Uneonde de tempête, uneinondation de tempête, uneonde de marée, unemarée de tempête, ou encoremarée cyclonique, est lerehaussement important duniveau de la mer sur lelittoral causé par lesvents d'une importantedépression qui pousse sur la surface de l'océan ou d'un lac.
Il en résulte une hausse locale forte et rapide du niveau de l'eau.Elle peut être accentuée par la dépression centrale du système — causant unpompage d'Ekman — ainsi que la forme du fond marin. En général, ce phénomène est associé auxcyclones tropicaux, mais va également se produire avec les fortesdépressions des latitudes moyennes, surtout celles en développement rapide (lesbombes) hivernal.
Les ondes de tempête sont particulièrement dangereuses quand elles surviennent en conjonction avec lamarée haute. On a alors une addition du niveau des eaux, provoquant dessubmersions marines et desinondations du littoral. La prévision du niveau qu'atteindra la marée de tempête (et de la durée d'inondation) sont donc dépendantes de la synchronisation de l'arrivée des deux phénomènes.
Diagramme illustrant la formation d'une onde de tempête par un cyclone tropical
De manière générale, au moins cinq facteurs influencent les ondes de tempête[1] :
Le vent : en se déplaçant, l'air agit par friction sur la surface de la mer. Cet effet crée une accumulation d'eau dans les régions sous le vent, similaire à celui qui crée uneffet de seiche, qui est inversement proportionnel à la profondeur[1]. Le vent est le principal facteur dans la création des ondes de tempête[2], et plus il s'exerce sur une grande distance, plus l'effet sera important.
La pression centrale : la pression étant plus faible au centre de la dépression, la colonne d'air exerce un poids moindre sur la mer à cet endroit qu'à l'extérieur de la dépression. Pour égaliser les pressions dans l'eau, le niveau de la mer sera plus élevé au centre de la dépression comme le mercure montant dans unbaromètre. Une règle empirique simple dit que pour estimer le rôle de la basse pression dans la formation d'une onde de tempête : une élévation supérieure de 1 cm à celle prévue normalement en fonction de la marée pour chaquehectopascal en dessous de la pression atmosphérique normale de 1013 hectopascals (hPa)[2]. Par exemple, dans le cas de l'ouragan Juan, la variation due à sa pression centrale de974hPa était de 39 cm des 150 cm notés de l'onde de tempête àHalifax (Canada)[2].
La rotation de la Terre : les vents tournant autour d'une dépression déplacent la surface de la mer. Laforce de Coriolis dévie ce mouvement vers l'extérieur d'une dépression, ce qui crée une onde partransport d'Ekman qui s'ajoute à celle créée par la pression.
La profondeur du fond marin : l'onde qui arrive de l'océan déplace un certain volume d'eau. Lorsqu'elle entre dans une zone où le fond marin s'élève ou dans une baie, le volume restant le même, la hauteur du niveau de la mer augmente sous forme de marée et de vagues. Plus la pente est raide, moins l'onde de tempête entrera dans les terres mais elle créera des vagues importantes. Inversement, une pente douce du plateau continental permettra à la mer d'entrer plus loin de la côte mais les vagues seront plus faibles[3].
L'onde de marée : la coïncidence entre l'arrivée de la marée et celle de l'onde de tempête augmente considérablement la hauteur du niveau de la mer. S'il s'agit d'unemarée de vive-eau, l'effet est encore plus grand.
Des structures rigides construites (digues,jetées portuaires) peuvent localement aussi amplifier les effets de certaines tempête en interférant avec l'onde de tempête[4]. L'analysea posteriori de tempêtes récentes, a permis de mieux comprendre ce phénomène : ces structures peuvent par exemple modifier les courants et/ou letransit sédimentaire et conduire à un abaissement ou à une disparition desplages situées devant elles et ainsi réduire la« capacité naturelle des systèmes côtiers à absorber l’énergie des vagues de tempête » et augmenter les risques desubmersion marine côtière.
De nombreux cas anciens d'invasion brutale de la mer sont documentés, dont la plupart ne semblent pas être de vraistsunamis (on parle parfois de« tsunamis météorologiques » pour les désigner).
Les Pays-Bas et l'Allemagne ont notamment retenu les épisodes (dits« Mandränke »,« Mandrenke » ou« Grote Mandränke » enhaut allemand) d'inondations dévastatrices survenues en1362 et1634, qui ont bouleversé le trait de côte de lamer du Nord et localement (comme auSchleswig-Holstein) du côté de lamer Baltique. L'inondation catastrophique de 1953 est également le résultat d'une onde de tempête.
Ledelta du Mississippi perd environ un demi hectare par heure depuis lesannées 1930, de manière aggravée ces dernières décennies, en raison de la conjonction d'ondes de tempêtes, d'une fragilisation ou destruction desécosystèmes littoraux et dezones humides, et d'une subsidence du sol qui semble en partie ou grande partie due à l'activité pétrogazière.
Destruction des constructions établies sur la côte duNew Jersey, États-Unis, par l'ouragan Sandy et sontsunami météorologique.
Le long d’unlittoral exposé, les ondes de tempête sont souvent suivies de hautesvagues provoquant dessubmersions marines. Se trouver près du littoral pendant l'inondation causée par une onde de tempête est dangereux car ces vagues apparaissent rapidement, sans laisser beaucoup de temps de préparation. Les résidents, surtout ceux qui vivent dans les terres basses du littoral, doivent prendre des précautions et se préparer à affronter ce phénomène naturel.
