Le genrePongo comprend troistaxons distincts qui se différencient difficilement par leur morphologie mais qui occupent desaires de répartition différentes. Lesorangs-outans de Bornéo sont légèrement plus petits que les deux autres espèces,orangs-outans de Sumatra etorangs-outans de Tapanuli, qui se répartissent toutes les deux à Sumatra, au nord et au sud dulac Toba. Ce sont les seuls grands singes à ne pas vivre en groupe. Les mâles comme les femelles sont solitaires, mais ces dernières peuvent vivre accompagnées de leur petit, qui reste avec elles pendant ses premières années de vie.
Lenom vernaculaire « orang-outan » provient de l'indonésien et dumalais « orang hutan », qui signifie « personne de la forêt » (ou « des bois »)[4],[5]. Le pluriel du mot en français demeure sujet à discussion[4], la forme traditionnelle du pluriel comprenant deux « s »[6] (les « orangs-outans »[7] ou « orangs-outangs »[8]), tandis que lesrectifications orthographiques de 1990 préconisent de toujours porter la marque du pluriel seulement en fin de mot composé (les « orang-outans »). Le terme « jocko » était utilisé autrefois en français pour désigner cette espèce, mais il est considéré comme vieilli[9].
Lenom scientifique dugenre « Pongo » provient dukikongo (langue d'Afrique centrale) « mpongi »[10],[11], un mot qui servait initialement à désigner les gorilles dans cette région africaine, repris en anglais parAndrew Battel, puis en français parBuffon[12],[13] qui pensait alors que les gorilles et les orangs-outans pouvaient ne former qu'une seule espèce[14].
Les orangs-outans peuvent vivre de trente à quarante ans dans la nature.Nénette, une femelle née vers 1969 àBornéo et hébergée à laménagerie du Jardin des plantes deParis, a atteint l'âge de 55 ans en 2024.
Le génome des orangs-outans a étéséquencé en[15]. Il fait apparaitre une similarité d'environ 97 % avec le génome humain[16], c'est-à-dire environ 3 % de différences génétiques avec l'espèce humaine[17]. Le premier séquençage du génome était basé sur un individu femelle captif appelé Susie[15].
Les chercheurs ont également publié des séquençages moins complets de dix orangs-outans sauvages, cinq deBornéo et cinq deSumatra. Il a été constaté que la diversité génétique était plus faible chez lesorangs-outans de Bornéo (Pongo pygmaeus) que chez ceux deSumatra (Pongo abelii), bien que ceux de Bornéo soient six ou sept fois plus nombreux que ceux de Sumatra.
Les chercheurs espèrent que ces données pourront aider à sauver les grands singes en voie de disparition et qu'elles s'avéreront également utiles pour une meilleure compréhension des maladies génétiques humaines[15].
Les orangs-outans sont parmi les plus arboricoles des grands singes. Ils passent la majeure partie de leur temps dans lesarbres, à la recherche de nourriture. Chaque nuit, ils fabriquent un nouveau nid perché entre 12 et18 mètres au-dessus du sol[réf. nécessaire], tout comme leschimpanzés, qui sont toutefois plus terrestres durant la journée.
L'animal se nourrit la plupart du temps de fruits, de jeunes pousses, d'écorce, de petits vertébrés, d'œufs d'oiseaux et d'insectes. Voilà pourquoiAnne Russon(en), qui étudie l'intelligence desgrands singes à l'université York, s'est étonnée d'observer une nouvelle activité des orangs-outans vivant autrefois en captivité et relâchés à Bornéo : la pêche.
Destinés à tisser des liens et non à se reproduire, des comportements sexuels entre mâles avaient parfois été observés dans les zoos. On les a souvent d'abord expliqués par la captivité et/ou l'absence de femelle dans un groupe. Mais comme pour de nombreux autres primates, de tels comportements sont aussi observés en forêt, dans la nature, chez des orangs-outans sauvages. Ce fut le cas par exemple àSumatra, lors d'études portant sur deux lieux et populations différentes d'Orangs-outans de Sumatra(Pongo abelii)[18]. Ce comportement ne découle donc pas d'une privation de liberté en zoo, ni du contact avec des humains. Les chercheurs estiment généralement qu'il s'agit de comportementsagonistiques (établissant des relations dedominance et/ou de rivalité) voire, pour partie, de jeux lors desquels les jeunes apprennent ou testent leursexualité.
