre à bulles à hydrogène. Un second laboratoire est construit en 1971 pour y placer leSuper Synchrotron à Protons (SPS) de sept kilomètres de circonférence. En 1976, les deux laboratoires[Lesquels ?] sont réunis.
Le 6 novembre 1970, le Cern lance avec succès les essais du premier grand anneau de stockage, dont la construction a commencé quatre ans avant, permettant d'y lancer des protons accélérés par le SPS et de tenter de les y faire séjourner en attendant la construction du second anneau, pour ensuite débuter les premières expériences de collision[14]. Dans la nuit du 26 au 27 janvier, les protons du premier anneau entrent bien en collision avec ceux du second, à une cadence de 1000 chocs par seconde, dont 10 % environ effectivement enregistrés, dégageant une énergie de 470 milliards d'électrons-volts, soit bien plus qu'attendu pour les deux grands accélérateurs de particules en construction aux États-Unis ou projeté en Europe[15]. Avec cette réussite, le CERN apparait comme« le seul organisme qui permette encore de croire que la coopération scientifique est possible en Europe »[4].
En 1981, il est décidé de construire leLarge Electron Positron collider (LEP, soit « Grand collisionneur électrons-positrons »), dans un tunnel d'une circonférence de27 kilomètres. Il est alors le plus grandaccélérateur de particules du monde et le plus puissant collisionneur deleptons. Il est inauguré le. Ce n'est qu'avec leLHC ou Grand collisionneur dehadrons, mis en service le et qui réutilise son tunnel, qu'il est détrôné.
Séminaire sur la physique du LHC parJean Iliopoulos (2009)[16].Bâtiments.Le Globe de la Science et de l'Innovation.
En 1994, la construction duLarge Hadron Collider (LHC, ou « Grand collisionneur de hadrons ») est approuvée. Intéressé, leJapon devient un État observateur à la suite de ses contributions financières au LHC en 1995, suivi par lesÉtats-Unis en 1997.
En, le début du démontage du LEP commence, afin de laisser son tunnel libre pour le LHC, qui entre en service le. Il est le plus important accélérateur de particules au monde construit à ce jour. Le, un incident provoque une fuite d'hélium qui nécessite une réparation et un arrêt de l'accélérateur[17]. Le, les réparations sur le LHC sont terminées et les essais reprennent progressivement. Les premières collisions de particules à7 TeV se produisent vers13 heures le, ce qui est alors, en énergie, la plus importante collision artificielle de particules[18]. Dès lors, il est prévu de faire fonctionner le LHC pendant une période presque ininterrompue de 18 à24 mois, de manière à redécouvrir les particules dumodèle standard et valider les différents détecteurs constituant le LHC. À l'issue de cela, des collisions d'une énergie de14TeV sont prévues, qui devraient permettre de découvrir des particules encore inconnues, infirmant ou confirmant plusieurs théories physiques en compétition[19].
Le, après un premier cycle opérationnel (2009-2013) et deux ans de réparation, les machines du LHC sont relancées pour une durée de trois ans sans interruption (24h/24)[20].
Fin, une fouine s'étant introduite dans les tunnels du LHC provoque « une perturbation électrique sévère ». La fouine a endommagé un transformateur, provoquant une panne de plusieurs jours du système[21].
Cette section doit êtreactualisée. Des passages de cette section sont obsolètes ou annoncent des événements désormais passés.Améliorez-la oudiscutez-en.
En, le CERN inaugure leLinac-4, un accélérateur de particules linéaire long de86 mètres et situé12 mètres sous le sol[23]. Il a été relié à la chaîne des accélérateurs alimentant le LHC au cours du deuxième long arrêt technique de 2019-2022 (LS2)[24],[25].
En 1983, lathéorie électrofaible est presque entièrement confirmée, les forcesfaibles etélectromagnétique sont presque unifiées. C'est également cette année, le 13 septembre, que les premiers travaux du LEP commencent. En 1984,Carlo Rubbia etSimon van der Meer reçoivent en octobre leprix Nobel de physique pour leur découverte concernant laforce électrofaible. À la suite de l'inauguration du LEP en 1989, les prédictions de la théorie sur laforce électrofaible sont confirmées, notamment l'existence de particules chargées (bosons W) dont la masse est d'environ80 fois celle du proton ainsi que d'une particule neutre (leboson Z) dont la masse est d'environ91 fois celle du proton.
