LeNKVD (enrusse :НКВД, l'abréviation deНародный комиссариат внутренних дел,Narodniï komissariat vnoutrennikh diel ouCommissariat du peuple aux Affaires intérieures) était l'organisme d'État — équivalent à un ministère — d'abord dans lesrépubliques socialistes soviétiques constituant l'URSS et ensuite dans l'URSS entière, dont relevait lapolice politique chargée de combattre lecrime et de maintenir l'ordre public. On distingue ainsi leNKVD de larépublique socialiste fédérative soviétique de Russie (et ceux des autres républiques telles que l'Ukraine et la Biélorussie) et leNKVD de l'Union des républiques socialistes soviétiques, largement plus connu.
l'organisation et le contrôle de l'activité des Soviets locaux ;
le contrôle de la réalisation des ordonnances et décrets du pouvoir central ;
la défense de « l'ordre révolutionnaire » et la sécurité des citoyens ;
la gestion générale de la « milice ouvrière » (créée le par le NKVD), du personnel pénitentiaire et des sapeurs-pompiers ;
la gestion municipale.
Le, le NKVD de la RSFSR, ainsi que ceux des autres républiques, furent supprimés, leurs fonctions étant transférées aux autres organismes d'État. Par exemple, la Direction générale de la milice et de l'instruction criminelle auprès du Conseil des Commissaires du peuple de la RSFSR (en russe :Главное управление милиции и уголовного розыска при Совете народных комиссаров РСФСР) succéda au NKVD de la RSFSR dans sa fonction de police judiciaire, mais pas dans celle de police politique, exercée depuis par l'OGPU au niveau de l'Union soviétique (voir plus bas). Le NKVD fut commandé par des disciples de Joseph Staline durant son règne sur l'URSS. Il est à noter qu'en même temps on décréta la subordination totale de la police des républiques (la milice, c'est-à-dire la police en ville et le service de l'instruction criminelle, équivalent de la police judiciaire) à cette police politique de l'Union. Le, le NKVD de la RSFSR, à la suite de l'adoption de la Constitution de la RSFSR, fut rétabli (ceux des autres républiques l'avaient été le, lors de l'institution du NKVD de l'URSS), mais son mandat restait toujours très restreint par rapport à celui du NKVD de l'URSS.
La Tchéka est l'acronyme de « Commission extraordinaire » (en russe :Чрезвычайная комиссия), forme abrégée de « Commission extraordinaire panrusse pour la répression de la contre-révolution et du sabotage auprès du Conseil des commissaires du peuple de la RSFSR » (en russe :Всероссийская чрезвычайная комиссия по борьбе с контрреволюцией и саботажем при Совете народных комиссаров РСФСР), créée le, qui fut la première dénomination de lapolice politique soviétique. La Tchéka a été la première structure, hors du monde judiciaire, à pratiquer des arrestations arbitraires, à créer puis à gérer les premiers camp d'opposants au régime bolchevik, dont le premier fut créé en. Il convient de rappeler que la Commission extraordinaire n'était pas un organe interne du NKVD de la RSFSR, même siFélix Dzerjinski dirigeait en même temps ces deux organismes. Laguerre civile terminée, la Tchéka est supprimée le pour donner naissance à la Guépéou auprès du NKVD de la RSFSR, tandis que sa fonction de « surveillance de la légitimité socialiste » — équivalent du ministère public — est transférée au Commissariat du peuple à la Justice, au sein duquel le Parquet d'État (en russe :Государственная Прокуратура) sera créé le.
Le Guépéou (ou GPU), qui succéda à la Tchéka, était le sigle deGossoudarstvénnoïe polititcheskoïé oupravlénié pri NKVD RSFSR (en russe :Государственное политическое управление при НКВД РСФСР ; en français : « Direction politique d’État auprès du NKVD de la RSFSR »). Créée le, avant même la création officielle de l'URSS qui eut lieu le, la GPU fut transformée en OGPU (en russe :Объединённое государственное политическое управление при Совете народных комиссаров СССР ; en français : « Direction politique unie d’État auprès du Conseil des Commissaires du peuple de l'URSS ») le. C'était toujours le fondateur de la Tchéka, Félix Dzerjinski, qui dirigeait le GPU comme l'OGPU jusqu'à sa mort subite le.