Bien que les orangs-outans soient généralement paisibles, des agressions entre individus peuvent arriver dans le cadre des rivalités territoriales ou sexuelles. Les mâles nonmûrs courtisent et tentent de mimer des accouplements avec les femelles immatures, qui fuient ces avances : ces « jeux » peuvent parfois devenir agressifs. Préférant s'accoupler avec les mâles mûrs, les femelles adultes repoussent facilement les jeunes prétendants. Ces interactions sociales s'établissent surtout en captivité ou en groupe auprès des installations humaines de recueil des jeunes orangs-outans abandonnés, tandis que, dans la vie sauvage, les rencontres sont beaucoup plus rares et les possibilités de fuite plus larges.
Le mâle n'est sexuellement mûr qu'entre 7 et 10 ans, âge auquel il commence à se reproduire. L'orang-outan n'a pas desaison des amours privilégiée. Lagestation dure 245 jours. La mère donne naissance à un seul petit à la fois. Les jumeaux sont rares. Les naissances sont espacées, avec un intervalle d'environ huit ans en moyenne. Les jeunes orangs-outans voyagent accrochés au dos ou au ventre de leur mère pendant plus de deux ans. Pendant un à deux ans après la naissance, la femelle est tolérée sur le territoire du mâle qui l'a fécondée. Les femelles accordent une grande attention aux jeunes.
En 2024, un mâleorang-outan de Sumatra est vu en train de mâcher les feuilles d'une plante réputée pour ses propriétés médicinales,Fibraurea tinctoria, puis d'en récupérer le jus pour soigner une blessure ouverte sur son visage, avant d'appliquer les feuilles mâchées par-dessus. Au bout de quelques jours, la blessure était refermée. Cette liane est connue pour ses propriétés antibactériennes, anti-inflammatoires et analgésiques. C'est la première fois qu'un animal sauvage est observé en train d'utiliser intentionnellement uneplante médicinale pour soigner une plaie ouverte[19],[20].
Comme les autresgrands singes, les orangs-outans sont remarquablement intelligents.
Au milieu des années 1990, une population d'orangs-outans a été observée utilisant régulièrement desoutils pour s'alimenter[21],[22]. Cela avait déjà été montré auparavant chez deschimpanzés parJane Goodall dans les années 1960[23],[24].
Ils ont aussi, comme les chimpanzés, les gorilles et peut-être les macaques crabiers, les macaques de Tonkeans et les capucins, la faculté de se reconnaître dans un miroir[25].
Un article paru dansScience en 2003 apporte des preuves de l'existence d'une culture propre aux orangs-outans[26].
Plus récemment, une expérience conduite par des chercheurs allemands de l'Institut Max-Planck d'anthropologie évolutionniste de Leipzig a permis de mettre en évidence les capacités intellectuelles des orangs-outans. Des chercheurs ont présenté à cinq orangs-outans femelles de 7, 11, 17 et 32 ans, venant d'un zoo local, une grossecacahuète flottant sur de l'eau, dans une longue éprouvette verticale transparente fixée à une paroi. Le niveau d'eau était trop bas pour que les singes puissent attraper la cacahuète avec les doigts. Un récipient d'eau était mis à leur disposition dans la pièce. Les orangs-outans ont rapidement compris qu'en prenant de l'eau dans leur bouche pour la recracher dans l'éprouvette, ils feraient monter le niveau de l'eau et pourraient attraper la cacahuète et la manger. Il a fallu 9 minutes en moyenne pour qu'ils le fassent ; à la dixième expérience, 30 secondes leur suffisaient pour attraper et manger la friandise. Aucune autre méthode ne permettait de récupérer et manger la cacahuète[27].
Plus que les expériences en zoo ou en laboratoire, Christophe Boesch suggère de s'intéresser à la vie des primates dans leur milieu d'origine[28]. Dans le cas des orangs-outans, la culture outillée a été détaillée par Carel van Schaiket al. Mais une culture animale comprend également des traits comportementaux partagés, une communication efficiente, des conditions de transmission[29]. Les travaux sur l'intelligence et la culture ne se posent plus de façon anthropocentrique comme dans le cas du langage chezChantek(en) (on a fait apprendre lalangue des signes à l'orang-outan Chantek, au chimpanzéWashoe, au bonoboKanzi et au gorilleKoko), mais sur la possibilité de conserver des cultures non humaines dans les centres de réintroduction et les parcs zoologiques[30].
Aire de répartition du genre en 2005 (en réduction rapide depuis cette date).