Le, des chercheurs annoncent qu'ils ont réussi à piéger pour la première fois des atomes d'antihydrogène dans un champ magnétique[26].
Le, une nouvelle particule est identifiée, dont les propriétés semblent compatibles avec celles duboson de Higgs tel que décrit par la théorie. Des résultats supplémentaires de cette expérience traités au cours de l'année 2013 ont permis de confirmer que cette nouvelle particule élémentaire est un boson de Higgs, dont les propriétés sont jusqu'à présent compatibles avec celles décrites par leModèle standard[27]. Le prix de Nobel de physique est décerné en 2013 aux physiciens théoriciensFrançois Englert etPeter Higgs pour leurs travaux théoriques portant sur cette particule, prédisant avec d'autres son existence dès les années 1960[28],[29],[30].
Le CERN n'exploite pas un seulaccélérateur de particules pour étudier la structure de la matière, mais toute une chaîne d'autres machines (appelés parfois injecteurs)[31]. Les particules qui les traversent successivement sont progressivement accélérées, pour donner ainsi aux particules une énergie de plus en plus importante. Ce complexe comprend actuellement plusieurs accélérateurs linéaires et circulaires.
Les bâtiments qui forment le complexe scientifique sont numérotés sans aucune logique apparente. Par exemple, le bâtiment 73 est coincé entre le bâtiment 238 et 119[32].
Chaîne des accélérateurs de particules autour du LHC
La plus puissante installation du CERN est leLarge Hadron Collider (LHC), qui a été mis en service le (initialement prévu en). Le LHC se trouve tout au bout de la chaîne d'accélérateurs. Dans le cas d'une accélération deprotons, ceux-ci empruntent le chemin suivant :
Tout commence par une source deprotons appelée « duoplasmatron ». Cet appareil, de la taille d'uneboîte de conserve, utilise de l'hydrogène pour produire des protons pourvus d'une énergie initiale de100keV[33] (le noyau de l'hydrogène ordinaire étant constitué d'un proton unique). Ce gaz, provenant d'une bouteille, est injecté à une cadence contrôlée dans la chambre de la source, où il est ionisé pour arracher l'unique électron de chaque atome. Les protons résultants sont alors éjectés par un champ électrique vers l'étape suivante[34].
L'accélérateur linéaire de protons Linac-2, qui fut mis en service en 1978. Constituant (avec la source de protons) le premier maillon de la chaîne, c'est l'installation la plus sollicitée du CERN ; son taux de disponibilité est de 98 à 99 % et sa mise à l'arrêt est prévue vers 2017[35] date à laquelle il sera alors remplacé par leLinac-4. LeLinac-2 accélère les protons jusqu'à un tiers de lavitesse de la lumière[34], ce qui se traduit par une énergie de50MeV par particule[33].
Dans le cadre de l'expérienceALICE le LHC accélère également des ions deplomb, et pour ces derniers le parcours est légèrement différent : produits par une « source ECR »[33] à partir de plomb vaporisé puis ionisé, les ions de plomb subissent leur première accélération dans l'accélérateur linéaire Linac-3, puis ils passent dans le LEIR (Anneau à ions de basse énergie). Ce n'est qu'ensuite que les ions suivent le même parcours que les protons, via le PS, le SPS, et le LHC[31] (la source ECR, le Linac-3 et le LEIR remplacent donc respectivement le duoplasmatron, le Linac-2 et le « Booster »). Au fur et à mesure de leur accélération, ces ions sont dépouillés de leurs électrons en plusieurs étapes, jusqu'à ce qu'il ne reste plus que des noyaux atomiques « nus » qui pourront atteindre une énergie de574TeV chacun (soit2,76TeV parnucléon)[38].
Chaque installation du CERN dispose de un ou plusieurs halls d'expérimentation, disponibles pour les expériences. C'est ainsi que les protons accélérés du Booster, du PS, et du SPS peuvent être dirigés soit vers l'accélérateur suivant dans la chaîne, soit vers des zones expérimentales, le plus souvent à cible fixe (collision entre les faisceaux et une cible afin de produire de nouvelles particules).
Bien que le LHC soit actuellement l'installation la plus importante et la plus médiatisée, d'autres équipements et travaux de recherche sont présents au CERN.