Une grande partie des victimes tuées par un cyclone tropical le sont du fait de l'onde de tempête.Par exemple, le, l'ouragan de Galveston (decatégorie 4) poussait une onde de tempête qui a submergé l'île de Galveston et noyé de 6 000 à 12 000 personnes.
Legolfe du Bengale est particulièrement propice à ces marées, étant dans une zone active en tempêtes tropicales et ayant une forme d'entonnoir peu profond. Avec 142 ondes d'intensité modérée à violente, notées entre1582 et1991, certaines ayant plus de huit mètres de haut, on y déplore des centaines de milliers de victimes durant cette période[7]. Elle porte d'ailleurs le surnom decapitale des ondes de tempête et la plus grande perte de vie causée par ce phénomène y est survenue en 1970 avec lecyclone de Bhola[8].
Outre desenjeux évidents de sécurité des biens et des personnes et desécurité maritime, dans lecontexte d'un probableréchauffement climatique associé à unemontée des océans, des enjeux deconnaissance scientifique et deprospective existent, ainsi que des enjeux économiques à court, moyen et long termes (par exemple en France, latempête Martin (26 décembre 1999) etXynthia (26 février 2010) ont été sources de dégâts importants (plusieurs milliards d’euros)[9] et en Louisiane, les ondes de tempêtes tropicales sont de moins en moins freinées par la rugosité du paysage en raison de la submersion en cours d'une partie dudelta du Mississippi. Mieux comprendre les effets des ondes de tempête pourrait peut-être aussi aider à améliorer larésilience écologique des milieux touchés.
Modélisation de la formation et du déplacement de l'onde de tempête par d'un cyclone tropical (Golfe du Mexique)
Les progrès de la recherche et en particulier de la modélisation permettent de mieux prévoir le moment, le lieu et la gravité probable des effets des ondes de tempête, en particulier les risques de submersion marine, de destruction d'aménagements ou de constructions portuaires ou littorales et le risque d'érosion du trait de côte[9]. Ces effets, qui ont souvent plusieurs causes, sont plus marqués sur les côtes sédimentaires là où les effets des houles et/ou des marées sont les plus marqués[9]. La modélisation devrait aussi permettre à l'avenir de mieux proportionner, concevoir, disposer les aménagements de lutte contre l'érosion ou d'atténuation de l'érosion littorale, voire de les supprimer quand ils se montrent inutiles ou sources d'effets pervers.Les modèles peuvent aussi intégrer mieux l'augmentation du niveau marin, la diminution des apports sédimentaires fluviatiles (ou parfois littoraux) quand elle existe.
Pour lescyclones tropicaux, et uniquement pour ceux-ci, une formule mathématique rapide a été élaborée pour estimer rapidement la hauteur potentielle d'une onde de tempête[10] :.
Dans cette formule, est le niveau de l'onde de tempête en mètre. est la différence de pression avec la pression minimale telle que. est le « shoaling factor », facteur de correction fonction de labathymétrie des lieux, qui augmente avec des fonds plats et peu profonds. Finalement, est le facteur de correction du déplacement de l'ouragan, qui augmente avec la vitesse de déplacement de l'ouragan.
Cette formule met en évidence le fait que les ondes de tempête sont les plus hautes quand l'ouragan se déplace rapidement en eau peu profonde. Un modèle plus exact est utilisé par leNational Hurricane Center, leSLOSH (Sea, Lake, and Overland Surges from Hurricanes)[11],[12].
Pour lescyclones extratropicaux, ou dépressions des latitudes moyennes, les mêmes phénomènes sont mis en jeu et de la même manière. Cependant, la structure de ces systèmes météorologiques est radicalement différente, et est en particulier asymétrique. D'autres modèles doivent donc être utilisés.
Une règle empirique permet d'évaluer lasurcote du niveau de la mer dans une zone de basse pression par la formation d'une onde de tempête : une élévation supérieure de 1 cm à celle prévue normalement en fonction de la marée pour chaquehectopascal en dessous de la pression atmosphérique normale de1 013hPa[2]. Cette évaluation est la combinaison des cinq phénomènes ci-dessus.
Les services météorologiques émettent desalertes lorsque le potentiel d'onde de tempête est présent. Les dépressions importantes et les cyclones tropicaux sont suivis et le calcul des différents effets est fait pour estimer ou anticiper la hauteur de la marée qui déferlera sur les côtes. Des pays comme lesPays-Bas (particulièrement vulnérables)[13], lesÉtats-Unis d'Amérique[14], leCanada, leRoyaume-Uni[15] et laFrance[16], qui ont d'importantes zones côtières, ont un tel système. Plus particulièrement pour lesÉtats-Unis, leNational Hurricane Center mène depuis la fin des années 2000 une réflexion pour intégrer directement dans ses avis publics une alerte aux ondes de tempête[17]. Une étape a été de retirer l'association faite dans l'Échelle de Saffir-Simpson entre les vents et l'onde de tempête, afin d'avoir une échelle plus spécifique aux ondes de tempête[18].
En cas d'onde de tempête, l’intérieur d'un édifice plus élevé que la hauteur prévue de l'onde offre une protection des eaux montantes. S'il est de construction solide, les personnes qui se réfugient dans les étages supérieurs sont à l’abri des vents et des eaux pour autant qu'ils se tiennent loin des fenêtres. Conduire dans les eaux d’inondation peut devenir dangereux car le courant emporte tout sur son passage.
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