La date de la divergence desPonginae et desHomininae est estimée à 15,5 millions d'années, ce qui les place à un point médian dans l'évolution desHominoidea. Ceux-ci auraient divergé desCercopithecoidea il y a environ 25 millions d'années[17],[33].
Pongo tapanuliensis(Nurcahyoet al., 2017),Orang-outan de Tapanuli : espèce endémique de la forêt de Batang Toru dans le nord deSumatra, décrite en 2017[35].
Mais d'autres espèces éteintes sont connues, quoique certaines formes fossiles soient parfois considérées plutôt comme des sous-espèces. SelonBioLib(23 avril 2018)[36], il s'agit de :
Plantation depalmiers à huile en Malaisie. Cette culture menace gravement l'habitat des orangs-outans.Orangs-outans gardés comme animaux de compagnie (débutXXe siècle).
La survie des orangs-outans dans la nature est grandement menacée par le développement des activités humaines et en particulier ladéforestation, récemment encouragée par les sylvicultures industrielles (exploitation ou surexploitation du bois), le développement demines et de cultures destinées à produire desbiocarburants[42], et l'agriculture (en particulier pour la production d'huile de palme[43] transformée ensuite enbiodiesel).
La plupart de ces activités responsables de l'accélération de la destruction de leurhabitat sont illégales. Cela touche également lesparcs nationaux officiellement hors d'atteinte desbûcherons, des mineurs et du développement des cultures. Certains jeunes orangs-outans sont capturés pour être illégalement vendus, les braconniers tuent souvent la mère pour voler son bébé.Taipei, la capitale deTaïwan, compte ainsi beaucoup d'orangs-outans. Aumarché noir, un petit singe se vend aisément. En dix ans, un millier de singes sont ainsi devenus des bêtes de cirque ou de compagnie. Or, sur six à huit petits capturés, un seul survit au choc et au voyage après que sa mère a été abattue par les braconniers. L'espèce est également menacée par lebraconnage alimentant le marché de la viande sauvage et des animaux de compagnie, et les incendies de forêts, souvent volontaires.
Les orangs-outans sont aussi menacés par leszoonoses, maladies transmises par les humains. En s'approchant pour faire des photos ou pour leur donner à mange, les humains peuvent leur transmettre des maladies, comme la Covid-19[44].
Entre 1999 et 2015, en 16 ans, la moitié de la population des orangs-outans de Bornéo a disparu[45].
Seul un tiers de la population de l'État deSabah se trouve dans des zones protégées telles que desparcs nationaux etréserves naturelles, ce qui laisse deux tiers des animaux sans protection et donc plus vulnérables encore.
LeWorld Wildlife Fund (WWF) travaille en collaboration avec les autorités et d'autres organisations pour laconservation de la nature : son but est d'étendre la superficie desaires protégées et d'en créer de nouvelles, où la chasse et l'exploitation forestière seront interdites. Le WWF a également aidé les autorités à faire appliquer les lois qui limitent sévèrement le commerce des orangs-outangs vivants et des produits dérivés de ces primates. Lorsqu'un orang-outang est confisqué à un trafiquant, il est confié à un centre où il est réhabitué à la vie sauvage avant d'être relâché dans un site protégé.
dansLa Planète des singes dePierre Boulle (1963), ainsi que dans plusieurs de ses adaptations au cinéma, Zaïus est l'orang-outan ministre de la science et gardien de la foi ;
Mettekoe, un géant folklorique belge engagé dans la protection des orangs-outans.
Leshōjō, est une créature dufolklore japonais, très présente dans le théâtre denō, présenté comme un esprit marin au visage rouge amateur d’alcool. Il s’inspirerait d’une pratique présente en Asie du Sud-Est consistant à enivrer un orang-outan pour lui extraire son sang servant à la teinture rouge des vêtements.
Mettekoe lors de sa première sortie àPetit-Enghien en septembre 2022
↑Frédéric Louchart,Que faire de l'orang-outan ? : reconstruire la nature à Nyaru Menteng, Bornéo, Indonésie, Paris, Harmattan,, 212 p.(ISBN978-2-343-11723-2,lire en ligne).
↑A.Nater, M. P.Mattle-Greminger, A.Nurcahyo, M. G.Nowak, M. deManuel, T.Desai, C.Groves, M.Pybus et T. B.Sonay, « Morphometric, Behavioral, and Genomic Evidence for a New Orangutan Species »,Current Biology,(DOI10.1016/j.cub.2017.09.047).