Bâtiment du décélérateur d'antiproton dénomméAntimatter Factory
Ledécélérateur d'antiprotons(en) est un appareil destiné à produire desantiprotons de basse énergie. En effet, lors de leur création (par impact de protons, provenant du PS, sur une cible métallique) les antiprotons ont d'ordinaire une vitesse trop élevée pour pouvoir être exploitables lors de certaines expérimentations, et de plus leurs trajectoires et leurs énergies sont disparates. Le décélérateur d'antiprotons a été construit pour récupérer, contrôler, et enfin ralentir ces particules jusqu'à environ 10 % de lavitesse de la lumière. Pour cela, il utilise des électroaimants et de puissants champs électriques[40]. Une fois « domptés », ces antiprotons peuvent être utilisés dans d'autres expériences :
ACE (Antiproton Cell Experiment) : une expérience qui étudie l'efficacité des antiprotons pour lutter contre lecancer, en injectant un faisceau de ces particules dans des cellules vivantein vitro. L'énergie dégagée, par l'annihilation entre les antiprotons injectés et les protons des noyaux atomiques, va alors détruire les cellules. Le but étant de pouvoir détruire les tumeurs cancéreuses en y projetant des antiprotons, méthode qui serait plus avantageuse que les autresthérapies par faisceau de particules car moins dommageable pour les tissus sains. Les premiers résultats sont prometteurs, mais les applications médicales ne sont pas attendues avant une dizaine d'années[41].
ALPHA[42] etATRAP[43] : le but de ces expériences est d'étudier les différences de propriétés entre la matière et l'antimatière. Pour cela, sont créés des atomes d'antihydrogène (composés d'un antiproton et d'unpositron) et leurs caractéristiques sont alors comparées à celles des atomes d'hydrogène ordinaire.
ASACUSA : cette expérience a le même but que les deux précédentes, mais avec une méthode différente. Plutôt que d'utiliser des atomes d'antihydrogène, les physiciens d'ASACUSA vont produire des configurations nettement plus exotiques, telle que l’hélium antiprotonique, c'est-à-dire des atomes d'hélium dont un des électrons a été remplacé par un antiproton ! (rappel : l'antiproton a une charge électrique négative, comme l'électron). L'avantage de ces configurations est d'être plus facile à produire et d'avoir une plus longue durée de vie que l'antihydrogène[44].
AEgIS : une expérience dont le principal but est de vérifier si les effets de lagravitation sur l'antimatière sont identiques (ou pas) à ceux exercés sur la matière[45]. Plusieurs hypothèses sont envisagées, y compris l'éventualité que pour l'antimatière l'effet de la gravité soit inversé[46].
CERN Axion Solar Telescope (« Télescope pour les axions solaires du CERN») est un instrument destiné à détecter d'hypothétiquesaxions en provenance duSoleil.
Les axions sont des particules que l'on soupçonne de faire partie de lamatière noire, et qui permettraient également d'expliquer l'origine des faibles différences observées entre matière et antimatière, d'où l'intérêt à rechercher leur existence. Le principe de fonctionnement de CAST consiste à positionner un puissant champ magnétique sur le chemin de ces particules, au sein de tubes sous vide correctement orientés, ce qui devrait avoir pour effet de les transformer enrayons X quand elles le traverseront. C'est ce rayonnement X, plus aisément détectable que les axions eux-mêmes, qui est destiné à être enregistré. Si les axions existent, il est probable qu'ils soient présents au centre de notre étoile, c'est pour cette raison que CAST est un télescope qui est pointé en direction du Soleil grâce à une plateforme mobile.
À noter que cette expérience réutilise un certain nombre de composants déjà existants : un prototype d'aimant dipolaire supraconducteur qui fut utilisé pour la conception du LHC, un dispositif de refroidissement cryogénique qui a servi pour l'expérienceDELPHI dugrand collisionneur électron-positron (LEP), et un système de focalisation des rayons X provenant d'un programmespatial. Combinant des techniques issues de l'astronomie et de la physique des particules, CAST est également la seule expérience à ne pas utiliser de faisceau produit par les accélérateurs, mais elle bénéficie cependant des compétences acquises par le CERN[47].