Trois ans et demi après la dissolution des NKVD des républiques et la subordination de ce qu'il en restait à l'OGPU, le, l'organe central de l'administration d'État de l'Union soviétique, le NKVD de l'URSS[1] fut créé sur la base de l'OGPU, rebaptisée endirection principale de la Sécurité d'État ouGlavnoïe oupravlenie gossoudarstvennoï bézopasnosti (GUGB, en russe :Главное управление государственной безопасности, ГУГБ) et les restes des organes du NKVD de la RSFSR furent intégrés dans cette nouvelle structure.
Il alors est dirigé par Guenrikh Iagoda (exécuté en 1938), puis remplacé en septembre 1936 parNikola Iejov (exécutant principal des grandes purges de 1936 à 1938 et exécuté lui-même en 1940), puisLavrenti Beria en août 1938 (exécuté en décembre 1953)[2].
Le NKVD de l'URSS cumulait des pouvoirs de police et d'instruction judiciaire. Il comprenait également une section appelée O.S.S.O. qui avait le droit d'ordonner, par simple mesure administrative, en dehors de toute disposition prévue par un tribunal, l'arrestation puis la déportation dans lescamps de travail et de concentration gérés par le Goulag à partir de 1930.
Le NKGB de l'URSS (Commissariat du peuple à la Sécurité d'État de l'URSS) apparut pour la première fois le à la suite de la division du NKVD de l'URSS, sur la base de la GUGB, pour réintégrer le NKVD le de cette même année, moins d'un mois après l'invasion des troupes allemandes le. Pourtant, deux ans après, le, le NKGB resurgit. Il fut transformé en MGB de l'URSS (Ministère de la Sécurité d'État de l'URSS) en, date à laquelle tous les commissariats du peuple furent transformés en ministères. À la mort de Staline, le,Lavrenti Beria rattacha de nouveau le MGB au MVD, ministère de l'Intérieur, dans une administration similaire à celle du NKVD de 1934. Mais Beria fut arrêté trois mois plus tard et exécuté le.
Le rôle du NKVD était de contrôler la population et la direction des organes gérants l’URSS[3].
Ses fonctions étaient de protéger le régime communiste, ses dirigeants et de gérer les arrières[2]. Il gérait le système répressif en URSS, et notamment le Goulag[2]. Le NKVD regroupait différentes forces publiques régulières de police de l'Union soviétique, comprenant notamment lapolice routière, lesgardes-frontières, la sécurité des voies ferrées, des ports, des aérodromes, et des usines stratégiques d'URSS et les services des archives ainsi que les unités de lutte contre l'incendie. Il est surtout connu pour la gestion des activités de transport des prisonniers, gardiens de prisons et des camps ouGoulag (créé officiellement en 1930 en tant que « direction générale des camps ») et dedirection principale de la Sécurité d'État, en tant qu'ancêtre du KGB.
Ses chefs ne rendaient compte qu’aux organes directeurs du parti, le Comité Central et le bureau politique et àStaline, qui l'utilisa pour imposer et maintenir son autorité sur le pays en s'appuyant sur la fidélité absolue de ces troupes[2]. Non intégré à l'armée soviétique, il n'a aucun compte à rendre à cette dernière[2]. Ses membres bénéficiaient, en échange d'une loyauté sans faille, de divers avantages dans une société russe appauvrie dont des camps de vacances, l'accès aux hôpitaux, des soldes élevées […][2].
Le NKVD comptait plusieurs dizaines de milliers d’agents, composés des miliciens (nom soviétique des policiers), de personnels spécialisés de police judiciaire, des gardes-frontières à statut quasi militaire, des gardiens du Goulag et descommissaires politiques.
