Le terme« soul » (enanglais,soul music qui signifie « musique de l'âme ») est associé à la musique noire américaine et apparaît pour la première fois dans le titre de deux albums deRay Charles[1] :Soul Brothers en 1958, etSoul Meeting en 1961. Le développement de la musique soul est stimulé par deux tendances principales : l'urbanisation durhythm and blues[2] et la sécularisation du gospel[3]. C'est Ray Charles qui mélangea sa passion pour le gospel avec les rythmes saccadés du rhythm and blues pour donner naissance à la soul. Se retrouve donc dans la soul une partie de l’émotion sacrée mêlée à des thèmes profanes, souvent à forte connotation sexuelle. La soul plonge ses racines dans lapop, legospel et lenegro spiritual. La jeunesse noire l'a utilisée comme un mouvement contestataire pour réagir face à la communauté blanche et à l'envahissement durock 'n' roll, qu'il soit blanc ou noir.
À la fin desannées 1950, la volonté de proposer au public blanc des artistes noirs originaux conduit plusieurs labels à rechercher des versions commercialisables de la« musique noire ». Les deux labels les plus influents sont alorsStax (près deMemphis) et laTamla Motown àDétroit[4]. On les oppose souvent et l’on parle alors desouthern soul[5] avec Stax, plus proche des racines (soul rapide et incisive), et denorthern soul[5], plus dansante et plus influencée par lapop avec Tamla Motown. De même, en termes de management, Motown — dont le slogan « la musique de la jeune Amérique » épouse les volontés d'émancipation de l'époque — est le premier label fondé et dirigé par un noir américain, le redoutableBerry Gordy[6],[7]. À l'inverse Stax est fondé par un blanc,Jim Stewart[8], et nombre de ses plus fameux musiciens de studio sont blancs eux aussi (Steve Cropper[9],Donald « Duck » Dunn, etTom Dowd).
Durant lesannées 1970, des albums sont produits et deviennent des classiques du genre (notammentWhat’s Going On deMarvin Gaye etSuper Fly deCurtis Mayfield), mais lasoul décline dans la seconde partie de la décennie, les ventes de disques étant alors dominées par ledisco. À la fin des années 1970 et au début desannées 1980, de nouveaux artistes renouvellent le genre, à l'image deMichael Jackson avecOff the Wall,Rick James,Roger & Zapp,Prince etLuther Vandross. Ils popularisent définitivement la soul. Un peu plus tard, ensamplant les standards desannées 1960 et 1970, lerap contribuera à une nouvelle popularité de la musique soul. Certains groupes iront plus loin et fusionneront soul etrap, pour donner naissance aunew jack swing, devenuhip-hop, puis enfin auneo soul dans la seconde partie des années 1990 (fusion d'instrumentations organiques mais typées hip-hop et de textes et vocalises toujours dans l'esprit soul)[21].D'Angelo,De La Soul,Erykah Badu,Maxwell etOmar, seraient à l'origine de ce mouvement.
La soul tient ses racines du gospel traditionnel afro-américain, durhythm and blues, et de l'hybridation de leurs styles respectifs séculaires et religieux, dans leurs contenus lyriques et instrumentaux, qui s'organise dans lesannées 1950. Selon le musicologueBarry Hansen« si ce contenu hybride a permis la popularisation de nombreuses chansons dans le marché du RnB des années 1950, seul l'impact a été visible chez les fans blancs les plus aventureux de l'époque ; les autres ont dû attendre la venue de la musique soul dans les années 1960 pour sentir la montée du rock and roll chanté dans le genre gospel[22]. »
D'aprèsAllMusic, la« musique soul est le résultat de l'urbanisation et la commercialisation du rhythm and blues dans les années 1960[23]. » La phrase« soul music » en elle-même, désignant la musique orientée gospel aux paroles séculaires, est d'abord attestée en 1961[24]. Le termesoul met en avant la culture et la fierté de la communauté afro-américaine. Lejazz auto-consciemment dérivé du gospel s'appellerasoul jazz[25]. Tandis que des chanteurs commencent à utiliser des éléments issus du gospel et du soul jazz dans la musique afro-américaine populaire des années 1960, le terme de« musique soul » est peu à peu utilisé pour désigner de cette musique de l'époque[26],[27].