Cosmics Leaving OUtdoor Droplets (CLOUD, « Rayons cosmiques produisant des gouttelettes extérieures ») est prévu pour étudier une possible influence qu'exerceraient lesrayons cosmiques sur la formation desnuages. En effet, ces particules chargées en provenance de l'espace seraient capables de produire de nouveauxaérosols affectant l'épaisseur de la couverture nuageuse. Des mesures par satellites permettent de soupçonner une corrélation entre épaisseur de nuages et intensité des rayons cosmiques. Or, des variations de quelques pourcents de la couverture nuageuse peuvent avoir une influence certaine sur le climat et l'équilibre thermique de notre planète.
CLOUD, encore en phase préparatoire avec un détecteur prototype, consistera en unechambre à brouillard et une « chambre de réaction » dans lesquelles pourront être reconstituées les conditions de pression et de température de n'importe quelle région de l'atmosphère, et qui seront soumises à un flux de particules produit par le PS simulant les rayons cosmiques. De multiples appareils contrôleront et analyseront le contenu de ces chambres. C'est la première fois qu'un accélérateur de particules est mis à contribution pour l'étude de l'atmosphère et du climat. Cette expérience pourrait « considérablement modifier notre compréhension des nuages et du climat »[48].
COmmon Muon and Proton Apparatus for Structure and Spectroscopy, expérience polyvalente, vise à explorer la structure deshadrons (dont font partie le proton et leneutron, constituants de la matière dont nous sommes faits), et donc les liens entre lesgluons et lesquarks qui les composent. Pour cela elle utilise les protons accélérés par leSPS. Les différents objectifs sont entre autres[49] :
étudier l'origine duspin desnucléons, en particulier le rôle joué par les gluons. Pour cela, sont créés desmuons (particules instables, comparables à l'électron mais plus massives) qui sont projetés sur une « cible polarisée » ;
détection deboules de glu, particules hypothétiques uniquement constituées de gluons ;
détermination de la hiérarchie des différents types de hadrons, par création puis utilisation d'un faisceau depions.
CLIC Test Facility 3 est un site d'essai où le CERN prépare l'après-LHC, dans le cadre du projetCompact Linear Collider (CLIC). Son but est la mise au point d'un accélérateur de prochaine génération, le CLIC, qui permettra d'approfondir les découvertes faites par le LHC, mais pour un coût et des dimensions d'installation qui resteraient relativement raisonnables. L'objectif est d'atteindre une énergie comparable à celle obtenue au LHC, mais avec cette fois des collisions électron/positrons (au lieu de collisions protons/protons), ce qui ouvrira de nouvelles perspectives.
Le principe de fonctionnement du futur CLIC est fondé sur un système à deux faisceaux, qui devrait permettre de produire des champs d'accélération plus élevés que les accélérateurs précédents, soit de l'ordre de 100 à 150 MV/m. Le faisceau principal sera accéléré grâce à une puissanceradiofréquence, laquelle sera produite par un faisceau parallèle d'électrons à plus faible énergie mais avec une forte intensité. C'est la décélération de ce « faisceau d'entraînement » qui fournira l'énergie utilisée pour l'accélération du faisceau principal[50],[51].On pourrait comparer ce principe à celui d'untransformateur électrique qui produirait un courant électrique haute tension à partir d'un courant de plus basse tension, mais au prix d'une baisse d'intensité.
L'expérienceDImeson Relativistic Atomic Complex (« Complexe atomique relativiste de di-mésons ») vise à mieux comprendre l'interaction forte qui lie lesquarks entre eux, constituant ainsi leshadrons. Plus précisément, il s'agit de tester le comportement de cette force sur de « grandes » distances et à basse énergie.
Pour cela, DIRAC étudie la désintégration d'atomes pioniques (oupioniums, c'est-à-dire des assemblages instables depions positifs et négatifs), ou bien d'atomes « [πK] » (constitués chacun d'un pion et d'unkaon de charges opposées, eux aussi instables). Ladurée de vie de ces assemblages exotiques, produits grâce au faisceau de protons du PS, est « mesurée à un niveau de précision jamais atteint jusqu'ici »[52],[53].
Isotope Separator On Line Detector (ISOLDE, « séparateur d'isotopes en ligne(en) »), qualifiée d"« usine alchimique », est une installation qui permet la production et l'étude d'un grand nombre d'isotopes instables, dont certains ont unepériode radioactive de quelques millisecondes seulement. Ces isotopes sont produits par impact de protons, provenant de l'injecteur du PS, sur des cibles de compositions variées (de l'hélium au radium). Ils sont séparés par masse, puis accélérés pour pouvoir être ensuite étudiés. Nombre de ces expériences utilisent un détecteur derayons gamma appelé « Miniball ».