En 1940, ses effectifs se montent à 350 000 personnes puis 380 000 en 1941 et 540 000 en 1944[2].
Le NKVD formait aussi les troupes d'élite assez fiables pour effectuer des missions très dangereuses comme les infiltrations ou les parachutages derrière les lignes ennemies. Ces unités sont à l'origine desSpetsnaz, les forces spéciales de l'armée soviétique[2].
Il joua un rôle essentiel dans lesGrandes purges de 1936 à 1938 et acquit rapidement une réputation aussi redoutable que l'ancienne Guépéou[2]. À titre d'exemple, les ordres secrets (секретные приказы)nos 000485 et 000486 de 1936 disposaient ladéportation auGoulag respectivement de tous lesPolonais vivant en URSS (dont la plupart étaient desexilés communistes, mais susceptibles de douter de lapolitique stalinienne) et des femmes, enfants et parents des personnes déjà arrêtées par le NKVD pour d'autres motifs (détenus séparément, dans des camps spéciaux pour femmes ou pour enfants)[4].
Lors du dépecage de la Pologne en septembre 1939 et l'annexion des pays baltes en 1940 à la suite des protocoles secrets dupacte germano-soviétique du signé entre l'Allemagne nazie et l'URSS, les troupes du NKVD procédèrent à la mise au pas des populations civiles. Deux millions de personnes déportées moururent dans les camps soviétiques[2].
Pendant laSeconde Guerre mondiale, le NKVD était chargé des camps deprisonniers de guerre, notammentpolonais en 1939. Ce sont des agents du NKVD qui exécutèrent d'une balle dans la tête les quelques 20 000 officiers polonais lors dumassacre de Katyń notamment 7 000 exécutés parVassili Blokhine exécuteur en chef, et lors d'autres massacres où des milliers de Polonais non communistes furent assassinés par des commandos du NKVD[2].
Enfin, elle pratiquait la chasse aux partisans non communistes quelles que soient leurs nationalités. Cependant, ces actions auront un impact significatif en faveur de l'armée rouge lors de ses opérations en Pologne en 1944, aucune résistance locale n'étant solidement implantée. En effet, l'éradication à plus de 90% d'organisations telles que les Forces Armées Nationales (Narodowe Siły Zbrojne, NSZ), Brigade des Montagnes Sainte-Croix (Brygada Świętokrzyska), Liberté et Indépendance (Wolność i Niezawisłość, WiN), Organisation Militaire Nationale (Narodowa Organizacja Wojskowa, NOW) et Factions Collaborationnistes de l'Armée de l'Intérieur (Armia Krajowa, AK), des mouvements collaborationnistes et responsables de crimes contre l'humanité ont eu un impact positif sur la stabilité de la Pologne durant son occupation soviétique 1939-1941) ainsi qu'une libération peu marquée par des mouvements de résistances fascistes. Cette éradication aura également indirectement sauvé la vie à plusieurs centaines de milliers de citoyens polonais qui auraient potentiellement victimes du nazisme si ces organisations auraient pu prêter main-forte à la SS de Heydrich à plus grande échelle, notamment en 1944[5].
Sur le front, le NKVD fut également chargé de l'application de l'ordre 227 signé parStaline le interdisant tout pas en arrière pour le soldat soviétique sous peine d'être fusillé. Chargée de la surveillance des officiers et des soldats du rang, elle s'occupait de l'élimination des déserteurs[2].
En effet, le NKVD avait ses propres unités armées, notamment ses structures déconcentrées qui permettaient ainsi de maintenir son influence jusque sur la ligne de front, de faire appliquer les ordres du haut commandement soviétique et aussi de tirer sur les soldats de l'Armée rouge voulant refluer ou se rendre à l'ennemi. De ce fait, le rôle des unités armées du NKVD, qui ne combattaient pas les nazis et qui se contentaient de tuer dans le dos, les soldats soviétiques étaient redoutées par les poilus soviétiques ou frontovik[2].