Pendant lesannées 1950, des innovateurs importants tels queClyde McPhatter,Hank Ballard, etEtta James, contribuent à l'émergence de la musique soul[22].Ray Charles est souvent cité pour avoir popularisé le genre soul avec des chansons à succès qui démarreront depuis son albumI Got a Woman (1954)[28]. Le chanteurBobby Womack explique que« Ray était un génie. Il a reconverti le monde à la musique soul[29]. »
Little Richard (qui inspireraOtis Redding[30]) etJames Brown sont également des contributeurs importants du genre. Brown est connu sous le nom de« Godfather of Soul » (parrain de la soul)[31] et Richard s'autoproclame« king of rockin' and rollin', rhythm and blues soulin' », car sa musique implique des éléments de ces trois genres qu'il cite[32].
Sam Cooke etJackie Wilson sont aussi des principaux contributeurs du genre[29],[33]. Cooke se popularisera en tant que chanteur dans le groupe de gospelThe Soul Stirrers, avant sa reconversion controversée dans la musique séculière. Sa chansonYou Send Me en 1957 propulse sa carrière dans lapop et sonBring It On Home to Me (1962) est décrit comme« la première chanson probable à définir l'expérience de la soul[34]. » Jackie Wilson, contemporain de Cooke et James Brown, atteint le succès grâce à son titreReet Petite (1957)[35].
L'écrivainPeter Guralnick est l'un des premiers à identifierSolomon Burke[36] comme une personnalité clé dans l'émergence la musique soul, etAtlantic Records[37] comme label discographique clé. Les premières chansons de Burke au début desannées 1960[4], commeCry to Me,Just Out of Reach etDown in the Valley sont considérées comme des classiques du genre. Guralnick explique que« La soul s'est lancée, dans un sens, avec le succès deJust Out Of Reach de Solomon Burke en 1961. Ray Charles, bien sûr, a déjà connu le succès (également chez Atlantic), idem pour James Brown et Sam Cooke — dans la veine de la pop. [...] ce n'est que lorsque Burke et Atlantic Records se sont associés que l'on pouvait commencer à sentir le lancement du mouvement[38]. »
Ben E. King parvient également à atteindre le succès en 1961 avec sa chansonStand By Me, directement basée sur du gospel[29]. Au milieu desannées 1960, le succès initial de Burke, King, et d'autres, surpasse celui des nouveaux chanteurs de soul comme ceux deStax incluantOtis Redding etWilson Pickett. SelonJon Landau« entre 1962 et 1964, Redding a enregistré une série de ballades soul caractérisées par des paroles sentimentales qui implorent le pardon... Il sera ensuite surnommé « Mr. Pitiful » et se popularisera dans le domaine des ballades soul[39]. »
La musique soul domine des classements afro-américains auxÉtats-Unis dans les années 1960. Otis Redding atteint le succès lors duMonterey Pop Festival de 1967[29]. Le genre se popularise en parallèle auRoyaume-Uni. Différentes régions et villes américaines commeNew York,Détroit,Chicago,Memphis,La Nouvelle-Orléans,Philadelphie, etMuscle Shoals,Alabama (localité des FAME Studios et Muscle Shoals Sound Studios) sont notées pour l'émergence de différents sous-genres dérivés de la soul et leurs styles d'enregistrement[23].
En 1968, le mouvement de la soul commence à se scinder. Des artistes comme James Brown etSly & the Family Stone se lancent dans lafunk, tandis que d'autres tels queMarvin Gaye,Stevie Wonder,Curtis Mayfield etAl Green se concentrent sur une variété d'autres genres, parfois politiquement engagés[29]. Cependant,« même si la musique soul évolue, elle ne meurt jamais[23]. »
Les termesdeep soul etsouthern soul désignent généralement un style de soul énergique et entraînant mêlant l'énergie duR&B à un son gospel sudiste américain. Le labelStax Records développera un son distinct de ce style.