Une équipe de ISOLDE a observé un effet de chaleur anormal (AHE) lors d'une expérimentation d'électrolyse avec une électrode en palladium, connue depuis 1989, et l'expose lors d'un séminaire[55].
« L'usine à neutrons », en utilisant les protons provenant du PS, est destiné à produire desneutrons avec des flux à haute intensité et une vaste gamme d'énergies. L'installation, dite « de mesure du temps de vol des neutrons », permet une étude précise des processus où ces particules sont impliquées. Les résultats obtenus intéressent diverses recherches où les flux de neutrons jouent un rôle : l'astrophysique nucléaire (en particulier ce qui concerne l'évolution stellaire et lessupernovas) ; la destruction dedéchets radioactifs ; ou le traitement detumeurs par faisceaux de particules[56].
Depuis son inauguration, le CERN a utilisé plusieursaccélérateurs, qui pour certains ont été démantelés pour en accueillir d'autres plus efficaces ou mieux adaptés aux recherches en cours. Ces accélérateurs sont :
Linac1, le premier accélérateur linéaire du CERN, mis en service en 1959 et remplacé par le Linac3 en 1993 ;
CESAR, un « anneau de stockage et d'accumulation d'électrons », achevé en 1963 et démantelé en 1968. La mise en service de CESAR fut difficile, mais celui-ci a permis d'acquérir un savoir-faire utile pour la mise au point des futurscollisionneurs du CERN[57] ;
lesIntersecting Storage Rings (ISR, Anneaux de stockage à intersections), construits de 1966 à 1971 et en service jusqu'en 1984. Ils constituèrent le tout premier collisionneur de protons, lequel fut également le premier accélérateur de particule à utiliser desélectroaimants supraconducteurs (à partir de)[57], puis le premier à produire des collisions entre protons et antiprotons (en)[58] ;
leLarge Electron Positron (LEP), en service de 1989 à 2000 pour être remplacé par le LHC. Le LEP était à son époque le plus grand accélérateur du CERN, et faisait entrer en collision desélectrons et despositrons ;
leLow Energy Antiproton Ring (LEAR, Anneau d'antiprotons de basse énergie), mis en service en 1982, qui a permis d'assembler les premiers atomes d'antimatière en 1995. Il fut mis à l'arrêt en 1996, pour être transformé enLEIR(en) (Anneau d'ions de basse énergie) destiné à alimenter le LHC en ions lourds[57] ;
le Linac-2, accélérateur de protons de 36 mètres de long[59] mis en service en 1978 et arrêté en 2018[60] pour être remplacé par le Linac-4. Il constituait (avec la source de protons) le premier maillon de la chaîne des accélérateurs du LHC. Le Linac-2 accélérait les protons jusqu'à un tiers de lavitesse de la lumière, ce qui se traduit par une énergie de50MeV par particule[59].
CNGS :Cern Neutrinos to Gran Sasso (CERN Neutrinos to Gran Sasso). Cette installation produit un faisceau deneutrinos qui est dirigé vers un laboratoire situé enItalie et distant de 732 kilomètres. Pour cela, des protons accélérés par leSPS sont envoyés sur une cible engraphite. Les collisions résultantes produisent des particules instables appeléespions etkaons, qui sont focalisées, par un dispositif magnétique, dans un tunnel sousvide long d'un kilomètre où elles vont se désintégrer. Ces désintégrations générèrent à leur tour desmuons et, surtout, des neutrinos. Un blindage puis la roche au-delà de l'extrémité du tunnel absorbent toutes les particules (les muons, les pions et kaons non désintégrés, ou les protons qui ont traversé la cible) autres que les neutrinos, lesquels sont ainsi les seuls à continuer leur route. L'ensemble est orienté de telle manière que le faisceau de neutrinos résultant soit dirigé vers un laboratoire italien installé dans leGran Sasso, où il sera analysé par des instruments construits à cet effet. Le but de tout ceci est d'étudier le phénomène d'oscillation de neutrinos : En effet, il existe trois types (appelés saveurs) de neutrinos, et il est aujourd'hui acquis que ces particules « oscillent » entre ces trois saveurs, se transformant de l'une en l'autre. CNGS permet l'étude de ces oscillations car les neutrinos produits sont exclusivement de saveurmuonique, alors qu'au niveau du Gran Sasso, et après un parcours de 732 kmà l'intérieur de la Terre, certains se seront transformés en d'autres saveurs, ce qui pourra être enregistré[61]. Les premiers faisceaux de neutrinos furent émis durant l'été 2006. Étant donné la faible interactivité des neutrinos et la rareté de leurs oscillations, des années d'expérimentation et de collecte de données seront nécessaires. En fut observé le premier événement correspondant à l'oscillation d'un des neutrinos produits par CNGS. Cette installation a été arrêtée en après six ans de service. Les tunnels du CERN utilisés pour le CNGS vont maintenant servir à accueillir l'expérience AWAKE (Advanced WAKefield Experiment)[62] alimenté en protons par le SPS, elle a commencé à fonctionner fin 2016[63].