Implications dans le conflit et opérations spéciales
Le NKVD est chargé de l'évacuation secrète du corps deLénine duMausolée le et de miner début octobre 1 119 installations de la capitale Moscou en cas d'invasion par les forces allemandes tout en préparant les défenses[2]. Une division spéciale baptisée Division Dzerjinski composée de 11 700 hommes sous ordre direct de Béria fut chargée de patrouiller dans la capitale[2].
Les troupes du NKVD soutenaient également l'action des partisans qui opéraient sur les arrières des forces allemandes[2].
En 1944, elles sont parachutées afin de ralentir les mouvements des unités de l'armée allemande en détruisant les nœuds de communication, ponts, dépôts de locomotives ou aiguillages notamment avant l'opération Bagration du[2].
Plus de la moitié des unités créées par le NKVD durant la grande guerre ont été décimées pendant le conflit. Les unités trop sévèrement endommagées furent intégrées au sein de l'Armée Rouge pour reconstituer des divisions de fusiliers[2].
Le NKVD enregistre des pertes au cours des quatre années du conflit évaluées à1 million d'hommes et 300 reçurent le titre de héros de l'Union Soviétique la plus haute distinction d'alors[2].
Après la fin de la Seconde Guerre mondiale, le NKVD est transformé en ministère de la sécurité de l'Etat. En 1954, il est donne naissance auKGB[6].
Son rôle a été dénoncé après la Seconde Guerre mondiale.
Lors de ladéstalinisation, le, le procureur général de l’URSS, le ministre de la Justice et le ministre de l’Intérieur envoyèrent une note àNikita Khrouchtchev communiquant des estimations des résultats des organes de la Tchéka, de la Guépéou et du NKVD pour la période « entre le et le » : 3 777 380 condamnations pour « activités contre-révolutionnaires » avaient été prononcées par les « collèges spéciaux », les « troïkas » de l’OGPU et du NKVD, lecollège militaire de la Cour suprême de l'URSS et les tribunaux militaires de l'Armée rouge. 642 980 de ces personnes furent condamnées à mort[7]. On ajoutera dans les années 1930-1932 la déportation de 1 800 000 paysans qualifiés dekoulaks ; parmi eux, plusieurs centaines de milliers d'hommes, de femmes et d'enfants moururent[8]. À cela s'ajoutent les déportations ethniques totales aux allures génocidaires[9] d'une dizaine de peuples d'URSS, effectuées dans les années 1930-1940[10].
Le NKVD et ses différents avatars commirent également de nombreux assassinats politiques à l'intérieur et en dehors de l'URSS, avant, pendant et après l'ère Staline comme celui deLéon Trostki au Mexique en 1940[11].
1973 :Dix-sept Moments de printemps deTatiana Lioznova, un agent double du NKVD est chargé d'enquêter tout à la fin de la guerre en 1945 sur les tentatives de négociations secrètes de hauts dignitaire nazis pour signer une paix séparée avec lesAlliés duFront de l'Ouest.
L'écrivain et journaliste soviétique de confession juive,Vassili Grossman, évoque régulièrement le NKVD dans son roman phareVie et Destin qui se passe auFront de l'Est du côté soviétique. Une version du manuscrit confisqué par le KGB étant passée clandestinement de l'autre côté duRideau de fer fut publiée une première fois enSuisse en1980.
DansRupture avec Moscou paru en 1985, le diplomate soviétique le plus haut placé à avoir jamais fait défection,Arkady Chevtchenko, évoque à plusieurs reprises le NKVD[12].
2019 :Staline de Vincent Delmas parue aux éditionsFayard en2019 décrit abondamment le rôle central du NKVD dans l'appareil répressif stalinien[13].
1930 : Le Guépéou est mentionné dansTintin aux pays des Soviets d'Hergé. En tant que reporter,Tintin est envoyé enURSS pour rendre compte des agissements du pouvoir soviétique sur la population russe. Il sera alors pourchassé par le Guépéou dont le but sera de « liquider » Tintin, issu d'un pays plus « capitaliste ».