La surveillance de l'environnement au CERN est effectuée d'une part par l'unité HSE (Health & Safety and Environmental protection) et d'autre part par deux organisme externes : l'Office fédéral de la santé publique (Suisse) et l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (France)[64]. L'OFSP a lancé un programme de surveillance point zéro du CERN qui vise à obtenir un point de référence de la situation radiologique aux alentours du CERN avant la mise en service duLarge Hadron Collider[65].
Un des deux premiers routeurs mis en service au CERN.
Les différents accélérateurs présents dans la chaîne génèrent un volume de données qui a nécessité la formation des physiciens aux problématiques debig data et des logiques algorithmiques propres à l'informatique pour mener à bien leurs expériences[66].
Où la toile est née, plaque commémorant la création duWorld Wide Web dans les locaux du CERN.Installation informatique en 2005 (la Grille).
Le CERN a une place importante dans le développement de certaines technologies informatiques. La plus connue est certainement leWorld Wide Web (à travers le développement duprotocole HTTP et dulangage HTML), qui est issue du projetENQUIRE du début des années 1980, développé parTim Berners-Lee etRobert Cailliau. Ce n'est qu'en 1989 que le projet duWorld Wide Web voit le jour, toujours développé par ces deux personnes et aidées par plusieurs autres. L'objectif duWorld Wide Web est de faciliter l'échange d'informations entre les chercheurs des équipes internationales menant leurs expériences au CERN. D'ailleurs, un outil de gestion de documents électroniques utilisant le Web, l'Engineering and Equipment Data Management Service, est mis en place dans ce but[67].
Le premiersite web est mis en service en 1991, et le marque le passage officiel duWorld Wide Web dans le domaine public[68].
Le CERN participe à l'introduction des technologies liées àInternet enEurope, avec la mise en service de deuxrouteursCisco au CERN en 1987, qui sont vraisemblablement les premiers à être introduits sur le continent européen[69].
L'organisation européenne développe également les technologies liées auxgrilles de calcul, pour permettre de traiter la quantité importante d'informations produites par les différentes expériences de physique réalisées, tout en limitant l'investissement en calculateurs.Enabling Grids for e-Science (EGEE) est le projet le plus avancé actuellement et a pour but notamment de traiter les données générées par les expériences du LHC[70]. Cette grille, à l'échelle mondiale, utilise plus de 41 000 processeurs appartenant à plus de240 organisations réparties dans45 pays[71].
En janvier 2003, une collaboration avec des entreprises privées du secteur de l'informatique, commeHewlett-Packard,Intel ou encoreOracle a été mise en place à travers le projetOpenLab[72].
Le 5 mars 2024 a été officiellement inauguré l’Open Quantum Institute (OQI), uninstitut quantique[Quoi ?]intégré dans la structure[pas clair] du CERN[73],[74].
Le CERN abrite un entrepôt d'archives et de données ouvertes,Zenodo. Il a été lancé en 2013 sous le nom OpenAIRE Orphan Record Repository, avant d'être renommé en 2015. Il a été fondé dans le cadre du projet européen OpenAIRE cofinancé par lacommission européenne[75].
Les grandes lignes de l'organisation, que ce soit au niveau scientifique, technique ou encore administratif sont définies par le Conseil du CERN. Les pays membres sont représentés au Conseil par deux personnes, l'une représentant le gouvernement et l'autre lacommunauté scientifique de son pays. Chaque pays membre a une seule voix et les décisions se prennent à la majorité simple.
Le Directeur général, par tradition un scientifique, est nommé par le Conseil pour une durée de cinq ans et entre en fonction le1er janvier. Voici la liste des directeurs généraux depuis la création du CERN[76] :
En 2015 le CERN employait 3 197 personnes à plein temps. C'est le plus grand centre de recherches enphysique des hautes énergies du monde. En outre, il accueille environ 13 000 scientifiques (représentant500 universités et plus de100 nations, soit près de la moitié de la communauté mondiale dans ce domaine) qui se succèdent pour effectuer leurs expériences au CERN.
En, lesÉtats membres du CERN sont au nombre de 23. En tant que contributeurs au budget de l'organisation, ils disposent d'un siège et d'une voix au Conseil qui définit tous les grands programmes[78].
Le statut d'observateur permet à son détenteur d'assister aux réunions du conseil et de disposer de toutes les documentations de celles-ci, sans toutefois y avoir droit de vote. Ces pays et organisations participent aux coûts de fonctionnement des expériences auxquelles ils participent.
Le Portail de la science est le centre d'éducation et de communication de la science du CERN. Situé à côté du site de Meyrin côté suisse, ce projet a pour objectif d'enrichir et de diversifier les activités proposées aux visiteurs, dans le but de satisfaire la mission d'éducation de l'organisation. Il sert également d'accueil aux visiteurs et remplace les expositions situées jusqu'alors dans leMicrocosm et le Globe.
Le complexe du Portail de la science se compose de cinq bâtiments, dont deux tubulaires, évoquant l'architecture des accélérateurs de particules. Les bâtiments sont reliés par une passerelle continue traversant la route de Meyrin. Ils abritent trois espaces d'expositions (découvrir le CERN, les grandes questions de l’Univers et le mystère duBig Bang, lesmondes quantiques), un laboratoire pour l'organisation d'ateliers, et un auditorium modulable pouvant accueillir jusqu'à900 personnes.
L'ouvrage a été conçu par l'agenceRenzo Piano Building Workshop à partir de 2018. Le portail de la science a été inauguré le.
Portail de la Science, avec le Globe en arrière-plan.
Le coût de cette structure s'est élevé à environ 100 millions de francs suisses, entièrement financés par des dons. Le CERN estime qu'il devrait accueillir jusqu'à 500 000 visiteurs par an[85].
Le CERN a également de nombreux programmes pour les enseignants et éducateurs scientifiques[87], de même que pour le grand public.
Entre 1965 et 1997,Rafel Carreras, qui est responsable du programme d'enseignement général, anime deux séries d'événements destinées au grand public : « Science pour tous », une conférence hebdomadaire, et chaque mois en soirée la conférence « Les sciences aujourd’hui ». Ouverte à tous, celle-ci attire un large public de la région genevoise. Lors de ces conférences, il explique et commente des articles scientifiques récents sur des sujets liés à l'astrophysique, la physique, la biologie et les sciences humaines[88].
Le CERN organise régulièrement des visites guidées de ses installations, telle que l'anciensynchrocyclotron et l'expérienceATLAS[89].
Le CERN est également desservi par laligne 18 du tramway de Genève desTransports publics genevois (TPG). L'arrêt de tramway, situé sur le territoire suisse, porte le même nom que l'organisation et constitue le terminus nord de la ligne. Un prolongement de la ligne sur le territoire français était en projet[90] mais a finalement été abandonné à la suite de l'annonce de la Suisse du non-financement de cette extension[91].
↑Guy Doyen, "27 janvier 1971 : Premières collisions Proton-Proton", CERN, (lire en ligne).
↑ab etcPierre Monnier, « 70 ans du Cern: les 7 découvertes majeures de l'organisation européenne de recherche nucléaire »,Géo le 29 septembre 2024 (lire en ligne).
↑abc etdCERN50e anniversaire ; Un jubilé en images (datant de 2004). Voir les dates 1952 pour le Synchrocyclotron, 1963 pour CESAR, 1971 pour les ISR, et 1992 & 1996 pour le LEAR (consulté en septembre 2009).
↑P. Vojtyla et D. Wittekind, « Rejets et environnement du CERN »,Radioactivité de l'environnement et doses de rayonnement en Suisse, 2005,chapitre 8.5,p. 108-112.